Intervention de Odette Terrade

Réunion du 3 juillet 2008 à 10h00
Modernisation de l'économie — Articles additionnels après l'article 14 bis

Photo de Odette TerradeOdette Terrade :

Ces deux amendements, sans doute parce que le Sénat est réputé avoir le sens de la mesure et qu’il faut bien contrebalancer les effets des dispositions de l’article 14 bis, portent sur l’une des formes les plus délicates, et les plus critiquables, du commerce d’aujourd’hui.

En effet, ils visent à moraliser quelque peu les règles de fonctionnement propres à ce que l’on appelle la « vente pyramidale », forme de commerce dont on peut pourtant craindre que, grâce à l’article 3 du présent projet de loi, elle ne connaisse un certain développement.

Le souffle nouveau de liberté contenu dans la philosophie générale du projet de loi risque en effet de se perdre dans les méandres de la vente à domicile de récipients en plastique, d’articles de lingerie fine, de parfumerie bon marché ou encore de produits d’entretien ménager aux qualités révolutionnaires…

Le fait est que la « vente pyramidale » constitue, depuis un certain nombre d’années, l’un des vecteurs les plus significatifs de l’activité commerciale accessoire, et se place, sous nombre d’aspects, à la lisière du travail occulte.

Au demeurant, les articles 1er et 3 du présent projet de loi risquent fort de faire entrer ces activités dans le champ de la légalité, quitte à « bonifier » leur taux de croissance apparent.

Pour autant, force est de constater que l’ensemble du dispositif de la vente directe, qui allège singulièrement les contraintes logistiques pour les marques qui y recourent, a donné lieu à de multiples abus.

Je ne puis manquer de me référer ici au rapport de la commission spéciale, qui précise qu’ « un code éthique de la vente directe élaboré par la Fédération de la vente directe régule ces pratiques. Pour autant, la loi doit jouer pleinement son rôle protecteur. »

Nous partageons pour partie les préoccupations ainsi exprimées, d’autant que, comme chacun l’aura deviné, les « vendeurs directs » sont souvent des personnes dont le niveau de qualification est relativement faible et dont l’activité commerciale leur permet de dégager un revenu accessoire venant compléter un salaire particulièrement bas.

Je me permettrai de faire deux observations.

Premièrement, l’adoption de la loi du 3 janvier 2008 dite « loi Chatel », qui transposait en droit interne la directive sur les pratiques commerciales déloyales, a hélas omis de donner au droit français une vertu que n’avait pas non plus le texte européen, à savoir protéger plus nettement le vendeur contre les menées du responsable du réseau.

Deuxièmement, l’application du principe selon lequel est conféré à la loi un rôle protecteur que ne saurait remplir une charte de déontologie pourrait être étendue, selon nous, à d’autres situations, notamment toutes celles où d’aucuns préfèrent que le droit soit fixé par la convention d’usage en lieu et place de la règle neutre et objective s’appliquant à tous.

Dans tous les cas, la vente directe doit être très sérieusement encadrée. Outre le fait que la plupart des contrats régissant cette forme commerciale devraient, pour l’essentiel, être requalifiés en contrats de travail en bonne et due forme, régis par le code du travail et non par le code de commerce, il faudra bien, un jour prochain, se demander s’il ne convient pas d’interdire purement et simplement ces pratiques, qui nuisent à la qualité de la concurrence et ne rendent service ni au consommateur ni, a priori, aux vendeurs.

En attendant ce nécessaire débat, notre groupe votera ces amendements, tout en étant parfaitement conscient de leur timidité.

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