Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est avec une grande satisfaction que j’engage ce débat sur un sujet qui préoccupe nombre de nos concitoyens : les concessions autoroutières.
Depuis leur privatisation en 2006, les sociétés concessionnaires d’autoroutes (SCA) sont l’objet de controverses, parfois légitimes, qui débouchent aussi sur des débats stériles, voire caricaturaux.
Dans quelles conditions la privatisation a-t-elle été réalisée ? Comment les tarifs sont-ils fixés ? Comment les nombreux avenants ont-ils été négociés ? Doit-on, en somme, mettre fin aux concessions ?
C’est pour apporter un éclairage documenté et objectif sur ces questions récurrentes dans le débat public que la commission d’enquête que j’ai eu l’honneur de présider a été créée sur l’initiative du groupe Union Centriste.
Il s’agissait, d’une part, de faire la lumière sur l’idée selon laquelle l’État serait, en quelque sorte, floué par les concessions en cours au profit des groupes concessionnaires et, d’autre part, d’anticiper la fin des concessions, qui interviendra dans dix ans pour les premières, ainsi que de formuler des propositions cohérentes et équilibrées pour que la répartition des profits futurs soit juste pour l’État, les usagers et les exploitants.
Tout au long de nos travaux, nous nous sommes donc attachés à analyser les relations entre l’État et les sociétés concessionnaires d’autoroutes, et à retracer l’historique de la mise en place du réseau autoroutier.
Nous avons, par ailleurs, cherché à évaluer de manière rigoureuse le niveau réel de rentabilité de l’exploitation des autoroutes.
Enfin, nous nous sommes penchés sur l’effectivité des contrôles de l’État quant au respect des contrats en cours avec les concessionnaires.
Les autoroutes sont un bien commun. Elles constituent des infrastructures de grande ampleur et un outil d’aménagement du territoire. Pour réaliser de longs trajets en voiture, nos concitoyens sont quasiment obligés de les parcourir. On peut donc considérer qu’il s’agit à la fois d’un service public et d’un monopole économique. Était-il dès lors souhaitable de la part de l’État de les privatiser ?
Lorsque le Premier ministre Dominique de Villepin a décidé, en 2006, de privatiser les autoroutes, des ouvertures partielles du capital avaient déjà été réalisées depuis 2002. La situation budgétaire des SCA ne nécessitait pas d’intervenir en urgence et la majorité était d’ailleurs divisée sur le sujet – les auditions que nous avons menées nous l’ont confirmé.
Le choix qui a été fait à l’époque a été de récupérer en une fois un montant élevé – 14, 8 milliards d’euros – pour réduire la dette de l’État et financer de nouvelles infrastructures. Il s’agissait alors d’une décision politique. L’autre option était de continuer à percevoir, année après année, la rente que constitue l’exploitation des autoroutes, en assumant les aléas économiques : niveau du trafic, coût des travaux d’entretien…
Il n’est pas question ici de refaire l’histoire, mais d’envisager l’avenir. Notre commission d’enquête a estimé que les concessions en cours étaient trop longues d’environ dix ans : au-delà de 2022, les dividendes versés devraient atteindre 40 milliards d’euros, à comparer avec les coûts d’acquisition des sociétés.
Il apparaît donc impensable de prolonger les concessions en cours et si le choix est fait de les renouveler, lorsqu’elles arriveront à échéance, il faudra a minima en réduire la durée.
Je n’entrerai pas dans le détail de nos conclusions, car je vais laisser mon collègue rapporteur Vincent Delahaye s’en charger. Je souhaite simplement dire que le but du débat que nous avons aujourd’hui est de faire vivre le travail que nous avons mené. Nous ne voulons pas que notre rapport termine, comme bien d’autres avant lui, au fond d’un tiroir.
Dès maintenant, nous devons préparer la fin des concessions et faire valoir notre rôle de parlementaires, qui consiste à peser dans la décision publique sur un sujet d’intérêt général.