Intervention de Éliane Assassi

Réunion du 1er avril 2021 à 15h00
Évolution de la situation sanitaire et mesures nécessaires pour y répondre — Débat et vote sur une déclaration du gouvernement

Photo de Éliane AssassiÉliane Assassi :

Nous sommes donc convoqués aujourd’hui pour vous écouter nous expliquer les décisions présidentielles, au cas où nous n’aurions pas bien compris. De surcroît, vous nous demandez de voter sur des propositions, d’une part, qui n’ont absolument pas été débattues préalablement, et, d’autre part, dont nous ignorons les motivations. En clair, nous ne savons pas pourquoi Emmanuel Macron a décidé certaines mesures qu’il rejetait quelques jours plus tôt, et pourquoi il en a écarté d’autres.

Dès le début de la crise, le 19 mars 2020, nous avons alerté, ici même, au Sénat, sur le risque de dérive autoritaire que comportait l’état d’urgence sanitaire. Depuis des mois, nous demandons de renoncer à cet état d’exception qui met le couvercle sur la démocratie. Rappelez-vous, mes chers collègues, de la dernière prorogation : nous avons rappelé que l’état d’urgence n’était plus une justification et que la gravité de la situation exigeait de rendre au Parlement sa capacité permanente de décision.

La représentation nationale, c’est la représentation du peuple, monsieur le Premier ministre. Le Parlement, c’est cela, et non un aréopage de gens inutiles, comme au temps du Conseil des Cinq-Cents. M. Macron et vous-même renvoyez à l’opinion publique cette conception qui serait la vôtre du Parlement.

Le mépris du Parlement est patent, et nous tenons à exprimer solennellement notre désaccord profond avec cette pratique institutionnelle. C’est même de la colère, monsieur le Premier ministre, car nous constatons la mise en pratique de la volonté jupitérienne d’écarter le Parlement de sa route, alors que la révision constitutionnelle préparée par le chef de l’État n’a pu être imposée ni ici ni au pays.

Cette dérive autocratique que beaucoup ont soulignée et dénoncée dès les premières heures du quinquennat prend une dimension inquiétante aujourd’hui, le Président de la République écartant tout de son chemin : Parlement, Conseil des ministres, puisque le Conseil de défense, détourné de son objet initial fixé par l’article 15 de la Constitution relatif au rôle de chef des armées du Président le supplée, et même le Conseil scientifique, puisque Emmanuel Macron, si l’on en croit les éloges de M. Blanquer, détient la connaissance, voire la science infuse en matière épidémiologique.

L’exercice solitaire du pouvoir n’est jamais une bonne chose pour la démocratie ; en temps de crise, cela peut générer des drames. La reprise en main par le Parlement, par le collectif, par la démocratie devient une nécessité absolue.

Hier soir, M. Macron nous a donc présenté ses choix : nouveau changement de pied avec la fermeture, brève pour l’instant, des établissements scolaires et l’abandon de la stratégie territoriale. On aura d’ailleurs noté cette étonnante initiative, au nom de la « respiration », d’autoriser la circulation dans tout le pays jusqu’au 5 avril, pour permettre sans doute aux propriétaires de résidences secondaires en particulier, de passer trois semaines ou le mois à venir au vert.

Ces évolutions, manifestes pour l’école, alors qu’au cours des jours qui ont précédé les ministres MM. Véran et Blanquer expliquaient que la situation était maîtrisée, sont justifiées par la nouvelle donne qu’impose le variant anglais.

Monsieur le Premier ministre, le 29 janvier, lorsqu’a été prise la décision de ne pas reconfiner et de préférer des mesures de freinage, qui ont échoué, vous saviez que le variant anglais pouvait avoir des effets dévastateurs dans notre pays.

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