Intervention de Grégoire Fraty

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 7 avril 2021 à 9h00
Projet de loi constitutionnelle complétant l'article 1er de la constitution et relatif à la préservation de l'environnement — Audition de représentants de l'association des citoyens de la convention citoyenne pour le climat « les 150 »

Grégoire Fraty, membre de l'association des citoyens de la Convention citoyenne pour le climat :

Vous avez évoqué le tirage au sort et la question de la légitimité des citoyens que l'on est ainsi allé chercher. Comme vous l'avez rappelé, monsieur le président, nous avions un rôle consultatif et non décisionnel. Nous n'avons pas cherché à en avoir un autre : nous nous sommes tenus à une posture de co-construction avec les représentants élus. Certes, nous avons préconisé que siègent au CESE des citoyens tirés au sort, parce que, pour l'avoir expérimenté, nous pensons que le tirage au sort est une beau mode de démocratie participative, voire délibérative, qui permet aux citoyens qui ne s'impliquent pas, qui ne veulent pas s'impliquer ou qui n'ont pas le temps de s'impliquer, de participer à la vie de la cité. De fait, cela conduit à aller chercher des gens en très grande précarité, qui ne sont pas forcément diplômés, des mères au foyer, bref des gens qui ne vont pas forcément se présenter à des élections ou être militants dans un parti politique. Je crois en la démocratie représentative et en nos représentants élus, mais je crois aussi qu'on peut adjoindre à ces derniers des citoyens qui sont là pour leur faire des propositions, pour les conseiller, pour apporter autre chose - en somme, pour être la cerise sur le gâteau institutionnel.

Avec M. Costa, nous siégions dans le groupe « Se loger » et avons donc beaucoup parlé des problématiques d'artificialisation des sols, sur lesquelles nous avons fait plusieurs propositions. Nous avons pris en compte tous les acteurs locaux. Certains d'entre nous sont d'ailleurs maires de très petites communes. Nos propositions visent à tendre vers le zéro artificialisation, selon une temporalité bien définie et avec des logiques de compensation, que nous avons pensées à l'échelle des schémas de cohérence territoriale (SCOT), et que le projet de loi place à celle des schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet). Certaines communes ont artificialisé tous leurs champs : c'est le cas de la mienne, une petite commune normande. Le schéma de cohérence, pour nous, est l'élément central. Nous ne voulons pas freiner toute artificialisation et tout développement. Il faut réfléchir en fonction des besoins des territoires, mais aussi du besoin de préservation de la biodiversité, qui n'a rien d'accessoire et doit être central - le faire figurer parmi les valeurs de la République à l'article 1er de la Constitution permettra d'ailleurs de souligner son importance.

Nous avons auditionné des acteurs économiques, des élus, dont vous pouvez retrouver la liste sur le site de la Convention citoyenne. En tout, nous avons rencontré entre 200 et 250 intervenants. Nous les avons vus une seconde fois pour leur soumettre nos propositions. Nous avons en outre été accompagnés dans notre travail, grâce aux moyens du CESE et à ceux de l'État. Tous ces intervenants avaient d'ailleurs, parfois, des avis très divergents. Ils nous ont aidés à construire nos propositions, en cherchant le consensus. Nous-mêmes, les 150 citoyens, avions des dissensions entre nous, puisque nous comptions dans nos rangs aussi bien un pilote de ligne qu'une personne en très grande précarité, qui dormait dans la rue. Nous avons pris en compte tous les champs, tous les acteurs, autant que possible.

Vous, les sénateurs, êtes des citoyens, personne ne le nie. Mais nous proposons un référendum, pour poser la question à tous les citoyens. Ce que nous demandons au Sénat, à l'Assemblée nationale, ce n'est pas de changer la Constitution, c'est de faire cette proposition aux Français, pour que ceux-ci, derniers juges, décident si, oui ou non, ils veulent y aller. Votre travail préparatoire est très important, car il ne faut pas que des propositions farfelues soient proposées au référendum ni qu'il y ait des référendums tous les quatre matins. Nous souhaitons demander à 45 millions d'électeurs s'ils pensent que la hiérarchie entre les valeurs doit être modifiée, et s'il faut aller vers la garantie de la préservation de la biodiversité, de l'environnement et la lutte contre le réchauffement climatique. Il y aura un temps très important d'éducation, de sensibilisation, de formation à la question climatique. Ce sera un temps d'appropriation collective. Ainsi, les Français pourront se donner une direction et faire un choix eux-mêmes.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion