Intervention de Odette Terrade

Réunion du 3 juillet 2008 à 15h00
Modernisation de l'économie — Article 37 bis

Photo de Odette TerradeOdette Terrade :

La chaîne TF1 s’est d’ailleurs attaché les services de M. Laurent Solly, qui fut un temps collègue de travail de M. Lefebvre, au cabinet de Nicolas Sarkozy, place Beauvau. M. Lefebvre est donc très au fait des questions liées à l’audiovisuel !

Cet amendement, devenu l’article 37 bis du projet de loi, modifie le premier alinéa du I de l’article 39 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, dite loi Léotard, en assouplissant les règles anti-concentration dans le secteur de la télévision.

L’article 39 de la loi du 30 septembre 1986 dispose ceci : « Une même personne physique ou morale agissant seule ou de concert ne peut détenir, directement ou indirectement, plus de 49 % du capital ou des droits de vote d’une société titulaire d’une autorisation relative à un service national de télévision diffusé par voie hertzienne terrestre dont l’audience moyenne annuelle par un réseau de communications électroniques au sens du 2° de l’article L. 32 du code des postes et des communications électroniques, tant en mode analogique qu’en mode numérique, dépasse 2, 5 % de l’audience totale des services de télévision. »

Lors de l’adoption du régime juridique de la TNT, défini par la loi du 1er août 2000 modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, cette disposition a été étendue aux chaînes de la TNT.

L’article 37 bis modifie, pour les chaînes de la TNT, non pas le taux concernant la part de capital – la manœuvre aurait été trop grossière –, mais le taux d’audience totale, relevé de 2, 5 % à 8 %. Avec un tel taux, la règle anti-concentration a désormais peu de chance de se déclencher un jour s’agissant de la TNT ! Je précise que votre majorité, alors dans l’opposition, s’était opposée à cette TNT lors du vote de la loi du 1er août 2000. Il faut dire que TF1 et M6, mais surtout TF1, avaient œuvré très activement contre son développement, ne croyant pas, à l’époque, dans ce modèle de télévision !

En huit ans, les choses ont bien changé. Précisons que les opposants d’hier, TF1 comme M6, ont investi dans la TNT. La première détient 50 % de TMC, la seconde 100 % de W9. La TNT a peu à peu trouvé son public, et d’autres groupes, comme Bolloré, qui détient 100 % de Direct 8, ou Lagardère, propriétaire à 100 % de Virgin 17 et à 66 % de Gulli, leur ont emboîté le pas. Alors, pourquoi ce changement radical ?

À vous entendre aujourd’hui, ce changement de taux d’audience serait « vital pour soutenir le développement de la TNT ». Pourtant, les chaînes de la TNT ont très bien réussi à se développer avec l’ancien seuil.

Mme la ministre, qui a soutenu cet amendement, nous parle de « modèle économique fragile ». Ne l’était-il pas au moment de son lancement en 2000 ? Cette fragilité exigerait que ces chaînes – je cite toujours Mme la ministre – « soient soutenues par des groupes à l’assise financière solide ». Or ces mêmes groupes avaient tout fait pour que la TNT ne sorte jamais des cartons !

Aujourd’hui, les audiences sont en constante progression : 2, 1 % de part d’audience au mois de mai pour TMC, filiale de TF1, et 1, 9 % pour W9, propriété de M6. Ces majors ne veulent pas partager le gâteau et s’inquiètent donc de l’obligation d’ouverture du capital que la loi allait leur imposer. Heureusement, le projet de loi de modernisation de l’économie, voiture-balai de cette session extraordinaire, passe par là… Il est trop facile de changer les règles du jeu en fonction des intérêts et des convenances de certains !

Le seuil des 2, 5 % d’audience totale avait un objectif : protéger le pluralisme et lutter contre la concentration à la télévision. Cet objectif est plus que jamais d’actualité aujourd’hui, alors que la question de la trop grande concentration des médias se pose avec autant d’acuité et à l’heure où l’audiovisuel public est menacé d’asphyxie par la suppression de la publicité. Cette suppression est orchestrée par le Président de la République au profit des chaînes privées, auxquelles ce gouvernement a également décidé d’accorder une deuxième coupure publicitaire. Trop de cadeaux !

Notre amendement vise donc à la suppression de cet article, et nous demandons qu’il fasse l’objet d’un vote par scrutin public.

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