Intervention de Hugues Maillot

Mission d'information Lutte contre la précarisation et la paupérisation — Réunion du 13 avril 2021 à 14h30
Mesure de la pauvreté et lutte contre ce phénomène en outre-mer — Audition commune de Mm. Aurélien dauBaire directeur interrégional de l'insee la réunion-mayotte charles trottmann directeur du département des trois océans à l'agence française de développement et Mme Nathalie Anoumby directrice générale des services adjointe en charge du pôle solidarités Mm. Hugues Maillot directeur général des services adjoint en charge du pôle action territoriale et insertion et thierry vitry directeur du pôle habitat au conseil départemental de la réunion

Hugues Maillot, directeur général des services adjoint, en charge du pôle action territoriale et insertion au conseil départemental de La Réunion :

M. Daubaire nous rappelait que le taux de pauvreté avait baissé considérablement à La Réunion. C'est une réalité. Mais, en même temps, la demande sociale au département n'a pas diminué, ni sur le plan de l'insertion, ni sur le plan du vieillissement, ni sur l'aide sociale à l'enfance, ni sur le plan de la précarité. Le nombre de bénéficiaires du RSA est relativement stable sur les dix dernières années. Mme Anoumby a rappelé la croissance de la population de plus de 60 ans et l'impact sur la dépendance. Nous constatons une progression des signalements et informations préoccupantes adressés à l'aide sociale à l'enfance. Nous avons encore des retards importants en matière d'accès au logement, notamment social. Face à cette demande sociale qui reste très soutenue, le département a vu ses marges d'action diminuer du fait de l'augmentation de la dépense du revenu de solidarité active, soit environ 600 millions d'euros par an de dépenses sur un budget de 1,4 à 1,5 milliard d'euros. Cette dépense a augmenté de l'ordre de 2 à 3 % par an et a handicapé la capacité du département à intervenir pour faire face à la demande sociale. En définitive, les leviers pour maîtriser cette dépense n'étaient pas dans ses mains, mais dans celles de l'État. Les deux tiers de la progression annuelle de la dépense de RSA relevaient des revalorisations annuelles décidées par l'État. Le plan de rattrapage engagé en 2012 et la reprise en main des dispositifs d'insertion, notamment les contrats aidés, par l'État à partir de 2017, sont les deux facteurs qui expliquent en grande partie l'évolution de la dépense du RSA à La Réunion ces dix dernières années. Le département ne disposant pas des leviers lui permettant d'agir sur la dépense, la recentralisation du RSA était indispensable pour que le département dispose à nouveau d'une marge de manoeuvre pour faire face à l'évolution soutenue de la demande sociale.

Nous avons constaté que cette recentralisation du RSA a effectivement permis à la collectivité de retrouver des marges de manoeuvre. Une partie a été engagée dans les réponses apportées en urgence dans le cadre de la crise covid et une partie a été injectée dans l'expérimentation du dispositif R+, qui est un levier permettant de relancer la politique d'insertion départementale. Le R+ répond au constat selon lequel, lorsqu'il existe une forte précarité, le RSA joue « trop » pleinement son rôle de filet de sécurité ; il devient même une « trappe à pauvreté ». L'économie réunionnaise n'est pas en mesure de fournir un emploi à l'ensemble de sa population pour se rapprocher du plein emploi, le taux de chômage s'élevant à 24 %, un taux trois fois supérieur à celui de la métropole. La construction de parcours d'insertion vers l'emploi est difficile, de même que la capacité des bénéficiaires du RSA à se projeter dans ce type de parcours. Le RSA offre donc un filet de sécurité qui, lorsqu'il est cumulé avec des revenus informels, apparaît satisfaisant et crédible.

L'objectif du R+ était de renforcer les effets de levier de l'encouragement à la reprise d'une activité. Dans cette perspective, le R+ apporte deux choses : sur le plan financier, il offre un complément à la prime d'activité, afin de compenser les pertes d'allocations qu'entraîne le retour à l'emploi ; sur le plan de l'accompagnement, il s'inscrit dans le cadre d'un contrat d'engagements réciproques et d'un parcours de un à trois ans afin d'améliorer durablement les conditions d'accès à l'emploi et de revenus. Aujourd'hui, environ 1 500 personnes bénéficient de ce dispositif. Il est encore trop tôt pour en évaluer les résultats, le dispositif ayant été lancé à la fin de l'année dernière. Tous les parcours fonctionnent et près de 200 personnes sont sorties du dispositif.

Le département s'est également engagé à expérimenter le service public de l'insertion et de l'emploi (SPIE). Nous partageons l'objectif de l'État d'améliorer la coordination des acteurs qui interviennent en matière d'insertion et d'accès à l'emploi. Trop de bénéficiaires potentiels passent à côté des dispositifs d'accompagnement. Il y a un vrai enjeu d'identification, d'appropriation et d'optimisation de ces dispositifs. Notre expérimentation porte sur une meilleure appropriation par le terrain de ces outils qui vont permettre la mutualisation et une meilleure visibilité des dispositifs d'accompagnement.

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