Intervention de Édith Gueugneau

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 11 février 2021 : 1ère réunion
Table ronde sur la lutte contre les violences faites aux femmes dans les territoires ruraux : enjeux et spécificités

Édith Gueugneau, maire de Bourbon-Lancy (Saône-et-Loire), co-présidente du groupe de travail Égalité femmes-hommes de l'AMF :

Madame la présidente, Mesdames les sénatrices, Messieurs les sénateurs, Mesdames les intervenantes, je suis très heureuse de participer à cette table ronde. La richesse des interventions me rend encore plus optimiste.

Effectivement, la question des violences faites aux femmes en milieu rural ne doit pas être sous-estimée car les victimes sont nombreuses. Ces femmes doivent être crues. Leur voix doit être entendue et leur parole ne doit pas être mise en doute ou minimisée comme c'est bien souvent le cas.

Déposer plainte constitue pour elles une épreuve. En milieu rural, tout le monde se connaît. C'est un frein. Comment peuvent-elles être assurées que leurs propos demeureront confidentiels ? S'y ajoute la crainte de se rendre à la gendarmerie et du contrôle opéré par la famille. Dans les petites communes, il est parfois difficile de se confier au maire. La prise en charge et l'accompagnement des victimes sont donc prioritaires et l'implication et la mobilisation des élus primordiales et fondamentales car tout repose sur l'engagement des collectivités territoriales. Je remercie les présidents des conseils départementaux, les associations et les directions départementales sur la cohésion sociale. En Saône-et-Loire, nous bénéficions en outre du concours d'une déléguée départementale au droit des femmes et à l'égalité.

En milieu rural, nous constatons que l'accès aux associations est rendu difficile en raison de leur éloignement ; l'isolement des victimes est accru par leur moindre mobilité et leur dépendance financière. J'ai entendu Mme la présidente du CIDFF : nous ne disposons d'aucune permanence du centre sur notre territoire. J'habite dans une petite commune de 5 000 habitants, à l'extrême ouest d'un département assez vaste. La Saône-et-Loire a organisé des réseaux VIF composés de professionnels de différentes institutions et associations. En tant que maire de Bourbon-Lancy, j'ai créé ce réseau VIF en 2015. Il fonctionne très bien. La commune dispose d'un appartement dédié aux femmes victimes de violences et de trois appartements d'urgence. En 2020, ils ont été occupés à 95 %. Il est nécessaire d'accueillir les femmes subissant des violences, pas uniquement lorsqu'elles habitent dans notre ville, mais également les villes alentour.

La ville de Bourbon-Lancy dispose également de services de professionnels qui accompagnent ces personnes, pour protéger ces femmes ayant besoin de se reconstruire. Cela prend du temps. Nous portons une attention particulière aux enfants, victimes collatérales des violences conjugales. Lorsque les femmes quittent leur domicile, elles se retrouvent très seules. Elles ont besoin d'un accompagnement et d'un suivi, car le harcèlement de leur conjoint, bien souvent, ne cesse pas.

Les femmes handicapées sont aussi victimes de violence. Un centre de réadaptation fonctionnelle est installé à Bourbon-Lancy et nous travaillons avec un Service d'accompagnement médico-social pour adultes handicapés (SAMSAH). Nous allons pouvoir mettre en place un appartement spécifique pour accueillir ces femmes lorsqu'elles subissent des violences.

J'aimerais également revenir sur la sénescence. Nous sommes parfois confrontés à l'émergence de violences au sein de couples vivant ensemble depuis des années, lorsque les personnes arrivent en fin de vie.

Avec Cécile Gallien, nous avons la volonté de travailler sur l'égalité femmes-hommes au sein de l'AMF. Nous avons besoin de mener ce travail de fond qui doit commencer dès la petite enfance pour changer les mentalités.

L'État doit répondre à nos demandes de moyens pour développer les formations, accompagner les collectivités et les gendarmeries dans la prise en charge des victimes. Nos gendarmes font face à de nombreuses demandes, ils ont besoin de personnel supplémentaire formé pour y répondre. Nous aimerions que des travailleurs sociaux nous accompagnent dans ces démarches.

Nous avons observé de nombreuses avancées, je reste très optimiste. Pour autant, nos territoires doivent s'organiser. Les maisons France Services répondent aujourd'hui à ce besoin de plus de proximité des services publics. Je suis en train d'en créer une dans ma commune. Vous avez évoqué les « Petites villes de demain », dispositifs portés par l'État qui nous permettront de proposer de plus de services.

Le travail que nous devons mener ensemble, main dans la main avec les associations, est très important à nos yeux. La dématérialisation numérique devrait nous permettre d'organiser des permanences virtuelles.

Le chemin parcouru est important. Depuis trois ans, la campagne #Metoo a provoqué un réel changement. La parole s'est libérée. Nous devons être en mesure d'accompagner toutes les victimes. Aujourd'hui, les maires de France affichent une réelle volonté de le faire. Cécile Gallien a rappelé la charte que nous pourrions faire signer à tous les maires. Nous avons également besoin de moyens, d'information et d'une véritable volonté politique pour avancer.

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