Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, s’il ne fait pas de doute que les difficultés liées à la campagne de vaccination à travers l’Europe occuperont une part considérable des échanges du Conseil européen de cette semaine, plusieurs points de son ordre du jour intéressent plus directement notre commission des finances.
Alors que le Conseil européen examinera les priorités pour le second semestre 2021, je mentionnerai ce soir deux principaux points d’attention.
Tout d’abord, la commission des finances suit avec grande attention la mise en œuvre de la réponse budgétaire de l’Union européenne à la crise sanitaire, au regard des perspectives de reprise économique de l’Union.
En juillet dernier, tous les États membres se sont accordés sur la mise en œuvre d’un plan de relance. Où en sommes-nous huit mois plus tard ? Si la France a rapidement approuvé la décision « ressources propres », indispensable pour permettre à la Commission européenne de lever les ressources nécessaires au plan de relance sur les marchés, à ce jour, seuls neuf autres États membres ont suivi la même dynamique.
Or, au travers de la ratification de cette décision, se joue une véritable course contre la montre pour la reprise économique. En effet, tant que le plan de relance européen n’est pas mis en œuvre, les budgets nationaux restent en première ligne pour soutenir l’économie, au risque d’accentuer davantage les déséquilibres macroéconomiques entre les États membres.
Monsieur le secrétaire d’État, pourriez-vous faire un point d’étape sur la ratification de la décision « ressources propres » et ses blocages ? Le Gouvernement espère-t-il toujours une entrée en application de celle-ci d’ici avant l’été ?
En outre, s’il n’est pas encore mis en œuvre, le plan de relance européen semble, selon certains, déjà insuffisant. La semaine dernière, son dimensionnement a même alimenté les divergences entre les membres du directoire de la Banque centrale européenne (BCE), comparé notamment aux 1 900 milliards de dollars du plan de relance américain.
Il faut donc, à tout le moins, engager les fonds rapidement pour que la relance budgétaire européenne ne soit pas reléguée en deuxième division.
En outre, pour bénéficier des subventions du plan de relance européen, encore faut-il que les États membres fassent valider leur plan national pour la reprise et la résilience. Les discussions entre le Gouvernement et la Commission européenne sur son contenu ont déjà commencé il y a plusieurs mois.
Monsieur le secrétaire d’État, pourriez-vous établir devant nous un état des lieux de ces échanges et nous confirmer le calendrier de transmission au Parlement du plan national pour la reprise et la résilience ? Cette transmission aura-t-elle lieu à la fin du mois d’avril, en même temps que le programme de stabilité ? Le plan français est-il à la hauteur des objectifs devant être satisfaits pour solliciter les fonds ?
Le second point à l’ordre du jour du Conseil européen qui intéresse tout particulièrement la commission des finances est le bilan des travaux sur la fiscalité de l’économie numérique, lequel devrait être discuté entre les États membres.
Prenant acte de l’échec des discussions entre les États membres sur les propositions de la Commission européenne datant de 2018, la France a introduit en 2019 une taxe sur les services numériques. Toutefois, cette solution ne peut qu’être temporaire, en attendant que les négociations au niveau de l’OCDE aboutissent.
Si les contraintes de l’unanimité en matière fiscale restent entières, l’année 2021 pourrait offrir un contexte renouvelé à ces discussions entre les États membres.
Premièrement, la Commission européenne est tenue de présenter une nouvelle proposition de ressource fondée sur une redevance numérique, et ce avant le mois de juin. Dans cette perspective, l’introduction de nouvelles ressources propres de l’Union européenne pour soulager les États membres du remboursement du plan de relance constitue assurément une incitation sans précédent à progresser sur ce dossier.
Deuxièmement, plusieurs États membres ont désormais mis en place une taxation proche de la « taxe GAFA à la française », tels que l’Autriche, l’Italie, l’Espagne ou encore la République tchèque.
Toutefois, la prudence reste de mise, compte tenu de la persistance d’opinions divergentes entre les États membres.
Surtout, l’articulation avec les négociations à l’OCDE reste, semble-t-il, incertaine à ce stade : envisageons-nous une solution européenne subsidiaire ou complémentaire ? Il s’agit d’une question centrale, alors qu’un accord semble de nouveau possible à la faveur des positions prises par la nouvelle administration américaine.
Monsieur le secrétaire d’État, pourriez-vous faire le point sur le message que la France entend porter sur ce dossier au Conseil européen de cette semaine ? Des progrès par rapport au Conseil européen de novembre dernier peuvent-ils être attendus ?