Intervention de Jérémy Bacchi

Réunion du 24 mars 2021 à 22h00
Quelle perspective de reprise pour une pratique sportive populaire et accessible à tous — Débat organisé à la demande du groupe communiste républicain citoyen et écologiste

Photo de Jérémy BacchiJérémy Bacchi :

Ce printemps encore, certains clubs exprimaient leur volonté de renforcer leur indépendance vis-à-vis de l’État, tout en attendant de ce dernier un soutien financier important. On en revient à la privatisation des profits et à la mutualisation des pertes, qui prévaut déjà dans la gestion des stades.

Il faudra bien pourtant reposer la question des liens, d’une part, entre sport professionnel et État, d’autre part, entre sport professionnel et sport amateur.

Sur le premier point, j’évoquais à l’instant l’attitude ambiguë de certaines ligues professionnelles.

Sur le second, pendant des décennies, sport professionnel et sport amateur ont entretenu une forme de solidarité à double sens. D’un côté, les clubs amateurs accueillaient et préformaient des jeunes qui faisaient ensuite carrière dans les clubs professionnels. De l’autre, ces derniers aidaient financièrement les clubs amateurs pour les maintenir en vie et les aider à se développer, dans un contexte de désengagement de l’État. Cette solidarité existe-t-elle toujours pleinement aujourd’hui ?

Le scandale de Mediapro, s’il met grandement en difficulté le football professionnel, a une conséquence que l’on évoque trop peu souvent : il prive toutes les disciplines sportives amatrices d’une manne essentielle à leur survie.

Depuis plusieurs années, des économistes pointent le risque d’implosion de la bulle des droits télévisés et de celle des transferts, mais aussi le problème de l’endettement des clubs, et appellent à revoir le modèle sportif professionnel.

Il me semble qu’un chantier devrait être lancé autour du plafonnement des taxes liées au sport. Selon les documents budgétaires présentés par le Gouvernement, les taxes sur les paris sportifs, les jeux de loterie et la taxe Buffet représenteront en 2021 une recette d’environ 420 millions d’euros, pour un reversement à l’ANS estimé à 166 millions d’euros à peine.

L’Assemblée nationale a discuté la semaine dernière d’une proposition de loi visant à démocratiser le sport en France. Madame la ministre, Laura Flessel, votre prédécesseure, nous parlait déjà de ce texte en 2017. Il est donc heureux qu’il arrive enfin. Toutefois, je me joins à la colère de ma collègue Marie-George Buffet qui, me semble-t-il, a une certaine légitimité en matière sportive.

Comment démocratiser le sport sans avancer sur le dossier de la régulation du monde professionnel, qui tout à la fois apporte les moyens nécessaires au monde amateur, mais capte une part non négligeable des ressources publiques ?

Comment démocratiser le sport sans s’atteler à la question de l’engagement de l’État dans la pratique sportive, alors même que votre ministère ne représente que 0, 14 % du budget de l’État ?

Comment démocratiser le sport sans évoquer la question du sport scolaire, qui constitue un outil essentiel à l’épanouissement des enfants comme une porte d’entrée à la pratique licenciée ?

Comment, enfin, démocratiser le sport sans s’atteler à tous les freins à la pratique, notamment économiques ?

En cette période de crise, les sports amateurs et professionnels ressemblent de plus en plus à un champ de ruines. Si la situation est catastrophique, elle offre aussi l’opportunité de repartir sur de bonnes bases.

Ce débat, qui préfigure d’une certaine manière la discussion sénatoriale sur la proposition de loi de Céline Calvez, doit être l’occasion de proposer des solutions pour un avenir sportif populaire et accessible à toutes et tous. Je sais que, sur toutes les travées de cet hémicycle, se trouvent des amatrices et des amateurs de sport qui auront à cœur de faire vivre les valeurs sportives.

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