Intervention de Érick Fontaine

Délégation sénatoriale aux outre-mer — Réunion du 13 avril 2021 : 1ère réunion
Étude sur le logement dans les outre-mer — Table ronde sur la situation du logement à la réunion

Érick Fontaine, administrateur de la Confédération nationale du logement (CNL) :

Nous avons des défis importants à relever à La Réunion. 350 000 personnes sont en dessous du seuil de pauvreté, les salaires sont bas, le nombre de personnes âgées a doublé et 35 % de la population est couvert par les allocations logement.

En premier lieu, je souhaite mettre en lumière le sujet de la réhabilitation. 25 000 à 30 000 logements doivent être réhabilités. L'enjeu est important pour la santé des occupants puisque beaucoup de ces logements sont indignes. Cela engendre des problèmes d'éducation avec des enfants qui traînent dans la rue. Se pose aussi le problème de l'amiante.

En deuxième lieu, j'attire votre attention sur les logements vacants dans le privé. Nous faisons un travail sur le repérage de ces logements. Notre objectif est d'accompagner les propriétaires pour rendre ces logements habitables et disponibles à la location. Nous travaillons avec Action Logement, la CAF et d'autres partenaires qui interviennent dans le logement privé.

Nous constatons que La Réunion ne manque pas de financements (Action Logement, LBU, les collectivités...), mais plutôt d'un véritable commandant à bord pour le « bateau Logement ». En revanche, des financements complémentaires seraient nécessaires pour soutenir les collectivités dans leur aménagement du territoire. En effet, la construction de logements engendre des coûts importants pour les collectivités : construction de routes, des réseaux, des équipements publics. Nous pourrions imaginer une dotation spécifique de l'État pour les collectivités dédiée à l'aménagement du territoire.

Je souhaite aborder un autre point important. La politique de l'ANRU n'est peut-être pas adaptée à la situation réunionnaise. Compte tenu de nos spécificités, quand nous sommes amenés à démolir des immeubles sur un quartier, il serait pertinent de pouvoir reconstruire dans ces mêmes quartiers. En effet, ces logements concernent des personnes à très bas revenus, souvent très âgées, qu'il est difficile de reloger ailleurs et très attachées à leur vie de quartier et la solidarité de l'entourage. Le frein est l'impossibilité de reconstruire des LLTS. Pour les logements détruits dans le cadre de l'ANRU, il faudrait permettre aux élus locaux, aux bailleurs sociaux, de pouvoir aménager comme ils le souhaitent le secteur de l'ANRU. Cette mesure permettrait de remettre de l'humain au centre de nos préoccupations.

Un fléau à La Réunion est la qualité des logements construits. Nous déplorons de plus en plus de dégradation sur des logements neufs, des logements qui au bout de quelques mois deviennent indécents. C'est une difficulté pour les locataires et les bailleurs également. Nous courrons le risque d'avoir dans 10 ans une situation catastrophique dans les logements neufs, augmentant encore le nombre de logements à réhabiliter. Dans ces milliers de logements, nous voyons apparaître des conditions de vie déplorables, un renfermement des locataires qui ne reçoivent plus leurs familles, des enfants dans la rue, des problèmes de sécurité et de santé pour les occupants.

L'allocation logement est également un sujet de préoccupation. Nous ne bénéficions pas de la même allocation logement qu'en Métropole. Nous disposons de l'allocation personnelle au logement et non pas d'allocation personnalisée au logement. Elle me paraît plus favorable dans l'Hexagone qu'à La Réunion. Une étude devrait être diligentée pour repérer ces différences, dans le cadre de cette situation sociale extrêmement tendue. Selon les études, nous sommes la troisième région de France dans laquelle le prix du loyer est le plus élevé au m2 par rapport à la surface habitable. Avec un loyer trop important, les conditions de revenus des locataires ne permettent pas d'accéder à ce type de logement. Un T2 s'élève à 500 euros charges incluses. Ni un RSA célibataire ni un retraité ne peuvent en bénéficier. La question à se poser est pour qui finalement ces logements sont-ils construits ?

Enfin, le dernier point concerne l'accession sociale à la propriété. Les dispositifs ALS doivent être maintenus et même intensifiés avec des aides plus importantes et un meilleur suivi de la part de l'État. Nous déplorons aujourd'hui un grand nombre de dossiers avec des déclarations d'ouverture de chantier, toujours pas démarrés depuis 3 ans. Cela pénalise à la fois les bénéficiaires et l'État. Il faut réfléchir à des solutions pour aider les bailleurs sociaux à baisser les prix de ces logements sociaux. La vente de logements sociaux n'est pas un grand succès, car le prix de vente demeure un frein à l'achat.

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