Intervention de Françoise Gatel

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 31 mars 2021 à 9h00
Projet de loi ratifiant les ordonnances n° 2021-45 du 20 janvier 2021 et n° 2021-71 du 27 janvier 2021 portant réforme de la formation des élus — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Françoise GatelFrançoise Gatel, rapporteure :

Mathieu Darnaud a eu raison de rappeler notre émotion lorsque nous avons été dessaisis de ce sujet lors de la loi Engagement et proximité. Merci aussi d'avoir évoqué l'initiative lancée par les maires en Bretagne en partenariat avec l'université de Bretagne-Occidentale pour former les élus. Les associations de maires ont intérêt à passer des accords avec des universités au niveau régional pour trouver les moyens de développer des formations adaptées et de proximité.

Plusieurs d'entre vous ont évoqué les frais de gestion. Ils sont trop élevés, mais il faut savoir que cinquante équivalents temps plein (ETP) sont affectés à cette tâche à la CDC. La Caisse entend ramener ce nombre à vingt grâce aux réformes. Le déploiement d'une plateforme et d'outils numériques devrait y contribuer.

La mutualisation au sein des intercommunalités me semble constituer une bonne réponse pour faciliter l'accès des élus des petites communes à la formation. La formation à distance pourrait aussi être développée. Je rappelle que si les communes ont l'obligation d'inscrire dans leur budget un montant minimum de 2 % des indemnités des élus pour la formation, il ne s'agit nullement d'une obligation de dépense.

Je regrette comme vous que ce sujet n'ait pas été traité dans la loi Engagement et proximité. Le DIFE devrait être avant tout consacré aux formations visant aux reconversions professionnelles. Il faut sensibiliser les élus à l'utilisation des deux enveloppes. En outre, il est bien difficile de cumuler son mandat, son activité professionnelle, une éventuelle charge de famille et un parcours de validation des acquis de l'expérience (VAE) ! Il serait judicieux de travailler avec les universités pour définir des certificats de compétences adaptés aux élus. Un adjoint aux finances ou à l'urbanisme acquiert des compétences qui pourraient être reconnues de la sorte afin de faciliter une VAE.

Il importe de conserver les deux systèmes, celui de 1992 et celui de 2015. L'obligation d'inscription budgétaire des dépenses de formation vise à ce que la collectivité finance les dépenses nécessaires à l'exercice du mandat - urbanisme, finances, prise de parole en public, etc. -, tandis que le DIFE constitue un droit individuel, à la disposition de chaque élu, sans avoir à obtenir l'autorisation de sa collectivité.

Certains médias ont révélé qu'une structure de formation avait réalisé 533 000 euros de chiffre d'affaires pour 191 formations délivrées en 2020. Deux organismes ont capté, en 2019, 40 % du financement du DIFE... Pourtant, la qualité de la formation n'est pas nécessairement corrélée à son coût !

Je partage ce que vous avez dit sur le statut de l'élu. Lors de la loi Engagement et proximité, avec Mathieu Darnaud notamment, nous avons poussé pour développer l'engagement, faciliter l'exercice du mandat et la réinsertion. Le mot « statut » soulève des difficultés, mais nous aurons à nous atteler à cette question : il ne s'agit pas de protéger les élus, mais d'encourager l'engagement citoyen, à travers différentes mesures : par exemple, pourquoi ne pas donner des points de retraite à un élu qui a exercé un certain nombre de mandats ?

En ce qui concerne la formation dans les petites communes, on note des avancées : la mutualisation, l'information annuelle, etc. En vertu du principe de subsidiarité, l'intervention de l'intercommunalité pourrait être utile en matière de formation, car il est possible de mener ensemble des actions et de créer des synergies afin que cela coûte moins cher.

Dans le privé, le montant des droits annuels de formation est de 500 euros, tandis qu'il s'établit autour de 700 euros pour les élus. De même, le coût d'une heure d'intervention est plafonné à 40 euros dans le privé, contre 80 euros dans le cadre de la formation des élus.

Je suis comme vous aussi réservée sur une éventuelle fongibilité entre le DIFE et les sommes non utilisées dans le cadre de la formation des élus financée par les 2 % des indemnités des élus. Le DIFE, en effet, est un droit individuel, à la disposition de chaque élu. Rien n'interdit non plus à une commune d'abonder le DIFE d'un élu, sous réserve d'une délibération de l'assemblée. Si les deux dispositifs devenaient fongibles, je crains aussi que le prix de l'heure de formation n'augmente.

La formation au rôle d'employeur est indispensable. L'élu, s'il doit maîtriser les sujets, n'est pas un technicien, ce n'est pas son rôle. Les guides du CNFPT sont précieux pour l'aider à acquérir les notions fondamentales qui entrent dans ce que je qualifiais de « kit de survie ».

Les organismes de formation doivent aussi être rentables. Il est plus facile pour eux de proposer des offres de formation dans les grandes collectivités où les demandes sont plus nombreuses. Or, il est vrai que ce sont les élus des petites communes qui ont le plus besoin de formation, car ce sont eux qui disposent le moins d'ingénierie. Nous devrons travailler pour faire en sorte que la formation apparaisse comme légitime, et ne soit pas perçue comme une fantaisie.

Enfin, l'ampleur du déficit est peut-être à nuancer, mais il n'en demeure pas moins qu'il convient de sécuriser l'avenir du fonds.

Je vous remercie d'avoir abordé la question de la transition ; en l'état de la rédaction de l'ordonnance les élus qui ont terminé leur mandat en 2020 pourront faire des demandes de formation jusqu'au début du mois de mai et devront les avoir suivies avant la fin du mois de juillet. Il n'est pas sûr que les organismes de formation puissent suivre, encore moins dans le contexte de crise sanitaire. Je remercie Alain Richard d'avoir proposé par son amendement que les formations débutées avant le 22 juillet 2021 puissent se dérouler jusqu'à la fin de l'année.

Notre collègue Guy Benarroche a évoqué le problème de l'inégalité territoriale. Je crois aussi beaucoup à l'inégalité de taille. Les conseillers régionaux ont effectivement plus facilement accès aux formations que les élus des petites communes. Quant au DIFE pour les élus de l'opposition, il est un droit acquis pour tous les élus. Chaque élu est libre d'utiliser son DIFE comme il l'entend. La seule difficulté, c'est quand un élu de l'opposition demande à suivre une formation dans le cadre fixé par la loi du 3 février 1992.

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