Les relations de l'IRSN et de l'ASN sont quotidiennes, elles représentent le tiers de l'activité de l'Institut, avec plusieurs centaines d'avis délivrés chaque année ; ces relations sont structurées et très denses, à tous les niveaux, du terrain à l'état-major ; nous avons deux auditions annuelles, avec un bilan au printemps et la définition du programme pour l'année suivante à l'automne.
Le président de l'ASN nous a dit, cette année encore, son approbation complète et sans réserve du travail de l'IRSN. Nous avons co-évalué notre expertise, sur l'ensemble de la chaîne, de la saisine à l'avis, en passant par l'expertise elle-même et nous avons constaté, ensemble, que le système fonctionne, ce qui n'empêche pas quelques progrès à faire, notamment sur la communication - nous y travaillons. Je dirai donc que la situation s'est améliorée depuis quatre ans.
J'ajoute que nous proportionnons notre expertise à l'importance du risque, aux enjeux de sûreté et de sécurité nucléaire.
La transparence est un objectif prioritaire dans une société vigilante au risque, où l'on gagne à ce que chacun soit capable de se faire sa propre opinion. Nous avons signé en 2009 une charte d'ouverture à la société, qui demande aux personnels de l'Institut de porter à connaissance l'expertise produite et d'aider les personnes qui le souhaitent à monter en compétence, nous l'avons fait dans la concertation sur la prolongation de deux réacteurs au-delà de quarante ans, ou encore dans le cadre du débat public sur le plan national de gestion des matières et des déchets radioactifs (PNGMDR), nous avons proposé des fonctionnements innovants, notamment des « serious games », des jeux de rôle où chacun envisage plusieurs points de vue. Nous poursuivons dans cette direction : l'ANR a lancé un appel à manifestation d'intérêt sur des projets de sciences participatives intitulé « Les sciences avec et pour la société » ; nous avons déposé quatre projets qui ont été retenus à ce stade. Petit bémol cependant : nous n'avons pas encore mis en place le comité des parties prenantes, comme prévu par le contrat d'objectif et de moyens, nous allons le faire prochainement.
Sur le démantèlement, l'IRSN joue un rôle d'expertise, de recherche et d'ouverture à la société. Le démantèlement est une activité industrielle à part entière, qui doit être gérée comme un projet ; elle n'impose pas de technique rédhibitoire, ce qui ne signifie pas qu'elle soit facile, en particulier compte tenu de ses risques spécifiques, et nous expertisons les conditions dans lesquelles l'opérateur démantèle. Nous avons aussi des programmes de recherche, notamment sur l'incendie. Nous avons agréé un centre de crise en juin dernier, lors de l'incendie intervenu sur le sous-marin Perle, à Toulon, lors d'une opération de maintenance lourde. Nous menons des recherches en sciences humaines sur le comportement des organisations - je pense à une recherche sur la co-activité, que nous conduisons avec la RATP. Enfin, l'ouverture à la société passe par le travail avec les commissions locales d'information (CLI). Nous répondons à une centaine de sollicitations par an et nous présentons notre position scientifique et technique.
Il n'entre pas dans les missions de l'IRSN de proposer une évolution des normes relatives à la sûreté et la sécurité nucléaire. Cela dit, nous réfléchissons sur les liens entre la capacité de prévoir des difficultés et le fait que certaines se produisent, cela vaut d'ailleurs pour l'ensemble de l'industrie.
Nous avons lancé, fin 2019, une plateforme intégrée de retour d'expérience (Pirex), avec le concours, pour 1 million d'euros, du Fonds pour la transformation de l'action publique (FTAP) ; cette plateforme utilise l'intelligence artificielle pour mieux extraire, dans les milliers de données que nous collectons chaque jour, l'information qui nous aidera à prévenir les incidents et les difficultés. D'une manière générale, les installations se complexifiant, il faut renforcer la résilience des opérateurs, c'est-à-dire leur capacité à intervenir sur des situations non prévues. Nous n'avons pas de prospective juridique, mais nous analysons ces questions de façon technique et scientifique.
Sur l'attractivité de nos métiers, il est vrai que, à la suite de l'accident de Fukushima, l'Institut national des sciences et techniques nucléaires (INSTN) a constaté un recul du nombre des candidats pour la filière génie atomique, notre « turn-over », la rotation de nos effectifs, est passée, elle, de 4,6 % à 6,5 % ; la crise sanitaire a ralenti le mouvement, nous allons voir ce qui se passe ensuite. L'IRSN étant un établissement public, il ne concurrencera jamais les industriels pour les rémunérations, mais nous avons des atouts que nous faisons valoir sur le sens de nos missions et sur la qualité de la vie au travail - c'est pourquoi nous avions développé le télétravail avant le confinement, dans le cadre d'un accord avec les syndicats et je dois dire que le dialogue social est de bonne qualité à l'IRSN.
S'agissant de la stratégie scientifique de l'IRSN, le contrat d'objectifs mentionne cette année 2021 pour un nouveau document, sachant que la stratégie 2015-2025 va s'achever. Nous y travaillons, en partant d'une vingtaine de questions que posent la sûreté et la sécurité nucléaires.
Madame de Cidrac, l'Andra est un exploitant nucléaire ; il exploite ainsi le centre de stockage de la Manche - qui est sans activité, mais sous surveillance - ou celui de l'Aube - pour des déchets de faible activité à vie courte. Nous menons donc à l'égard de l'Andra un travail d'expertise technique, à la demande de l'ASN, pour assurer la sûreté de ces centres.
Le centre Cigéo est un cas tout à fait particulier, car il s'agit d'un centre de stockage en profondeur, avec une durée d'exploitation d'au moins une centaine d'années. Nous nous sommes penchés en 2018 sur le dossier d'option de sûreté et la prochaine étape sera le rapport de sûreté, qui sera remis dans les prochains mois. Nous avons considéré que le dossier d'option de sûreté était en cohérence avec l'avancement des travaux, tout en soulignant quelques points d'attention, notamment sur la maîtrise du risque incendie - qui ne semble pas suffisamment assurée s'agissant des colis de déchets de bitume -, la surveillance du stockage ou encore la capacité d'intervention. Ces points devront être traités par l'Andra.
L'Autorité environnementale nous a interrogés sur la déclaration d'utilité publique de Cigéo : nous avons répondu en janvier. Enfin, nous menons également des projets de recherche communs avec l'Andra, notamment européens.