La sociovigilance est un champ qu'il faut investiguer, car la science de la prévention en est encore à ses balbutiements. Le COCT appuie certaines recherches, et l'ANSéS et l'institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) s'y intéressent aussi. Il est temps désormais d'élever cette question aux échelles française et européenne. Une chaire internationale de la santé au travail devrait être prochainement créée à Bordeaux et présidée par le professeur Loïc Lerouge. Une de ces missions pourrait être d'élaborer un schéma de création de cette sociovigilance. Les membres du groupe permanent d'orientation (GPO) vont s'investir sur cette question passionnante encore en friche.
Après quelques hésitations, la CFTC a bien signé l'ANI. En revanche, la CGT ne l'a pas signé en estimant que l'accord ne répondait pas au niveau d'exigence qui était celui de la fédération. La CGT a toujours prôné la création d'une branche sur le modèle de la mutualité sociale agricole (MSA), choix qui n'a pas été retenu. Pour autant, je ne pense pas que la CGT ne participera pas aux travaux qui permettront de mettre en route ce texte, tout simplement parce qu'il y a la volonté de rendre plus opérationnelle la santé au travail. Au sein des groupes permanents régionaux d'orientation (GPRO), futurs comités régionaux de prévention et de santé au travail (CRPST), les représentants syndicaux, notamment la CGT, jouent un rôle important. Il faut donc bien distinguer l'ANI, la proposition de loi, le plan santé-travail et, enfin, la gouvernance sur le terrain.
La Fnath est effectivement très clairement opposée au projet. Je ne pense pas que la proposition de loi sécurise davantage les employeurs qu'aujourd'hui. Je ne vois pas en quoi la proposition de loi modifierait le curseur dans un sens comme dans l'autre.
Dans l'ANI, il est en effet fait mention, pour mémoire, de la dernière jurisprudence qui tend à mieux encadrer la responsabilité de l'employeur. Ce n'est pas pour autant que les employeurs s'estiment mieux protégés. En réalité, la jurisprudence a évolué et a cherché à se stabiliser. Les affaires qui alimentent la doctrine sont excessivement limitées. On peut considérer qu'un équilibre existe et qu'il satisfait l'ensemble des acteurs. Ce n'est pas un point déterminant, à mon sens, pour mettre en oeuvre une réforme de la prévention et de la santé des travailleurs.
L'enjeu des cotisations est le même que celui qui se pose quand vous êtes membre d'une copropriété. Il est normal de se demander où va l'argent. Mais, comme dans le cadre d'une copropriété, vous êtes adhérent d'une association qui doit rendre des comptes : elle dispose d'un président, d'un trésorier, d'une assemblée générale devant laquelle a obligatoirement lieu le report des comptes. Si l'ensemble des membres affiliés n'ont pas été conviés à une assemblée générale, ses décisions peuvent être remises en cause.
J'en reviens à la question des indicateurs et de la nécessité d'encadrer les services de prévention et de santé au travail. Si des dysfonctionnements majeurs sont constatés dans l'organisation des services et leurs relations avec des adhérents qui sont aussi des clients, il y a matière à réfléchir sur la certification. On peut envisager une certification sous réserve et des exigences de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) et du CRPST pour une amélioration de la situation. L'existence d'indicateurs, d'un encadrement et d'un reporting permettra, à mon sens, d'obliger à se réformer les services de santé au travail qui, pour l'instant, sont déficients. L'objectif est totalement partagé, autant par les employeurs que par les représentants des salariés, pour mettre fin à des dysfonctionnements majeurs qui ne sont pas majoritaires mais qui existent.