Intervention de Marta de Cidrac

Réunion du 13 avril 2021 à 14h30
Hydroélectricité transition énergétique et relance économique — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Marta de CidracMarta de Cidrac :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la France dispose de deux avantages majeurs dans son mix énergétique : l’énergie nucléaire, bien entendu, et l’énergie hydraulique, qui compte pour 11 % de notre production électrique et la moitié de notre production d’énergie renouvelable.

Et pourtant, l’hydroélectricité n’est pas la vedette de la transition énergétique. Elle ne fait pas la une des journaux. Mais son rôle est loin d’être secondaire dans l’atteinte de la neutralité carbone à l’horizon 2050. Il est donc tout à fait naturel que notre Haute Assemblée se penche sur le sujet, grâce à cette proposition de loi de notre collègue Daniel Gremillet.

Ce débat est d’autant plus bienvenu que nous serons prochainement saisis du projet de loi Climat et résilience, quasi-muet sur le sujet. Une exception toutefois : nos collègues députés ont adopté la semaine dernière l’exclusion de la destruction de retenues des moulins d’eau, une mesure analogue à celle qui est proposée par Mme la rapporteure.

Patrimoine, biodiversité, gestion de la ressource en eau, lutte contre les crues… L’hydroélectricité et les moulins à eau recouvrent bien des aspects culturels et écologiques. Mais c’est sur le volet énergétique que je souhaite m’attarder.

L’hydroélectricité présente plusieurs avantages. Non intermittente, elle est surtout facilement pilotable et permet donc de faire face aux pics de consommation.

La France dispose du deuxième parc hydroélectrique d’Europe, avec des capacités qui sont déjà importantes. Le potentiel des grands sites est aujourd’hui limité, mais des occasions apparaissent pour augmenter notre production hydroélectrique.

La première est le couplage avec des sources renouvelables intermittentes. En coordonnant les infrastructures existantes, il est possible d’adapter la production hydroélectrique aux fluctuations de production de fermes photovoltaïques ou éoliennes, par exemple. Des expérimentations intéressantes sont en cours, montrant combien les sources d’énergie sont complémentaires.

L’autre potentiel de développement concerne le stockage de l’énergie dans les STEP. Le stockage est un enjeu des années à venir et un aspect essentiel si nous souhaitons maintenir notre indépendance énergétique. L’inscription d’un objectif de capacités installées en la matière dans la loi est donc une excellente chose.

Mais la meilleure source de développement reste la multiplication des petites unités de production. Le potentiel est considérable. Avec 2 270 installations, ce sont déjà 6 à 7 térawattheures de petite hydroélectricité qui sont produits en France.

La France pourrait atteindre les 10 térawattheures de petite hydroélectricité avec les sites les plus faciles à rééquiper, ce qui n’est pas négligeable. Face à cet immense potentiel, c’est bien d’une véritable stratégie hydroélectrique dont la France a besoin, comme l’a souligné M. le rapporteur. C’est ce qu’entreprend cette proposition de loi.

Simplification, incitation, mais surtout vision : tels sont les trois piliers de ce texte, qui remet l’hydroélectricité à sa juste place, au cœur de la décarbonation de notre mix énergétique.

Simplification d’abord, en sécurisant les démarches administratives des porteurs de projets. Ce travail de simplification a été engagé depuis quelques années, mais les freins administratifs sont encore trop nombreux. Or il est primordial d’accompagner et de faciliter les démarches d’acteurs de terrain qui font de l’écologie une réalité locale et concrète, afin de transformer ce potentiel électrique en production.

Ces simplifications visent non pas à revenir en arrière en matière de protection de la biodiversité, mais à réaffirmer les intentions du législateur sur les dérogations en matière de continuité écologique, alors que l’interprétation par l’administration de la loi sur l’autoconsommation de 2017 s’est révélée beaucoup trop restrictive.

Incitation ensuite, avec des réductions d’impôts pour la mise en conformité avec les règles de préservation de la biodiversité et de continuité écologique, alors que ces travaux restent encore extrêmement coûteux. Les collectivités pourront également exonérer de certaines taxes locales les nouvelles installations, au moins temporairement, afin d’améliorer la rentabilité des unités de production.

Vision enfin, avec un renforcement du cadre stratégique pour l’hydraulique. À l’occasion de la loi Énergie-climat, le Sénat avait déjà montré son ambition en la matière. Il la renouvelle aujourd’hui en rehaussant les objectifs de la PPE et en ciblant les petites installations. Le recensement des installations existantes est également une nécessité si nous voulons dessiner la future loi quinquennale de l’énergie.

L’hydroélectricité ne peut pas être un impensé de notre stratégie énergétique. Loi Énergie-climat, plan de relance, projet de loi Climat et résilience… Les occasions n’ont pas manqué pour se montrer ambitieux sur le sujet. Et pourtant le Gouvernement ne mentionne que trop peu cette énergie, la plus décarbonée à l’heure où nous parlons.

Je ne pas peux terminer sans évoquer une conviction profonde, acquise ces dernières années : la nécessité de mobiliser l’ensemble des sources d’énergies décarbonées dans notre transition. Ne les opposons pas : elles sont pleinement complémentaires.

Cette combinaison doit se faire en conservant trois impératifs : notre indépendance énergétique, la capacité à piloter facilement la production et la décarbonation de cette production sur l’ensemble du cycle de vie.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion