… frappé, comme beaucoup d’entre vous, par une interdiction du cumul des mandats que je continue de regretter –, la formation des élus comptait parmi les principaux dossiers dont nous nous occupions.
En effet, parce que le retrait progressif de l’État d’un certain nombre de missions qu’il exerçait dans les territoires s’accentuait, le besoin d’ingénierie territoriale a crû peu à peu.
C’est ainsi que nous avons accompagné les 816 maires de l’Aisne, principalement ruraux, au fur et à mesure de la décentralisation, via des sessions de formation organisées tout au long de l’année, qui rencontraient et continuent de rencontrer beaucoup de succès.
C’est donc tout naturellement que, en 2012, dans le cadre de notre délégation aux collectivités territoriales, que vous présidiez à l’époque, madame la ministre, je commettais un rapport intitulé La Formation des responsables locaux : un enjeu pour nos territoires, assorti de la conclusion suivante : « La formation, en ce qu’elle permet une amélioration des connaissances, des compétences et des aptitudes, constitue un outil qui répond à la fois aux intérêts des élus et des agents des collectivités territoriales. En ce sens, le droit à la formation doit être préservé et consolidé. »
J’y formulais une quinzaine de propositions, dont bon nombre ont finalement été intégrées dans notre droit, par exemple l’instauration d’un plancher de crédits budgétaires consacrés à la formation, ou encore la mise en place d’un droit individuel à la formation, le DIFE, qui fut créé par la loi de 2015 que vous avez évoquée, madame la ministre.
En 2018, avec mes collègues Michelle Gréaume et François Bonhomme, que je salue, j’ai sur le métier remis l’ouvrage, comme eût dit Boileau, en rédigeant un nouveau rapport intitulé Faciliter l ’ exercice des mandats locaux : la formation et la reconversion. Complexification du droit, augmentation des compétences des collectivités au fur et à mesure de la décentralisation, montée des intercommunalités : voilà en effet autant de dynamiques qui ont fait de la formation des élus et des agents publics un défi pour l’avenir des collectivités territoriales.
C’est donc peu de dire que la formation des élus est un serpent de mer, indissociable de celui du statut de l’élu.
Si nous avons pu avancer sur ce dernier point depuis quelque temps, la formation reste un défi majeur et crucial, car la compétence des élus locaux est la véritable condition d’un bon exercice du mandat. Elle permet de compenser les inégalités de formation initiale et elle est devenue une condition de la démocratisation de l’accès aux fonctions politiques.
Former les élus, c’est aussi les préparer à l’après-mandat – vous y avez fait référence, madame la ministre. À l’heure où plus personne n’envisage qu’un élu local occupe un mandat toute sa vie, la sortie du mandat et la reconversion supposent une formation adaptée et une bonne préparation en amont.
Dans notre rapport de 2018, nous avions fait des propositions dont l’adoption aurait permis d’avancer, mais, d’une part, de mauvaises habitudes avaient été prises, assorties de pratiques à tout le moins perfectibles, et, d’autre part, la soutenabilité financière du schéma adopté pour gérer le DIFE apparaissait au mieux fragile, comme l’a expliqué Mme la ministre.
La décision fut donc prise, fin 2019, de légiférer par ordonnance. Soit ! Nous avions alors regretté le choix de ce véhicule, sachant que nous aurions pu « boucler » le sujet lors de la discussion du projet de loi Engagement et proximité.
Cette ratification tardive, bien au-delà des délais impartis, nous aura fait perdre un temps précieux, d’autant que le personnel élu a entre-temps été en partie renouvelé à l’occasion des élections municipales de 2020.
Les ordonnances ont été substantiellement amendées par notre rapporteur, également présidente de la délégation aux collectivités territoriales, qui y a précisé, comme elle vient de l’exposer, d’une part, le contour du DIFE, et, d’autre part, les modalités de contrôle des organismes, mais aussi la pérennisation du financement et la protection des droits non entièrement liquidés.
Si nous souhaitons développer la culture de la formation, il faut précisément que les dispositifs en vigueur facilitent l’accès à cette dernière, pour les uns comme pour les autres, pour les ruraux comme pour les urbains, pour les élus majoritaires comme pour les élus d’opposition.
Ce projet de ratification sera soutenu par notre groupe, car il représente une avancée notable dans ce domaine essentiel pour les élus locaux.