Intervention de Claude Raynal

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 24 mars 2021 à 10h30
Audition de M. Jean Arthuis président de la commission sur l'avenir des finances publiques

Photo de Claude RaynalClaude Raynal, président :

Après mes collègues, permettez-moi de vous interroger également. Vous avez évoqué dans votre rapport l'idée de sanctuariser à un niveau plancher des dépenses d'avenir, afin de les préserver des efforts de redressement. Cette formulation de niveau plancher m'a un peu gêné. Ne faut-il pas plutôt profiter de cette période de taux bas, qui pourrait durer selon les auditions que nous avons menées, pour financer par la dette une hausse des dépenses d'avenir qui seraient favorables à la croissance ? Cette croissance engendrerait les conditions de son remboursement. En réalité, derrière cette interrogation, se pose, davantage que la question financière, celle de la qualité de la dépense.

Vous avez dit vous être appuyé, pour réaliser vos différents scénarios, sur des hypothèses réalistes. Pourtant vos principales projections sont fondées sur une remontée du taux de financement de la France à 3,1 % en 2027, alors que ces taux sont aujourd'hui nuls. Mais aucun économiste, aucun marché, aucune projection n'anticipe un risque de remontée à 3,1 % en 2027. Les marchés anticipent une remontée à 0,8 % et les conjoncturistes tablent plutôt sur 1,4 %. On peut bien sûr mettre des marges de précaution, mais ne se prive-t-on pas, si elles sont trop grandes, de notre capacité à intervenir ? Ce scénario ne traduirait-il pas une volonté de dramatiser un peu la situation ?

Enfin, le troisième sujet a été évoqué par Sophie Taillé-Polian : on a le sentiment que le ministre vous a donné une mission, mais sans la possibilité de modifier les grands agrégats tels que l'inflation ou les impôts, constituant autant de verrous. Certes, ce qui va être réellement important c'est de dépenser pour l'avenir. Mais vous ne revenez pas sur des décisions étonnantes prises cette année, critiquées en creux par de nombreux acteurs, tels que le gouverneur de la Banque de France ou le Premier président de la Cour des comptes, qui indiquent qu'il est curieux, dans une période de crise comme nous n'en avons jamais connue, de diminuer les recettes. On peut admettre, même si ce n'est pas mon avis, que les impôts de production soient un enjeu quand on est en période de croissance. Mais lorsqu'on est en période de crise, je suis un désaccord total avec la décision de se priver de dix milliards d'euros de recettes chaque année, alors même qu'il ne s'agit pas de stimuler l'investissement mais d'une diminution qui profite à toutes les entreprises. De même, ne pouvions-nous pas retarder l'exonération de 20 % de la taxe d'habitation pour les ménages les plus favorisés, alors qu'on réfléchit actuellement aux moyens de remettre dans le circuit l'épargne de ceux qui ont le plus de revenus ? Une bonne solution aurait été de garder ces ressources, qui représentent un montant de 17 milliards d'euros chaque année, dans le budget de l'État.

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