Intervention de Fabien Gay

Délégation aux entreprises — Réunion du 8 avril 2021 à 8h30
Audition de M. Jean-Yves Kerbourc'h professeur à l'université de nantes faculté de droit et des sciences politiques

Photo de Fabien GayFabien Gay, rapporteur :

Je vous prie d'excuser mes quelques minutes de retard. J'ai cependant pu suivre votre intervention sur ma tablette. Je suis très intéressé par votre intervention. Pour plaisanter, quand j'ai vu figurer comme question l'abolition du salariat, j'ai pensé que nous allions parler de marxisme. En 1847, Marx a écrit dans l'ouvrage Travail salarié et capital qu`une société communiste impliquait l'abolition du salariat puisque celui-ci consiste en la vente de sa force de travail au capital. Marx préconisait de dépasser ce rapport de domination en mettant les richesses et les moyens de production en commun et, cela plaira à mon collègue Michel Canévet, en abolissant la propriété privée. Vous me situez ainsi dans mon courant de pensée. Nous n'en sommes plus là, malheureusement, et mon camp se retrouve à défendre le salariat. Il s'agit toujours de vendre sa force de travail mais le salaire soumis aux charges permet de bénéficier d'une protection sociale, indispensable dans le monde actuel.

Lors d'une récente audition, un économiste nous indiquait que la richesse était mieux distribuée aujourd'hui. C'est faux, puisqu'en trente ans, les salaires ont baissé de dix points, lesquels ont été transférés au capital.

Je souhaite vous interroger sur les nouvelles formes de travail. Dans un contexte d'ubérisation de la société, les libéraux ne cherchent-ils pas à se défaire du statut du salarié et de la protection sociale en organisant le chômage de masse et la destruction du salariat par l'instauration de statuts différents ? Cette question rejoint celle de la multiplicité des contrats de travail qui a amené de la précarité. Une nouvelle étape, l'ubérisation, prive les travailleurs de protection sociale. Ces travailleurs dits indépendants dépendent de la plateforme et il existe un lien de subordination, qui est l'actuelle définition du contrat de travail. Cependant, leur revenu n`est pas soumis aux cotisations et n'offre pas de protection sociale. Ces situations sont, je pense, amenées à se développer et à dépasser le salariat, non pour ce que les marxistes souhaitaient mais pour précariser le monde du travail.

Le portage, même s'il répond à des besoins, ou les groupements d'employeurs, posent question. Après de nombreuses auditions, nous constatons l'absence de difficultés si le recours aux groupements d'employeurs reste encadré et cantonné à des branches spécialisées comme l'agriculture ou à des petites entreprises. En revanche, cela pose problème si de grandes entreprises utilisent ce système pour sous-traiter. Je voulais vous demander si les nouvelles formes de travail ne sont pas un moyen de précariser la situation des salariés.

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