Intervention de André Reichardt

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 5 mai 2021 à 9h30
Bilan annuel de l'application des lois — Communication

Photo de André ReichardtAndré Reichardt, rapporteur :

Le président a souligné à juste titre que la loi du 24 juillet 2020 visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux restait inappliquée, et inapplicable. Cette proposition de loi venue de l'Assemblée nationale vise à renforcer l'efficacité de l'interdiction faite aux professionnels de contacter un consommateur inscrit sur la liste d'opposition au démarchage téléphonique dite Bloctel.

Trois mesures introduisant des obligations déontologiques pour les professionnels sont encore inapplicables faute de parution des décrets requis, notamment l'encadrement des jours et horaires et de la fréquence des appels, introduit à l'initiative du Sénat.

Ces décrets seraient en cours de finalisation, tout comme le code de bonnes pratiques qui devait être élaboré par les professionnels du secteur. Un arrêté du ministre de l'économie était aussi prévu pour encadrer les conditions du signalement par un consommateur du caractère frauduleux d'un numéro surtaxé. Il n'a, lui non plus, pas encore été pris. Il conviendrait donc d'appeler le Gouvernement à publier au plus vite ces textes nécessaires à la sérénité du quotidien des Français. Ils ont peut-être d'autres préoccupations en ce moment, mais faut de mesures d'encadrement, le démarchage continue de plus belle.

L'interdiction du démarchage téléphonique dans le domaine de la rénovation énergétique ou de la production d'énergies renouvelables a connu une première application assez spectaculaire, avec une amende de 375 000 euros prononcée le 15 mars dernier sur ce fondement par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). Je maintiens mes réserves quant à la constitutionnalité de cette mesure, dont le Conseil constitutionnel n'a toujours pas été saisi : pourquoi interdire le démarchage téléphonique dans ces seuls domaines ?

Enfin, le mécanisme d'authentification de tous les appels internationaux, qui vise à empêcher l'usurpation de numéros français déjà attribués, demande encore un travail important des opérateurs de communications électroniques sous l'égide de l'Autorité de régulation des communications électroniques et des Postes (Arcep), pour un résultat incertain, et qui comportera des limites : l'état de la technologie ne permet pas d'authentifier tous les appels et échanges par SMS ou MMS frauduleux. L'usurpation de numéros français se poursuit.

Nous ne pourrons juger cette loi qu'à l'épreuve des faits. Ce texte était l'une de nos dernières chances de conserver la possibilité d'un démarchage téléphonique sur la base de l'opt out - c'est-à-dire qu'il reste autorisé sauf pour les personnes qui ont manifesté leur refus par l'inscription sur la liste Bloctel. Si rien n'est fait, nous basculerons dans la logique inverse : le démarchage ne sera possible qu'auprès des personnes qui auront fait savoir, par l'inscription sur une liste, qu'elles souhaitaient en bénéficier. Ce serait la mort du démarchage téléphonique et des emplois qui y sont associés.

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