Monsieur Retailleau, je voudrais dire ici à quel point je crois que votre amendement est satisfait, voire bien plus encore, par les dispositions de cet article et les amendements déjà adoptés, comme l’amendement n° 633 du Gouvernement sur les TGV et les offices HLM qui ne constituaient pas, en tant que tels, des structures de service public.
Dans la première partie de l’article 1er, on trouve ce qui relève de la loi et du règlement ; dans la seconde, on traite de la commande publique, ce qui englobe tout ce qui concourt aux contrats, qu’il s’agisse de délégations de service public, de concessions de service public, de contrats relevant du droit des marchés publics, ou encore d’accords de gré à gré avec des associations, sujet sur lequel nous reviendrons, parce qu’il pose parfois des questions, lors de l’examen des dispositions relatives au contrat d’engagement républicain.
Je veux cependant être tout à fait honnête avec vous : cet article prévoit deux exceptions, que nous assumons pleinement.
La première vise les établissements éducatifs sous contrat d’association. Certes, ils concourent au service public, mais il serait quelque peu absurde de les soumettre aux principes de neutralité et de laïcité alors qu’il s’agit, par exemple, d’écoles catholiques. Nous les avons donc sortis du champ de cet article.
La seconde porte sur les établissements de santé privés d’intérêt collectif (Espic), à savoir des hôpitaux et des Ehpad qui sont souvent gérés selon des principes religieux et où interviennent d’ailleurs encore des religieuses ; cela s’explique par une tradition longue et complexe en la matière dans notre pays, qui comprend notamment une culture chrétienne.
Voilà les deux exceptions que nous avons prévues : ces établissements concourent manifestement au service public, mais nous avons rédigé cet article de manière qu’ils ne soient pas embêtés, si j’ose dire, par ces dispositions.
Je veux par ailleurs préciser qu’il y a des marchés publics conclus par les collectivités qui n’ont rien à voir avec le service rendu au public. Cet article ne prévoit pas – ce serait sans doute contraire à la Constitution – d’imposer ces principes à une entreprise ou à une association d’insertion qui travaillerait pour le compte d’une collectivité pour, par exemple, nettoyer la mairie quand celle-ci est fermée : nous ne pouvons pas obliger les dames qui viennent nettoyer les marches de la mairie en dehors des horaires d’ouverture à retirer leur foulard si elles en portent un. Ce n’est pas ce que dit le texte !
En revanche, si un maire délègue à une entreprise ou à une association, par un marché public ou même par un contrat d’insertion conclu de gré à gré sans recours aux mécanismes de la commande publique, l’accueil du public à la mairie, ou encore le répondeur d’appel pour les problèmes de voirie ou toute autre difficulté que rencontre le public, alors la neutralité s’imposera.
Notre approche va donc bien au-delà de la jurisprudence de la Cour de cassation, monsieur Retailleau, puisque nous étendons très largement le champ du service public ; il n’y a pas de doute sur ce point.
Il convient même sans doute de travailler – je veux le dire à ceux qui nous écoutent dans les entreprises de transport ou les sociétés qui exploitent, par exemple, des piscines publiques – sur l’application de ces dispositions aux sous-traitants. Ainsi, une société de transport agissant en vertu d’une délégation de service public qui aurait recours en sous-traitance à une société de médiation pour répondre à un appel d’offres serait soumise au principe de neutralité : sur ce point, nous allons beaucoup plus loin que la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation.
Il me semble donc que votre amendement est pleinement satisfait, nonobstant les deux exceptions citées : j’imagine que vous pourrez convenir qu’elles sont bienvenues.