Intervention de Élise Tenret

Mission d'information Conditions de la vie étudiante — Réunion du 11 mars 2021 à 14h00
Audition de Mme Monique Ronzeau présidente de l'observatoire national de la vie étudiante ove

Élise Tenret, chargée de mission à l'OVE :

Une question portait sur le rapport au corps et à l'activité physique : on n'a pas spécifiquement interrogé les étudiants sur leur activité physique, mais sur leur alimentation et leur consommation d'alcool. Ainsi que nous l'avons noté dans l'enquête « confinement », un quart des étudiants ont jugé que leur alimentation avait été moins satisfaisante pendant ledit confinement, et en particulier ceux qui ne sont pas rentrés chez leurs parents - ceux qui sont retournés au domicile familial déclarent avoir plutôt été satisfaits de leur alimentation. De plus, 14 % ont déclaré avoir consommé plus d'alcool qu'habituellement. Parmi ceux qui étaient seuls, 10 % ont déclaré consommer de l'alcool tous les jours, contre 5 % dans l'ensemble, et 1 % en temps normal. On a donc observé une hausse de cette consommation pendant le confinement.

Sur les questions en lien avec la précarité : un quart des étudiants dont les difficultés financières se sont aggravées pendant le confinement ont déclaré ne pas avoir toujours mangé à leur faim pour des raisons financières. Cela nous permet de voir les effets de cette période sur la santé physique et l'alimentation des étudiants.

Je voulais aussi revenir sur la question des enseignants, puisque je me sens un peu concernée ! À partir des chiffres de l'enquête, je voudrais rappeler que lors du premier confinement, malgré toutes les difficultés entraînées par les cours en ligne, 77 % des étudiants ont déclaré avoir eu des échanges avec leurs enseignants, que 73 % avaient disposé de supports de cours mis à leur disposition, et que 69 % déclarent avoir eu des cours ou des réunions de travail en visioconférence. Je ne viens peut-être pas d'une université représentative et je ne peux m'exprimer pour l'ensemble de mes collègues, mais du côté des enseignants, le confinement a occasionné un surplus de travail massif (scanner les copies de tous les étudiants page par page pour leur faire un retour, les recevoir en visio, faire des cours sur le logiciel à distance avec des partages d'écran très compliqués...). Je ne crois pas qu'on puisse dire que les enseignants ne se sont pas investis. Il faudrait sans doute une formation, et les situations étaient différentes selon les universités et les moyens dont elles disposaient. Les étudiants n'étaient pas complètement satisfaits : seulement 39 % l'étaient - ce qui représente beaucoup moins que le pourcentage normal. Mais les insatisfaits sont plus nombreux parmi ceux qui avaient une mauvaise connexion internet, qui n'avaient pas d'ordinateur personnel à disposition et qui, en somme, ne jouissaient pas de bonnes conditions de travail. Des choses n'ont peut-être pas été mises en place assez rapidement à l'université, mais vu l'investissement collectif que cela a demandé et l'épuisement dans lequel sont mes collègues, il paraît difficile de dire que les enseignants ne sont pas complètement impliqués.

Nous n'avons pas répondu à la question sur les violences sexistes et sexuelles. Ce sont en effet de nouvelles questions introduites dans l'enquête cette année, sur la suggestion d'une équipe de l'Institut national des études démographiques (Ined) qui avait travaillé sur l'enquête Virage (violences et rapports de genre). L'intérêt de prendre en compte ce sujet dans une enquête généraliste comme celle de l'OVE est que cela évite des biais liés aux enquêtes spécialisées, qui pourraient influencer le taux de réponse. On a distingué les propos, les attitudes ou les propositions à caractère sexuel, d'un côté et, de l'autre, les étudiants victimes d'attouchements et de rapports sexuels forcés. 4 % des étudiants ont été victimes de violences : 3 % ont subi des propos, attitudes et propositions à caractère sexuel et 1 % des attouchements ou des rapports sexuels forcés. Ces prévalences peuvent paraître faibles en pourcentage, mais quand on les rapporte à 3 millions d'étudiants, on aboutit à de nombreux cas en réalité. On voit des effets sur la suite des études : les étudiants touchés auront plus de mal à se concentrer, et pour certains vont abandonner leurs études. Beaucoup d'étudiants gardent ces violences pour eux, n'en parlent pas, ou seulement à leur entourage et non aux services ou acteurs universitaires.

Par ailleurs, la question sur les discriminations est posée depuis l'enquête 2016, dans laquelle on a introduit d'une part l'origine migratoire des étudiants, et d'autre part le sentiment d'avoir été traité différemment : c'est ainsi qu'est posée la question. On demande ensuite aux étudiants la variable qui a joué, selon eux, dans ce traitement différent. On n'utilise pas le terme de discrimination : on se cale sur les enquêtes de l'Ined, cela évite de créer des biais dans les réponses. On mesure que 19 % des étudiants considèrent avoir été moins bien traités que leurs camarades pour la notation, l'orientation et le rapport avec les enseignants ou avec les camarades. Pour 23 % de ces étudiants, cette différence est liée à leur origine ou à leur nationalité, pour 12 % à leur couleur de peau, pour 11 % à leur sexe ou identité de genre, pour 10 % à leur apparence, et pour 7 % à leur religion. Ces chiffres sont stables entre 2016 et 2020.

Dans l'enquête, nous avons introduit des questions sur les agressions verbales, les insultes ou les injures pour ceux qui avaient déclaré des discriminations en raison de leur nationalité, origine, couleur de peau ou religion. Parmi ces étudiants, six sur dix ont déclaré avoir fait l'objet de moqueries, plaisanteries répétées, mise à l'écart ou rejet, et un sur trois a déclaré avoir subi des agressions verbales, insultes ou injures.

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