Pourquoi une telle mesure, qui est parfois considérée comme relevant du bon sens, soulève-t-elle pourtant une inquiétude dans ce pays ?
Le NIR, autrement dit le « numéro de sécu », celui qui sert le plus largement, pourrait servir de numéro fiscal ou de numéro pour l’éducation nationale. Mais, dans notre pays, compte tenu de notre histoire, on évite les croisements de fichiers systématiques et on évite d’attribuer à chacun, de la naissance à la mort, un numéro qui le suit dans l’intégralité de sa vie et de ses choix.
Mettons qu’un tel outil soit créé ; le jour où il tombera entre les mains d’un régime totalitaire, nous serons bien forcés de constater que nous aurons tout simplement constitué le grand fichier national de ses rêves. Si un tel interdit est posé, si une démocratie fait en sorte de ne pas croiser les fichiers ou, le cas échéant, de contrôler les croisements autorisés, ainsi en matière fiscale, c’est parce que – je vous l’assure, mes chers collègues – l’enfer est pavé de bonnes intentions.
Ce numéro global, général, universel, pose des difficultés qui ont trait aux libertés publiques – pardon de le rappeler ici. Et la CNIL n’a fait que rappeler cette position-là.
Si notre pays, voilà plus de quarante ans, a créé la Commission nationale de l’informatique et des libertés, c’est précisément sur cette question du numéro universel. À chaque fois que cette idée revient dans les débats parlementaires, comptez sur des personnes comme moi pour rappeler la nécessité de ne jamais y faire droit.