Nul ne conteste ici l'exigence de préserver les richesses dont nous avons hérité et que nous devons transmettre. Il n'y a pas d'un côté des bienveillants et de l'autre des malveillants - vous l'avez dit.
Nul ne conteste non plus l'intérêt de la participation citoyenne. J'imagine que les membres de la Convention citoyenne ont été informés que la Charte de l'environnement était adossée à la Constitution au même titre que la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
Or l'intégration de la Charte au sein du bloc de constitutionnalité n'a pas été sans conséquence. Récemment encore, trois décisions ont été prises sur ce fondement, notamment l'interdiction de la fabrication, de la vente et de l'importation de certains produits pharmaceutiques - le Conseil constitutionnel a estimé justifiée l'atteinte ainsi portée à la liberté d'entreprendre au nom de la protection de l'environnement - et, plus récemment, l'autorisation de l'utilisation provisoire de produits phytosanitaires. La Charte a donc montré son utilité, notamment pour l'articulation de différents principes.
Vous avez parlé de symbole, monsieur le garde des Sceaux. Estimez-vous nécessaire que le respect de l'environnement devienne un principe constitutionnel supérieur à d'autres principes dans notre hiérarchie des normes ?
Vous avez aussi indiqué vouloir « aller un peu plus loin ». Or parfois, la créature dépasse son créateur, si vous me permettez cette expression. Ne va-t-on pas geler, ce faisant, l'action des collectivités ? Je vais prendre plusieurs exemples, en me mettant à la place des élus locaux. Une commune élabore son plan local d'urbanisme et décide de geler 20 % de son territoire ; une association se constitue et estime que ce taux, trop bas selon elle, ne respecte pas la Constitution. Que se passera-t-il dans ce cas avec un article 1er modifié selon vos souhaits ? Autre exemple : si un jour l'État ou une région estime nécessaire de construire une nouvelle ligne ferroviaire pour favoriser le désenclavement, la rédaction que vous soutenez le permettrait-elle ? Enfin, quid des parcs éoliens, qui sont souvent contestés de nos jours ?