Madame la ministre, la pratique sportive est fortement fragilisée par la crise sanitaire. Le financement du sport professionnel par la vente de billets et le sponsoring est en chute libre, tandis que le sport amateur connaît une forte diminution du nombre de ses adhérents et, surtout, de ses bénévoles. Pourtant, le sport est plus que jamais indispensable pour améliorer la santé physique et mentale des Français.
Nos habitudes sont bouleversées par les confinements et couvre-feux successifs. La sédentarité s’installe dans nos vies avec le télétravail. Dans un tel contexte, à trois ans des jeux Olympiques, ce débat sur l’activité et la popularité de la pratique sportive arrive à point nommé.
Il s’agit d’une question essentielle, tant la pratique sportive est un facteur déterminant de santé publique, d’intégration et de cohésion sociale.
Le premier objectif de la politique publique du sport, pilotée par l’État dans le cadre de la nouvelle Agence nationale du sport, devrait être l’accessibilité des lieux sportifs pour tous et la promotion du sport au quotidien.
La situation actuelle est préoccupante : notre pays arrive en 119e position pour ce qui est du respect des recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) sur la pratique physique régulière des jeunes. D’après l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), une grande partie des adolescents français seraient en surpoids.
Pour lutter contre la sédentarisation, il nous faut nécessairement renforcer la pratique sportive à l’école, d’autant plus que l’exercice physique améliore sensiblement les résultats scolaires.
Or, sur les trois heures hebdomadaires de sport dispensées dans les écoles, la Cour des comptes observe que seule la moitié est effectivement consacrée à la pratique sportive. Et que dire de l’apprentissage de la natation, qui souffre d’un manque de structures ?
Des initiatives intéressantes sont menées à l’étranger, notamment en Finlande. Favorisons les initiatives locales pour diffuser une culture du sport dès le plus jeune âge, dans le cadre scolaire ou périscolaire, et gardons à l’esprit que les temps extrascolaires sont la plupart du temps consacrés à des activités sédentaires. La lutte contre les dispenses de complaisance d’éducation physique et sportive ou les disparités d’accès aux pratiques sportives entre les hommes et les femmes sont aussi des points importants. Nous en débattrons prochainement en séance.
Par ailleurs, la pratique sportive est un facteur essentiel de la santé au travail. Nous pourrions utilement l’intégrer dans notre politique de prévention des affections et maladies professionnelles. Il me semble que les prochains débats sur la proposition de loi pour renforcer la prévention en santé au travail seront bénéfiques à ce sujet.
L’examen de la proposition de loi visant à démocratiser le sport en France constituera un autre rendez-vous législatif important, en ce qu’il sera l’occasion d’évoquer l’accessibilité des équipements sportifs des établissements scolaires au grand public en dehors des heures de classe. Nous devons également réfléchir à l’accessibilité de ces infrastructures pour les enfants scolarisés en famille.
Le sport étant parfois le meilleur des remèdes, dans le prochain projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous ne pourrons faire l’économie d’une réflexion sur la prise en charge par la solidarité nationale de séances d’activité sportive dans le traitement des affections de longue durée. Une expérimentation pourrait être menée à ce sujet. La pratique sportive aurait aussi toute sa place dans nos politiques de prévention de la perte d’autonomie et dans l’offre d’accompagnement des personnes en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, ou Ehpad.
Enfin, la pratique sportive peut constituer un premier pas vers l’insertion en milieu carcéral, en lien avec les éducateurs sportifs. Nous devons encourager ces initiatives, tout en renforçant notre vigilance pour prévenir les phénomènes de radicalisation, qui s’étendent bien au-delà de l’univers carcéral et touchent le monde du sport à bien des niveaux.
Les auditions sur la radicalisation en milieu sportif menées par notre collègue Nathalie Delattre au mois de janvier 2020 sont édifiantes. La proximité entre certains clubs, le communautarisme et la radicalisation n’est plus à démontrer.
Pour reprendre les recommandations du Conseil d’État, promouvoir la pratique du sport pour tous nécessite avant tout d’instaurer un cadre sécurisé et d’étendre les contrôles réalisés par les services de l’État aux éducateurs sportifs.
Pour conclure, je souligne que la politique du sport irrigue l’ensemble de l’action publique, de la santé à la cohésion nationale. Les prochaines échéances législatives seront autant d’occasions de renforcer l’accès au sport pour tous dans les meilleures conditions possible.
Avant d’être la recherche de performances et de victoires, le sport est avant tout une école de la volonté, de la confiance et du vivre ensemble.
Pour toutes ces raisons, nous espérons que la reprise des activités sportives en intérieur est imminente, avec des protocoles sanitaires adaptés aux différentes pratiques. Nous serons particulièrement attentifs à leur développement dans le cadre scolaire. Il faut aimer le sport et surtout le faire vivre !