Intervention de Stéphane Pimbert

Commission des affaires sociales — Réunion du 14 avril 2021 à 9h30
Proposition de loi pour la prévention en santé au travail — Audition de Mm. Richard Abadie directeur de l'agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail anact stéphane pimbert directeur général de l'institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles inrs du pr gérard lasfargues conseiller scientifique auprès du directeur général et M. Henri Bastos directeur adjoint de l'évaluation des risques volet santé-travail de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation de l'environnement et du travail ansés et de Mme Mélina Le barbier directrice-adjointe de la direction santé-environnement-travail de santé publique france

Stéphane Pimbert, directeur général de l'institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS) :

Sur le télétravail, je veux insister sur un point par rapport au texte. Nous sommes dans une situation de télétravail extrême. J'espère que nous ne serons pas, du fait de la crise, trop longtemps dans cette situation. La majorité du télétravail tel qu'il a été envisagé avant la crise sanitaire était, le plus souvent, idéalement situé à deux jours maximum par semaine. Les entreprises et les organismes de prévention le disaient. Certains salariés se trouvent dans une situation de télétravail intégral parfois depuis un an. Selon moi, on n'a pas à intégrer cette situation extrême que j'espère temporaire dans un texte sur le télétravail.

On peut parler des problèmes de santé mentale, réels dans de nombreux cas actuellement, et de l'isolement vécus par les salariés. Si le salarié fait deux jours de télétravail par semaine, et trois avec ses collègues, il n'a pas la même sensation d'isolement ou de difficulté mentale. Les problèmes matériels d'équipements informatiques qui se posent quand la personne passe la totalité de son temps à son domicile, sont nettement moindres quand elle revient trois jours par semaine à son bureau.

La distinction entre vie privée et vie professionnelle pose des questions similaires : à une ou deux journées par semaine, on n'est plus dans une situation de télétravail extrême. La question du management aurait pu se poser en termes d'évolution de la situation, par objectif, etc.

L'autre aspect est le renvoi à la négociation vers les partenaires sociaux. La prévention est basée sur les partenaires sociaux dans l'entreprise. Notre vision, à l'INRS, est celle-ci. C'est ce qui fait la crédibilité au niveau national, au niveau local, et dans l'entreprise. Sur le télétravail, là aussi, on renvoie aux partenaires sociaux de l'entreprise avec une adaptation qui se passe sur le terrain.

En ce qui concerne la deuxième question sur les professionnels de santé, j'avais en tête le nombre de 4 500 à 5 000 médecins du travail. J'ai vu dans le texte la reconnaissance législative de l'infirmier en santé au travail. Du fait de la démographie des médecins du travail, on a besoin d'autres acteurs qui interviennent en santé au travail. Et pour la prévention, on n'a pas forcément besoin d'avoir uniquement le médecin du travail, mais parfois aussi des techniciens, d'autres personnes qui interviennent en prévention, comme les ergonomes. L'infirmier joue ici un rôle important.

Je n'ai pas lu l'article de La Gazette des communes. Le texte retirera-t-il le rôle central au médecin ? Je ne suis pas médecin, mais je crois qu'il faut être réaliste. Depuis plusieurs années, la démographie médicale fait que si on veut agir auprès des 18 millions de salariés du régime général, et vers les PME, il faut que différents acteurs interviennent. Cela a été fait par différentes réformes.

À l'INRS, nous publions une revue Documents pour médecins du travail (DMT). Depuis près de cinq ans, nous l'avons renommée Référence en santé au travail, pour montrer qu'on s'adresse aussi aux infirmiers et à d'autres acteurs du service de santé au travail, et pas uniquement au médecin du travail, même s'il a un rôle. J'ai vu dans le texte ou dans une des questions qu'il devrait avoir un rôle de coordination réel. Mais il ne peut pas tout faire et a besoin d'experts autour de lui.

Sur le passeport de prévention : fait-il porter sa responsabilité au salarié et exonère-t-il l'employeur ? Cela fait l'objet des débats à l'ANI. J'ai cru comprendre que cela va dans un sens plutôt positif : il est prévu que le salarié soit davantage formé, et qu'une trace de formation le suive toute sa carrière. Il peut, ensuite, y avoir des visions différentes.

Sur le rôle de la branche, je ne vais pas parler de l'OPPBTP, qui est la seule structure qui fonctionne. J'ai observé ce rôle au niveau de la construction des référentiels pénibilité, pour lesquelles nous étions intervenus auprès de la direction générale du travail (DGT), notamment avec l'Anact. Cela peut être important pour les TPE et les PME, même si, à l'INRS, nous fonctionnons généralement plutôt par risques transversaux. Nous avons toutefois mené des actions très ciblées sur les boulangers, les coiffeurs, l'onglerie, les garages. Nous avons par exemple eu des accords avec le conseil national des professions de l'automobile (CNPA). Je pense que la branche peut être utile, notamment pour les petites entreprises, qui n'ont pas les moyens ni le temps d'entamer une réflexion.

Sur les CPOM par branche, je ne peux pas répondre, et sur la visite de pré-reprise, ce n'est pas notre domaine.

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