Intervention de Monique Lubin

Réunion du 15 avril 2021 à 10h30
Retour à l'emploi des bénéficiaires du rsa — Discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Monique LubinMonique Lubin :

Nous saluons donc l’intention de la présente proposition de loi de promouvoir une expérimentation destinée à favoriser le retour à l’emploi des bénéficiaires du RSA.

Nous ne sommes cependant pas convaincus par le dispositif proposé, qui nous semble passer à côté de l’objectif affiché. Si nous devons soutenir les bénéficiaires de minima sociaux dans leur démarche d’insertion professionnelle, cela ne peut se faire à n’importe quel prix.

Concernant la durée hebdomadaire de quinze heures mentionnée dans le texte, un effet d’aubaine est, par exemple, à craindre : il sera facile pour certains employeurs, dans certains domaines, de ne plus proposer que des contrats de très courte durée. Et nous ne voulons pas voir l’avènement d’un sous-contrat de travail destiné à des sous-salariés.

La durée minimale d’un contrat de travail à durée déterminée d’une durée d’un an pour le déclenchement du dispositif pose également problème. Être bénéficiaire du RSA, c’est être de toute façon éloigné de l’emploi depuis un long moment déjà : l’obtention d’un contrat de travail d’une durée d’un an est un objectif très ambitieux.

L’alternative de l’obtention d’un CDI pour bénéficier du dispositif me semble encore plus chimérique : accéder à un CDI, c’est être déjà inséré. Il n’y a aucune raison, dans ces conditions, de continuer à bénéficier du RSA.

Les réserves que nous exprimons sont d’autant plus conséquentes que des initiatives au service de l’objectif recherché ici existent déjà sur les territoires.

Les départements qui mènent des expérimentations en ce sens sont en effet nombreux. Dans les Landes, par exemple, nous donnons la possibilité aux bénéficiaires du RSA de « cumuler » ce minimum social avec des emplois saisonniers ainsi qu’avec des emplois d’aide à domicile.

Il s’agit de favoriser le retour à l’emploi, même ponctuel, des allocataires du RSA ; de leur permettre de se saisir d’une opportunité d’emploi saisonnier ou de remplacement sans voir leurs finances, déjà précaires, se déséquilibrer ; de trouver une opportunité d’insertion professionnelle favorisant l’inclusion sociale et le retour à l’emploi.

Le choix d’engager une démarche pérenne d’investissement social et professionnel s’impose dans de nombreux autres territoires.

Le « RSA saisonnier » existe ainsi également en Dordogne, en Gironde, en Meurthe-et-Moselle comme en Charente-Maritime. Dans la Marne, ce dispositif existe depuis dix ans au profit de près de 340 allocataires. Cela fait également dix ans que le Rhône mène une expérimentation en ce sens, pour favoriser notamment les activités saisonnières de vendange et de cueillette. On compte une centaine de bénéficiaires.

La crise sanitaire a amplifié cette dynamique. En avril 2020, le Lot-et-Garonne a ainsi mis en place une expérimentation de cumul avec un emploi « essentiel à la Nation » dans les secteurs de l’agriculture ou de l’agroalimentaire. Il en est de même dans l’Hérault ou encore dans l’Aude pour les vendanges.

Nous nous interrogeons donc : la présente proposition de loi prévoit-elle que les départements cités ici inscrivent également leur démarche dans l’expérimentation qu’elle tend à mettre en place ? Si tel est le cas, cela risque d’être particulièrement contraignant, voire contre-productif, au regard des spécificités du dispositif qui posent problème.

Nous craignons par ailleurs que l’efficacité de ce texte ne soit encore amoindrie, voire qu’il devienne contre-productif, au gré des amendements adoptés en séance.

C’est la raison pour laquelle nous attendons la suite des débats pour déterminer notre vote final, qui d’une intention d’abstention, pourrait glisser vers un vote contre.

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