J'ai eu la chance de diriger le centre d'enseignement à distance de la Sorbonne Nouvelle, il y a maintenant presque quinze ans, au moment du tournant opéré en matière de numérique, et de participer à la démarche d'accompagnement des enseignants et des enseignants-chercheurs dans l'appropriation de ces outils.
J'ai même eu la chance, à cette occasion, d'animer et de produire un podcast sur l'e-learning. Nous nous demandons avec certains collègues, dans le contexte de la crise, si nous ne devrions pas faire revivre ce podcast. Nous avons écouté les anciennes émissions qui datent de 2007-2008 et avons été frappés de voir à quel point les questions que l'on évoquait à l'époque restent d'actualité.
Le contexte de crise a joué un rôle de catalyseur et a permis de réfléchir à la problématique de l'équipement, de l'outillage et de l'environnement numérique nécessaires pour les enseignants et les enseignants-chercheurs par rapport à leur mission de formation. Car enseigner avec les outils numériques change fondamentalement la nature de l'enseignement.
Dans une logique de crise, nous ne sommes pas, par définition, dans un environnement serein. On emploie ces outils numériques, mais on a tendance à garder sa manière d'enseigner, comme si on était encore dans une salle de classe.
Cette évolution demande donc un certain accompagnement. Les universités sont depuis quelques années dans une démarche d'innovation pédagogique et d'accompagnement des enseignants et des enseignants-chercheurs. Nous mettons en place des formations pour les nouveaux maîtres de conférences stagiaires dans ce domaine. C'est un point qu'il faut renforcer sur le long terme.
Je n'ai pas évoqué la question des psychologues. Or c'est notre devoir d'insister, comme le président Bui l'a fait dans son propos liminaire, sur la question de la santé mentale étudiante. C'est un sujet sans doute trop long à traiter dans le temps qui nous est imparti ce matin, mais nous savons que c'est durant les premières années de la construction identitaire du jeune adulte que se manifestent le plus grand nombre de problématiques liées à la santé mentale. C'était le cas avant la crise sanitaire, et cela s'est accentué pendant celle-ci.
Nous sommes aujourd'hui tous conscients des difficultés. La santé mentale peut varier, tout comme la santé physique. On peut avoir affaire à des problématiques plus ou moins importantes. Elles ne nécessitent d'ailleurs pas systématiquement un accompagnement médicalisé. Si j'en parle, c'est parce que nous venons d'évoquer la question des enseignants et des enseignants-chercheurs, qui restent le point de contact principal entre un étudiant et son institution.
La possibilité de témoigner ou d'identifier une variation psychologique chez un étudiant ne s'invente pas : elle s'accompagne. C'est sans doute très difficile pour nos collègues d'être face à des étudiants en grande difficulté, de pouvoir identifier les problématiques qui se manifestent d'une part, de savoir les gérer d'autre part, d'orienter les étudiants vers les services appropriés si nécessaire, de savoir comment entamer la démarche d'accompagnement et d'orientation. Il ne faut pas oublier la place des enseignants et des enseignants-chercheurs dans le contexte actuel.
À la rentrée 2021, aucun étudiant, sur les trois années de licence, n'aura connu une vie universitaire qu'on pourrait qualifier de normale. Ces étudiants s'interrogent aujourd'hui sur le sens des enseignements et la valeur de leur diplôme.
Les étudiants en master, surtout ceux de master 2, commencent ce mois-ci à entamer leur stage de fin d'études et se posent des questions à propos de leur stage et de leur insertion professionnelle. Les doctorants, surtout non contractuels, se retrouvent en grande difficulté financière pour achever leur cursus. Certains travaux de recherche sont potentiellement en souffrance.
Avant la crise sanitaire, sur le plan national, 47 % des étudiants avaient une activité rémunérée, d'où l'importance de pouvoir accéder à ces emplois.
L'individuation des parcours, dans un contexte de massification de l'enseignement supérieur, est un sujet vaste et complexe. Nous n'avons pas évoqué les associations étudiantes, qui sont des acteurs extrêmement importants de l'animation des campus et qui peuvent aussi créer un lien entre le campus et le territoire, le campus et la localité, le campus et la commune, voire des activités d'entreprenariat étudiant.
Ces activités, fortement articulées avec la formation étudiante, étaient auparavant qualifiées de péri-universitaires ; elles sont aujourd'hui considérées comme des vecteurs de professionnalisation, d'épanouissement et de réussite. Elles permettent aussi aux étudiants de tracer un parcours plus individualisé, au sein d'une population étudiante de plus en plus nombreuse.