Intervention de Jean Castex

Réunion du 1er avril 2021 à 15h00
Évolution de la situation sanitaire et mesures nécessaires pour y répondre — Débat et vote sur une déclaration du gouvernement

Jean Castex :

… pour permettre à notre pays de franchir ce que nous espérons toutes et tous être une dernière étape, dans la perspective du déploiement massif de la vaccination et donc d’un retour à une vie normale.

La troisième vague déferle et frappe durement. L’épidémie s’emballe depuis la mi-mars : en deux semaines, le nombre de cas a augmenté de 55 % pour s’élever aujourd’hui à environ 38 000 par jour. L’épidémie progresse vite et partout.

Cette forte accélération est, chacun le sait, le résultat de la progression du variant apparu en fin d’année dernière en Grande-Bretagne. Nous savions qu’il était plus contagieux. De récents travaux scientifiques prouvent qu’il est aussi plus dangereux. Comme je le constate à chacune de mes visites dans des établissements de santé, le virus frappe des patients plus jeunes et, en plus grande proportion, des patients sans facteur de risque lié à des comorbidités.

Bien évidemment, ce phénomène n’est pas propre à la France : depuis une quinzaine de jours, le nombre de cas quotidiens a triplé en Allemagne et il a augmenté de 70 % en Belgique et de 40 % aux Pays-Bas.

Cette virulence accrue de l’épidémie est particulièrement préoccupante, car elle survient à un moment où notre système de santé est déjà mis à lourde contribution, et ce depuis longtemps. Avec plus de 5 000 malades de la covid-19 hospitalisés en réanimation, c’est certes moins que le pic de la première vague, mais celui de la deuxième vague est désormais dépassé.

Face à ce nouveau virus, nous avons rapidement réagi, en prenant ces derniers mois et semaines plusieurs mesures fortes : maintien depuis fin octobre de la fermeture de nombre d’activités et établissements recevant du public, couvre-feu national depuis la mi-décembre, mesures renforcées dans près de 20 départements couvrant près d’un tiers de la population, et ce depuis le 20 mars dernier.

Nous l’avons fait en tenant le plus grand compte des différences de situation territoriale – ces différences étaient particulièrement perceptibles en début de vague épidémique. Si j’insiste ici, devant la Haute Assemblée, sur la territorialisation des mesures que nous avons prises, c’est parce que je sais à quel point les membres du Sénat étaient, tout comme moi, attachés à une adaptation de notre politique sanitaire aux réalités du terrain.

La stratégie de réponse territorialisée que nous avons utilisée depuis le mois de janvier jusqu’à aujourd’hui était la bonne, car l’épidémie frappait alors nos territoires de manière très hétérogène ; il n’y avait pas de raison d’appliquer un durcissement des mesures dans les territoires où le virus circulait très peu.

Mais, aujourd’hui, le variant britannique poursuit son accélération dans de telles conditions que nous devons nous aussi accélérer, c’est-à-dire prendre des mesures renforcées, de façon à briser la spirale épidémique enclenchée depuis quelques semaines.

Et ce variant accélère malheureusement sur l’ensemble du territoire métropolitain. Depuis une dizaine de jours, sur 96 départements, 92 connaissent une accélération de la circulation virale avec des rythmes parfois spectaculaires : l’augmentation est supérieure à 20 % sur une semaine dans la moitié des départements et de plus de 40 % dans une vingtaine d’entre eux – c’est par exemple le cas du département des Pyrénées-Orientales, où le taux d’incidence a progressé de 73 % en sept jours.

C’est la raison pour laquelle nous avons décidé, sous l’autorité du Président de la République, d’étendre à l’ensemble du territoire métropolitain les mesures qui s’appliquaient déjà dans les 19 départements les plus touchés par l’épidémie. Ces nouvelles mesures entreront en vigueur samedi soir à 19 heures pour être pleinement applicables le dimanche 4 avril, et ce jusqu’au 3 mai, soit pour une durée de quatre semaines.

Face à la situation actuelle, il nous faut agir fortement à l’échelle nationale, selon les mêmes règles et les mêmes calendriers pour tous. En prenant une mesure nationale, nous souhaitons aussi préserver l’offre hospitalière des régions moins durement touchées, qui pourraient fournir des capacités de repli pour les régions davantage en tension.

Il nous faut cependant faire une exception pour les collectivités et départements d’outre-mer, dont la situation sanitaire n’est évidemment pas comparable à celle de la métropole, ni même du reste d’un territoire à l’autre, compte tenu de leur éloignement géographique. Ces territoires continueront donc à observer des règles spécifiques et adaptées aux évolutions épidémiques propres à chacun d’entre eux.

Comme l’a indiqué hier le Président de la République, les règles qui s’appliqueront à compter de samedi soir au territoire métropolitain seront identiques à celles qui ont été mises en place depuis le 20 mars dernier dans les 19 départements soumis à des mesures renforcées.

Le couvre-feu sera maintenu à 19 heures. L’ouverture et la fermeture des commerces obéiront aux mêmes critères et conditions. Le télétravail sera systématisé quatre jours par semaine au minimum pour tous les emplois publics et privés, quand cela est possible. Les motifs de sortie et de déplacement seront encadrés selon les mêmes termes : il restera possible de se déplacer, de se promener, de faire du sport, sans limitation de durée et dans un rayon de dix kilomètres autour de chez soi.

En revanche, les rassemblements ou regroupements de plus de six personnes resteront interdits.

Enfin, une attestation précisant le motif du déplacement sera exigée au-delà des dix kilomètres et, après la fin du prochain week-end prolongé de Pâques, les déplacements interrégionaux seront restreints à quelques motifs impérieux – ces motifs incluront évidemment les déplacements professionnels, mais aussi ceux liés à un motif familial, comme accompagner ou aller chercher un enfant chez un parent, un grand-parent ou un proche.

Nous sommes en effet un gouvernement pragmatique §et une certaine souplesse est toujours nécessaire pour permettre aux règles d’être mieux appropriées.

J’observe du reste que l’immense majorité de nos concitoyens respecte spontanément les règles en vigueur, faisant preuve en cela d’un sens des responsabilités et d’un civisme qui les honorent.

Mais je constate aussi avec vous qu’une minorité d’entre eux s’y refuse et je veux condamner devant vous sans réserve l’inconscience et l’irresponsabilité de certains qui se croient sans doute invincibles ou peut-être même immortels

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