Je remercie Jean-Pierre Sueur d’avoir rappelé que les règles de la République s’appliquaient à tous les Français. Il est vrai que l’on a parfois un peu trop tendance à l’oublier avec ce texte.
Mme la ministre voudrait nous faire croire que ce texte vise à aider les élus. Je signale à tous mes collègues, en particulier à ceux de la majorité sénatoriale, toujours si prompts à défendre les collectivités locales et à dénoncer toutes les contraintes supplémentaires que la loi leur impose, que c’est exactement ce à quoi tend cet article : au lieu d’offrir aux collectivités et aux autorités administratives un levier d’action contre les séparatismes, il crée de nouvelles obligations. En effet, dans sa rédaction actuelle, il s’agit d’une forme d’injonction qui permettrait à l’État de poursuivre une collectivité qui n’aurait pas refusé une subvention ou procédé au retrait de celle-ci si une association ne respectait pas le contrat d’engagement républicain.
Je rappelle d’ailleurs encore une fois que le cadre de ce contrat doit être défini par un décret – on renvoie donc bien à un décret dont on ne connaît pas par avance le contenu – et concerne des sujets dont l’interprétation est extrêmement délicate au point qu’elle est d’ailleurs aujourd’hui confiée aux tribunaux.
Outil de dialogue respectueux des apports et pratiques de chacune des parties, la charte des engagements réciproques, signée en 2014 entre l’État, les représentants des collectivités territoriales et les acteurs associatifs, aurait pu ou, en tout cas, aurait dû être le cadre concret des engagements et des responsabilités. Au lieu de cela, on vient jeter la suspicion sur l’ensemble du monde associatif, voire créer un cadre juridique pour contrôler ses actions.
Le tissu de la vie associative ne peut s’épanouir que si l’État respecte la liberté d’association, mais aussi les libertés d’expression et d’opinion.
Les associations constituent le premier des remparts contre le communautarisme. Elles sont les lieux où se vivent et se pratiquent les règles de la vie en société, les lieux où se fabriquent les « communs » : il existe donc d’autres chemins pour atteindre les objectifs – que nous partageons – d’une République unie autour de ses principes, des principes vivant par la volonté de tous et de toutes.
Ce soir, le Sénat ne peut décemment pas maintenir cet article.