Intervention de Christine Lagarde

Réunion du 30 septembre 2010 à 21h30
Régulation bancaire et financière — Suite de la discussion d'un projet de loi

Christine Lagarde, ministre :

Mon intervention anticipera sur la présentation des amendements du Gouvernement.

Monsieur Vera, nous avons soigneusement veillé à assurer la transparence de la fiducie. Nous avons, en particulier, mis en place un registre, accessible notamment aux autorités administratives et judiciaires de contrôle. Il convient en effet d’éviter que la fiducie ne serve de véhicule à des mécanismes d’optimisation fiscale.

En matière de régulation financière, il est certes tentant, madame Bricq, messieurs Fourcade et Marc, de considérer que, depuis que M. Barack Obama préside les États-Unis, la lumière vient de l’Ouest. Cependant, si l’on se donne la peine de se pencher sur les 1 200 pages de la régulation Dodd-Frank, de retracer la mise en œuvre de l’ensemble du dispositif et de prendre la mesure de la complexité de l’organisation de la supervision, caractérisée par une multiplicité d’agences et de sous-agences, une segmentation entre l’échelon fédéral et celui des États, entre les secteurs d’activité et entre les différents acteurs, on constate que la réglementation américaine constitue un maquis inextricable.

Vous avez donc raison de souligner, monsieur Fourcade, que nous pouvons être fiers du texte que nous sommes en train d’élaborer. Il nous permettra, dans le prolongement de la réglementation européenne que le Parlement a transposée dans notre droit national le 22 septembre dernier, de mettre en place une régulation simple et pratique, qui autorisera une identification très rapide des organismes compétents soit en matière bancaire, assurantielle et mutualiste, soit en matière de marchés financiers, tout en prenant en compte la problématique du consommateur, que j’ai pris soin d’intégrer dans la modification de la réglementation prudentielle.

De ce point de vue, mesdames, messieurs les sénateurs, l’œuvre que nous élaborons ensemble sera largement aussi utile que celle qui a été réalisée outre-Atlantique, sans être aussi volumineuse : grâce à la clarté rédactionnelle du législateur et aux vertus de notre droit civil, nous produisons des textes intelligibles, pouvant être appliqués dans des délais très courts.

En ce qui concerne la mise en œuvre de la directive CRD3, madame Bricq, la matière justifie l’application de l’article 37 de la Constitution, plutôt que celle de l’article 34. Il ne me semblerait en outre pas souhaitable de recourir à la voie législative et d’encombrer davantage encore l’ordre du jour des assemblées pour la simple transposition d’une directive dont l’élaboration à l’échelon communautaire a déjà pris beaucoup de temps.

Concernant la directive sur les produits alternatifs, évoquée par certains orateurs, je voudrais à nouveau clarifier les choses.

Des retards dans la mise en place de la réglementation européenne sont dénoncés çà et là, et souvent imputés à notre pays. Je tiens à l’affirmer avec force : la France veut une réglementation et une supervision en matière de produits alternatifs. Nous participons très activement aux négociations actuellement en cours à Bruxelles, et notre pays est également favorable à l’instauration d’un passeport européen pour les fonds et les gérants de fonds basés sur le territoire de l’Union. En revanche, la France ne souhaite pas qu’un tel passeport soit délivré à des fonds offshore. Pour ceux-ci, nous estimons qu’il n’y a aucune raison d’aller au-delà de la situation actuelle : il est parfaitement possible de privilégier l’option du placement privé, qui permet à un fonds offshore de commercialiser ses produits dans le pays où il est enregistré et supervisé, sans pour autant pouvoir le faire dans les vingt-six autres États membres de l’Union européenne. Sur ce point, nous avons des alliés, et je me flatte d’avoir rallié à notre position certains de nos grands voisins. Ce débat se poursuivra, car je n’ai pas l’intention de laisser faire n’importe quoi dans ce domaine : ce ne serait pas conforme à l’esprit qui a animé nos débats ni à la détermination dont a fait preuve le Président de la République sur ce dossier, notamment à l’occasion du G20. On ne peut pas, d’un côté, lutter contre les paradis fiscaux comme nous l’avons fait, et, de l’autre, laisser agir librement dans l’espace communautaire des fonds alternatifs localisés dans des territoires où la supervision n’est pas assurée dans les mêmes conditions.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion