Intervention de Marie-Agnès Labarre

Réunion du 30 septembre 2010 à 21h30
Régulation bancaire et financière — Articles additionnels avant l'article 1er

Photo de Marie-Agnès LabarreMarie-Agnès Labarre :

Si l’objectif visé par le Gouvernement était vraiment l’instauration d’une régulation bancaire et financière, c’est tout le cadre institutionnel de l’Union européenne qu’il faudrait changer.

En effet, ce cadre institutionnel est aujourd’hui inopérant pour casser les reins à la spéculation contre les États. Si tel était l’objectif de l’Union européenne et de ses États membres, la seule solution serait que la Banque centrale européenne prête directement au pays agressé par la spéculation, à un taux européen de 1 %.

Ce qui a été possible pour les banques il y a un an devrait l’être a fortiori pour un État, qui représente l’intérêt général. Pourtant, ce n’est pas le cas. Le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne l’interdit dans son article 123, qui dispose qu’« il est interdit à la Banque centrale européenne et aux banques centrales des États membres […] d’accorder des découverts ou tout autre type de crédit aux institutions, organes ou organismes de l’Union […] ou des États membres ; l’acquisition directe, auprès d’eux, par la Banque centrale européenne ou les banques centrales nationales, des instruments de leur dette est également interdite. »

Par conséquent, contrairement à la Réserve fédérale des États-Unis, la BCE ne peut accorder de prêts directement aux États. La spéculation ne peut donc être stoppée rapidement. Au contraire, cette dernière peut utiliser les fonds mis à sa disposition par la BCE ! Un comble !

Vous nous répondrez sans doute qu’il existe, dans le traité, des dispositions pour les cas de crise majeure. Toutefois, elles comportent des conditions restrictives. En effet, il est possible d’y recourir, mais uniquement en cas d’« événements exceptionnels échappant au contrôle de l’État concerné ».

En réalité, la procédure d’aide qui a été mise en place pour la Grèce est celle qui est prévue à l’article 143 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne s’agissant d’une aide exceptionnelle à un État… non membre de la zone euro ! Cette procédure peut prendre la forme « d’une action concertée auprès d’autres organisations internationales, auxquelles les États membres faisant l’objet d’une dérogation peuvent avoir recours » et de l’« octroi de crédits limités de la part d’autres États membres, sous réserve de leur accord ». C’est exactement ce qui s’est passé avec la Grèce : appel au FMI et négociation avec les autres pays membres de l’Union européenne pour obtenir des crédits exceptionnels.

Nous proposons une solution bien plus simple, et surtout plus efficace : faire admettre à l’échelon communautaire que la BCE et les banques centrales nationales puissent souscrire directement aux émissions de dette publique.

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