Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, chers collègues, le groupe Les Républicains se félicite de ce qu’un accord ait pu être trouvé entre l’Assemblée nationale et le Sénat sur la proposition de loi tendant à garantir le droit au respect de la dignité en détention.
Je tiens à saluer particulièrement François-Noël Buffet, président de la commission des lois et auteur de cette proposition de loi d’initiative purement sénatoriale et transpartisane, ainsi que le rapporteur, Christophe-André Frassa. Leur travail honore, une fois de plus, le Sénat.
Les travaux de notre assemblée ont été sérieux, comme de coutume. Ce n’est donc pas une surprise si nos collègues de l’Assemblée nationale ont conservé les dispositions de fond de ce texte.
La proposition de loi tire les conséquences d’une récente décision du Conseil constitutionnel. Cette dernière fait suite à un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme condamnant la France pour conditions indignes de détention de détenus. Le Conseil constitutionnel avait alors déclaré contraire à la Constitution le second alinéa de l’article 144-1 du code de procédure pénale et demandé au législateur de garantir aux personnes placées en détention la possibilité de saisir le juge par rapport à des conditions de détention qui porteraient atteinte à leur dignité.
L’inaction du Gouvernement en la matière, malgré l’échéance du 1er mars fixée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 2 octobre 2020, a conduit le Sénat à proposer un texte permettant de concilier à la fois le droit à des conditions dignes de détention et la nécessité de garantir la sécurité des Français. Grâce à cette initiative du Sénat, notre droit sera bientôt mis en conformité avec les normes internationales. La France évitera ainsi d’éventuelles condamnations par la Cour européenne des droits de l’homme, vœu qui vous semble cher, monsieur le garde des sceaux.
Pour la première fois, les requérants disposeront d’une voie de recours effective pour faire cesser ces conditions de détention indignes, ce que ne permettent pas actuellement les seules procédures de référé.
Grâce au travail du rapporteur sur le texte, le Sénat a veillé à associer, avec pertinence, le juge d’instruction à la procédure instituée par la proposition de loi. Ce n’est pas sans importance, puisque près de 30 % des personnes incarcérées en France ont la qualité de prévenu et sont donc placées en détention provisoire.
Notre assemblée a aussi amélioré la proposition initiale en complétant les possibilités de recours. Je pense, par exemple, au fait de faire appel de la décision du juge s’agissant de la recevabilité ou non de la requête formulée par le détenu. Elle a également précisé que l’obligation de statuer en appel dans un délai de quinze jours porte uniquement sur l’hypothèse d’un appel émanant du ministère public. Enfin, le requérant aura la faculté de demander à être entendu par le juge alors que la version initiale de cette proposition de loi laissait au seul juge cette faculté.
Il est important de noter que la proposition de loi, du fait de ses dispositions équilibrées, ne consacre pas un droit absolu à la remise en liberté. Le groupe Les Républicains salue ainsi les garanties visant à éviter la libération inconsidérée d’individus dangereux ou susceptibles de récidiver, ainsi que les marges de manœuvre laissées à l’administration pénitentiaire.
Cependant, malgré la création d’un recours effectif, le problème de la surpopulation carcérale reste entier. Les matelas au sol ne sont pas acceptables dans un pays moderne. Cette année encore, la densité carcérale s’établit à 105 % et s’élève même à 122 % dans les maisons d’arrêt. La construction de nouvelles places de prison, régulièrement appelée de ses vœux par le Sénat, constitue la meilleure des solutions pour répondre aux conditions indignes de détention.
Pour l’ensemble de ces raisons, le groupe Les Républicains votera le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire. Il remercie le président de la commission des lois d’avoir pris l’initiative de proposer un tel texte et il salue le rapporteur pour le travail qu’il a mené, en bonne intelligence avec nos collègues députés.