Intervention de Clément Beaune

Réunion du 23 mars 2021 à 21h30
Débat préalable à la réunion du conseil européen des 25 et 26 mars 2021

Clément Beaune  :

Il convient de replacer les choses dans ce contexte et de relever les améliorations que l’on est en train d’apporter, au fur et à mesure et le plus vite possible. Je le répète : le seul sujet sur lequel nous allons nous concentrer est la production et la livraison de vaccins ; quant au reste, il ne s’agit pas de vraies réponses à une situation qu’il faut, objectivement, améliorer.

Je veux à présent vous apporter quelques éléments de réponse au sujet de la relance et de la stratégie économique, qui ont été évoquées par nombre d’entre vous et, en particulier, par M. le rapporteur général de la commission des finances.

Pour être précis et apporter une note positive en cette heure tardive, je ferai remarquer que plus de neuf États membres, de fait, sont arrivés au bout de la procédure d’autorisation du plan de relance européen : la procédure parlementaire est en effet achevée dans quatre États supplémentaires, auxquels il ne reste plus qu’à notifier la ratification aux autorités européennes ; on peut donc considérer que treize États ont aujourd’hui ratifié ce plan de relance, soit près de la moitié des membres de l’Union. Il faut encore accélérer !

Une dernière phase doit, elle aussi, être accélérée, à savoir la discussion avec la Commission européenne de chacun des plans de relance nationaux. Pour répondre à la question qui m’a été posée sur le calendrier, je préciserai que c’est à la fin du mois d’avril que le programme national de relance et de résilience sera communiqué, en même temps que le programme de stabilité ; il fera sans doute alors également l’objet d’un débat devant votre assemblée.

Je veux brièvement revenir sur les comparaisons, parfois imprécises, qui sont établies entre le plan européen et le fameux « plan Biden » de relance de l’économie américaine. Il ne convient pas de comparer celui-ci aux 750 milliards d’euros du plan de l’Union européenne, parce qu’il ne s’agit pas d’un plan de relance, mais principalement de mesures d’urgence portant sur le pouvoir d’achat ou le chômage partiel.

De telles mesures sont mises en place dans les États membres de l’UE en dehors du plan de relance : quand vous additionnez l’ensemble des mesures d’urgence et des plans de relance nationaux et européens qui ont été mis en place, même si le total est encore imprécis, on avoisine sans doute les 2 000 milliards d’euros, soit une somme très voisine de celle du plan américain.

Rappelons également qu’une partie des mesures du « plan Biden », notamment les mesures sociales de soutien au pouvoir d’achat des ménages, sont liées au fait que l’économie américaine a vingt points de dépense publique de moins que la France, ce qui a des inconvénients en temps de crise.

Il y a dans ces dispositifs un effet de rattrapage qui empêche une comparaison directe avec nos mesures, en particulier de chômage partiel. Je ferai remarquer à ce propos que la Commission européenne a relevé la semaine dernière que la France avait été le pays de l’Union européenne qui avait décaissé le plus de moyens pour aider les entreprises, les salariés et le pouvoir d’achat durant cette crise.

Je veux maintenant faire un point sur les questions numériques, qui sont également à l’ordre du jour de cette réunion du Conseil européen et que plusieurs d’entre vous ont évoquées.

La taxation du numérique sera évoquée, de même que la souveraineté numérique au sens large, dont M. Pellevat a parlé. La boussole numérique pour 2030 est un concept important ; concrètement, il s’agit de chantiers que l’on doit faire avancer d’ici à la présidence française et au cours de celle-ci.

Des propositions législatives seront faites en ce sens, autour de la cryptomonnaie ou de cryptoactifs, mais aussi de la souveraineté de nos centres de stockage de données, un sujet très important. Vous savez d’ailleurs que la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne nous incite à relocaliser ces centres.

Nous avons subi le dramatique incendie du centre de stockage de l’entreprise OVH, à Strasbourg, mais il existe des acteurs européens qui peuvent être nos champions du stockage de données. Parfois, on n’a pas le réflexe d’imposer le recours à des solutions européennes pour le cloud ou, en meilleur français, les centres de données ; parfois, on ne dispose pas des règles nécessaires pour le faire.

J’en avais pris un exemple très concret lors de notre précédent échange, parce que la souveraineté numérique passe d’abord par ce genre de choix : nous avons refusé une solution de stockage sur des serveurs non européens pour les données de la présidence française, au profit d’une solution européenne, à savoir OVH.

C’est possible, et il faut renforcer cet avantage : cela fera partie des discussions relatives à la souveraineté numérique. Ce concept figure d’ailleurs pour la première fois dans le projet de conclusions de ce Conseil, qu’il conviendra de préciser.

J’en viens aux questions relatives à la francophonie, confus que je suis d’avoir utilisé le terme de cloud. §M. Gattolin a souligné à juste titre l’importance de ces questions.

Je pourrai en faire un long exposé, quelques jours après la Semaine de la francophonie et sa Journée internationale, mais je puis d’ores et déjà vous annoncer que Jean-Baptiste Lemoyne et moi-même serons accompagnés de la secrétaire générale de l’Organisation internationale de la francophonie, l’OIF, le 8 avril prochain, à Bruxelles, pour rencontrer la présidente de la Commission, le président du Conseil européen et beaucoup d’autres acteurs des institutions européennes et souligner auprès d’eux la nécessité, pendant la présidence française et au-delà, de recourir davantage au français.

En effet, il s’agit non pas seulement de francophonie, mais plus largement de multilinguisme, et il ne faut pas tomber dans un réflexe anglophone qui est d’autant moins justifié après le Brexit.

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