Intervention de Vanina Paoli-Gagin

Réunion du 25 mars 2021 à 14h30
Droit au respect de la dignité en détention — Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire sur une proposition de loi

Photo de Vanina Paoli-GaginVanina Paoli-Gagin :

Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, nous le savons, la France fait partie des États européens dont les prisons sont les plus encombrées et dont la population pénale augmente. En 2019, un rapport du Contrôleur général des lieux de privation de liberté établissait que la densité moyenne des maisons d’arrêt en France était de 138 personnes pour 100 places opérationnelles, quarante-quatre de ces établissements ayant une densité supérieure à 150 %. Pour certains d’entre eux, le taux d’occupation pouvait aller jusqu’à 200 %, voire 213 %.

Alors que le principe d’encellulement individuel est inscrit dans notre droit depuis la loi de juin 1875 sur le régime des prisons départementales, cette surpopulation chronique a de graves conséquences sur les droits et la dignité des détenus. Notre pays est d’ailleurs régulièrement condamné pour des conditions de détention contraires aux dispositions de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Prenant acte des divers arrêts et sanctions visant notre République, la proposition de loi présentée par notre collègue François-Noël Buffet a deux objets principaux : le premier est de garantir à tous les détenus des conditions de détention compatibles avec le principe de dignité de la personne humaine ; le second est de créer une voie de recours effective lorsque la dignité du détenu est bafouée. Je me réjouis donc que la commission mixte paritaire soit parvenue à une rédaction commune de l’ensemble des dispositions restant en discussion. Je souhaite néanmoins faire plusieurs remarques.

En premier lieu, je regrette que, sur ce sujet, ce soit une proposition de loi qui vienne apporter une réponse aux injonctions qui sont adressées à la France et que le Gouvernement n’ait pas affiché de véritable ambition pour faire cesser une situation insupportable au pays des droits de l’homme.

En second lieu, il est bien évident que l’adoption de cette proposition de loi ne résoudra pas, à elle seule, le problème posé par les conditions de détention dans notre pays. Elle ne nous dispensera pas non plus de poursuivre notre programme de construction et de rénovation de places de prison.

Je veux rappeler que le Gouvernement s’est engagé à ouvrir 7 000 places d’ici à 2022 et à lancer des opérations pour l’ouverture de 8 000 places supplémentaires à l’horizon de 2027. Mon collègue Alain Marc, dans le cadre des travaux de la commission des lois, a régulièrement relevé le manque d’ambition de ce programme, qui se contente de prolonger des projets lancés par la précédente majorité, alors qu’il faudrait les amplifier.

J’espère que vos annonces, monsieur le garde des sceaux, seront suivies d’effets concrets. Aussi, je souhaite insister sur la nécessité de ne voir ni retard ni mesures budgétaires affecter ou freiner la réalisation de ce programme immobilier.

Avant de conclure, je souhaite exprimer toute ma reconnaissance aux personnels pénitentiaires. J’aurai une pensée toute particulière pour ceux de la maison centrale de Clairvaux, que vous avez rencontrés, monsieur le garde des sceaux. Ils remplissent une mission majeure, dans des conditions de travail souvent très difficiles.

Mes chers collègues, reconnaître et respecter la dignité des détenus n’est pas une mesure de complaisance. Il s’agit d’une mesure indispensable pour faire de ces derniers des citoyens à part entière et leur permettre une vraie réinsertion dans le corps social.

Cette proposition de loi représente une grande avancée pour notre démocratie. Le groupe Les Indépendants, particulièrement attentif au respect des droits fondamentaux des personnes, votera ce texte à l’unanimité.

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