Monsieur le sénateur Klinger, la France s’engage en faveur de la sobriété foncière, comme vous l’avez rappelé, en visant à atteindre cet objectif de zéro artificialisation nette des sols d’ici à 2050.
Dans le cadre du projet de loi Climat et résilience, si les parlementaires le veulent bien, nous fixerons une trajectoire de réduction de moitié de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers dans les dix prochaines années, conformément à la recommandation de la Convention citoyenne pour le climat.
Chaque année, entre 20 000 et 30 000 hectares d’espaces naturels, agricoles et forestiers sont artificialisés, avec des conséquences écologiques que personne ne nie, mais aussi des conséquences socioéconomiques, telles que la dévitalisation des petites centralités, l’éloignement de l’emploi et des surcoûts pour la mobilité.
Je partage donc votre analyse : l’un des principaux moteurs de l’artificialisation des sols est bien économique. En effet, il est parfois plus coûteux, plus complexe et plus long de reconstruire la ville sur la ville que de construire sur un terrain agricole en périphérie. C’est l’une des raisons qui conduit malheureusement les aménageurs à construire prioritairement en extension urbaine, ce qui a pour conséquence de favoriser l’étalement urbain.
Le différentiel de coûts est d’autant plus élevé lorsque les opérations se situent sur des friches et dans des secteurs détendus, qui ne permettent pas de générer des recettes pour équilibrer le bilan économique de l’aménagement.
Cependant, si construire en extension urbaine est moins cher pour l’aménageur, cette stratégie de déploiement a un coût pour la collectivité ; elle entraîne aussi des coûts, souvent cachés, pour les ménages.
Aussi, afin d’apporter des réponses en matière de financement du « zéro artificialisation nette », le ministère de la transition écologique envisage trois leviers principaux.
Le premier levier est le développement de l’ingénierie foncière et financière des établissements publics fonciers (EPF), qui acquièrent du foncier, le remettent en état et le gardiennent avant rachat à prix coûtant à la collectivité dans le cadre d’une convention. Leur modèle économique repose sur la recette fiscale de la taxe spéciale d’équipement. Cette taxe est votée dans les conseils d’administration des EPF, qui sont toujours présidés par un élu local : cela a son importance du point de vue de la gouvernance. Les EPF couvrent 80 % du territoire national et leur extension est encouragée.
Le deuxième levier est l’allocation de subventions pour absorber le déficit d’opérations ou encourager les opérations denses qui recyclent du foncier. Des aides sont accordées dans le cadre des contrats de projet partenarial d’aménagement et des programmes de l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) ; je pense notamment aux programmes Action cœur de ville et Petites villes de demain.
Enfin, le troisième levier passe par une adaptation de la fiscalité visant à encourager le recyclage urbain. Il est d’ores et déjà possible de moduler certaines taxes à cette fin, qu’il s’agisse de la taxation des plus-values immobilières ou de la taxe sur les surfaces commerciales.