Monsieur le secrétaire d’État, même à cette heure-ci, même dans les conditions de fatigue et de lassitude de cette fin de semaine – nous sommes prêts, bien sûr, à continuer le temps qu’il faudra –, nous ne voulons pas laisser passer, dans une sorte d’apathie, des dispositions rognant la liberté de la presse.
L’article 24 de la proposition de loi pour une sécurité globale préservant les libertés, y compris dans la forme qui sera finalement adoptée, rogne la liberté de la presse et y porte atteinte. Dans la mesure où vous n’avez pas voulu y inscrire la garantie que nous avons proposée, l’article 18 du texte que nous sommes en train d’examiner rogne également la liberté de la presse.
Cette question de comparution immédiate n’est pas du tout anodine, vous le savez bien et tous les journalistes le sauront. En effet, comme l’a souligné Mme de La Gontrie, le mot « journaliste » n’apparaît pas à l’article 20 tel qu’il est rédigé.
Or la fabrication d’un journal, et même d’un article, est très souvent une œuvre collective : elle implique le directeur de la publication, mais aussi toute l’équipe, qui s’exprime par différents moyens et sur différents canaux. Dès lors, on n’est presque jamais « exclusivement responsable » de la publication d’un article, celui-ci passant par différents stades : rédaction, correction, révision, publication…
Par conséquent, la rédaction retenue introduit une grande part d’arbitraire et de danger.
Vous savez combien, depuis Beaumarchais et beaucoup d’autres – je ne ferai pas de citation parce que mon temps de parole est épuisé –, la République française est attachée à la liberté de l’expression.
Il est donc très grave de banaliser la comparution immédiate pour les œuvres de l’esprit.