Monsieur le ministre, comme vous le savez, le Sénat est le reflet de nos territoires. C’est pourquoi j’aimerais fertiliser ce débat en exprimant le point de vue des agriculteurs du territoire que je représente, la Haute-Saône, qui se disent aujourd’hui très inquiets.
Cette inquiétude est très légitime au regard des nombreux points de désaccord et de la très lente progression des négociations en trilogue sur la réforme de la PAC. Et elle est renforcée dès lors que l’on mesure les conséquences que pourraient avoir des arbitrages sur les équilibres fragiles de certaines exploitations.
En Haute-Saône, monsieur le ministre, plus de 80 % de la surface agricole utile est en zone défavorisée, caractérisée par des sols superficiels, voire très superficiels.
Pour pallier ces handicaps, les efforts sont incontestables. En polyculture-élevage, les agriculteurs développent des systèmes particulièrement autonomes, résilients et vertueux sur le plan environnemental, qui méritent une attention toute particulière.
La politique agricole commune, au travers du second pilier, soutient et accompagne ces exploitations situées en zone défavorisée. Or la PAC va changer, mais les contraintes de production, elles, ne changent pas ; elles ont même tendance à s’aggraver.
Si la faible qualité des sols est presque routinière pour nos paysans, le fléau de l’excès de sécheresse est une calamité à laquelle on ne se fait pas.
Dans ce contexte, un changement brutal de paradigme serait un coup mortel porté à nos agriculteurs, dont les revenus sont au plus bas, et, en cascade, à nos paysages et à notre biodiversité.
Pour éviter ce désastre, une prise en considération totale de l’ICHN s’impose en faveur des zones défavorisées simples, en Haute-Saône notamment. Il importe aussi de reconnaître certaines spécificités, comme celles des zones intermédiaires. L’État devra également s’engager à compenser la baisse des cofinancements du Fonds européen agricole pour le développement rural, le Feader.
Monsieur le ministre, dans quelle mesure ces spécificités territoriales seront-elles prises en compte ? En d’autres termes, quelle « agriculture des territoires » attend demain ces paysans des terres à handicap et à faible potentiel ?