Intervention de Jean Christophe Niel

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 6 avril 2021 à 17h00
Audition de M. Jean-Christophe Niel candidat proposé aux fonctions de directeur général de l'institut de radioprotection et de sûreté nucléaire irsn

Jean Christophe Niel, candidat proposé aux fonctions de directeur général de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire :

Merci Monsieur le Président. Comme vous venez de le rappeler, j'ai l'honneur de servir mon pays en évaluant les risques radioactifs depuis une trentaine d'années. Vous avez présenté mon parcours et l'IRSN. Je soulignerais en particulier mon expérience du dialogue avec les élus et les associations, mon expérience des situations de crise - nous mobilisons notre centre de crise régulièrement, pour des exercices, mais aussi des situations réelles, en France et à l'étranger. Par ailleurs, je suis président, depuis 2017, du comité de la sûreté des installations nucléaires de l'OCDE, qui regroupe des organismes similaires à l'IRSN. Enfin, j'ai une expérience en matière de direction de structures publiques, d'autorités administratives indépendantes ou d'établissements publics, de management, de dialogue avec les tutelles, le Parlement, les instances représentatives du personnel (IRP), ainsi que dans la capacité à conduire des changements. J'ai aussi une connaissance des mécanismes budgétaires et administratifs.

L'IRSN prend une place particulière dans la transition écologique, avec l'enjeu de la prolongation de deux réacteurs au-delà de quarante ans, le réexamen de sûreté des installations du cycle du combustible, la gestion des déchets radioactifs, le démantèlement d'installations, la construction de nouvelles structures, comme le réacteur pressurisé européen (EPR), le centre industriel de stockage géologique (Cigéo), le réacteur thermonucléaire expérimental international (ITER), le réacteur de recherche Jules Horowitz (RJH), la contribution du personnel médical et le recours à des techniques de plus en plus sophistiquées notamment de radiothérapie, enfin un enjeu de protection contre les rayons ionisants en particulier des professionnels et des patients. Le baromètre de l'IRSN montre que les Français se préoccupent de plus en plus de santé environnementale.

Les questions de sécurité et de lutte contre les actes malveillants prennent une importance grandissante et ce contexte me conduit à vous proposer trois axes pour être au rendez-vous en matière de sécurité et de sûreté nucléaires ainsi qu'en radioprotection.

Le premier consiste à réaffirmer les fondamentaux de l'IRSN : expert public du risque radiologique et nucléaire, l'Institut doit éclairer la décision par l'évaluation du risque lié à l'utilisation des rayons ionisants ; cette évaluation est technique et scientifique, elle obéit aux canons et aux exigences de la science, elle est collective et impartiale ; elle s'appuie sur une expertise nourrie par la recherche. En cohérence avec les agences sanitaires européennes et nationales, cette mission d'évaluation est bien distincte de la mission d'inspection et de sanction qui appartient aux pouvoirs publics. C'est par ce système de double sécurité, entre l'expert et l'autorité, entre l'évaluateur et le gestionnaire du risque, que l'État assure la protection de nos concitoyens à l'égard des usages des rayonnements ionisants. L'IRSN est un interlocuteur de confiance des pouvoirs publics et de la société en répondant à leurs attentes par des informations qu'il délivre de manière transparente, en interagissant avec eux.

Deuxième axe, l'anticipation et la culture du risque. Notre environnement évolue en permanence et de nouveaux risques émergent, par exemple la pandémie de coronavirus, ou l'accident de Fukushima, survenu il y a dix ans. Lors de chaque crise, l'anticipation et la culture de risque sont questionnées, les pouvoirs publics sont interpellés : l'IRSN est un outil pour aider à anticiper les risques liés à l'utilisation des rayons ionisants et pour la gestion des risques en général.

Cette anticipation fait partie de notre contrat d'objectifs signé il y a deux ans : il s'agit, par la recherche, par les retours d'expériences, par l'évaluation des sujets à venir comme la prolongation d'exploitation de réacteurs, les déchets, le radon, la cybersécurité, d'anticiper les enjeux liés à la révolution numérique, d'anticiper les nouvelles demandes de la société par un dialogue avec elle, d'instaurer de nouveaux partenariats, mais aussi d'anticiper en capitalisant sur l'humain et l'accumulation des compétences et des connaissances. Comme le disait Saint-Exupéry : pour ce qui est de l'avenir, il ne s'agit pas de le prévoir, mais de le rendre possible.

Troisième axe, c'est la performance et l'efficience. L'IRSN doit être performant, prospectif, faire évoluer ses méthodes et ses pratiques. J'ai introduit dans notre fonctionnement quatre programmes de transformation : celui des modes de collaboration, par exemple le mode projets ou les communautés de pratiques ; celui de la transformation managériale, avec la mobilité professionnelle et la préparation des métiers de demain ; celui de la transformation numérique, en développant les méthodes et les outils d'aide à l'expertise ou à la recherche ; enfin, le programme de la transformation des relations sociales et sociétales, en renforçant notre démarche de responsabilité sociétale des entreprises (RSE). Grâce à ces quatre programmes, nous évaluerons mieux notre rôle et les conditions d'exercice de nos missions, et ce de manière collective, en interaction avec nos tutelles et la société.

Depuis sa création, l'IRSN contribue à la protection des citoyens contre les risques liés aux usages des rayonnements ionisants sous toutes leurs formes, à renforcer leur implication dans la vigilance à l'égard de ces risques. Dans un monde en constante évolution, la pertinence de notre action nécessite une adaptation permanente aux nouveaux enjeux. Mon projet, c'est de permettre à l'Institut de répondre à tout moment à ce besoin d'adaptation pour que la sûreté nucléaire, la sécurité nucléaire et la protection des personnes et de l'environnement soient au plus haut niveau. C'est la voie pour que l'IRSN soit un outil d'anticipation et de confiance dans un univers innovant et numérique.

Pour répondre à votre question sur notre bilan, je dirai que l'IRSN a été résilient durant la crise sanitaire. Dans un contexte de télétravail massif, nous avons pu rendre un avis attendu sur la capacité, pour EDF, à poursuivre l'exploitation de ses réacteurs au-delà de quarante ans - un avis qui a demandé 200 000 heures de travail sur quatre ans et que nous avons rendu dans ce contexte très particulier. Nous avons rempli nos missions, y compris en situation de crise, par exemple en créant notre centre de crise à distance pour suivre les incendies autour de la centrale de Tchernobyl en avril dernier. Nous avons pu utiliser un grand nombre de nos plateformes expérimentales, mais pas toutes, ce qui nous a fait prendre un peu de retard sur certains programmes de recherche et d'expérimentation.

La crise sanitaire a eu un impact sur nos finances que nous évaluons entre 7 et 8 millions d'euros, en particulier pour l'achat de matériel informatique, et ce compte tenu du manque à gagner dû au report de la vente de dosimètres et des économies liées aux moindres déplacements pendant les périodes de confinement.

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