Intervention de François Bonhomme

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 7 avril 2021 à 9h00
Communication sur la tenue des élections régionales et départementales de juin 2021 — Échange de vues

Photo de François BonhommeFrançois Bonhomme :

Nous avons reporté les élections dans un contexte où nous espérions pouvoir tenir un scrutin dans des conditions normales. Le moins que l'on puisse dire est que l'on peut aujourd'hui avoir des doutes sérieux sur la réunion de ces conditions...

À l'époque, nous nous étions réjouis des mesurettes prises, en elles-mêmes tout à fait respectables, mais dont nous savions déjà qu'elles seraient insuffisantes si le contexte sanitaire général ne s'améliorait pas.

Au-delà de l'organisation du scrutin, la question principale porte sur la campagne électorale. La campagne est un élément substantiel d'une élection. Or la liberté de réunion est aujourd'hui particulièrement contrainte, puisque l'on ne peut pas réunir plus de six personnes. Les conditions actuelles ne permettent donc pas d'assurer le plein exercice des droits du candidat.

Je ne suis pas sûr que le rapport Debré soit à la hauteur de l'enjeu : doubler la taille des photographies ou des textes des professions de foi ne suffira pas à atteindre les électeurs que l'on ne peut atteindre aujourd'hui dans des conditions normales. Il ne faudrait pas que de telles mesures nous cachent l'essentiel.

Dans l'histoire politique française, jamais des élections à venir ne se sont tenues dans de telles conditions. À quasiment deux mois de l'échéance, une incertitude majeure plane. D'ailleurs, même si les dates d'élections sont confirmées, les conditions de préparation des candidats seront affectées.

L'autre chimère est l'idée qu'une campagne 2.0 pourrait se substituer à une campagne traditionnelle. Je ne reviens pas sur l'erreur originelle d'avoir redécoupé les régions, mais je vous laisse imaginer ce que signifie faire campagne dans d'aussi grandes régions que l'Occitanie ou la Nouvelle-Aquitaine dans les conditions que nous connaissons aujourd'hui, quand deux mois ne suffisent déjà pas en temps normal.

Je vois mal comment de nouvelles règles relatives à la campagne officielle, notamment le renforcement de la couverture médiatique et l'organisation de débats par des chaînes publiques, pourraient pallier la difficulté à laquelle nous nous heurtons... à moins que le Gouvernement n'ait l'intention de créer une antenne locale de France 3 dans chacun des cantons.

On nous oppose l'argument des treize pays qui ont organisé des élections, mais il y a également des pays qui ont dû modifier le calendrier des élections ! Au demeurant, la France a une stratégie vaccinale bien moins efficace que d'autres pays. Ce retard impacte clairement le calendrier prévisionnel.

Les propositions qui nous sont faites peuvent être tout à fait sympathiques, mais elles ont parfois un caractère baroque. Elles ne sont pas à la hauteur des enjeux. Il convient d'assurer non seulement les conditions normales des élections, mais aussi le principe d'égalité entre candidats, qui est un principe majeur des élections.

Il est vrai que la prime aux sortants, qui existe déjà en temps normal, sera ici largement renforcée. C'est un élément supplémentaire de crainte.

Je regrette l'impréparation du Gouvernement en la matière. On sent bien aujourd'hui qu'il est tétanisé. Il n'ose pas se prononcer parce que, s'il venait à proposer le report des élections dans la situation tout à fait hors norme que l'on connaît, cela mettrait en lumière son impréparation et ferait peser un soupçon de manipulation. Il n'empêche que les conditions de préparation des élections sont tout à fait anormales.

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