Intervention de Éric Kerrouche

Réunion du 8 avril 2021 à 10h30
Réforme de la formation des élus locaux — Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Éric KerroucheÉric Kerrouche :

On peut décerner un satisfecit global au travail réalisé, notamment par la commission des lois, sur le présent texte. Les orateurs précédents ont souligné les avancées réalisées ; elles sont réelles et s’ajoutent aux améliorations qui avaient été suggérées par Mme le rapporteur Françoise Gatel.

Ces ordonnances montrent que nous sommes arrivés au bout d’un système. Il est nécessaire de mettre en place un véritable statut de l’élu.

Le satisfecit ne saurait être complet. En effet, la réforme a une connotation trop budgétaire. Elle excède pour partie le champ de l’habilitation accordée au Gouvernement par le Parlement. Elle s’inscrit dans la perspective d’un statut de l’élu qui n’existe qu’en creux.

Madame la ministre, je pense que ce texte est en deçà des attentes que vous aviez en tant que sénatrice. Nous pouvons encore faire mieux.

Le questionnaire que nous avions envoyé en 2018 aux élus locaux faisait ressortir deux éléments : tout d’abord, la question de la formation est essentielle pour les élus ; ensuite, ces derniers souhaitent davantage de formations.

J’évoquerai trois points de questionnement et des pistes d’amélioration.

Il faut tout d’abord partir de la sous-utilisation, soulignée par les orateurs qui m’ont précédé, des possibilités de formation et de leur concentration sur quelques élus – en bref des raisons pour lesquelles les dispositions de la loi de 2015 ne s’appliquent pas, ou mal. La sous-budgétisation des collectivités locales traduit également un manque de moyens.

Le DIFE permet de financer un accompagnement à la validation des acquis de l’expérience, la VAE, et au bilan de compétences. Mais il ressort des résultats du questionnaire du Sénat que 83 % des répondants ignoraient cette possibilité…

Plus fondamentalement, la tripartition de l’espace électif n’est pas prise en compte. Il existe en France une opposition entre deux catégories d’élus : les simples conseillers – ce terme n’est pas péjoratif – et les exécutifs, au sein desquels il y a aussi une dualité – d’une part, les maires et adjoints de petites ou moyennes communes, et, d’autre part, les exécutifs des communes les plus grandes.

Qu’observe-t-on ? Les maires ruraux, qui sont au centre des dispositifs dans les petites communes, ne peuvent accéder à une formation qui leur est pourtant très nécessaire, justement en raison de leur manque de moyens et d’ingénierie.

Par ailleurs, le groupe intermédiaire des élus bénéficie de formations techniques très précises, par exemple sur les déchets ou les mobilités. Il aurait été normal de prévoir, pour cette catégorie comme pour celle des exécutifs des collectivités les plus grandes, non seulement une variabilité du prélèvement sur l’indemnité, mais aussi une variabilité du quota d’heures disponibles. À défaut, il n’y aura pas de démocratisation de ce point de vue.

J’en viens à ma conclusion. Dans la sociologie des professions, deux critères permettent de marquer la professionnalisation : tout d’abord, l’exercice d’une activité rémunérée ; ensuite, une formation spécifique pour remplir cette activité.

L’actuel statut de l’élu fait comme si cette formation ne participait pas de la professionnalisation. Il faut rompre avec cette logique et construire, enfin, un statut de l’élu qui permette une véritable professionnalisation et, surtout, je le précise, une authentique démocratisation.

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