Monsieur le ministre, début mars ont eu lieu les négociations commerciales entre les producteurs agricoles et les distributeurs. Un profond désaccord entre les parties s’est traduit par des manifestations d’agriculteurs partout en France, ces derniers dénonçant la teneur de ces négociations et demandant une application de la loi Égalim beaucoup plus juste. Le problème est bien là !
Rappelons que cette loi d’octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous avait notamment pour objectif de « payer le juste prix aux producteurs, pour leur permettre de vivre dignement de leur travail ». Aujourd’hui, il n’en n’est rien, et les espoirs des agriculteurs nés avec cette loi sont déçus.
Dans mon département de la Somme, les jeunes agriculteurs et la fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles (FDSEA) m’ont fait part de leur frustration devant cette non-application de la loi. Ils ont le sentiment que la grande distribution est peu réceptive aux tarifs proposés par les fournisseurs et que la hausse des coûts de production à l’amont n’est absolument pas prise en compte. D’ailleurs, l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires ne dit pas autre chose quand il affirme que, dans de très nombreuses filières, les prix payés aux producteurs n’intègrent pas suffisamment les coûts de production.
Monsieur le ministre, la crise sanitaire a mis en avant l’importance stratégique de préserver notre souveraineté alimentaire.
Cela passe, vous le savez, par une juste rémunération de nos agriculteurs, leur permettant de répondre aux exigences sociétales et environnementales de plus en plus contraignantes. Il s’agit aussi de pouvoir donner envie aux nouvelles générations de s’installer, car il faut savoir que 46 % de la population agricole peut prétendre à la retraite dans les cinq ans à venir. Notre souveraineté alimentaire passe donc mécaniquement par des installations en nombre.
Allez-vous vous saisir du rapport de Serge Papin pour mieux rémunérer les agriculteurs ? Plus globalement, quelles mesures comptez-vous prendre pour que la rémunération des agriculteurs reflète réellement leur travail ?
Enfin, la situation de l’agriculture française dépend non seulement de l’application de la loi Égalim, mais aussi, bien sûr, de la politique agricole commune (PAC) et de sa fameuse déclinaison française. Pour les exploitations agricoles des Hauts-de-France, la réforme de la PAC, telle qu’elle est envisagée à l’heure actuelle, équivaudrait à près de 180 millions d’euros par an d’aides en moins. C’est colossal et, vous le comprendrez, inacceptable. Nos agriculteurs ont plusieurs propositions à vous faire sur le plan stratégique national, en cours d’élaboration. Je vous demande, monsieur le ministre, de les écouter. Nous ne devons pas avoir honte de soutenir notre agriculture.