Intervention de Barbara Pompili

Mission d'information Méthanisation — Réunion du 12 mai 2021 à 16h30
Audition de Mme Barbara Pompili ministre de la transition écologique et de M. Julien deNormandie ministre de l'agriculture et de l'alimentation

Barbara Pompili, ministre :

Nous ne sommes qu'au début du développement d'une filière. Il est donc normal qu'il y ait quelques hésitations, voire quelques ratés. C'est pourquoi votre mission d'information arrive à point nommé. Grâce au retour d'expérience dont nous disposons, il est maintenant possible d'avancer.

Vous avez abordé plusieurs points et, en premier lieu, celui de l'impact que pouvaient avoir certaines externalités sur la méthanisation, comme le changement climatique ou les changements d'habitudes alimentaires des Français.

L'autonomie de notre production d'énergie est aussi une question de stratégie. Le sujet essentiel sera celui de la disponibilité de la biomasse. Le changement climatique va entraîner des évolutions dans ce domaine. Les projections qui ont été faites dans le cadre de la stratégie nationale bas-carbone (SNBC) indiquent que des contraintes vont apparaître concernant le gisement de biomasse. On ne pourra évidemment pas remplacer en totalité le gaz naturel par du biogaz. Cela va sans dire, mais il faut le rappeler.

C'est pourquoi nous devons faire des choix concernant l'utilisation du biogaz. Cela a notamment eu des conséquences lorsque nous avons mis en place la nouvelle réglementation environnementale des bâtiments neufs (RE 2020). Mais c'est un autre sujet dont on pourra reparler si vous le souhaitez.

On doit donc tenir compte d'autres éléments importants pour atteindre la neutralité carbone. Il est nécessaire de préserver les puits forestiers et de développer le recours au bois dans l'économie. Il est très compliqué de pouvoir faire des projections précises sur la disponibilité de la biomasse. Une stratégie nationale de mobilisation de la biomasse a été adoptée en 2018. Les impacts à long terme du changement climatique sur la disponibilité de la biomasse destinée à la méthanisation sont en cours d'étude. Il est très difficile d'avoir des projections réalistes. Cela fait partie des sujets sur lesquels on continue à travailler, mais on n'en est qu'au début.

S'agissant des pratiques alimentaires des Français, certaines évolutions vont réduire la quantité d'intrants disponibles pour la méthanisation. La baisse de la consommation de viande constatée ces dernières années devrait notamment, à terme, induire un recul du cheptel français et, par voie de conséquence, des effluents d'élevage pouvant être traités par méthanisation.

De la même manière, des mesures positives, comme la réduction du gaspillage alimentaire vont entraîner de facto la réduction de la quantité de biodéchets qui peut être introduite dans des méthaniseurs.

D'autres éléments peuvent aller dans l'autre sens, car certaines évolutions sont susceptibles d'accroître la quantité de biomasse disponible pour la méthanisation. Ainsi, la généralisation de la mise en place des dispositifs de tri des déchets à la source va-t-elle permettre d'augmenter les quantités qui pourront partir vers les méthaniseurs.

Par ailleurs, le recul du cheptel pourrait également faciliter l'évolution de pratiques agronomiques, notamment grâce à une meilleure intégration des cultures intermédiaire à vocation énergétique (CIVE) qui peuvent être valorisées par la méthanisation.

Il existe donc plusieurs paramètres clés dont les effets sont différents. Nous devrons mener des réflexions plus précises lorsque nous préparerons la future programmation pluriannuelle de l'énergie pour prendre en compte ces différents facteurs.

Vous avez posé la question du soutien tarifaire à la méthanisation. Une mission d'inspection a été lancée pour examiner les externalités. Nous venons à peine d'en recevoir les résultats. L'ensemble doit ensuite faire l'objet d'un rapport que nous allons transmettre au Gouvernement.

Nous connaissons un certain nombre d'externalités positives comme la valorisation des biodéchets et des déchets agroalimentaires, la réduction de l'épandage des déchets d'élevage et du lessivage d'excès d'azote, qui permet une diminution de la pollution des eaux. Cela va réduire notre dépendance aux importations de gaz fossiles, et c'est une source de revenus complémentaire, comme je l'ai déjà dit.

Nous avons réfléchi à une compensation du surcoût du passage au gaz renouvelable en payant plutôt les externalités et en récompensant la méthanisation pour ses apports. Nous vous ferons parvenir le rapport.

Les premiers résultats donnent le sentiment que cela va être d'une grande complexité. Il va en effet falloir étudier chaque externalité, voir ce qu'elle apporte à chaque niveau et les mesurer toutes apparaît assez complexe.

Nous pensons que le soutien budgétaire essentiellement conçu dans une logique de couverture des coûts reste la solution la plus simple.

Nous nous dirigeons à présent vers un nouveau cap en matière de méthanisation. Les filières gagnent en maturité. Cela s'accompagne de gains de compétitivité - et c'est tant mieux.

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