Intervention de Louis-Jean de Nicolay

Commission de l'aménagement du territoire et du développement durable — Réunion du 5 mai 2021 à 9h35
Bilan annuel de l'application des lois — Communications

Photo de Louis-Jean de NicolayLouis-Jean de Nicolay, rapporteur :

Je vous présenterai, pour ma part, l'application de la loi du 22 juillet 2019 portant création d'une Agence nationale de la cohésion des territoires, qui a été officiellement créée le 1er janvier 2020.

Sur le plan statistique, la situation n'a pas évolué depuis l'an dernier : il manque environ 25 % des mesures d'application prévues par la loi.

À l'article 2, une convention doit être formalisée entre le ministre chargé de l'aménagement du territoire et le ministre chargé des communications électroniques et du numérique pour définir les mesures et moyens permettant l'exercice par l'ANCT des missions anciennement assurées par l'Agence du numérique, service à compétence nationale dissous au 1er janvier 2020. Cette convention, en cours de rédaction avec la direction générale des entreprises (DGE), devrait être présentée d'ici au mois de juin prochain au conseil d'administration de l'ANCT. Sa publication devrait intervenir à l'été 2021. Il est important qu'elle soit prise rapidement, car la Cour des comptes a formulé plusieurs recommandations pour garantir une bonne reprise des missions de l'Agence du numérique par l'ANCT dans son rapport public annuel de 2021.

À l'article 7, les conventions pluriannuelles liant l'ANCT et ses cinq opérateurs partenaires - l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), l'Agence nationale de l'habitat (ANAH), le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema), la Caisse des dépôts et consignations (CDC) et l'Agence de la transition écologique (Ademe) - et prévoyant les conditions de leur participation financière aux missions de l'ANCT n'ont pas encore été transmises au Parlement par la voie officielle du Secrétariat général du Gouvernement, selon la procédure prévue par la commission de l'aménagement du territoire lors de l'examen du texte. Ces conventions sont déterminantes pour assurer le bon fonctionnement de l'agence et éviter qu'elle ne devienne un « arbre de plus » dans la forêt des opérateurs de l'État. Les cinq conventions prévues par la loi ont été validées au conseil d'administration de l'ANCT du 17 juin 2020. Leur signature officielle prévue en novembre dernier a été repoussée et serait en cours.

Enfin, à l'article 11, un décret manque pour déterminer les catégories de personnes pouvant entrer dans la réserve citoyenne pour la cohésion des territoires, la durée et les clauses du contrat d'engagement. Cette disposition, introduite par les députés, semble a priori difficile à mettre en oeuvre. La direction générale des collectivités locales (DGCL) a indiqué que plusieurs projets de décrets avaient été préparés depuis un an et que les travaux devraient aboutir d'ici à l'été 2021.

Au-delà de ces éléments statistiques, permettez-moi de dire un mot sur la mise en place de l'agence, rendue difficile par la crise sanitaire. Depuis l'automne 2020, on peut considérer que l'ANCT est pleinement opérationnelle, même si elle doit encore poursuivre sa montée en puissance et démontrer son efficacité sur le terrain.

L'ANCT est au coeur de plusieurs dispositifs importants en cours de déploiement : la mise en oeuvre de l'agenda rural du Gouvernement, présenté le 20 septembre 2019 après la remise du rapport de la mission Ruralités, et dont les mesures sont suivies dans le cadre du comité interministériel aux ruralités ; la mise en oeuvre du plan de relance, dont l'agence assure la conduite de certaines actions par exemple s'agissant de l'identification et du diagnostic de l'état des ouvrages d'art des collectivités territoriales ou encore de la rénovation énergétique des bâtiments qui leur appartiennent mais aussi s'agissant du déploiement de programmes territorialisés comme Petites Villes de demain et Territoires d'industrie, etc., dont les enveloppes financières ont été renforcées avec le plan de relance.

Le succès de l'ANCT reposera donc sur sa capacité à répondre aux besoins des collectivités territoriales de façon efficace et en proximité.

Dans cette perspective, le Sénat avait marqué plusieurs priorités pour l'action de l'agence, qu'il convient de rappeler. D'abord, la nécessité pour l'ANCT d'apporter une offre d'ingénierie aux collectivités territoriales pour la définition et la mise en oeuvre de leurs projets locaux ; ensuite l'importance de la coordination des actions de l'ANCT avec celles de ses opérateurs partenaires, formalisée dans le cadre des conventions pluriannuelles prévues par l'article 7 de la loi du 22 juillet 2019 ; enfin, la nécessité de s'appuyer sur un dialogue constant avec les élus dans le cadre des comités locaux de cohésion territoriale prévus à l'article L. 1232-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT). D'après les informations qui m'ont été communiquées, 87 comités ont été mis en place et 8 ne l'ont pas été à ce jour (Allier, Ariège, Bouches-du-Rhône, Corse-du-Sud, Haute-Corse, Loire, Haute-Loire, Haut-Rhin).

Le Sénat a attiré l'attention du Gouvernement sur ces enjeux d'une part, à l'occasion de la publication du rapport d'information intitulé Les collectivités et l'ANCT au défi de l'ingénierie dans les territoires, fait par nos collègues Josiane Costes et Charles Guéné au nom de la délégation aux collectivités territoriales et publié le 2 juillet 2020 et, d'autre part, lors d'un débat en séance, organisé à la demande du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen le 18 novembre 2020, sur la mise en place de l'ANCT.

Pour notre part, au sein de la commission, le cycle d'auditions lancé sur les perspectives de la politique d'aménagement du territoire, avec nos quatre référents Patricia Demas, Christine Herzog, Bruno Rojouan et Martine Filleul, que je salue, permettra également à terme d'évaluer l'action de l'agence.

Le projet de loi 4D - différenciation, décentralisation, déconcentration et décomplexification - qui devrait être examiné au Sénat en juillet prochain pourrait également permettre de compléter les dispositions relatives à l'ANCT et au Cerema si cela s'avérait utile, le cas échéant.

En résumé, la loi est presque entièrement applicable, mais l'ANCT doit encore s'emparer de l'ensemble des outils à sa disposition, réglementaires, législatifs et financiers, pour démontrer véritablement son efficacité.

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