Or ces données sont pseudonymisées et non anonymisées, ce qui permet sous certaines conditions d’en retrouver les détenteurs.
De plus, ce pass laisse transparaître une obligation vaccinale, car, bien que les résultats de tests PCR restent admis, ces derniers ne sont pas gratuits. En France, ils représentent un coût pour la sécurité sociale, que vous jugez, par ailleurs, exsangue. Dans la quasi-totalité des pays européens voisins, ils sont payants et coûtent très cher. Ce pass vient donc limiter encore davantage notre liberté d’aller et venir, et non la garantir.
Toutes ces vérités doivent être rétablies. Par exemple, la crise que nous vivons est-elle une crise sanitaire à proprement parler, ou bien une crise de notre système hospitalier et de santé qui n’a pas les moyens de faire face à la pandémie ? En quoi l’exceptionnalité serait-elle la réponse à l’incurie assumée des politiques publiques de santé qui ont incontestablement aggravé la crise actuelle ? Voilà ce que se demande même le syndicat de la magistrature !
Cette manière de gouverner par des mesures sécuritaires et non pour la santé publique pose problème. Le confinement a servi non pas à freiner la propagation de l’épidémie, mais plutôt à alléger la pression hospitalière, car nous avons fermé trop de lits pour des raisons managériales, explique Marie-Laure Basilien-Gainche, professeur de droit public à l’Université Jean-Moulin Lyon 3, et spécialiste des états d’exception : « On s’est privé de moyens pour lutter contre cette épidémie. Pourquoi ne pas avoir investi massivement dans l’hôpital public ? Lorsqu’on n’emploie pas les bons moyens, on ne peut pas obtenir les bons résultats », conclut-elle.
Le 31 décembre 2021, les Français auront passé plus de vingt et un mois sous ce régime ou sous celui de sortie de l’état d’urgence sanitaire. Comme pour l’état d’urgence sécuritaire, décrété au lendemain des attentats de novembre 2015 et resté en vigueur jusqu’au mois d’octobre 2017, la notion d’urgence semble avoir perdu tout son sens et laisse place à un mode de gestion habituel de la société.
L’une des spécificités de l’état d’urgence sanitaire est d’avoir justifié des mesures encore plus restrictives qu’en matière sécuritaire. Au fil des mesures prises, la balance entre libertés publiques et protection de la santé publique n’est plus simplement en déséquilibre : elle est renversée.
Dans ce cadre, il est absolument nécessaire de laisser le Parlement légiférer. Vous ne l’avez même pas accepté pour le couvre-feu. Plutôt que de passer des semaines et des mois sur le séparatisme et la sécurité globale, le Parlement aurait pu se consacrer à la santé publique et au système hospitalier de notre pays.
Si nous en sommes là, c’est parce qu’il y a eu une énorme défaillance sur le vaccin et sur la stratégie vaccinale. Cette gestion approximative et autoritaire de la crise sanitaire n’a que trop duré : nous demanderons pour notre part que tout ce régime exorbitant du droit commun cesse au 30 juin.
Mes chers collègues, le chapitre sur l’état d’urgence sanitaire introduit dans notre code de la santé publique en mars 2020 donne encore au Gouvernement la possibilité de décréter l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 31 décembre 2021 : qu’il s’en saisisse si la situation l’exige, et qu’il se représente devant nous ! Sinon, monsieur le ministre, nous serons à votre disposition pour débattre d’un véritable projet de sortie de crise. Celui-ci n’en est pas un.
Les Français ont trop pâti de la situation qui dure depuis plus d’un an ; ils ne doivent plus endurer davantage les conséquences de la contradiction d’un gouvernement qui témoigne, dans le même temps, d’une toute-puissance décisionnelle et d’une incertitude inhérente au sujet qui nous occupe.
Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, le groupe CRCE vous invite à rejeter ce texte : tel est l’objet de cette motion tendant à opposer la question préalable.