La séance, suspendue à treize heures, est reprise à quinze heures.
La séance est reprise.
Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale après déclaration d’urgence, de modernisation de l’économie (nos 398 et 413).
Mes chers collègues, je vous rappelle que, dans la suite de la discussion des articles, nous avons décidé d’examiner en priorité les amendements portant sur l’article 31 jusqu’aux articles additionnels après l’article 31 ter et les amendements portant sur l’article 36 jusqu’à l’article additionnel après l’article 42 octies.
TITRE III
priorité
CHAPITRE II
I. - L'article 81 B du code général des impôts est applicable aux personnes dont la prise de fonctions en France est intervenue avant le 1er janvier 2008.
II. - Après l'article 81 B du code général des impôts, il est inséré un article 81 C ainsi rédigé :
« Art. 81 C. - I. - 1. Les salariés et les personnes mentionnées aux 1°, 2° et 3° du b de l'article 80 ter appelés de l'étranger à occuper un emploi dans une entreprise établie en France pendant une période limitée ne sont pas soumis à l'impôt à raison des éléments de leur rémunération directement liés à cette situation ou, sur option, et pour les salariés et personnes autres que ceux appelés par une entreprise établie dans un autre État, à hauteur de 30 % de leur rémunération.
« Le premier alinéa est applicable sous réserve que les salariés et personnes concernés n'aient pas été fiscalement domiciliés en France au cours des cinq années civiles précédant celle de leur prise de fonctions et, jusqu'au 31 décembre de la cinquième année civile suivant celle de cette prise de fonctions, au titre des années à raison desquelles ils sont fiscalement domiciliés en France au sens des a et b du 1 de l'article 4 B.
« Si la part de la rémunération soumise à l'impôt sur le revenu en application du présent 1 est inférieure à la rémunération versée au titre de fonctions analogues dans l'entreprise ou, à défaut, dans des entreprises similaires établies en France, la différence est réintégrée dans les bases imposables de l'intéressé.
« 2. La fraction de la rémunération correspondant à l'activité exercée à l'étranger pendant la durée définie au 1 est exonérée si les séjours réalisés à l'étranger sont effectués dans l'intérêt direct et exclusif de l'employeur.
« 3. Sur option des salariés et personnes mentionnés au 1, soit la fraction de la rémunération exonérée conformément aux 1 et 2 est limitée à 50 % de la rémunération totale, soit la fraction de la rémunération exonérée conformément au 2 est limitée à 20 % de la rémunération imposable résultant du 1.
« 4. Les salariés et personnes mentionnés au présent I ne peuvent pas se prévaloir des dispositions de l'article 81 A.
« II. - Les salariés et personnes mentionnés au I sont, pendant la durée où ils bénéficient des dispositions du même I, exonérés d'impôt à hauteur de 50 % du montant des revenus suivants :
« a) Revenus de capitaux mobiliers dont le paiement est assuré par une personne établie hors de France dans un État ou territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale ;
« b) Produits mentionnés aux 2° et 3° du 2 de l'article 92 dont le paiement est effectué par une personne établie hors de France dans un État ou territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale ;
« c) Gains réalisés à l'occasion de la cession de valeurs mobilières et de droits sociaux, lorsque le dépositaire des titres ou, à défaut, la société dont les titres sont cédés, est établi hors de France dans un État ou territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale. Corrélativement, les moins-values réalisées lors de la cession de ces titres sont constatées à hauteur de 50 % de leur montant. »
III. - Dans le 2°-0 ter de l'article 83 du même code, après la référence : « I de l'article 81 B », sont insérés les mots et la référence : « ou au 1 du I de l'article 81 C ».
IV. - Dans le troisième alinéa du 1 de l'article 170 et le c du 1° du IV de l'article 1417 du même code, les références : « 81 A et 81 B » sont remplacées par les références : « 81 A à 81 C ».
V. - Après le 4 de l'article 1600-0 H du même code, il est inséré un 4 bis ainsi rédigé :
« 4 bis. Les revenus, produits et gains exonérés d'impôt sur le revenu en application du II de l'article 81 C ; ».
VI. - Après le 8 du I de l'article 1600-0 J du même code, il est inséré un 8 bis ainsi rédigé :
« 8 bis. Les revenus, produits et gains non pris en compte pour le calcul du prélèvement forfaitaire libératoire prévu aux articles 117 quater et 125 A, en application du II de l'article 81 C, lors de leur perception ; ».
VII. - L'article 1649-0 A du même code est ainsi modifié :
1° Le c du 4 est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsqu'un contribuable précédemment domicilié à l'étranger transfère son domicile en France, les revenus réalisés hors de France et exonérés d'impôt sur le revenu ne sont pris en compte pour la détermination du droit à restitution que du jour de ce transfert. » ;
2° Le 5 est complété par un d ainsi rédigé :
« d) Des impositions équivalentes à celles mentionnées aux a, e et f du 2 lorsque celles-ci ont été payées à l'étranger. »
VIII. - La seconde phrase du II bis de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale est complétée par les mots : « ainsi que pour les revenus exonérés en application du II de l'article 81 C du même code ».
IX. - Après le 8° du II de l'article L. 136-7 du même code, il est inséré un 8° bis ainsi rédigé :
« 8° bis Les revenus, produits et gains non pris en compte pour le calcul du prélèvement forfaitaire libératoire prévu aux articles 117 quater et 125 A du code général des impôts, en application du II de l'article 81 C du même code, lors de leur perception ; ».
X. - Les II à VI et les VIII et IX sont applicables aux personnes dont la prise de fonctions en France est intervenue à compter du 1er janvier 2008. Le VII s'applique pour la détermination du plafonnement des impositions afférentes aux revenus réalisés à compter de l'année 2006.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce chapitre, qui a trait à l’amélioration de l’attractivité de notre territoire, est essentiel et va sûrement nous permettre de travailler plus efficacement.
À cet égard, j’avais mentionné, lors de la discussion générale, la difficulté d’obtention des visas. Or l’attractivité de notre territoire commence à la porte de nos ambassades et de nos consulats.
Je veux donc profiter du début de la discussion relative à l’attractivité pour rappeler que les dispositions qui sont actuellement en vigueur sont absolument contraires à l’efficacité et au bon sens. En effet, les diplomates, les agents commerciaux, les membres des chambres de commerce de nos partenaires sont obligés d’aller déposer leurs empreintes digitales puis d’attendre une dizaine de jours pour obtenir un visa. C’est contraire à la réactivité nécessaire aux affaires, contraire à la libre circulation, aussi.
Je n’ignore pas les problèmes actuels et je sais que, de surcroît, les dispositions en cause sont d’ordre européen. Cependant, l’attractivité de notre territoire va aussi dépendre de l’accueil que nous réserverons à nos amis étrangers qui veulent venir en France.
Il en est de même de l’accueil des étudiants étrangers, car on ne pourra pas rendre ce territoire attractif si cet accueil n’est pas amélioré. En effet, quand ces étudiants s’en retournent dans leur pays, c’est le plus souvent après avoir tissé avec la France des liens indéfectibles. Or, si nous manquons les étudiants d’aujourd’hui, nous manquons les décideurs de demain. Et que d’occasions déjà gâchées !
Mes chers collègues, monsieur le secrétaire d’État, quelles que soient les mesures fiscales ou autres que nous pourrons prendre, rien ne changera si nous n’améliorons pas l’accueil des étudiants et des personnalités étrangères.
De ce point de vue, la politique des visas me semble essentielle.
À l’heure actuelle, je vous le rappelle, ne sont dispensés de visa que les présidents des États et les Premiers ministres. Autrement dit, si, par exemple, Sheikha Loubna al-Qassemi, ministre de l’économie des Émirats Arabes Unis, …
… veut séjourner à Paris avec une délégation, en dehors de tout voyage officiel, elle est obligée de se rendre à l’ambassade de France afin d’y déposer ses empreintes digitales, puis d’attendre dix jours avant d’obtenir un visa. C’est absolument inadmissible !
Il ne s’agit pas ici de ces « cartes de séjour gold »dont Bariza Khiari va parler ; il s’agit de permettre à des agents économiques, qui sont autant de facteurs d’attractivité pour notre territoire, de venir en France pour y faire des affaires, pour apporter la plus-value que nous attendons d’eux et pour favoriser les échanges entre nos deux pays.
L’article 31 concerne les impatriés fiscaux. Ce terme désigne les salariés, français ou étrangers, venus travailler en France à la demande d’une entreprise installée à l’étranger et qui n’ont pas été domiciliés en France les cinq années précédant leur prise de fonctions.
Autrement dit, il vise tous les cadres de la banque et de la finance et, plus précisément, tous les anciens élèves du DEA de Mme El Karoui formés aux mathématiques financières et partis travailler à la City, tous ceux qui ont pour mission de créer des produits financiers de plus en plus sophistiqués, à l’instar de ceux qui ont contribué à la crise financière actuelle.
On nous dit que cet article vise à améliorer l’attractivité de la France et de la place financière parisienne. Soit !
En revanche, nous contestons vivement le diagnostic de certains esprits chagrins sur l’attractivité française. Selon le dernier rapport du cabinet Ernst&Young – cabinet peu suspect de gauchisme, qui, depuis cinq ans, publie un rapport annuel sur l’attractivité européenne –, la France est depuis plusieurs années déjà la deuxième destination des investissements directs à l’étranger en Europe. Elle se situe un peu derrière la Grande-Bretagne, certes, mais loin devant l’Allemagne. D’un point de vue international, elle serait, si je me rapporte aux propos tenus par Mme le ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi à l'Assemblée nationale, la troisième destination mondiale en investissements directs.
Ces chiffres traduisent des faits tangibles et mesurables.
Or le Gouvernement met en avant, non pas les faits, mais la perception de l’ensemble des investisseurs. Si ces derniers agissaient conformément à cette perception, alors, la France se trouverait en bas de l’échelle, et non pas au deuxième rang européen !
Faut-il en conclure que ces dirigeants sont schizophrènes ou encore que les entreprises étrangères venues s’installer en France ont eu un comportement irrationnel pour choisir un pays aussi fiscalement « désincitatif »? Faut-il en conclure, au contraire, que ces entreprises ont fait le choix rationnel d’un pays attractif à d’autres égards ?
Je m’en remets aux faits : si ces entreprises continuent à investir en France en argent, en personnel, en projets, c’est sans doute qu’elles y trouvent un intérêt majeur.
Monsieur le secrétaire d'État, citons, par exemple, le système de soins, que vous êtes en train d’affaiblir, la qualité de notre système éducatif, que vous fragilisez, la richesse, du point de vue de la diversité, de la recherche française, que vous démantelez, enfin, la paix sociale, que votre politique ultralibérale met à mal.
Les entreprises étrangères et les salariés hautement qualifiés viennent chercher en France l’excellence qu’ils ne trouvent plus dans d’autres pays, notamment anglo-saxons : excellence des services publics, du système de santé, du maillage territorial, des infrastructures. Il me semble donc logique qu’ils y contribuent, au même titre que les entreprises et les contribuables français. Il serait trop facile de profiter à moindre frais, comme vous le proposez, des efforts fournis par la Nation.
Alors même que vous vous employez, méthodiquement, laborieusement, à expulser des personnes salariées, mais sans papiers, cotisant, mais sans droits, vous faites des ponts d’or à certains, au seul motif de la compétitivité.
Le groupe socialiste est naturellement favorable aux politiques de compétitivité, mais pas quand elles prennent place dans un contexte de chasse aux plus pauvres et aux plus faibles.
Avec l’article 31, monsieur le secrétaire d'État, vous dévoilez tout le cynisme de votre conception de l’immigration choisie.
En élargissant le champ des bénéficiaires, en introduisant un nouveau dispositif d’exonération de la moitié des revenus perçus hors de France, vous renforcez un dispositif dont le coût n’est pas évalué et qui, d’après les études dont nous disposons, n’est pas nécessaire.
Après avoir distribué 15 milliards d’euros aux plus riches, vous créez une nouvelle niche fiscale au bénéfice exclusif des acteurs de la spéculation financière et au détriment de nos finances publiques, et ce alors que vous voulez réduire les niches fiscales. C’est incohérent !
Je partage l’indignation de Mme Goulet pour ce qui concerne les visas. Il faudrait effectivement prendre des mesures en la matière. Mais, lors de l’examen de l’article 32, j’évoquerai cette fameuse carte de séjour gold, ou, pourquoi pas ? platinum.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.
Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’état, mes chers collègues, je souhaite expliciter, en quelques mots, l’analyse et la position de la commission spéciale sur l’article 31, ce qui me permettra d’être moins disert lors de la présentation de chaque amendement.
Le régime proposé constitue un élément important du dispositif d’attractivité qui doit être mis en place. Le Gouvernement, qui est à l’initiative de cette proposition, s’est probablement, pour une large part, inspiré des travaux réalisés par le Sénat, l’an dernier, dans le cadre de la mission commune d’information sur la notion de centre de décision économique et les conséquences qui s’attachent en ce domaine à l’attractivité du territoire national ; la Haute Assemblée avait alors formulé des propositions s’inspirant elles-mêmes du modèle britannique.
Nos deux collègues qui viennent d’intervenir ont évoqué plusieurs aspects de la problématique.
Comme Nathalie Goulet, je crois que les questions administratives doivent être traitées avec tact lorsque l’image de la France et sa capacité d’attirer des investissements et des transactions économiques sont en jeu. Il faut là faire preuve de beaucoup d’empirisme. J’avais cru comprendre que telle était bien l’approche du ministre Brice Hortefeux et que les adaptations nécessaires seraient entreprises. Monsieur le secrétaire d’État, j’aimerais que vous puissiez nous rassurer à ce sujet.
Cela étant, lorsque l’on se rend dans les postes diplomatiques, on voit la réalité des problèmes et l’on a alors l’impression qu’il y a une certaine distance entre les assurances données ici et la réalité sur le terrain.
S’agissant des régimes sociaux, la commission spéciale estime que des personnes qui ont déjà une couverture sociale n’ont pas à cotiser à nouveau ; en contrepartie, bien entendu, elles ne doivent pas avoir accès aux prestations offertes par notre pays. Je me permets de souligner ce point pour que pas un seul malentendu ne subsiste avec Mme Khiari et les membres du groupe socialiste.
Si des étrangers sont dispensés de contribuer aux régimes sociaux, c’est parce qu’ils disposent déjà d’une garantie par ailleurs et qu’ils ne bénéficieront pas, sur le territoire français, des prestations financées avec les contributions des autres.
Il faut être très clair sur le principe que nous souhaitons voir appliquer.
Monsieur le secrétaire d’État, le dispositif que vous préconisez pose, selon moi, un problème, car, comme la pratique des visas tout à l’heure, il me paraît être un peu en décalage par rapport aux affirmations.
Attirer des cadres est une bonne chose, mais ce dispositif est trop formaté pour les cadres et les salariés.
Si nous voulons rendre efficace le dispositif complexe et très artificiel que vous proposez – pour un profit bien maigre en termes d’apport d’activités si nous l’adoptions tel quel –, et attirer dans notre pays la richesse créée par les non-résidents fiscaux, il nous faut prévoir deux mesures importantes.
Il faut, d’une part, étendre le dispositif aux non-salariés, et ce dans le cadre d’agréments permettant de vérifier que ces personnes sont susceptibles d’apporter un « plus » à l’économie nationale, et, d’autre part, point important, traiter l’impôt sur le patrimoine pari passu avec l’impôt sur le revenu en termes de territorialité de l’assiette.
Le dispositif que vous proposez, monsieur le secrétaire d’État, va dans le bon sens, mais je regrette que les bonnes intentions du Gouvernement soient quelque peu récupérées par une vision restrictive de l’administration fiscale.
Pour notre part, au sein de la commission spéciale, nous nous sommes efforcés de revenir à l’esprit des mesures initialement annoncées par Mme Lagarde, mesures auxquelles votre dispositif ne me semble pas complètement fidèle.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 473, présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Bernard Vera.
L’article 31 du projet de loi porte sur le traitement de la situation fiscale des cadres dirigeants d’entreprises étrangères d’origine extracommunautaire.
La question des impatriés a fait l’objet, dans une loi de finances rectificative récente, de dispositions spécifiques conduisant à l’adoption de l’article 81 B du code général des impôts.
Nous avions souligné, lors de la discussion du collectif budgétaire de la fin 2005, à quel point cette mesure nous paraissait discutable, et nous avions signifié, par le dépôt d’un amendement de suppression, notre opposition à l’application d’un système sérieusement dérogatoire au droit commun. Nous sommes donc nourris par l’expérience.
Il s’agit de savoir quelles applications ce régime dérogatoire a pu trouver dans la pratique.
S’agissant des déclarations de revenus de 2006, première année d’application du dispositif, les dossiers comportant ces dispositions sont peu nombreux. On compte, en effet, 7 151 dossiers d’impatriés, auxquels s’ajoutent 233 autres dossiers déposés par les conjoints.
Le montant de salaires ainsi exonéré est loin d’être négligeable, si l’on rapporte ce montant au nombre de dossiers concernés, puisque l’on obtient pratiquement le chiffre de 160 millions d’euros de salaires exonérés pour les dossiers principaux, soit plus de 22 300 euros par contribuable. Pour le cas des dossiers présentés au titre des revenus des conjoints, on se situe sur une moyenne d’exonération de plus de 26 200 euros.
Comme chacun le sait, ces sommes ne constituent pas, en l’état de l’article 81 B, la totalité des revenus salariaux concernés, mais seulement une partie. Nous sommes donc assez loin de la situation spécifique des revenus salariés dans notre pays, où les moyennes de revenus imposables déclarés dans la catégorie des traitements et salaires est nettement inférieure, et ce d’autant plus que les revenus exonérés ont la caractéristique de ne pas représenter la totalité de la rémunération annuelle des personnes concernées.
Il est donc patent que l’article 31 constitue un avantage fiscal important, strictement dérogatoire au droit commun, que nous avions dénoncé lors de son adoption dans le collectif budgétaire de 2003 et lors de son perfectionnement dans celui de 2005.
Nous ne pouvons donc que proposer la suppression pure et simple de cet article, qui prolonge et raffermit ce dispositif fiscal.
L’amendement n° 14, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. - Après le premier alinéa du 1 du I du texte proposé par le II de cet article pour l'article 81 C du code général des impôts, insérer quatre alinéas ainsi rédigés :
« Sur agrément délivré dans les conditions prévues à l'article 1649 nonies, ne sont également pas soumises à l'impôt, à hauteur de 30 % de leur rémunération, les personnes non salariées remplissant les conditions suivantes :
« a) Apporter une contribution économique exceptionnelle à la France au sens de l'article L. 314-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
« b) Ou exercer à titre principal une activité figurant sur une liste fixée par décret en raison du caractère spécifique des compétences requises ou de difficultés de recrutement ;
« c) Ou souscrire, à compter du 1er janvier 2008 et dans les conditions définies à l'article 885 I ter, au capital de sociétés répondant aux conditions définies audit article, pour un montant excédant la limite inférieure de la première tranche du barème de l'impôt de solidarité sur la fortune, et prendre l'engagement de conserver les titres souscrits pendant la durée de l'agrément et, en cas de cession, de réinvestir le produit de la cession dans des titres de même nature.
II. - En conséquence, rédiger comme suit le début du deuxième alinéa du 1 du I du même texte :
Les alinéas précédents sont applicables...
III. - Pour compenser la perte de recettes résultant des I et II ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes pour l'État résultant de l'inclusion des non-salariés dans le nouveau régime fiscal des impatriés est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n°473.
Monsieur le président, je présenterai en même temps les amendements n° 12 rectifié et 13.
L’amendement 14 vise à étendre, sous certaines conditions, le dispositif gouvernemental aux non-salariés.
Comme je l’ai déjà indiqué, il s’agit d’un régime d’agrément délivré dans les conditions de droit commun. Ce nouveau régime doit bénéficier aux non-salariés disposant de compétences spécifiques ou d’un patrimoine élevé, qui remplissent l’une ou l’autre des trois conditions suivantes.
La première condition, qui s’articule avec le nouveau dispositif introduit à l’article 33 du présent projet de loi, est l’apport d’une contribution économique exceptionnelle à la France. Cette condition est directement liée à la nécessité, soulignée précédemment, d’attirer sur notre territoire des personnes utiles pour notre pays, notamment grâce à la mise en place d’une politique avisée de délivrance des visas et des cartes de séjour.
La deuxième condition est l’exercice d’une activité correspondant à des compétences particulièrement recherchées. En effet, avec le dispositif que vous proposez, monsieur le secrétaire d’État, si le professeur Montagnier, par exemple, voulait revenir en France, il n’aurait aucun intérêt à le faire dans la mesure où il n’est pas salarié !
La troisième condition est la souscription au capital d’une PME française ou européenne d’un montant excédant la première tranche du barème de l’impôt de solidarité sur la fortune, soit 770 000 euros.
Telles sont les contreparties définies par la commission spéciale. Le système est complètement ficelé : il s’agit d’un agrément nominatif, donné par décision ministérielle, sur instruction des services compétents, en échange d’une contribution économique, de compétences particulièrement recherchées, ou de la souscription au capital d’une PME.
Cette proposition est donc particulièrement équilibrée.
Nous souhaitons, ensuite, que le régime de territorialisation de l’impôt s’applique également à l’impôt sur le patrimoine.
Vous ne ferez croire à personne, monsieur le secrétaire d’État, que vous allez attirer en France, comme vous vous le proposez par ce projet de loi, une personne qui risquerait d’être assujettie à l’impôt de solidarité sur la fortune français au titre de l’ensemble des éléments de patrimoine qu’elle possède dans le monde. Personne ne serait intéressé ! La commission spéciale souhaite donc que cette lacune manifeste soit comblée.
L’amendement n° 13 est de pure coordination.
Naturellement, la commission est défavorable à l’amendement de suppression n° 473.
L’amendement n° 12 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. - Après le II de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Le 1° de l'article 885 A du code général des impôts est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Toutefois, les personnes physiques mentionnées à l'alinéa précédent qui n'ont pas été fiscalement domiciliées en France au cours des cinq années civiles précédant celle au cours de laquelle elles ont leur domicile fiscal en France, ne sont imposables qu'à raison de leurs biens situés en France.
« Cette disposition s'applique au titre de chaque année au cours de laquelle le redevable conserve son domicile fiscal en France, et ce jusqu'au 31 décembre de la cinquième année qui suit celle au cours de laquelle le domicile fiscal a été établi en France. »
II. - Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes pour l'État résultant de l'imposition des seuls biens situés en France est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement a été défendu.
L’amendement n° 13, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :
A. - Rédiger comme suit le X de cet article :
X. - Le II, les III à VI, le VIII et le IX sont applicables aux personnes dont la prise de fonctions en France est intervenue à compter du 1er janvier 2008. Le II bis est applicable aux personnes qui établissent leur domicile fiscal en France à compter de la date d'entrée en vigueur de la présente loi. Le VII s'applique pour la détermination du plafonnement des impositions afférentes aux revenus réalisés à compter de l'année 2006.
B. - Pour compenser la perte de recettes résultant du A ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes pour l'État résultant de l'entrée en vigueur de l'imposition des seuls biens situés en France est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement a également été défendu.
Quel est l’avis du Gouvernement sur l’ensemble de ces amendements ?
M. Luc Chatel, secrétaire d’État chargé de l'industrie et de la consommation, porte-parole du Gouvernement. Les sénateurs communistes proposent de supprimer l’article 31. Je n’ai d’ailleurs pas compris s’ils reprochaient à ce dispositif d’être trop efficace ou pas assez !
Sourires
Comme l’a très bien expliqué M. le rapporteur, nous proposons ces dispositions parce qu’un certain nombre d’enquêtes et de rapports nourris, notamment d’origine parlementaire, ont démontré que l’un des éléments déclencheurs de notre attractivité économique permettant, dans le contexte de compétition mondiale que nous connaissons, d’attirer sur notre territoire des centres de décision, était la capacité de faire venir dans notre pays des cadres de haut niveau travaillant au sein de ces grands groupes.
Je peux d’ailleurs témoigner, en tant qu’ancien responsable des ressources humaines d’un grand groupe industriel, de la nécessité de gérer les ressources humaines au niveau mondial et de la difficulté d’attirer des cadres de haut niveau en France, la législation en vigueur dans notre pays n’étant pas avantageuse notamment par rapport à celle de nos voisins européens.
L’installation en France de ces cadres peut être génératrice d’emplois et d’activités.
Nous avons pris un certain nombre de garanties et le dispositif que nous proposons est très encadré, dans la mesure où il est optionnel : soit le supplément de rémunération lié à l’activité exercée en France par les intéressés et la part de leur rémunération se rapportant à leur activité à l’étranger sont exonérés dans la limite de 50 % de la rémunération totale, soit, comme dans le régime actuel, la part de la rémunération liée à l’activité des intéressés à l’étranger est exonérée à hauteur de 20 % de leur rémunération imposable.
Par ailleurs, dans tous les cas, leur revenu passif – les dividendes, les intérêts, les redevances – et les plus-values de cession de valeurs mobilières de source étrangère sont exonérés à hauteur de 50 %.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 473.
Le problème traité dans l’amendement n° 14 est très complexe. Le régime des salariés impatriés concerne avant tout les éléments de leur rémunération directement liés à leur situation. Le texte qui vous est proposé limite l’exonération en fonction du niveau de rémunération normale pratiquée en France pour des fonctions équivalentes.
Vous conviendrez qu’il n’existe pas, pour un travailleur indépendant, de revenus directement liés à sa situation d’impatrié.
En Europe, onze pays ont déjà introduit dans leur législation ce type de dispositifs attractifs visant les salariés impatriés, dispositifs qui sont assez variés.
Un seul pays, l’Italie, a mis en place un système spécifique pour les étrangers qui perçoivent des bénéfices non commerciaux. Comme vous le savez, monsieur le rapporteur, ce dispositif ne concerne pas seulement l’impôt d’État sur le revenu, mais intègre également une exonération de l’impôt perçu par les régions, impôt qui ressemble un peu à notre taxe professionnelle.
Enfin, monsieur le rapporteur, votre proposition entraînerait une rupture d’égalité entre les contribuables. Le fait de réserver un avantage fiscal aux travailleurs indépendants qui s’installent comme résidents en France serait, en effet, discriminatoire, d’une part, par rapport aux travailleurs indépendants non résidents, qui disposent déjà d’une installation fixe d’affaires en France, sans pour autant y résider, et, d’autre part, par rapport aux travailleurs indépendants résidents français, particulièrement ceux qui démarrent leur activité. Or il n’existe aucune différence de situation objective entre ces différents contribuables permettant de justifier une telle discrimination.
Nous sommes prêts, monsieur le rapporteur, à réfléchir à ce problème et à en discuter, mais nous émettons des réserves sur le dispositif proposé dans l’amendement n° 14, et je vous demande de bien vouloir le retirer. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
L’amendement n° 12 rectifié, en revanche, comporte des avancées importantes et significatives, que le Gouvernement voit d’un bon œil.
J’émets donc un avis favorable sur cet amendement, ainsi que sur l’amendement de coordination n° 13.
... mais je souhaite obtenir une précision.
La France a signé un certain nombre de conventions internationales tendant à éviter les doubles impositions. Dans quelle mesure les dispositions que nous nous apprêtons à voter entrent-elles dans le cadre des conventions déjà conclues ?
En termes de réciprocité, à quoi faut-il nous attendre ? Ou alors sommes-nous en face de dispositions uniquement franco-françaises ?
Pouvez-vous apaiser les inquiétudes de Mme Goulet, monsieur le rapporteur ?
Sourires
Les dispositions que nous examinons, qu’elles émanent du Gouvernement ou de la commission spéciale, sont, par exemple, conformes à la convention fiscale franco-britannique, qui a été récemment renégociée.
Le point que vous soulevez a bien entendu été examiné par nos collaborateurs, en liaison avec ceux de Mme la ministre – nous sommes heureux de la saluer à cet instant –, non pas seulement au regard des relations franco-britanniques, mais de manière plus générale.
L'amendement n'est pas adopté.
M. le secrétaire d'État a soufflé le chaud et le froid. (Sourires.) Il a reconnu que le problème existait et qu’il fallait travailler pour y trouver une solution.
Selon moi, la meilleure façon d’y travailler, c’est d’adopter cet amendement de sorte que le dispositif soit dans la navette.
Pour ce qui est de l’égalité devant l’impôt, notre amendement ne devrait pas poser de problème, dès lors qu’il s’agit d’un régime d’agrément et que sont prévus dans le texte un équilibre, une appréciation portée sur le domaine d’activité et sur les compétences, et, si ces conditions n’étaient pas remplies, la nécessité pour l’impatrié non salarié d’investir dans le capital d’une petite et moyenne entreprise, à un niveau qui n’est pas symbolique, puisque le seuil indiqué est de 770 000 euros.
Je vous apporte un dernier argument, monsieur le secrétaire d'État, qui pourra de surcroît nourrir nos échanges à venir.
Dans ce texte, vous avez raisonné par rapport à la situation des cadres des groupes bancaires. C’était sans doute la première question posée, qui avait notamment fait l’objet de discussions au sein du Haut comité de place que Mme la ministre réunit opportunément à échéances régulières.
La notion de prime d’impatriation – un supplément de revenu issu de l’arrivée en France – est relativement simple à cerner dans le cas d’une personne déplacée, au sein d’un groupe multinational, de la ville A, située hors de nos frontières, à la ville B, en France, mais, hormis ce cas de figure, s’il s’agit d’un recrutement, comment fait-on apparaître cette prime d’impatriation ? Comment la calcule-t-on ? Je ne le sais pas. Et quid du détenteur de capitaux susceptible de choisir sa résidence fiscale en France pour y investir et y mener des activités non salariées ? Ce cas est complètement en dehors de votre grille d’analyse et du mode de raisonnement habituel de vos services.
J’ai entendu parler, tout à l’heure, de « rémunération normale » : comment, mes chers collègues, l’administration peut-elle imaginer définir pour chaque fonction une « rémunération normale » ?
Je me permets de vous faire part de ma légère incompréhension
Sourires
Raisonner en termes de rémunération normale et vouloir activer l’esprit d’entreprise est tout de même, madame la ministre, un peu antinomique. En tout cas, ces deux notions sont assez décalées l’une par rapport à l’autre.
Mme la ministre sourit.
Je comprends bien qu’il va falloir progresser dans la mise au point de ce dispositif. Nous ferions un pas en ce sens si, au moins, nous inscrivions la discussion de ce problème à l’ordre du jour de la commission mixte paritaire. Nous participerions ainsi à une prise de conscience utile.
C'est pourquoi je maintiens cet amendement.
Il s’agit, par cet article, d’alléger certaines contraintes de mise en œuvre du dispositif d’exonération, et singulièrement celles qui pèsent sur les déplacements professionnels associés à l’exercice de la mobilité géographique.
On peut se demander, à l’égard du peu de succès des dispositions en vigueur ce qui est exactement visé. Veut-on, en participant à la course au moins-disant fiscal que la concurrence européenne nous mène récupérer, au travers d’un nombre plus important de dossiers fiscaux, ce que l’on perdrait en assiette, ou cherche-t-on, de manière privilégiée, à accueillir dans notre pays de nouveaux cadres dirigeants étrangers, en général extracommunautaires ?
En tout cas, ce qui est sûr, c’est que la notion de « travailleur étranger en France » va finir par recouvrir des réalités fort différentes. Pour 10 000 ou 20 000 dossiers de cadres dirigeants d’entreprises étrangères, combien y a-t-il de milliers de salariés venus des pays du Sud qui continuent de subir les règles de la fiscalité française, comme tous les autres salariés de ce pays ?
Si le Gouvernement souhaite que les compétences et les talents s’expriment, peut-être pourrait-il alors donner droit aux milliers de salariés sans papiers qui font « tourner » nos usines, nos chantiers, nos restaurants et nos commerces, et qui participent, avec leurs bras, avec leur dévouement, aussi, à la richesse économique de notre pays ?
Vivre dans une économie ouverte ne signifie pas céder à la manie des cadeaux fiscaux réservés à une toute petite élite de ménages et de personnes, fussent-ils des cadres compétents.
Nous ne voterons donc aucun des amendements de la commission portant sur cet article 31, attendu qu’ils accusent encore plus les défauts d’un régime des impatriés déjà très dérogatoire.
L'amendement est adopté.
Avant de mettre aux voix les amendements n° 12 rectifié et 13, je me dois d’interroger le Gouvernement : monsieur le secrétaire d’État, acceptez-vous de lever le gage ?
Cela ne coûte rien, puisque ce sont des gens qui ne sont pas encore là !
Il s’agit donc de l'amendement n° 12 rectifié bis et de l’amendement n° 13 rectifié.
Je mets aux voix l'amendement n° 12 rectifié bis.
L'amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l'article 31.
Je précise, afin que nous nous comprenions bien, que le groupe socialiste n’a pas d’opposition de principe quant à la nécessité d’attirer sur le territoire français les cadres de haut niveau afin qu’ils y déploient leurs talents.
Toute mesure s’apprécie selon le contexte dans lequel elle intervient. C’est précisément le contexte actuel qui nous conduit à voter contre l’article 31.
Tout d’abord, nos finances publiques ne sont pas très florissantes, c’est le moins que l’on puisse dire. Or le coût des exonérations déjà très favorables accordées aux impatriés est estimé à 40 millions d'euros.
Quant à l’effet des nouvelles mesures proposées dans l’article 31, nous ne le connaissons pas, mais il sera forcément supérieur au coût actuel.
Nous n’avons eu, en commission, aucune possibilité d’apprécier la part du coût et la part de l’avantage espéré, aucune indication quant aux effets incitatifs attendus.
J’ai noté aussi que l’entrée en vigueur de ce nouveau dispositif aurait lieu au 1er janvier 2008, soit de manière rétroactive. Elle pèse donc d’ores et déjà sur les finances de l’année 2008.
Par ailleurs, cette mesure, censée être propice à un renforcement de l’attractivité, vise en fait exclusivement à faire droit aux revendications de la place financière de Paris, au moment où sa concurrente, Londres, licencie, compte tenu de la crise financière, crise qui atteint toutes les places mondiales, surtout américaines et européennes, la nôtre y compris. Le Premier ministre britannique, M. Gordon Brown, écorne sérieusement le régime du que le Gouvernement veut précisément imiter avec cet article 31.
Il est clairement indiqué dans le rapport écrit qu’il s’agit de profiter « d’un appel d’air ». Du reste, Mme la ministre, devant le Haut comité de place, l’a confirmé non moins clairement : « notre objectif est de rendre nos activités aussi bienvenues à Paris que dans d’autres places, notamment Londres. » Mes chers collègues, il s’agit d’attirer des financiers, pas des ingénieurs, pas des chercheurs ou encore des jeunes étudiants prometteurs.
Peut-être le Gouvernement envisage-t-il la création– on y arrivera forcément, au rythme où vont les choses depuis que la droite est au pouvoir – d’un paradis fiscal du type de celui des îles anglo-normandes, où sont domiciliées 130 000 personnes ?
Notre littoral est agrémenté de quelques îles ; pourquoi l’île d’Yeu, notamment, ne jouerait-elle pas ce rôle ? (Sourires.)
Monsieur le rapporteur, souvenez-vous : lorsque nous avions conduit ensemble la mission commune d’information sur la notion de centre de décision économique, nous vous avions déjà fait remarquer que la fiscalité sur les personnes physiques et les personnes morales n’était citée dans tous les baromètres qu’en sixième position dans la hiérarchie des avantages attractifs, bien avant les conditions d’accès à la culture, à l’éducation et autres.
Enfin, l’avantage accordé devrait être plafonné, mais ni en commission ni dans le rapport nous n’avons été éclairés sur ce plafond, qui reste très flou.
Quand on fait le compte de toutes les mesures introduites depuis 2002 par les gouvernements successifs, on s’aperçoit que cela fait beaucoup, beaucoup trop dans la conjoncture actuelle.
Paris est dans une position très confortable, de ce point de vue, dans la hiérarchie mondiale ; elle n’est pas une citadelle assiégée, comme on voudrait nous le faire croire. J’ai cru comprendre que, concernant la Capitale, Mme la ministre nourrissait quelque ambition politique. Elle a raison, mais elle ne doit pas oublier que la population de Paris n’est pas composée que de traders et de professionnels du CAC 40 !
Lors de l’adoption de la disposition relative au régime fiscal des impatriés, nous nous étions élevés contre une mesure pour le moins surprenante, surtout dans un contexte de déficit permanent du budget de l’État.
Je me permets de rappeler nos propos : « Une telle orientation n’est pas réellement susceptible de recueillir notre assentiment. En effet, selon les conclusions du plus récent rapport rendu sur le sujet, 3 000 cadres seront concernés par le dispositif que nous sommes invités à adopter. Certains estiment que les coûts salariaux atteignent dans notre pays un niveau trop élevé, niveau lié, soit dit en passant, à l’importance des prélèvements sociaux plus que de ceux qui découlent de la fiscalité des revenus.
« En fait, la réalité, comme souvent, est contradictoire. Si les prélèvements sociaux sont aussi élevés en France, c’est que nombre de dépenses y sont socialisées, alors que, dans d’autres pays, elles sont couvertes non par les impôts que perçoit l’État, mais par les contributions volontaires des salariés. »
Nous poursuivions en faisant remarquer que « les grandes entreprises françaises à vocation internationale sont souvent les premières à faire des choix négatifs pour l’emploi et la croissance de notre pays.
« Ainsi, on ne peut oublier que nous souffrons d’un déficit de 400 milliards d’euros entre les capitaux placés hors de nos frontières par les grands groupes français à vocation internationale et les sommes placées par les entreprises étrangères dans notre pays. Ce qui joue contre la croissance française, c’est donc non pas l’insuffisance des investissements étrangers en France, mais bien plutôt les stratégies de rentabilité financière à court terme, et parfois d’acquisitions coûteuses de concurrents par nos propres entreprises. »
À la vérité, nous n’étions alors guère éloignés de la réalité. En effet, le régime des impatriés concernait moins de 7 500 contribuables, mais s’avérait déjà relativement coûteux.
Les critiques que nous faisions à l’époque restent pleinement fondées aujourd’hui.
J’en veux pour preuve une interview qu’a accordée M. Marini au Figaro, après qu’Alain Ducasse a renoncé à la nationalité française, …
… et que j’ai découverte sur un site Internet. Je ne résiste pas au plaisir d’en citer quelques phrases.
Le Figaro pose ensuite une question sur l’ISF, qui a rapporté 4, 4 milliards d’euros l’an dernier : « Est-il raisonnable de supprimer cet impôt, alors que les déficits publics pourraient atteindre et dépasser les 3 % de PIB en fin d’année ? »
La réponse de M. le rapporteur est sans ambages : « Je plaide pour la suppression de cet impôt depuis des années. Il est possible de trouver ces 4 milliards en augmentant le rendement de l’impôt sur le revenu de la façon la plus efficace et la plus indolore possible. »
« Je suis convaincu que, cette année, l’ISF est encore plus mal vécu que les années passées, puisque nous sommes en fin de cycle immobilier et que la Bourse a beaucoup perdu. Les redevables ont été contraints de déclarer le niveau de patrimoine qu’ils avaient fin 2007 et qui peut avoir sensiblement baissé depuis. »
Il continue ainsi : « Le projet de loi de modernisation de l’économie, qui est en discussion au Parlement, prévoit d’améliorer le régime des impatriés. Mais ces améliorations ne concernent que les salariés. […] La commission des finances du Sénat a adopté deux amendements que je lui ai proposés. Ces amendements visent à étendre le régime de l’impatriation aux non-salariés et à l’impôt sur le patrimoine. Le Gouvernement semble réceptif à mes initiatives. »
Vous comprendrez donc, mes chers collègues, que, dans ce contexte, la suppression de l’article 31 se justifie pleinement aux yeux de notre groupe.
Pour compléter ce qu’a déjà exposé brillamment Nicole Bricq, je voudrais m’inscrire en faux contre les propos de M. le rapporteur.
Sourires
En effet, vous dites que les personnes concernées ne bénéficieront pas des efforts de la Nation. Or, autant que je sache, la gratuité est la règle dans nos écoles et nos universités. Qui plus est, nous subventionnons pour partie l’école privée.
Pour avoir dû moi-même financer les cycles d’études de mes enfants aux États-Unis, je connais un peu le sujet !
Par ailleurs, la position que vous exposez fait suite à des propos tenus au plus haut niveau de l’État qui laissent entendre que les caisses sont vides !
Telles sont les raisons pour lesquelles le groupe socialiste votera contre cet article.
L'article 31 est adopté.
L'amendement n° 717, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après l'article 31, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. 1° Les trois premiers alinéas du 1 de l'article 293 A du code général des impôts sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :
« La taxe afférente à l'importation est reportée sur la déclaration mentionnée à l'article 287 par l'assujetti désigné comme destinataire réel du bien sur la déclaration d'importation. »
2° Le 2 du même article est supprimé.
II. La perte de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Le présent amendement vise à supprimer le paiement à la douane française de la TVA sur les produits importés. Actuellement, le remboursement est ensuite effectué par la DGI, la Direction générale des impôts. Il s’agirait d’adopter la méthode de l’auto-liquidation auprès de la DGI, ce qui éviterait les avances de trésorerie.
Cela reviendrait donc à modifier les règles de recouvrement de la TVA pour les opérations d’importation en transférant ce recouvrement à la Direction générale des impôts. Les entreprises assujetties à cette taxe seraient tenues de la déclarer sur leurs importations le mois suivant à la DGI, comme c’est le cas pour la TVA intracommunautaire.
Le même amendement était venu en discussion l’année dernière lors de l’examen de la loi de finances ; je crois que la commission des finances s’était montrée réceptive à la démarche proposée.
Ce pourrait être en effet une bonne mesure, de nature à améliorer notre compétitivité, puisqu’il y aurait un interlocuteur unique au sein des services compétents en matière de TVA.
Il me semble que cette initiative, madame la ministre, mérite d’autant plus d’être soutenue qu’elle paraît aller dans le sens des intentions générales de la présente loi.
Par conséquent, la commission spéciale est assez favorable à cet amendement.
Je partage souvent les analyses de M. le rapporteur, qui se signalent par leur grande intelligence et qui, en outre, sont frappées au coin du bon sens.
Mais, en ce qui concerne le mode de recouvrement de la TVA, madame le sénateur, si votre amendement tend bien à renforcer l’attractivité du territoire français en favorisant celles de nos entreprises qui sont actives dans le secteur de l’import-export, je voudrais rappeler qu’un certain nombre de mesures ont déjà été mises en œuvre en la matière, en particulier depuis juin 2005.
Depuis cette date, toute entreprise peut en effet, sur simple demande et sans condition, choisir de s’acquitter de la TVA dans le cadre d’une échéance mensuelle de paiement fixée au 25 du mois. Il lui est donc possible de déduire la TVA payée sur les produits d’importation entre le 15 et le 20 du mois, et de s’acquitter du reste de la TVA due le 25.
On ne peut donc pas dire que, pour l’écart dans la trésorerie de l’entreprise entre les sommes payées et les remboursements, le calendrier français ne soit pas attractif.
Par ailleurs, il me semble que le mécanisme actuel, qui repose, à l’image de ce qui se pratique dans des pays comme l’Espagne et l’Italie, sur l’intervention de deux services distincts de l’administration, est de nature à mieux prévenir et éliminer les risques de fraude.
Or, nous sommes actuellement confrontés à une nette recrudescence de la fraude à la TVA, notamment à travers la « fraude carrousel », qui coûte très cher à l’État. Par conséquent, tout système évitant le risque de fraude est préférable à une organisation qui aurait certes l’avantage de proposer un interlocuteur unique, mais qui ne permettrait pas des croisements susceptibles de détecter la fraude.
Au bénéfice de ces deux observations, je vous demande donc de retirer votre amendement. À défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.
Je voudrais suggérer à nos collègues du groupe de l’Union centriste de rester fidèles à l’orientation qu’ils proposent, mais de rechercher, peut-être d’ici à l’examen du projet de loi de finances pour 2009, une formulation qui réponde au moins à l’objection ayant trait à la lutte contre la fraude. Des deux arguments avancés par Mme la ministre, celui-ci me paraît en effet le plus important.
Je ne remets toutefois pas en cause, bien entendu, l’assentiment de la commission au mécanisme proposé. Si une rédaction plus satisfaisante était proposée lors de la prochaine discussion budgétaire, on pourrait envisager de voter la mesure.
Non, je le retire, monsieur le président, à la suite des explications fournies par Mme la ministre et de la suggestion de M. le rapporteur.
I. - L'article 1465 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Dans la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « du volume des investissements et du nombre des emplois créés » sont remplacés par les mots : « soit du volume des investissements et du nombre des emplois créés, soit du seul volume des investissements » ;
2° La deuxième phrase du quatrième alinéa est supprimée ;
3° Après le quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par délibération, les collectivités territoriales peuvent fixer un prix de revient maximum des immobilisations exonérées, par emploi créé ou par investissement. »
II. - Le I s'applique aux opérations réalisées à compter du 1er janvier 2009.
Il s’agit, par cet article qui concerne la taxe professionnelle, de privilégier les investissements effectués par rapport à la création d’emplois dans les territoires.
Au départ, il était prévu que les collectivités ayant décidé une exonération reçoivent une compensation financière ; ce n’est plus le cas aujourd’hui. Cela nous paraît d’autant plus gênant que cela s’inscrit dans un mouvement général de désengagement de l’État.
En effet, l’exonération, laissée à la libre appréciation des collectivités locales, pèsera ainsi entièrement sur celles-ci, et accroîtra d’autant les tensions sur leurs finances.
Si cet article est voté, les collectivités seront inexorablement soumises à la pression des entreprises, puisqu’elles se trouveront en situation non plus de « pouvoir » accorder l’exonération, mais bien de devoir le faire, en raison de la mise en concurrence avec les autres territoires.
Le risque est donc fort de voir s’instaurer, au travers de cette mesure, des inégalités territoriales, alors même que le principe de péréquation est déjà loin d’être une réalité !
Après les mesures relatives à la taxe professionnelle déjà votées – je rappelle que la majorité parlementaire a plafonné la TP à 3, 5 % en 2006 –, nous savons que Gouvernement entend modifier de nouveau prochainement – une énième fois ! – le système de la taxe professionnelle.
Le Président de la République lui-même a déclaré le 2 juin dernier que la réforme de la taxe professionnelle restait encore à « imaginer ».
Les rumeurs sont nombreuses. Nous avons bien noté que, le dimanche 29 juin, vous avez déclaré, madame la ministre, être en train d’examiner des hypothèses de baisse du plafonnement de la TP de 3, 5 % à 3 %, voire d’exonération totale ou partielle pour les nouveaux investissements.
Mme la ministre fait des signes de dénégation.
C’est donc très légitimement que nous nous demandons quelle sera l’étape ultime. S’agira-t-il de la suppression pure et simple de la taxe professionnelle, comme le réclame à cor et à cri le MEDEF ?
Je vous rappellerai que le plafonnement de la TP a déjà coûté aux collectivités plus de 600 millions d’euros. Ce n’est tout de même pas une paille ! C’est dans ce contexte où l’on entend faire vivre toujours plus les collectivités territoriales dans la contrainte qu’interviendra très bientôt le débat d’orientation budgétaire.
Le groupe socialiste est favorable aux mesures visant à accroître la compétitivité, mais pas si elles sont prises au détriment des collectivités. Ces dernières, je tiens à le rappeler, sont tout de même de gros investisseurs ! Tous les chiffres attestent qu’elles soutiennent très fortement l’investissement, et par là même la croissance.
Nous voterons donc contre cet article. Par ailleurs, madame la ministre, je souhaiterais que vous nous fournissiez quelques informations sur le travail que vous menez actuellement sur la réforme de la TP. Elles seraient les bienvenues devant les sénateurs, c’est-à-dire les représentants des collectivités territoriales.
Ce n’est ni le lieu ni le moment d’improviser un avant-projet visant à de profondes modifications en matière fiscale.
J’observerai tout de même que vous nous plongez en plein rêve, madame Bricq !
Tout à l’heure, vous parliez en effet, au sujet du territoire national, de « paradis fiscal », alors que je ne pense vraiment pas que ce soit le cas…
Quant aux mesures que nous proposons concernant les impatriés ou les cadres à compétence multi-juridictionnelle, elles n’ont rien à voir non plus avec ce qui se pratique dans les paradis fiscaux.
Maintenant, je crains que vous n’ayez rêvé, le dimanche 29 juin ! Je suis formelle : je n’ai jamais parlé d’un quelconque plafonnement à 3 % de la taxe professionnelle. Je serais vraiment curieuse que vous m’apportiez la preuve du contraire !
En ce qui concerne le présent article, il modifie l’article 1465 du code des impôts, qui existe depuis fort longtemps et qui ne présente aucun des risques que vous évoquez, puisque la disposition en question ne s’applique que sur délibération des collectivités territoriales ; elle ne revêt donc aucun caractère général et obligatoire et il n’est pas question de revenir sur ce principe.
L'amendement n° 15, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le 2° du I de cet article :
2° Les deuxième et troisième phrases du quatrième alinéa sont supprimées ;
La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.
Cet amendement est de rectification et de cohérence ; il n’appelle pas de remarque particulière.
Je voudrais en revanche rappeler à Mme Bricq que le présent article est en parfaite conformité avec la doctrine, constante sur la question, de la commission des finances.
Comme vous l’avez dit, il faut une délibération des conseils compétents en la matière et il n’y a pas de compensation par l’État. C’est la raison pour laquelle je suis favorable à cet article, que je n’entends pas modifier sur le fond.
La taxe professionnelle en soi, lato sensu, est un tout autre débat. Et, sur ce point, madame la ministre, je ne vous cacherai pas qu’une très grande inquiétude règne vraiment dans la Haute Assemblée à ce sujet, et sur toutes les travées.
D’ici peu, nous aborderons le débat d’orientation budgétaire, puis la préparation de la loi de finances pour 2009.
Or, pour les finances locales comme pour d’autres secteurs d’activité publics, les choses vont être difficiles. Nous risquons en effet d’être confrontés – je crois que l’hypothèse est vraisemblable – à des normes d’évolution de la dépense assez contraignantes.
Par conséquent, on ne peut pas imaginer en plus une insécurité fiscale pour nos collectivités.
Je le dis tout à fait calmement : ce n’est pas possible, car la situation deviendrait alors ingérable.
Cela a déjà été évoqué à maintes reprises au cours de ce débat, le développement économique dans son ensemble, notamment l’accueil des entreprises, repose sur les intercommunalités, dont le financement dépend largement de la taxe professionnelle unique.
Par conséquent, madame la ministre, gardons-nous d’ouvrir une telle boîte de Pandore pour 2009. Si je me suis permis de souligner une telle inquiétude, c’est pour qu’elle n’apparaisse pas comme étant l’apanage d’un seul « secteur » de l’hémicycle !
Mme Nicole Bricq sourit. – Mme Bariza Khiari applaudit.
Permettez-moi tout d’abord de rectifier mon précédent propos. Madame la ministre, vous avez raison, ayant votre déclaration sous les yeux, je m’aperçois que j’ai mal lu vos propos. Voici exactement ce que vous avez indiqué : « La diminution de la taxe professionnelle par une exonération totale ou partielle des futurs investissements est une des pistes de réflexion. Il n’y a pas encore eu d’arbitrage. »
Je vous donne donc acte de cette déclaration, madame la ministre.
En outre, monsieur le rapporteur, il ne m’a pas échappé que cet article n’offrait qu’une possibilité aux communes et qu’elle était conforme à la doctrine de la commission des finances, du moins à celle de sa majorité, qui refuse toute compensation par l’État.
J’ai simplement fait remarquer que la concurrence inévitable entre les territoires ne manquera pas d’être utilisée comme un moyen de pression par les entreprises. Une telle possibilité risque bien, à terme, de devenir de facto une obligation. C’est la raison pour laquelle je crains que, avec cette disposition, on n’ouvre la porte à bien des dangers pour les finances des collectivités.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la lecture du rapport de la commission spéciale sur le présent projet de loi donne une idée assez précise des mesures prévues dans le cadre de cet article. Rappelons-le, ce dernier a été introduit à l’Assemblée nationale, à la suite de l’adoption d’un amendement présenté par Nicolas Forissier, rapporteur pour avis de la commission des finances.
Voici donc ce qu’indique la commission spéciale du Sénat : « [L’] Assemblée nationale a adopté le présent article additionnel, qui modifie l’article 1465 précité pour améliorer l’attractivité du dispositif d’exonération de TP en faveur des établissements situés en zone d’aide à finalité régionale. L’objet est de permettre aux collectivités territoriales d’attirer des grands groupes qui ne créent pas nécessairement des emplois immédiatement, mais réalisent des investissements lourds et participent au développement économique à long terme de la collectivité concernée. »
Elle précise ensuite : « Votre commission spéciale approuve les objectifs et modalités de ce dispositif, mais considère qu’il aurait vocation à figurer dans une loi de finances, qu’il est susceptible d’accroître les tensions sur les finances des collectivités territoriales et qu’il ne fait qu’ajouter une nouvelle modification à un régime de taxe professionnelle marqué depuis longtemps par le triple symptôme de la stratification, de la complexité et de l’insécurité juridique et fiscale. »
Pour notre part, nous ne voterons ni cet article 31 bis ni l’amendement de la commission spéciale.
Monsieur Marini, les dispositions de cet article trouveraient plutôt leur place en loi de finances et nécessiteraient pour le moins une expertise avant que d’être inscrites dans un droit fiscal qui est déjà, comme on vient de le constater, passablement mis en question.
La mise en œuvre de ce dispositif pour le moins discutable serait source de tensions entre collectivités locales, au motif qu’elles pourraient se battre entre elles pour obtenir que tel ou tel grand investisseur étranger vienne s’implanter sur leur territoire.
En outre, précisément parce qu’aucune compensation n’est prévue, il constitue tout de même une aide locale, particulièrement dérisoire au demeurant, au renforcement de la situation de groupes qui, entre nous soit dit, n’ont pas forcément besoin de cela pour venir s’installer chez nous.
Franchement, croyez-vous que la taxe professionnelle soit un obstacle à l’implantation d’Unilever, d’Exxon Mobil ou de Colgate-Palmolive sur notre territoire ? À l’évidence, non !
En revanche, ce qui est sûr, c’est que ces groupes, quand le besoin s’en fait sentir, au regard de leurs critères de rentabilité, savent très bien mettre en œuvre des plans sociaux.
C’est pourquoi nous ne voterons pas cet incroyable article 31 bis, ni l’amendement de la commission spéciale.
L’amendement est adopté.
Je rappelle au Sénat qu’en une heure nous n’avons examiné que six amendements !
Sourires sur les travées de l’UMP.
Dispensez-nous de vos remarques ! Nous n’avons pas protesté lorsque le Sénat a passé une heure à examiner les dispositions relatives aux pharmaciens !
L'article 31 bis est adopté.
L’article L. 111-2-2 du code de la sécurité sociale est complété par huit alinéas ainsi rédigés :
« Sous réserve des règlements communautaires, les dispositions du premier alinéa ne s’appliquent pas en matière d’assurance vieillesse aux salariés étrangers qui demandent, conjointement avec leur employeur établi en France ou, à défaut, avec leur entreprise d’accueil en France, à être exemptés d’affiliation pour ce risque, à condition :
« 1° De justifier par ailleurs d’une assurance vieillesse ;
« 2° De ne pas avoir été affiliés, au cours des dix années précédant la demande, à un régime français obligatoire d’assurance vieillesse, sauf pour des activités accessoires, de caractère saisonnier ou liées à leur présence en France pour y suivre des études, ou à un régime de sécurité sociale d’un État auxquels s’appliquent les règlements communautaires de coordination des systèmes de sécurité sociale ;
« 3° D’avoir été présents au moins six mois dans l’établissement ou l’entreprise établis hors de France où ils exerçaient leur activité professionnelle immédiatement avant la demande.
« L’exemption n’est accordée qu’une seule fois pour le même salarié pour une durée de trois ans. Celui-ci ne peut, pour la période couverte par cette exemption, avoir droit ou ouvrir droit à aucune prestation d’un régime français d’assurance vieillesse.
« À titre exceptionnel, le ministre chargé de la sécurité sociale peut accorder une prolongation de l’exemption pour une nouvelle période de trois ans ou octroyer le bénéfice de cette exemption lorsque n’est pas remplie la condition d’antériorité dans l’établissement ou l’entreprise fixée au 3°.
« Le non-respect des conditions d’exemption énoncées ci-dessus, dûment constaté par les agents visés à l’article L. 243-7, entraîne l’annulation de l’exemption et le versement, par l’employeur ou le responsable de l’entreprise d’accueil, à l’union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales et aux autres organismes collecteurs concernés, d’une somme égale à une fois et demi le montant des contributions et cotisations qui auraient été dues si le salarié n’avait pas bénéficié de ladite exemption.
« Un décret fixe les modalités d’application de ces dispositions dérogatoires. »
Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 474, présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Cet article 31 ter est, si je puis dire, un sous-produit de l’article 31 relatif au statut fiscal des impatriés.
Il s’agit, en l’occurrence, de dispenser les cadres étrangers impatriés de contribuer au financement de la protection sociale, au motif qu’ils sont assurés sociaux par ailleurs et qu’ils disposent ainsi d’une protection sociale dans leur pays d’origine.
Le régime prévu par cet article est particulièrement intéressant à étudier, et la lecture des dispositions proposées suffit d’ailleurs à pointer les dangers qu’il recèle.
Dans l’absolu, un salarié venant d’un autre pays de l’Union européenne pourrait être employé en France par son employeur, aux mêmes conditions, en termes de prélèvements sociaux, que celles qui sont fixées dans son pays d’origine.
Sous certains aspects, c’est donc le système prévu par la fameuse directive Bolkestein qui trouverait à s’appliquer, avec tout ce que cela implique comme course au dumping social.
Ne serait-ce que pour parer à ce genre de risque, il importe de procéder à la suppression de cet article 31 ter, en cohérence, entre autres, avec celle de l’article 31 que nous avons proposée.
Les quatre amendements suivants sont présentés par M. Longuet.
L’amendement n° 587 rectifié est ainsi libellé :
I. - Dans le deuxième alinéa de cet article, supprimer les mots :
en matière d’assurance vieillesse
II. - Dans le troisième alinéa de cet article, remplacer les mots :
d’une assurance vieillesse
par les mots :
d’une couverture des risques sociaux pris en charge par l’employeur ou l’entreprise.
III. - Dans le quatrième alinéa et la deuxième phrase du sixième alinéa de cet article, remplacer les mots :
d’assurance vieillesse
par les mots :
de sécurité sociale
IV. - Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
A. - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant de l’extension de la dispense d’affiliation au régime d’assurance vieillesse est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
B. - La perte de recettes pour l’État résultant du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L’amendement n° 588 est ainsi libellé :
Dans le deuxième alinéa de cet article, après le mot :
étrangers
insérer les mots :
détachés au sens du 2° de l’article L. 1262-1 du code du travail
L’amendement n° 589 est ainsi libellé :
I. - Dans le quatrième alinéa de cet article, remplacer les mots :
dix années
par les mots :
cinq années
II. - Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
... - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant du I est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
... - La perte de recettes pour l’État résultant du paragraphe précédent est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
L’amendement n° 590 rectifié est ainsi libellé :
I. - Dans le cinquième alinéa de cet article, remplacer les mots :
six mois
par les mots :
trois mois
II. - Rédiger comme suit le septième alinéa de cet article :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, une prolongation de l’exemption peut être accordée par l’autorité administrative compétente pour une nouvelle période de trois ans.
III. - Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
A. - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant de l’assouplissement des conditions de l’exemption d’affiliation au régime d’assurance vieillesse est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
B. - La perte de recettes pour l’État résultant du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Gérard Longuet, pour présenter ces quatre amendements.
Ces quatre amendements tirent leur justification de l’expérience des grands groupes français de taille internationale, qui s’efforcent de gérer pour leurs cadres, français ou non, une carrière à l’international, tout en s’efforçant de leur faire exercer, à un moment ou à un autre, des responsabilités sur notre territoire national.
C’est en quelque sorte une manière de préserver une certaine culture française dans des groupes à dimension mondiale dont le personnel provient de différents pays.
Bien entendu, je mets de côté le cas particulier des ressortissants de pays dans lesquels s’appliquent les règlements communautaires de coordination des systèmes de sécurité sociale.
Les dispositions de ces amendements concernent uniquement les salariés, français ou non, de groupes internationaux – en l’occurrence, je me fais le porte-parole des groupes français – qui ne ressortissent pas à de tels régimes.
Ainsi l’amendement n° 587 rectifié a-t-il pour objet d’élargir l’exonération prévue à l'ensemble des cotisations de sécurité sociale, et non plus seulement à l’assurance vieillesse, dès lors que la couverture des prestations d’assurance maladie est assurée par l’employeur dans un régime reconnu.
En effet, si le salarié rencontre une difficulté en France, il est couvert par son régime d’origine. C’est ce dernier, et non le régime français de sécurité sociale, qui le prendra en charge.
L’amendement n° 588 vise à limiter l’application des dispositions de l’article 31 ter aux étrangers détachés, au sens du 2° de l’article L. 1262-1 du code du travail, c'est-à-dire dans le cadre d’une mobilité à l’intérieur d’un même groupe. On peut certes discuter de la pertinence d’une telle proposition, mais mon objectif est d’éviter tout risque de dumping social, car certains salariés pourraient très bien être recrutés sur des considérations de pure opportunité, dans le but de « casser les prix » sur notre marché du travail national.
Par l’amendement n° 589, il s’agit de revenir sur la condition, justifiée par ailleurs, de non-immatriculation antérieure au régime français de sécurité sociale pendant une période dix années. Le réalisme me conduit à vous proposer de limiter cette exigence à cinq ans, dans la mesure où la mobilité des salariés, notamment des jeunes cadres, est beaucoup plus rapide. Si la disposition actuelle était maintenue, un jeune salarié qui reviendrait en France moins de dix ans après son départ ne pourrait bénéficier du régime des impatriés.
Dans le même esprit, l’amendement n° 590 rectifié est une mesure de coordination. Il est pour l’instant prévu que le salarié impatrié ait au moins six mois d’ancienneté dans le groupe pour le compte duquel il est impatrié en France. Je vous suggère de ramener cette antériorité à trois mois. C’est d’ailleurs celle qui est exigée par la loi du 20 novembre 2007 relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile – nous l’avons votée avec enthousiasme ! –, laquelle a effectivement prévu que l’attribution de la carte « salarié en mission » est subordonnée à une antériorité de trois mois.
Tel est le sens de ces quatre amendements, qui ont pour objet de faciliter la circulation des impatriés des grands groupes internationaux et, plus particulièrement, ceux de racines françaises, qui m’intéressent au premier chef.
L’amendement n° 16, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. Compléter cet article par sept alinéas ainsi rédigés :
« Sous réserve des règlements communautaires, les dispositions du premier alinéa ne s’appliquent pas aux étrangers travailleurs non salariés au sens du livre VI du présent code qui demandent à être exemptés d’affiliation pour l’ensemble des risques, à condition :
« 1° De justifier par ailleurs d’une couverture des mêmes risques ;
« 2° De ne pas avoir été affiliés, au cours des dix années précédant la demande, à un régime français obligatoire de sécurité sociale, sauf pour des activités accessoires, de caractère saisonnier ou liées à leur présence en France pour y suivre des études, ou à un régime de sécurité sociale d’un État auquel s’appliquent les règlements communautaires de coordination des systèmes de sécurité sociale.
« L’exemption n’est accordée qu’une seule fois à une même personne pour une durée de trois ans. L’intéressé ne peut, pour la période couverte par cette exemption, avoir droit ou ouvrir droit à aucune prestation d’un régime français de sécurité sociale.
« À titre exceptionnel, le ministre chargé de la sécurité sociale peut accorder une prolongation de l’exemption pour une nouvelle période de trois ans.
« Le non-respect des conditions d’exemption énoncées ci-dessus entraîne l’annulation de l’exemption et le versement par l’intéressé aux organismes collecteurs concernés d’une somme égale à une fois et demi le montant des contributions et cotisations qui auraient été dues si le salarié n’avait pas bénéficié de ladite exemption.
« Un décret fixe les modalités d’application de ces dispositions dérogatoires. »
II. Pour compenser la perte de recettes résultant du I ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe additionnel ainsi rédigé :
... - La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale résultant de l’exonération d’affiliation consentie aux étrangers travailleurs non salariés mentionnés au I est compensée à due concurrence par une augmentation des tarifs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et par la création d’une taxe additionnelle à ces mêmes droits.
La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission spéciale sur les amendements n° 474, 587 rectifié, 588, 589 et 590 rectifié.
L’amendement n° 16 a un triple objet.
Il s’agit, d’abord, d’accorder aux travailleurs étrangers non salariés qui le demandent une exemption d’affiliation au système français de sécurité sociale pour l’ensemble des risques.
Il s’agit, ensuite, d’interdire aux intéressés d’avoir droit ou d’ouvrir droit à une quelconque prestation d’un régime français de sécurité sociale.
Il s’agit, enfin, de subordonner le bénéfice de l’exemption à l’existence d’une couverture des risques par ailleurs, pour se prémunir contre les conséquences possibles, en particulier pour les ayants droit, de l’imprévoyance ou de la légèreté éventuelle de certains impatriés.
En définitive, il s’agit d’un amendement de cohérence avec un vote émis tout à l’heure par le Sénat.
Par ailleurs, la commission spéciale est bien entendu défavorable à l’amendement n° 474 de suppression de l’article.
En revanche, sur l’amendement n° 587 rectifié, elle a de la sympathie pour l’analyse présentée…
… et souhaiterait connaître l’avis du Gouvernement.
Nous avons estimé que la mesure proposée au travers de l’amendement n° 588 était tout de même quelque peu réductrice, en ce sens qu’elle était vraiment ciblée sur la gestion des carrières des cadres des très grandes entreprises.
Cela étant, le Gouvernement nous dira ce qu’il faut en penser.
En ce qui concerne l’amendement n° 589, nous nous en remettons bien volontiers à la sagesse du Sénat.
Enfin, s’agissant de l’amendement n° 590 rectifié, nous souhaiterions également entendre l’avis du Gouvernement.
Le Gouvernement émet évidemment un avis défavorable sur l’amendement n° 474 de suppression de l’article.
Monsieur Longuet, par l’amendement n° 587 rectifié, vous souhaitez en réalité étendre l’exemption actuellement prévue, qui est limitée au risque vieillesse, à l'ensemble des autres risques, notamment ceux de court terme.
Le Gouvernement est défavorable à une telle exemption, et ce pour deux raisons.
D’abord, l’importance du manque à gagner s’accroît au fur et à mesure que s’étend le champ d’application de l’exemption. En l’espèce, en ce qui concerne le risque maladie, l’impact n’est vraiment pas négligeable.
Ensuite, et surtout, l’exonération au titre du risque vieillesse se justifie par le fait qu’il s’agit d’un risque de long terme. On peut donc supposer que, dans le cadre de déplacements d’un salarié d’un groupe dans plusieurs pays, ce risque se réalisera ailleurs que sur le territoire français. Il est par conséquent légitime de privilégier la cotisation au régime de retraite du pays d’origine et d’exonérer le salarié de celle qui serait exigible dans le pays d’accueil temporaire.
En revanche, il nous paraît plus logique que les risques de plus court terme puissent être aussi assurés dans le pays où réside et travaille le salarié au moment où ils peuvent se réaliser.
Pour cette raison, monsieur le sénateur, nous vous demandons de bien vouloir retirer l’amendement n° 587 rectifié ; à défaut, nous émettrions un avis défavorable.
Dans la mesure où les amendements n° 587 rectifié et 588 sont liés, nous émettons le même avis sur ce dernier. Là où vous proposez une restriction, nous préférons au contraire maintenir un champ d’application large. Nous souhaitons en effet que l’exemption puisse s’appliquer, d'une part, à tous les salariés susceptibles d’en bénéficier, et non pas aux seuls salariés détachés, et, d'autre part, pour la raison invoquée par M. le rapporteur, à tous les groupes, y compris les petits groupes, qui n’ont pas nécessairement mis en place une gestion prévisionnelle des carrières des cadres, notamment en termes de mobilité.
Le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 589, qui vise à limiter à cinq années la durée d’absence d’affiliation au régime français afin de pouvoir bénéficier d’une dispense d’affiliation. La solution proposée nous paraît tout à fait appropriée dans une perspective d’harmonisation avec la plupart des dispositifs en matière de sécurité sociale internationale qui, bien souvent, se réfèrent à ces périodes de cinq années.
Je lève le gage, monsieur le président.
Il s’agit donc de l’amendement n° 589 rectifié.
Veuillez poursuivre, madame la ministre.
Sur l’amendement n° 590 rectifié, de même, le Gouvernement est favorable et lève le gage.
Il s’agit donc de l’amendement n° 590 rectifié bis.
Veuillez poursuivre, madame la ministre.
Je rappelle que l’objet de l’amendement est de limiter à trois mois, au lieu de six dans la rédaction actuelle, la durée de présence dans l’entreprise étrangère exigée préalablement au détachement. Nous approuvons d’autant plus cette initiative qu’elle procède à une harmonisation avec un texte voté il y a quelques semaines.
J’en viens à l’amendement n° 16. Le Gouvernement sollicite son retrait. À défaut, l’avis serait défavorable pour des raisons qui nous ramènent au débat que nous avons eu sur l’exemption fiscale accordée aux non-salariés : cette disposition risque de favoriser les étrangers qui viendraient en France au détriment de non-salariés français ; je pense, en particulier, à des travailleurs indépendants qui se trouveraient très clairement défavorisés par rapport à des collègues.
Je crains aussi d’éventuels effets d’aubaine en matière tant fiscale que sociale. Nous aurions intérêt, à ce propos, à nous appuyer sur des études d’impact pour apprécier le manque à gagner potentiel pour nos finances publiques, car je crois véritablement qu’il y a un risque.
Monsieur Longuet, maintenez-vous les amendements n° 587 rectifié et 588 ?
J’ai entendu le Gouvernement. Je vous remercie, madame la ministre, de votre soutien aux amendements n° 589 rectifié et 590 rectifié bis, qui sont naturellement maintenus.
Nous sommes dans un régime encore expérimental. Je retire volontiers les amendements n° 587 rectifié et 588, partant du principe que l’expérience nous dira où se trouve le juste équilibre, notamment ce qui concerne le détachement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
Pour reprendre les arguments avancés tout à l’heure à propos de l’application aux non-salariés de ce régime des impatriés et par souci de cohérence avec le vote que nous avons émis, il convient, me semble-t-il, de voter également cet amendement.
Cela étant, les interventions de Mme la ministre et de plusieurs collègues m’inspirent une question : ce régime des impatriés coûte-t-il quelque chose ? Le sujet mérite que nous nous y arrêtions un instant.
C’est une question de raisonnement. Cela coûte-t-il quelque chose et, si oui, par rapport à quoi cela coûte-t-il quelque chose ?
Finalement, c’est toute la problématique de l’article 40, telle qu’elle est fréquemment invoquée dans notre assemblée. Si l’on considère que ce régime s’adresse à des personnes qui n’ont pas été résidents fiscaux français pendant les cinq dernières années, c’est de la matière fiscale nouvelle. Nous sommes donc en présence d’une matière fiscale qui n’a pas encore été assujettie à l’impôt en France. Dès lors, quelle que soit la fiscalité applicable sur ladite matière, il y a gain et non pas perte.
J’attire votre attention sur le fait que je raisonne en termes économiques. Or la réalité économique est, mes chers collègues, la seule chose qui devrait nous guider, parce que c’est la vraie richesse, celle qu’on trouve à l’arrivée.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Et je pense, chère Nicole Bricq, que vous ne pouvez pas être en désaccord avec mon raisonnement, car vous connaissez la réalité des entreprises.
Même si vous ne faites payer qu’un euro, le jour où elle arrive, à une personne qui ne payait rien parce qu’elle n’était pas là, vous gagnez un euro ! C’est un cas d’école que j’évoque : plus les impatriés ont des moyens à investir sur notre territoire, plus ils vont rapporter, alors qu’ils ne rapportaient rien !
On peut aussi choisir une approche juridique et administrative consistant à dire que, si l’on était dans le droit commun, cette personne paierait tant. Mais, comme cela fait une somme, cette personne ne viendrait pas. Donc, le droit commun ne lui serait pas appliqué. Néanmoins, si, contre toute attente et toute vraisemblance, cette personne venait, eh bien, elle paierait l’impôt aux conditions de droit commun !
En d’autres termes, si un richissime étranger ayant des biens dans le monde entier vient en France et choisit de payer l’ISF pour les biens qu’il possède dans le monde entier sur leur valeur vénale, on applique le droit commun. Si on l’en dispense, on perd juridiquement de l’argent. Mais si on l’exonère complètement de l’ISF et s’il crée des richesses en faisant travailler des gens autour de lui, ces richesses vont engendrer des bases fiscales. Donc, juridiquement, on sera perdant par rapport à quelque chose d’absolument virtuel et qui n’a aucune chance de se produire et, économiquement, on sera gagnant par rapport à une réalité !
Je vous livre, chers collègues, ces quelques éléments d’appréciation pour vous suggérer de bien vouloir voter l’amendement de la commission spéciale.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP.
Mme Nicole Bricq. On critique souvent nos grandes écoles, mais là, j’ai vraiment reconnu tout l’art des élèves sortis de l’ENA ! Encore bravo !
Sourires
Nouveaux sourires.
L’amendement de notre collègue rapporteur Philippe Marini prévoit une compensation ; j’appelle simplement l’attention du rapporteur général Philippe Marini, et celle du Gouvernement, sur le fait qu’il est de plus en plus difficile de compenser les exonérations sociales.
Sous le bénéfice de cette observation, je ne vois pas d’inconvénient à la création d’une niche sociale supplémentaire.
Donc, madame la ministre, si cet amendement est adopté malgré vos réserves, il faudra veiller à la compensation.
L'amendement est adopté.
L'article 31 ter est adopté.
L'amendement n° 321 rectifié, présenté par MM. Laffitte et Charasse, est ainsi libellé :
Après l'article 31 ter, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article 150-0 D ter du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - 1. L'imposition de la plus-value retirée de la cession à titre onéreux des titres mentionnés aux articles L. 225-177, L. 225-179 et L. 225-180 du code de commerce est réduite d'un abattement à due concurrence, dans la limite de 15 %, des versements effectués par le redevable au titre de la participation au financement d'une structure publique ou privée d'incubation d'entreprises, de souscriptions au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés, en numéraire ou en nature par apport de biens nécessaires à l'exercice de l'activité, à l'exception des actifs immobiliers et des valeurs mobilières.
« 2. La société bénéficiaire des versements mentionnée au 1 doit satisfaire aux conditions mentionnées au deuxième alinéa du 1 du I de l'article 885-0 V . Elle doit en outre satisfaire l'une des conditions suivantes :
« a) Avoir réalisé, au cours des trois exercices précédents, des dépenses cumulées de recherche visées aux a à f du II de l'article 244 B d'un montant au moins égal au tiers du chiffre d'affaires le plus élevé réalisé au cours de ces trois exercices ;
« b) Justifier de la création de produits, procédés ou techniques dont le caractère innovant et les perspectives de développement économique sont reconnus, ainsi que le besoin de financement correspondant. Cette appréciation est effectuée pour une période de trois ans par un organisme ou une agence pour l'aide à l'innovation désigné conjointement par le ministre en charge des finances et le ministre en charge de la recherche.
« 3. Les versements ouvrant droit à l'avantage fiscal mentionné au 1 sont ceux effectués entre la date limite de dépôt de la déclaration de l'année précédant celle de l'imposition et la date limite de dépôt de la déclaration de l'année d'imposition.
« 4. Le premier alinéa du 1 du I de l'article 885-0 V est applicable aux versements effectués par les redevables de l'impôt de solidarité sur la fortune au titre du 1.
« 5. La fraction du versement ayant donné lieu à l'avantage fiscal mentionné au 1 ne peut donner lieu à l'une des réductions d'impôt sur le revenu prévues à l'article 199 -0-A.
« 6. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné au respect de celles du règlement (CE) n° 1998/2006 de la Commission, du 15 décembre 2006, concernant l'application des articles 87 et 88 du traité aux aides de minimis. »
II. - Les pertes de recettes résultant pour l'État de l'application du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus par les articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n’est pas soutenu.
L'amendement n° 322, présenté par M. Laffitte, est ainsi libellé :
Après l'article 31, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. Afin de favoriser l'attractivité du territoire, des « zones d'innovation privilégiée » permettant d'expérimenter des simplifications ou des améliorations dans le domaine administratif, financier et fiscal sont créées par décret en Conseil d'État. Ce décret précise le type de mesures, la durée de l'expérimentation et les modalités d'évaluation des effets constatés.
II. Les pertes de recettes résultant pour l'État du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
Cet amendement n’est pas soutenu
M. Adrien Gouteyron remplace M. Roland du Luart au fauteuil de la présidence.
CHAPITRE III
priorité
Développer l'économie de l'immatériel
I. - L'article L. 80 B du livre des procédures fiscales est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa du 3°, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« Pour l'examen des demandes mentionnées au premier alinéa, l'administration des impôts sollicite l'avis des services relevant du ministre chargé de la recherche ou d'organismes chargés de soutenir l'innovation dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État lorsque l'appréciation du caractère scientifique et technique du projet de dépenses de recherche présenté par l'entreprise le nécessite.
« L'avis est notifié au contribuable et à l'administration des impôts. Lorsqu'il est favorable, celle-ci ne peut rejeter la demande du contribuable que pour un motif tiré de ce qu'une autre des conditions mentionnées à l'article 244 quater B du code général des impôts n'est pas remplie.
« Les personnes consultées en application du deuxième alinéa du 3° sont tenues au secret professionnel dans les conditions prévues à l'article L. 103 du présent code. » ;
2° Après le 3°, il est inséré un 3° bis ainsi rédigé :
« 3° bis Lorsque les services relevant du ministre chargé de la recherche ou un organisme chargé de soutenir l'innovation figurant sur la liste mentionnée au 3° n'ont pas répondu dans un délai de trois mois à un redevable de bonne foi qui leur a demandé, dans les mêmes conditions que celles prévues au 2°, si son projet de dépenses de recherche présente un caractère scientifique et technique le rendant éligible au bénéfice des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts.
« La prise de position des services relevant du ministre chargé de la recherche ou de l'organisme chargé de soutenir l'innovation est notifiée au contribuable et à l'administration des impôts. Lorsque cette prise de position est favorable ou en l'absence de réponse dans un délai de trois mois, l'administration des impôts ne peut rejeter la demande du contribuable que pour un motif tiré de ce qu'une autre des conditions mentionnées à l'article 244 quater B du code général des impôts n'est pas remplie.
« Les personnes consultées en application des dispositions du premier alinéa sont tenues au secret professionnel dans les conditions prévues à l'article L. 103.
« Un décret en Conseil d'État précise les conditions d'application du présent 3° bis ; ».
II. - Le I entre en vigueur le 1er janvier 2009.
Toutefois, son 2° entre en vigueur à une date fixée par décret et au plus tard le 1er janvier 2010.
Je suis saisi de sept amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 481, présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Michel Billout.
Cet article 36, comme bien d’autres dans ce texte, contribue à donner à ce projet de loi de modernisation de l’économie l’allure d’un projet de loi de finances rectificative de milieu d’année.
C’est ainsi que l’on peut appréhender les termes de ces articles à vocation fiscale qui donnent une claire indication sur l’ordre des priorités du Gouvernement : tout faire pour réduire la taxation des entreprises, c’est-à-dire, en fait, la récupération sociale de la valeur ajoutée créée par le travail, quitte, dans un certain nombre de cas, à fermer les yeux sur des formes de fraude ou d’évasion fiscales pour le moins avérées.
Nous sommes dans cette situation vis-à-vis de l’article 36. Il s’agit, en effet, d’instaurer, en matière de crédit d’impôt recherche, une forme de rescrit, comme c’est déjà le cas pour un certain nombre d’éléments des relations entre l’administration fiscale et les entreprises.
Une telle démarche prolonge évidemment la réforme du crédit d’impôt recherche votée lors de la discussion de la loi de finances pour 2008, réforme qui va conduire à un très sensible accroissement du coût de la dépense fiscale.
Nous avions eu l’occasion de dire ce que nous en pensions au moment où le texte était venu en débat. Avec l’article 36, nous allons au bout de la logique. Non seulement on ne fera pas l’inventaire de la réalité de la situation, mais, ensuite, on présumera justifiée toute demande d’éligibilité de n’importe quelle entreprise au bénéfice du dispositif par tacite acceptation de l’administration dans des délais naturellement réduits.
Cette démarche, plus que discutable, complétée d’ailleurs par celle de la commission qui préconise le recours à l’instruction des dossiers par OSEO, tend à favoriser l’externalisation du contrôle des dossiers des entreprises hors l’administration fiscale.
Une telle initiative, sans qu’il soit dans notre esprit de mettre en question la qualité des personnes œuvrant au sein d’OSEO, conduit immanquablement à mettre en cause l’existence d’un véritable contrôle fiscal, neutre et objectif, sur la mobilisation de la dépense fiscale comme outil des politiques publiques.
Qu’on le veuille ou non, ce que l’on souhaite ainsi faire, c’est rendre légal et possible, par le rescrit, ce qui, il y a peu, aurait conduit au redressement et au rappel des droits. En clair, à la place de la modernisation de l’économie, nous aurons la validation de la fraude, le crédit d’impôt recherche n’étant pas le dispositif fiscal le moins sujet à contentieux.
L'amendement n° 740, présenté par M. C. Gaudin et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après le premier alinéa de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
1°A. - Dans le premier alinéa du 3°, après le mot : « répondu » sont insérés les mots : « de manière motivée » ;
Monsieur le président, si vous n’y voyez pas d’inconvénient, je souhaiterais présenter en même temps l’amendement n° 739.
Je suis en effet saisi d’un amendement n° 739, également présenté par M. C. Gaudin et les membres du groupe Union centriste - UDF, et ainsi libellé :
Dans la deuxième phrase du troisième alinéa du 2° du I de cet article, après les mots :
en l'absence de réponse
insérer les mots :
motivée
La parole est à Mme Anne-Marie Payet, pour présenter ces deux amendements.
L’amendement n° 740 vise à instaurer à l’égard de l’administration fiscale une obligation de motivation des réponses aux demandes des contribuables portant sur l’éligibilité de leur projet de dépenses de recherche au dispositif du crédit d’impôt recherche, à l’instar des dispositions prévues au 4° de l’article L.80 B pour la qualification de jeune entreprise innovante.
L’amendement n° 739 a le même objet.
L'amendement n° 17 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. - Rédiger comme suit le deuxième alinéa du 1° du I de cet article :
« Pour l'examen des demandes mentionnées au premier alinéa, l'administration des impôts sollicite l'avis d'un organisme chargé de soutenir l'innovation désigné par décret en Conseil d'État lorsque l'appréciation du caractère scientifique et technique du projet de dépenses de recherche présenté par l'entreprise le nécessite.
II. - En conséquence, modifier comme suit le 2° du même I :
A. - Dans le deuxième alinéa, remplacer les mots :
les services relevant du ministre chargé de la recherche ou un organisme chargé de soutenir l'innovation figurant sur la liste mentionnée au 3° n'ont pas répondu dans un délai de trois mois à un redevable de bonne foi qui leur
par les mots :
l'organisme chargé de soutenir l'innovation mentionné au 3° n'a pas répondu dans un délai de trois mois à un redevable de bonne foi qui lui
B. - Dans le troisième alinéa, supprimer les mots :
des services relevant du ministre chargé de la recherche ou
L'amendement n° 1046, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Supprimer la seconde phrase du troisième alinéa du 2° du I de cet article.
La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur, pour présenter ces deux amendements.
L’amendement n° 17 rectifié vise à réserver à un seul organisme, c’est-à-dire au groupe OSEO, la délégation de l’administration fiscale ou la saisine alternative par le contribuable afin d’assurer l’unicité de la doctrine en la matière et la sécurité juridique du rescrit.
L’amendement n° 1046 est un amendement de précision.
L'amendement n° 369, présenté par Mme Bricq, MM. Massion, Repentin et Angels, Mme Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Pastor, Raoul, Sueur, Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après le I de cet article, insérer un paragraphe ainsi rédigé :
... - Après le premier alinéa du I de l'article 244 B du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour les grandes entreprises, au sens communautaire du terme, au-delà de 50 millions d'euros de dépenses exposées, le crédit d'impôt sera accordé si le projet associe des petites et moyennes entreprises au sens communautaire du terme ou des organismes de recherche. »
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Je veux bien considérer cet amendement comme un amendement d’appel dans la mesure où nous l’avions déjà déposé en loi de finances rectificative, quand vous avez modifié en profondeur le crédit impôt recherche.
Nous avions exprimé, à l’époque, notre crainte de voir le dispositif profiter d’abord aux grandes entreprises ; cette inquiétude n’est pas dissipée. Je rappelle que, dans le rapport écrit, le crédit d’impôt est évalué à un montant variant entre 3, 5 milliards et 4, 5 milliards d’euros en année pleine. C’est énorme ! Je l’ai dit hier soir, c’est l’équivalent de l’ISF. Raison de plus pour maintenir cet impôt, d’ailleurs…
Le texte qui nous est soumis prétend renforcer l’attractivité et la compétitivité. Or nous n’avons toujours pas de réaction par rapport à la situation que nous avons signalée il y a six mois, celle des grandes entreprises, qui seraient les premières bénéficiaires – à hauteur de 80 %, me dit-on – de ce crédit d’impôt recherche, et qui délocalisent actuellement leurs centres de recherche.
J’attire votre attention sur ce point essentiel : que font les virtuels- et heureux !-destinataires du CIR ? Ils délocalisent leurs centres de recherche ! Et cela ne les empêcherait pas de bénéficier tout de même du crédit d’impôt, alors que les PME, qui, elles, ne délocalisent pas, n’y auraient pas droit ?
De surcroît, encore selon certaines rumeurs, madame la ministre, vos services examineraient une nouvelle modification du crédit d’impôt recherche afin de réintégrer les avances remboursables.
Je dirai ultérieurement ce que je pense du rescrit concernant le crédit d’impôt recherche. Pour ce qui concerne cet amendement, je suis tout à fait prête à le retirer si vous nous donnez des informations chiffrées. Si vous n’êtes pas en mesure de le faire aujourd'hui, je souhaiterais que vous vous engagiez à nous les transmettre lors de l’examen de la prochaine loi de finances.
S’il apparaît que mes réserves sont fondées, je le dis à nos collègues, il vous faudra comprendre que ce texte n’est pas fait pour renforcer la compétitivité des PME et qu’il est destiné aux grandes entreprises qui délocalisent leurs centres de recherches !
L'amendement n° 743, présenté par M. C. Gaudin et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Supprimer le second alinéa du II de cet article.
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Depuis la loi de finances pour 2008, l'absence de réponse de l'administration fiscale dans le délai de trois mois suivant une demande d'une entreprise vaut accord tacite sur le principe de l'admission des dépenses dans le calcul du crédit d’impôt recherche et fait donc obstacle à la remise en cause de l'avantage fiscal qui serait fondée sur une appréciation différente lors d'un contrôle ultérieur.
Le 2° du paragraphe I de l’article 36 permet aux redevables de s'adresser directement aux services du ministère de la recherche ou à un organisme chargé de l'innovation pour demander si leur projet de dépenses de recherche est éligible au crédit d'impôt recherche.
Cette mesure n'a de sens et d'efficacité que si un délai est imposé pour la réponse. Le report de l'entrée en vigueur de cette disposition à 2010 rend la mesure inutile jusqu'à cette date.
En effet, le contribuable qui adresse une demande doit être en mesure de déterminer rapidement si son projet présente un caractère scientifique et technique qui le rend éligible au crédit d'impôt recherche. Le délai de réponse de trois mois doit donc impérativement être exigé dès le 1er janvier 2009, comme le reste des dispositions de cet article.
L’amendement n° 481 visant à supprimer l’article 36, nos collègues du groupe CRC ne seront pas surpris que j’exprime un avis négatif. (Sourires.)
L’amendement n° 739 vise à contraindre l’administration de la recherche et les organismes habilités à traiter les demandes de rescrit, en pratique OSEO, à motiver toute réponse négative. La commission est sensible à cette demande. Elle souhaite entendre l’avis du Gouvernement et s’en remet à la sagesse du Sénat.
La commission a adopté la même position sur l’amendement n° 740.
J’en viens à l’amendement n° 369. La commission y est défavorable dans la mesure où il tend à revenir de manière significative sur la réforme du crédit d’impôt recherche décidée dans la loi de finances pour 2008.
Cette réforme a été qualifiée de robuste ; ses objectifs sont clairs. Elle peut laisser sur le côté telle ou telle catégorie d’entreprises, mais ses effets économiques me paraissent indéniables. C’est un dispositif beaucoup plus puissant que le précédent, et nous l’avions soutenu. Il serait sans doute malencontreux de le modifier, du moins si rapidement.
La commission sollicite l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 743. Je crains toutefois qu’il ne soit nécessaire de le retirer, car le compte rendu des débats à l’Assemblée nationale montre que le report de délai résulte de la situation technique et matérielle d’OSEO, qui ne pourra pas répondre sous trois mois dès l’année 2009. Peut-être nous le confirmerez-vous, madame la ministre.
Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 481 de suppression.
Il est favorable à l’amendement n° 740 présenté par Mme Payet.
Le Gouvernement est également favorable à l’amendement n° 17 rectifié de la commission, qui a pour objet de supprimer la saisine du ministère de la recherche au bénéfice du guichet unique.
L’amendement rédactionnel n° 1046 a reçu un avis favorable.
Le Gouvernement a émis un avis favorable sur l’amendement n° 739 présenté par Mme Payet. Celui-ci instaure une obligation de motivation, ce qui nous paraît tout à fait approprié.
En ce qui concerne l’amendement d’appel n° 369, madame Bricq, je voudrais vous apporter quelques précisions.
Pour l’instant, environ 1, 4 milliard d’euros ont été engagés au titre du crédit d’impôt recherche, ce qui correspondra probablement au coût du crédit d’impôt recherche sur l’exercice. En année pleine, notre estimation, sans doute quelque peu conservatrice, s’établit à 2, 7 milliards d’euros.
Je serais très heureuse que cette estimation soit largement dépassée. Cela signifierait que les entreprises françaises ont enfin à cœur d’atteindre l’objectif que se sont fixé les pays de l’Union européenne à Lisbonne, à savoir de consacrer au moins 3 % de leur produit intérieur brut à la recherche. La France n’en est pas encore là, puisqu’elle n’y consacre aujourd'hui qu’un peu plus de 2 % de son PIB.
Les entreprises privées doivent pouvoir contribuer, dans des conditions auxquelles nous nous associons, à cet effort de recherche et développement, qui est seul de nature à nous permettre de triompher d’un certain nombre de vicissitudes auxquelles sont confrontées nos entreprises dans la concurrence internationale.
En ce qui concerne les petites et moyennes entreprises, nous avons précisément établi des taux majorés, les deux premières années, respectivement de 50 % et de 40 %, particulièrement pour les PME de croissance, dont nous pensons qu’elles doivent absolument, elles aussi, être incitées à participer à cet effort.
Je suis pour ma part très hostile à la modification du mécanisme en place. Toutes les entreprises, grandes, petites, moyennes, ont clamé haut et fort qu’elles souhaitaient le mécanisme le plus simple et le plus sécurisé possible. Elles veulent savoir si les dépenses qu’elles engagent en recherche et développement sont ou non éligibles, grâce justement à l’obtention de rescrits ou d’ « opinions » de l’administration.
En ajoutant des plafonds, des restrictions, des contraintes, des conditions, nous allons retomber dans les errements dont nous sommes coutumiers consistant, lorsqu’un mécanisme est simple et qu’il fonctionne, à en réduire progressivement la portée, au bénéfice de je ne sais quel principe dont on n’a pas encore la certitude.
Alors j’entends ici ou là, j’ai lu sous la plume de tel ou tel, que les grands seraient privilégiés au détriment des petits… Laissons le mécanisme s’appliquer dans la vie économique, puis faisons des audits. Nous avons procédé ainsi pour les pôles de compétitivité. Quatorze d’entre eux ont été mis en garde et risquent de perdre leur label s’ils ne réalisent pas un effort considérable en termes tout à la fois de gouvernance et d’organisation pour rassembler les PME autour des projets dans l’année qui vient.
De la même manière, il faut laisser le crédit d’impôt recherche, dont chacun s’accorde à penser que c’est un bon mécanisme - les étrangers vantent ses mérites pour implanter en France des centres de recherche et développement – jouer son rôle sans l’alourdir ou le modifier à ce stade.
L’amendement n° 743 présenté par Mme Payet vise à ramener la date d’entrée en vigueur au 1er janvier 2009 et non plus au 1er janvier 2010, comme l’avait prévu l’Assemblée nationale, avec l’accord du Gouvernement.
Nous mettons en place un nouveau mécanisme qui va permettre à OSEO d’instruire l’ensemble du dossier. Pour ce faire, les personnels doivent être formés, organisés dans une structure dont la gouvernance permette leur indépendance totale. Nous avons donc besoin d’un délai, qui ne sera certainement pas suffisant si la date d’application est fixée au 1er janvier 2009.
Au bénéfice de ces explications, je vous demanderai d’avoir l’obligeance de retirer cet amendement, madame Payet. Si nous essayons de brûler les étapes, je crains que le mécanisme ne fonctionne pas bien et que les entreprises soient déçues.
Comte tenu des déclarations de Mme la ministre, je retire cet amendement, monsieur le président.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement est adopté.
La parole est à Mme Anne-Marie Payet, pour explication de vote sur l'amendement n° 17 rectifié.
Je voterai l’amendement présenté par la commission spéciale, mais je souhaiterais attirer l’attention sur un point particulier.
M. Marini souhaite que l’administration des impôts sollicite l’avis d’un seul organisme chargé de soutenir l’innovation et désigné par décret en Conseil d’État. Il a cité OSEO, mais il faut savoir que cet organisme n’est pas présent dans certains départements d’outre-mer, comme à la Réunion, où c’est l’Agence française de développement qui exerce les missions confiées à OSEO. J’aimerais que l’on en tienne compte et que Mme la ministre nous rassure à ce sujet.
Mme Payet nous fait remarquer que le groupe OSEO, à qui est confié l’essentiel de la compétence dans le domaine du rescrit destiné à valider l’inscription d’une dépense au sens du crédit d’impôt recherche, n’a pas de réelle capacité d’intervention dans les départements d’outre-mer, plus précisément à la Réunion.
Dans l’amendement n° 17 rectifié, qui a reçu l’avis favorable du Gouvernement, il est bien indiqué « l’organisme chargé de soutenir l’innovation mentionné au 3° ». Je me demande donc si l’organisme compétent pour la Réunion et l’outre-mer est ou non visé dans cette formulation. Peut-être Mme la ministre va-t-elle nous en donner confirmation. Comme il s’agit d’une lecture par référence, les choses ne sont jamais très simples.
En l’état de la rédaction de l’amendement n° 17 rectifié, le mécanisme peut fonctionner dans la mesure où, je vous en donne l’assurance, le Gouvernement sera très attentif, dans la rédaction du décret, à ce que sur tous les territoires, y compris ceux où OSEO ne serait pas actif, un organisme désigné puisse instruire les demandes.
L'amendement est adopté.
Le Gouvernement et la commission ayant exprimé un avis favorable sur l’amendement de Christian Gaudin et des membres du groupe de l’Union centriste-UDF, il faudrait à mon sens, pour que l’amendement n° 1046 de la commission ne fasse pas tomber l’amendement n° 739, que ce dernier soit rectifié comme suit : « Après la première phrase du troisième alinéa du 2° du I de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée : “Cette réponse doit être motivée.” »
En procédant ainsi, nous rendons les deux amendements techniquement compatibles.
Madame Payet, acceptez-vous de rectifier votre amendement dans le sens suggéré par la commission ?
Je suis donc saisi d’un amendement n° 739 rectifié, présenté par M. C. Gaudin et les membres du groupe Union centriste - UDF, et ainsi libellé :
Après la première phrase du troisième alinéa du 2° du I de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :
Cette réponse doit être motivée.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
L'amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
J’ai indiqué tout à l’heure qu’il s’agissait d’un amendement d’appel destiné à obtenir des réponses de la part du Gouvernement.
Mme la ministre a précisé que 1, 4 milliard d’euros avaient été engagés au titre du crédit d’impôt recherche au 1er juillet. Elle a également donné l’estimation en année pleine, même si je remarque que M. le rapporteur n’est pas d’accord avec les chiffres annoncés par ses services. En outre, elle s’est engagée, si j’ai bien compris, à commander des audits qui permettront enfin d’établir le ratio d’utilisation par type d’entreprise ; nous saurons ainsi si cette réforme profite plus aux grandes entreprises qu’aux petites, ce qui est l’idée communément admise. La réforme étant récente, je comprends que l’on ne puisse pas encore exactement le déterminer.
Madame la ministre, vous comprendrez notre souci de disposer de chiffres exacts pour mieux appréhender la réalité de ce dispositif. Vous ne serez donc pas surprise de voir réapparaître un amendement semblable au moment de l’examen de la loi de finances ou de la loi de finances rectificative visant à connaître le bilan de ce nouveau dispositif.
En attendant, je retire le présent amendement.
L’amendement n° 369 est retiré.
La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote sur l'article.
Puisque l’on parle de chiffres, je voudrais appeler l’attention de la Haute Assemblée sur l’importance de la recherche.
Tout le monde ici connaît l’attachement de Pierre Laffitte à ce secteur. Grâce au précédent dispositif, notamment au système des business angels, une holding a été créée le 28 mai à Sophia-Antipolis – il s’agit là d’une réalité et non de prospectives – qui a pu investir 5 millions d’euros dans quinze sociétés innovantes avant le 15 juin de cette année. Il existe donc des dispositifs qui fonctionnent.
C’est pourquoi M. Laffitte s’interroge, en ce qui concerne les procédures facilitant la recherche et l’innovation, sur l’opportunité de créer dans un avenir proche des zones d’innovation privilégiées sur le modèle des pôles d’attractivité.
Les dispositifs d’innovation-recherche actuels donnent d’excellents résultats. Il faudra donc les suivre et favoriser leur développement.
L'article 36 est adopté.
M. Roland du Luart remplace M. Adrien Gouteyron au fauteuil de la présidence.
L'amendement n° 616, présenté par M. Adnot, Mme Desmarescaux et MM. Türk, Darniche, J.L. Dupont, Détraigne, Laffitte et P. Dominati, est ainsi libellé :
Après l'article 36, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le III de l'article 244 quater B du code général des impôts est ainsi rédigé :
« III. - Lorsqu'une avance remboursable en cas de succès consentie par un établissement public ou l'une de ses filiales est reçue par une petite ou moyenne entreprise autonome au sens de la recommandation 2003/361/CE de la Commission européenne, celle-ci n'est pas déduite de la base du crédit d'impôt recherche déterminée au titre de l'exercice au cours duquel elle est reçue. Ces avances remboursables publiques seront déduites des bases du crédit d'impôt recherche établi au titre de l'exercice au cours duquel elles sont définitivement acquises, ou au titre de l'exercice suivant celui du constat d'échec du projet de recherche financé. Il en est de même des sommes reçues par les organismes ou experts désignés au d et au d bis du II, pour le calcul de leur propre crédit d'impôt. Ce report de déduction de l'avance remboursable est subordonné à la souscription par l'entreprise d'un état conforme au modèle fourni par l'administration faisant apparaître, pour chaque avance remboursable, les renseignements nécessaires à l'ajustement ultérieur du crédit d'impôt recherche. »
II. - La perte de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Adnot.
Mme la ministre a opportunément rappelé l’évolution du crédit d’impôt recherche. Les chiffres dont j’ai connaissance sont même beaucoup plus importants que ceux qu’elle a cités. Nous ne pouvons donc que nous réjouir d’un tel succès.
Pour autant, on constate que ce système bénéficie d’abord aux entreprises les plus importantes et pose un problème de trésorerie aux sociétés plus petites, puisque les avances remboursables perçues par ces dernières sont déduites de l’assiette des dépenses éligibles. Je propose donc de réintégrer ces avances dans l’assiette des dépenses éligibles au crédit d’impôt recherche afin d’éviter d’affaiblir ces PME et de leur permettre au contraire de se développer. Le coût serait extrêmement faible.
Cet amendement vise à réintégrer les dépenses ayant bénéficié d’avances remboursables dans l’assiette des dépenses éligibles au crédit d’impôt recherche.
Les avances remboursables ont été exclues de l’assiette du crédit d’impôt recherche lors de la réforme de l’an dernier, à la suite d’un rapport de la Cour des comptes. Tant qu’elles ne sont pas remboursées, ces avances sont assimilables à des subventions.
Compte tenu de la doctrine que nous appliquons en la matière depuis longtemps, il me semble difficile de les incorporer à l’assiette du crédit d’impôt recherche. Il s’agirait en effet sinon d’une « aide sur une aide ».
Cela étant, ce n’est qu’une analyse rapide. Je pense que celle du Gouvernement aura plus de valeur que les modestes travaux de la commission.
Mme Isabelle Debré, vice-présidente de la commission spéciale. Quelle humilité, mon cher collègue !
Sourires
Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur le rapporteur, je ne pense pas que l’analyse du Gouvernement ait d’autre valeur que celle de la répétition.
Nouveaux sourires.
En effet, je confirme votre analyse, ces avances remboursables tant qu’elles n’ont pas été remboursées ont la nature de subventions publiques. Dans ces conditions, il nous paraît légitime qu’elles ne soient pas réintégrées dans l’assiette permettant de calculer le crédit d’impôt recherche. Cela évite de cumuler une aide d’État et un mécanisme fortement incitatif, qui est également une forme de soutien, quoi que destiné spécifiquement à l’innovation et qui est à ce titre parfaitement légitime.
Le Gouvernement vous invite donc, monsieur Adnot, à retirer votre amendement. À défaut, il émettrait un avis défavorable.
Il y a la théorie et il y a la pratique, madame la ministre.
Avant qu’il soit modifié, le crédit d’impôt était calculé tel que je le propose. Mais la réforme aura permis de dépenser beaucoup d’argent en faveur des grandes entreprises et au détriment des plus petites, qui ont vu leur trésorerie se réduire.
Je veux répondre à l’objection de la Cour des comptes : il est possible à l’administration fiscale d’apprécier, le moment venu, le remboursement ou le non-remboursement des avances en mettant en place un mécanisme de suivi des avances remboursables reçues par les entreprises éligibles au crédit d’impôt recherche. De tels mécanismes existent déjà en matière d’intégration fiscale.
Je demande à la commission et au Gouvernement de tenir compte du fait que la réforme qui a été instituée augmente considérablement la dépense et a pour effet de réduire la trésorerie des entreprises créatrices de la richesse de demain.
Cette mesure très importante n’aurait pas un coût très élevé. Je le répète, d’une part, c’est le régime qui prévalait avant la réforme et, d’autre part, il est parfaitement possible de répondre aux objections de la Cour des comptes.
Je maintiens donc mon amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
I. - L'accréditation est l'attestation de la compétence des organismes qui effectuent des activités d'évaluation de la conformité. Afin de garantir l'impartialité de l'accréditation, il est créé une instance nationale d'accréditation, seule habilitée à délivrer les certificats d'accréditation en France. Un décret en Conseil d'État désigne cette instance et fixe ses missions.
II. - Le chapitre V du titre Ier du livre Ier du code de la consommation est ainsi modifié :
1° L'intitulé de la section 5 est ainsi rédigé : « Certification des services et des produits autres qu'agricoles, forestiers, alimentaires ou de la mer » ;
2° L'article L. 115-27 est ainsi rédigé :
« Art. L. 115-27. - Constitue une certification de produit ou de service soumise aux dispositions de la présente section l'activité par laquelle un organisme, distinct du fabricant, de l'importateur, du vendeur, du prestataire ou du client, atteste qu'un produit, un service ou une combinaison de produits et de services est conforme à des caractéristiques décrites dans un référentiel de certification.
« Le référentiel de certification est un document technique définissant les caractéristiques que doit présenter un produit, un service ou une combinaison de produits et de services, et les modalités de contrôle de la conformité à ces caractéristiques. L'élaboration du référentiel de certification incombe à l'organisme certificateur qui recueille le point de vue des parties intéressées. » ;
3° L'article L. 115-28 est ainsi rédigé :
« Art. L. 115-28. - Peuvent seuls procéder à la certification de produits ou de services les organismes qui bénéficient d'une accréditation délivrée par l'instance nationale d'accréditation, ou l'instance nationale d'accréditation d'un autre État membre de l'Union européenne, membre de la coopération européenne pour l'accréditation et ayant signé les accords de reconnaissance mutuelle multilatéraux couvrant la certification considérée.
« Un organisme non encore accrédité pour la certification considérée peut, dans des conditions définies par décret, effectuer des certifications, sous réserve d'avoir déposé une demande d'accréditation.
« Toute référence à la certification dans la publicité, l'étiquetage ou la présentation de tout produit ou service, ainsi que sur les documents commerciaux qui s'y rapportent doit être accompagnée d'informations claires permettant au consommateur ou à l'utilisateur d'avoir facilement accès aux caractéristiques certifiées. La consultation des référentiels de certification s'effectue soit gratuitement auprès de l'organisme certificateur, soit par la délivrance d'exemplaires aux frais du demandeur.
« Le signe distinctif, qui, le cas échéant, accompagne ou matérialise la certification, est déposé comme marque collective de certification, conformément à la législation sur les marques de fabrique, de commerce et de service. » ;
4° Le 1° de l'article L. 115-29 est ainsi rédigé :
« 1° À la certification des produits agricoles, forestiers, alimentaires ou de la mer ; »
5° Le dernier alinéa de l'article L. 115-31 est ainsi rédigé :
« Ces agents disposent des pouvoirs prévus au livre II du présent code. » ;
6° L'article L. 115-32 est ainsi rédigé :
« Art. L. 115-32. - Les modalités d'application des articles L. 115-27 et L. 115-28 sont fixées par décret en Conseil d'État. »
III. - Le II entre en vigueur le 1er janvier 2009. –
Adopté.
CHAPITRE IV
priorité
Attirer les financements privés pour des opérations d'intérêt général
Dans le premier alinéa de l'article L. 719-12 du code de l'éducation, après le mot : « professionnel », sont insérés les mots : « et les établissements publics de coopération scientifique ». –
Adopté.
L'article L. 719-13 du code de l'éducation est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Les établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel et les établissements publics de coopération scientifique peuvent créer, en vue de la réalisation d'une ou plusieurs œuvres ou activités d'intérêt général conformes aux missions du service public de l'enseignement supérieur visées à l'article L. 123-3, une ou plusieurs personnes morales à but non lucratif dénommée «fondation partenariale». Ils peuvent créer cette fondation seuls ou avec toutes personnes morales et physiques, françaises ou étrangères. » ;
2° Le deuxième alinéa est complété par trois phrases ainsi rédigées :
« L'autorisation administrative prévue à l'article 19-1 de cette même loi est délivrée par le recteur de l'académie dans laquelle chacune de ces fondations partenariales a fixé son siège. Le recteur assure également la publication de cette autorisation. Ces fondations partenariales bénéficient de plein droit de toutes les prérogatives reconnues aux fondations universitaires créées en application de l'article L. 719-12 du présent code. » ;
3° Après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« En cas de dissolution de la fondation partenariale, les ressources non employées et la dotation, si celle-ci a été constituée et n'a pas fait l'objet de l'affectation prévue à l'article 19-6 de la loi n° 87-571 du 23 juillet 1987 précitée, sont attribuées par le liquidateur à l'une ou à plusieurs de la ou des fondations universitaires ou partenariales créées par l'établissement. Dans le cas où l'établissement ne dispose d'aucune fondation autre que celle en voie de dissolution, les ressources non employées et la dotation lui sont directement attribuées. » ;
4° À la fin du troisième alinéa, les mots : « et le mécénat », sont remplacés par les mots : «, le mécénat et les produits de l'appel à la générosité publique ».
L'amendement n° 615 rectifié bis, présenté par M. Adnot, Mme Desmarescaux et MM. A. Dupont et Laffitte, est ainsi libellé :
I. - Dans la première phrase du second alinéa du 1° de cet article, après le mot :
professionnel
insérer les mots :
, les établissements publics à caractère scientifique et technologique
II. Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes pour l'État résultant du I ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Adnot.
Des organismes tels que le CNRS, l’INRIA ou l’INRA, qui ne sont juridiquement ni des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel ni des établissements publics de coopération scientifique, se voient privés de la faculté de créer des fondations partenariales. Le présent amendement a pour objet de leur permettre de bénéficier de cette faculté. Je vous remercie d’avance de votre soutien !
Il s’agit d’un excellent amendement, qui vise à permettre aux établissements publics à caractère scientifique et technologique, tels que le CNRS, l’INSERM ou l’INRA, pour ne citer que ceux-là, de créer des fondations partenariales, entités issues de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités votée il y a un an.
L’article 37 B du projet de loi ouvre déjà la possibilité aux pôles de recherche et d’enseignement supérieur de créer de telles fondations. L’amendement de Philippe Adnot complète opportunément le dispositif. La commission a donc émis un avis très favorable.
Le Gouvernement partage avec d’autant plus de plaisir l’avis de la commission qu’il s’agit d’un très bon amendement, qui vise à élargir le champ d’application des fondations partenariales en y faisant entrer des organismes tels que l’INSERM, le CNRS ou l’INRA.
J’ajoute au passage que ces fondations rencontrent un vrai succès. On peut donc se féliciter de la mesure qui a été votée l’année dernière. J’en parlais d’ailleurs récemment avec le responsable de l’excellente TSE, Toulouse School of Economics, qui me disait avoir levé plus de 33 millions d’euros de fonds pour soutenir la recherche en sciences économiques.
Par conséquent, je lève le gage.
Il s’agit donc de l’amendement n° 615 rectifié ter.
Vous voilà comblé, monsieur Adnot !
Sourires
Personne ne sera étonné de m’entendre dire que notre groupe ne partage pas l’enthousiasme du Gouvernement et de la commission.
L’air de ne pas y toucher, l’amendement n° 615 désormais rectifié ter consacre un dispositif spécifique de financement de la recherche publique qui offre l’opportunité à l’État de se dégager de cette fonction essentielle.
Les organismes visés par l’amendement sont connus. Même s’ils souffrent de sérieuses réductions budgétaires, ils continuent essentiellement à être financés par des crédits d’État au travers des subventions que nous votons en loi de finances. Leur ouvrir la possibilité de créer des fondations accueillant d’autres fonds que des fonds publics n’est pas une garantie de durabilité de leur mission de recherche.
Nous pensons juste, dans un premier temps, qu’il ne s’agit que d’offrir à l’État, dès la loi de finances pour 2009, l’occasion de se désengager, au motif de l’existence de ce dispositif.
Pour le coup, je rappelle notre opposition de principe à la privatisation du financement de la recherche, qui conduira à la privatisation de la recherche tout court avec, en corollaire, l’abandon progressif et programmé de l’ensemble des travaux n’ayant pas d’application concrète et immédiate.
C’est pourquoi nous ne voterons pas cet amendement.
L'amendement est adopté.
L'article 37 B est adopté.
L'amendement n° 614, présenté par M. Adnot et Mme Desmarescaux, est ainsi libellé :
Avant l'article 37, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Après l'article 885-0 V bis A du code général des impôts, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - Au-delà du plafond mentionné au I de l'article 885-0 V bis A et dans la limite de 10 000 euros, le redevable peut imputer sur l'impôt de solidarité sur la fortune 75 % du montant des dons en numéraire et dons en pleine propriété de titres de sociétés admis aux négociations sur un marché réglementé français ou étranger effectués au profit des organismes de recherche ci-après limitativement énumérés :
« 1° Les associations reconnues d'utilité publique et les fondations ayant pour objet la recherche ;
« 2° Les établissements publics d'enseignement scientifique ;
« 3° L'Agence nationale pour la recherche ;
« 4° Les établissements publics à caractère scientifique et technologique ;
« 5° Les groupements d'intérêt scientifique recherche. »
II. - La perte de recettes pour l'État est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Adnot.
Nous avons mis en évidence tout l’intérêt qu’un contribuable à l’ISF aurait de placer une partie de sa cotisation dans le renforcement des fonds propres des entreprises. Une autre possibilité lui est offerte, celle de financer les fondations. Or, si la situation reste en l’état, aucun contribuable à l’ISF n’ira placer cet argent dans les fondations : dans un cas, il y a une possibilité de retour sur investissement dans les cinq ans et, dans l’autre, il n’y a aucun retour !
L’objet de mon amendement est de créer une tranche uniquement affectée aux fondations, qu’elles soient universitaires, partenariales ou autres, afin d’approvisionner ces fondations et d’accélérer la recherche, l’innovation et donc de développer l’économie de notre pays.
Philippe Adnot montre texte après texte que son intérêt pour ces sujets ne se dément pas. Il a raison, car l’utilisation des fonds dont il s’agit peut bénéficier à l’essor de la recherche, au développement de structures d’intérêt général telles que des fondations ou encore aux petites et moyennes entreprises.
La question qui toutefois me semble se poser est de savoir, madame la ministre, si un dispositif aussi récent que celui issu de la loi d’août 2007 doit être dès maintenant complété, retaillé, transformé.
Ne faudrait-il pas que nous disposions rapidement d’un point d’étape de son application ?
Le 15 juin est une date encore toute récente. Il serait bon que vous puissiez transmettre à nos commissions des éléments d’information sur le succès réellement rencontré par le dispositif, à mon avis excellent, de la loi de 2007, afin que nous en mesurions exactement les proportions avant d’envisager d’apporter des adjonctions ou des modifications à ce régime.
La commission s’en remet donc à l’avis du Gouvernement.
Monsieur Adnot, votre proposition vise à diriger une partie supplémentaire de l’ISF dans la limite de 10 000 euros vers un secteur particulier d’activité, déjà prévu par les textes, qui est celui de la recherche.
Or le dispositif prévoit l’affectation à hauteur de 75 % de l’investissement à des fins de contribution de l’ISF pour trois secteurs d’activité : la recherche, l’enseignement supérieur et les organismes d’insertion.
Créer cette tranche supplémentaire au seul bénéfice de la recherche encouragerait le fléchage de ces sommes vers celle-ci au détriment des deux autres secteurs.
De ce point de vue, nous souhaitons maintenir la parité entre les trois secteurs d’activité et ne pas les dissocier.
Par ailleurs, le dispositif est déjà fortement incitatif.
Je suis d’accord avec M. le rapporteur : évaluons d’abord le succès de la mesure. Le 15 juin est tout juste derrière nous ; le 15 septembre est la date limite à laquelle les contribuables pourront justifier du document attestant leur contribution à l’augmentation du capital ou à la souscription de tel ou tel fonds pour documenter la mesure d’exonération dont ils se prévalent.
Il faut, comme M. Marini le propose, tirer les enseignements du mécanisme pour en mesurer le succès avant de le modifier d’une quelconque manière et de prendre le risque de le complexifier.
Pour toutes ces raisons, monsieur le sénateur, je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.
À défaut, le Gouvernement émettrait un avis défavorable.
Madame la ministre, votre explication laisse à penser que l’adoption de cet amendement, diminuerait la part qui reviendrait aux autres secteurs.
C’est inexact puisque je propose de créer une tranche supplémentaire. Elle ne vient donc rien retirer aux autres secteurs et offre bien au contraire la possibilité de flécher les sommes dont il s’agit en direction de la recherche.
Évidemment, il est plus intéressant de placer son argent dans des secteurs qui permettront un retour financier au bout de cinq ans.
Imaginez, mes chers collègues, que vous ayez le choix de placer de l’argent soit dans les fonds propres d’une entreprise, avec la possibilité de le retrouver, assorti d’une éventuelle évolution positive, le tout net de droits, soit dans une fondation, avec le risque de ne rien en retirer du tout. Nous savons tous d’avance où ira le placement !
Quoi qu’il en soit, j’accepte de retirer mon amendement, madame la ministre, mais je vous prendrai au mot : si nous constatons au 15 septembre qu’il n’y a eu aucun placement de l’ISF dans les fondations, je déposerai un amendement similaire lors de l’examen du projet de loi de finances, si du moins je suis réélu sénateur !
Sourires
Dans ce cas, vous devez me promettre, madame la ministre, que ma proposition recevra un avis favorable de la part du Gouvernement. Je vous en remercie d’avance et, pour l’heure, je retire l’amendement.
I. - Le fonds de dotation est une personne morale de droit privé à but non lucratif qui reçoit et gère, en les capitalisant, des biens et droits de toute nature qui lui sont apportés à titre gratuit et irrévocable et utilise les revenus de la capitalisation en vue de la réalisation d'une œuvre ou d'une mission d'intérêt général ou les redistribue pour assister une personne morale à but non lucratif dans l'accomplissement de ses œuvres et de ses missions d'intérêt général.
Le fonds de dotation est créé par une ou plusieurs personnes physiques ou morales pour une durée déterminée ou indéterminée.
II. - Le fonds de dotation est déclaré à la préfecture du département dans le ressort duquel il a son siège social. Cette déclaration est assortie du dépôt de ses statuts.
Le fonds de dotation jouit de la personnalité morale à compter de la date de publication au Journal officiel de la déclaration faite à la préfecture.
Les modifications des statuts du fonds sont déclarées et rendues publiques selon les mêmes modalités ; elles ne sont opposables aux tiers qu'à compter de leur publication.
Toute personne a droit de prendre connaissance, sans déplacement, des statuts du fonds de dotation et peut s'en faire délivrer, à ses frais, une copie ou un extrait.
III. - Le fonds de dotation est constitué par les dotations en capital qui lui sont apportées auxquelles s'ajoutent les dons et legs qui lui sont consentis. L'article 910 du code civil n'est pas applicable à ces libéralités.
Le ou les fondateurs peuvent apporter une dotation initiale au fonds.
Aucun fond public, de quelque nature qu'il soit, ne peut être versé à un fonds de dotation. Il peut être dérogé à cette interdiction, à titre exceptionnel, pour une œuvre ou un programme d'actions déterminé, au regard de son importance ou de sa particularité. Les dérogations sont accordées par arrêté conjoint des ministres chargés de l'économie et du budget.
Les ressources du fonds sont constituées des revenus de ses dotations, des produits des activités autorisées par les statuts et des produits des rétributions pour service rendu.
Le fonds peut faire appel à la générosité publique après autorisation administrative. Les dons issus de la générosité publique peuvent être joints à la dotation en capital du fonds de dotation.
Le fonds de dotation dispose librement de ses ressources dans la limite de son objet social.
Il ne peut disposer des dotations en capital dont il bénéficie ni les consommer et ne peut utiliser que les revenus issus de celles-ci.
Les modalités de gestion financière du fonds de dotation sont fixées par décret en Conseil d'État.
IV. - Un legs peut être fait au profit d'un fonds de dotation qui n'existe pas au jour de l'ouverture de la succession sous la condition qu'il acquière la personnalité morale dans l'année suivant l'ouverture de celle-ci. Dans ce cas, la personnalité morale du fonds de dotation rétroagit au jour de l'ouverture de la succession.
À défaut de désignation par le testateur des personnes chargées de constituer le fonds de dotation, il est procédé à cette constitution par une fondation reconnue d'utilité publique, un fonds de dotation, ou une association reconnue d'utilité publique. Pour l'accomplissement des formalités de constitution du fonds, les personnes chargées de cette mission ou le fonds de dotation désigné à cet effet ont la saisine sur les meubles et immeubles légués. Ils disposent à leur égard d'un pouvoir d'administration à moins que le testateur ne leur ait conféré des pouvoirs plus étendus.
V. - Le fonds de dotation est administré par un conseil d'administration qui comprend au minimum trois membres nommés, la première fois, par le ou les fondateurs.
Les statuts déterminent la composition ainsi que les conditions de nomination et de renouvellement du conseil d'administration.
VI. - Le fonds de dotation établit chaque année des comptes qui comprennent au moins un bilan et un compte de résultat. Ces comptes sont publiés au plus tard dans un délai de six mois suivant l'expiration de l'exercice. Le fonds nomme au moins un commissaire aux comptes et un suppléant, choisis sur la liste mentionnée à l'article L. 822-1 du code de commerce, dès lors que le montant total de ses ressources dépasse 10 000 € en fin d'exercice.
Les peines prévues par l'article L. 242-8 du code de commerce sont applicables au président et aux membres du conseil d'administration du fonds de dotation qui ne produisent pas, chaque année, des comptes dans les conditions prévues à l'alinéa précédent. Les dispositions des articles L. 820-4 de ce code leur sont également applicables.
Le commissaire aux comptes doit appeler l'attention du président et des membres du conseil d'administration du fonds de dotation sur tout fait de nature à compromettre la continuité de l'activité qu'il a relevé au cours de sa mission. Il peut demander au conseil d'administration d'en délibérer ; il assiste alors à cette délibération, y présente ses observations et répond aux questions qui lui sont posées. Si le commissaire aux comptes constate que les dispositions relatives à la tenue des comptes ne sont pas observées ou que la continuité de l'activité est compromise par des irrégularités, il établit un rapport spécial qu'il adresse à l'autorité administrative.
VII. - L'autorité administrative s'assure de la régularité du fonctionnement du fonds de dotation. À cette fin, elle peut se faire communiquer tous documents et procéder à toutes investigations utiles.
Le fonds de dotation adresse chaque année à l'autorité administrative un rapport d'activité auquel sont joints le rapport du commissaire aux comptes et les comptes annuels.
Si l'autorité administrative constate des dysfonctionnements graves affectant la réalisation de l'objet du fonds de dotation, elle peut, après mise en demeure non suivie d'effet, décider, par un acte motivé qui fait l'objet d'une publication au Journal officiel, de suspendre l'activité du fonds pendant une durée de six mois au plus ou, lorsque la mission d'intérêt général n'est plus assurée, de saisir l'autorité judiciaire aux fins de sa dissolution.
Les modalités d'application du présent VII sont fixées par décret en Conseil d'État.
VIII. - La dissolution du fonds de dotation peut être statutaire ou volontaire. Elle peut également être judiciaire, notamment dans le cas prévu au troisième alinéa du VII. Elle fait l'objet de la publication prévue au même alinéa.
Il est procédé à la liquidation dans les conditions prévues par les statuts ou, à défaut, à l'initiative du liquidateur désigné par l'autorité judiciaire.
À l'issue de la liquidation du fonds, l'ensemble de son actif net est transféré à un autre fonds de dotation ou à une fondation reconnue d'utilité publique.
Un décret en Conseil d'État prévoit les conditions d'application du présent VIII et, notamment, les limites dans lesquelles un fonds de dotation à durée déterminée peut utiliser sa dotation à l'expiration du délai prévu pour la réalisation de son objet.
IX. - Après le 6° de l'article L. 562-2-1 du code monétaire et financier, il est inséré un 7° ainsi rédigé :
« 7° La constitution ou la gestion de fonds de dotation. »
X. - Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° Le 1 de l'article 200 est ainsi modifié :
a) Après le f, il est inséré un g ainsi rédigé :
« g) De fonds de dotation :
« 1° Répondant aux caractéristiques mentionnées au b ;
« 2° Ou dont la gestion est désintéressée et qui reversent les revenus tirés des dons et versements mentionnés au premier alinéa du présent 1 à des organismes mentionnés aux a à f ou à la Fondation du patrimoine. Ces organismes délivrent aux fonds de dotation une attestation justifiant le montant et l'affectation des versements effectués à leur profit. » ;
b) Dans le dernier alinéa, le mot : « septième » est remplacé par le mot : « huitième » ;
2° Le premier alinéa du 1 bis de l'article 206 est ainsi modifié :
a) Après les mots : « fondations d'entreprise », sont insérés les mots : «, les fonds de dotation » ;
b) Il est ajouté une phrase ainsi rédigée :
« Sont réputées lucratives les activités de gestion et de capitalisation, par les fonds de dotation, de dons, droits et legs dont les fruits sont versés à des organismes publics ayant une activité exclusivement lucrative ou à des organismes autres que ceux mentionnés au présent alinéa. » ;
3° Dans le premier alinéa du 5 de l'article 206, après les mots : « autre disposition », sont insérés les mots : «, à l'exception des fondations reconnues d'utilité publique et des fonds de dotation, » ;
4° Le III de l'article 219 bis est abrogé ;
5° Après le f du 1 de l'article 238 bis, il est inséré un g ainsi rédigé :
« g) De fonds de dotation :
« 1° Répondant aux caractéristiques mentionnées au a ;
« 2° Ou dont la gestion est désintéressée et qui reversent les revenus tirés des versements mentionnés au premier alinéa du présent 1 à des organismes mentionnés aux a à e bis du présent 1, au 4 ou à la Fondation du patrimoine. Ces organismes délivrent aux fonds de dotation une attestation justifiant le montant et l'affectation des versements effectués à leur profit. » ;
6° L'article 1740 A est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L'amende prévue au premier alinéa s'applique également en cas de délivrance irrégulière de l'attestation mentionnée à la seconde phrase du 2° du g du 1 de l'article 200 et à la seconde phrase du 2° du g du 1 de l'article 238 bis. »
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 865, présenté par M. Gouteyron, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le I de cet article :
I. - Le fonds de dotation est une personne morale de droit privé à but non lucratif qui reçoit et gère, en les capitalisant, des biens et droits de toute nature qui lui sont apportés à titre gratuit et irrévocable et utilise les revenus de la capitalisation en vue de la réalisation d'une œuvre ou d'une mission d'intérêt général menée par des organismes publics ou privés d'enseignement, hospitaliers, culturels, de santé ou de recherche, des fondations reconnues d'utilité publique et des associations reconnues d'utilité publique, et ou les redistribue pour assister une personne morale à but non lucratif mentionnée au présent alinéa dans l'accomplissement de ses missions d'intérêt général.
Le fonds de dotation est créé par une ou plusieurs personnes physiques ou morales pour une durée déterminée ou indéterminée.
Cet amendement n’est pas soutenu.
La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.
Je ne peux pas reprendre formellement cet amendement puisque la commission spéciale n’y a pas été favorable.
Néanmoins, je souhaite relayer notre collègue Adrien Gouteyron et me faire l’écho devant vous, madame le ministre, des questions qu’il escomptait poser lui-même au Gouvernement. Les fondations françaises se sont effectivement inquiétées de la coexistence de la fondation classique « à la française » et du fonds de dotation.
Cette inquiétude s’est exprimée au travers de documents qui ont été adressés à plusieurs d’entre nous. Adrien Gouteyron, à juste titre, y a été sensible. Il en résulte donc les amendements n° 865 à 868.
Même si ces amendements ne sont pas soutenus, je souhaite, au nom de la commission spéciale, madame le ministre, qu’il vous soit possible de répondre à leur auteur.
À mon sens, le fonds de dotation est un dispositif nouveau qui devrait permettre de susciter de nouvelles initiatives, lesquelles n’auraient probablement pas pu naître sous le régime juridique antérieur, compte tenu de ses rigidités.
Il me semble, mais c’est un avis personnel, que la coexistence des fonds de dotation et des fondations, au sens classique du terme, doit pouvoir être envisagée sans risque particulier pour ces dernières.
En tout état de cause, il serait utile, madame la ministre, que vous puissiez apporter quelques éléments d’information en réponse à la démarche de notre collègue Adrien Gouteyron.
L'amendement n° 370, présenté par Mme Bricq, MM. Massion, Repentin et Angels, Mme Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Pastor, Raoul, Sueur, Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du I de cet article par un membre de phrase ainsi rédigé :
, notamment pour soutenir des organismes d'intérêt général ayant un caractère social, humanitaire, culturel ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, notamment pour financer l'achat d'objets ou d'œuvres d'art destinés à rejoindre les collections d'un musée de France accessibles au public, ou à la diffusion de la culture, de la langue et des connaissances scientifiques françaises.
La parole est à Mme Bariza Khiari.
L’amendement que nous proposons vise à orienter les fonds de dotation vers le soutien à des organismes d’intérêt général ayant un caractère social, humanitaire ou culturel.
J’ai pris bonne note, en commission, monsieur le rapporteur, de votre remarque : tous les organismes à caractère cultuel seront exclus du dispositif.
D’une façon générale, les financements privés bénéficient en priorité aux établissements les plus attractifs et, le plus souvent, déjà les plus richement dotés : cette situation ne peut qu’entraîner des déséquilibres entre les établissements, mais aussi entre les territoires.
Par ailleurs, ces financements peuvent inciter à un désengagement de l’État ou à une substitution partielle des subventions publiques, le tout au détriment des missions d’intérêt général.
Afin de limiter ces risques, l’amendement tend à orienter les fonds de dotation au soutien d’organismes ayant plus particulièrement un caractère social, humanitaire ou culturel.
En effet, d’une façon générale, l’introduction d’un mécanisme de financement privé déroge à notre modèle de financement et de prise en charge des missions d’intérêt général qui repose habituellement sur les ressources fiscales, l’État et les collectivités territoriales décidant seuls de ce qui relève du service public.
La logique de la capitalisation et l’association inévitable des donateurs à l’utilisation des fonds dégagés devraient sans doute conduire à de nouveaux modes de détermination du bien public, avec toutes les dérives que l’on peut craindre.
Nous vous proposons donc, au travers de cet amendement, d’essayer d’orienter autant que possible les fonds de dotation vers des organismes à caractère social, humanitaire ou culturel.
L'amendement n° 1006, présenté par Mme Garriaud-Maylam, est ainsi libellé :
Compléter le premier alinéa du I de cet article par les mots :
en France ou à l'étranger
La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam.
Il s’agit simplement, par cet amendement, d’obtenir une précision du Gouvernement, monsieur le président.
Quel est l’avis de la commission sur les deux amendements en discussion commune ?
Madame la ministre, l’amendement n° 370 a conduit à évoquer une question en effet très significative, et j’appelle, à la suite de Mme Khiari, votre attention sur ce point.
Les fonds de dotation ne doivent pas être un réceptacle pour une action militante, idéologique, théologique, cultuelle. C’est un souci qui est exprimé. Je crois qu’il est bon de veiller à ce que de telles dérives ne puissent pas avoir lieu sur notre territoire.
En ce qui concerne l’amendement lui-même, sa rédaction ne me paraît pas vraiment de nature à atteindre les objectifs visés, notamment parce qu’il utilise beaucoup le terme « notamment ».
Sourires
Toutefois, le fait d’avoir, grâce à cet amendement, posé la question d’éventuelles dérives enrichira notre débat.
Je suppose que, lorsque Mme la ministre vous aura répondu, vous serez en mesure, madame Khiari, de retirer votre amendement.
Quant à Joëlle Garriaud-Maylam, elle appelle l’attention sur un point tout à fait important.
Selon notre lecture, le texte ne limitant pas explicitement le champ d’intervention des fonds de dotation à la France, il serait possible, madame Garriaud-Maylam, que vous ayez d’ores et déjà satisfaction. Encore faut-il que cela soit confirmé.
En toute hypothèse, il conviendrait de veiller à ce que les avantages fiscaux consentis ne profitent qu’à des missions réellement effectuées sur le territoire français.
Cet amendement, là aussi, me semble de nature à permettre des clarifications utiles. Lorsque le Gouvernement se sera exprimé, peut-être pourrez-vous également retirer votre amendement, madame Garriaud-Maylam ?
Monsieur le rapporteur, vous avez attiré l’attention du Gouvernement sur l’amendement n° 865. Il s’agira pour moi non pas de donner un avis, mais de répondre à son auteur.
M. Gouteyron soulève la question de l’utilisation des dotations telles qu’elles sont définies ici, à savoir très clairement par rapport à l’intérêt général.
Or l’intérêt général est une notion jurisprudentielle elle-même très clairement définie par les tribunaux, et qui exclut l’objet purement cultuel.
Néanmoins, il faut en être bien conscient, un organisme à caractère cultuel, mais visant un objectif qui, lui, remplirait les conditions de l’intérêt général et répondrait à ses critères, ne serait pas exclu du dispositif des fonds de dotation.
Un tel organisme pourrait donc être éligible au dispositif s’il entrait dans le cadre du champ d’application du fonds de dotation tel que nous le définissons ici.
M. Adrien Gouteyron était également soucieux des risques de détournements éventuels.
Les détournements sont inhérents, et nous le savons tous, à toute structure juridique.
En l’espèce, dans la mesure où les fonds de dotation sont encadrés et font l’objet d’une surveillance spécifique, non seulement par les commissaires aux comptes, mais aussi par l’autorité administrative et, lorsqu’ils font appel à la générosité publique, par la Cour des comptes, nous pouvons penser que les risques de détournement sont bien circonscrits par ces différents modes de contrôle.
J’espère, monsieur le rapporteur, que ces réponses pourront satisfaire M. Adrien Gouteyron, que vous avez relayé.
Sur l’amendement n° 370, qui vise à orienter les fonds de dotation vers le soutien à des organismes d’intérêt général ayant un caractère social, humanitaire ou culturel, je souligne que ces trois aspects sont inclus dans l’objet même des fonds de dotation. Toutefois, il ne me paraît pas souhaitable de restreindre les fonds de dotation à ces seuls éléments, puisqu’il faut également inclure l’enseignement, la recherche ou encore la santé.
L’attractivité des fonds de dotation subsiste pour tous les domaines d’activité et aucun de ceux qui sont mentionnés dans votre amendement n’est exclu, madame Khiari.
Pour cette raison, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement. Sinon, j’émettrais un avis défavorable.
Madame Garriaud-Maylam, votre amendement n° 1006 vise à préciser que l’action des fonds de dotation n’est pas strictement limitée au territoire national. Comme toute association, fondation, établissement public ou entreprise commerciale, un fonds de dotation qui est constitué en France, qui est donc une entité juridique française, peut parfaitement prolonger son action au-delà de notre territoire. Il peut exercer son action à l’étranger ou, au contraire, décider de limiter son activité au territoire français. Mais cela relèvera de la définition de l’objet social tel que le fonds de dotation le constituera et ce sera propre à chacun des organismes concernés.
Donc, sous le bénéfice de ces explications qui, je l’espère, vous auront éclairée sur l’activité hors des frontières des fonds de dotation - possible si les fondateurs le décident, restreinte si les fondateurs en décident autrement -, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.
Dans la mesure où, s’agissant de ces fonds de dotation, Mme la ministre vient de nous préciser que les domaines visés par l’amendement étaient déjà couverts, je le retire, monsieur le président.
Je reconnais effectivement, monsieur Marini, que la rédaction aurait mérité d’être plus rigoureuse.
Je remercie Mme le ministre de ses précisions, qui sont extrêmement intéressantes.
Nous avions en effet de véritables interrogations quant à l’application possible de ces dispositions en dehors de nos frontières. Comme vous le savez, nous avons de très importants besoins. Je ne citerai qu’un exemple, celui des lycées français à l’étranger, qui ont besoin d’être aidés dans un certain nombre de pays.
Donc, à partir du moment où vous m’affirmez que ces fonds peuvent être utilisés à l’étranger, je retire bien volontiers mon amendement en vous renouvelant mes remerciements.
M. Christian Cointat applaudit.
L'amendement n° 1006 est retiré.
L'amendement n° 866, présenté par M. Gouteyron, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le premier alinéa du III de cet article :
Le fonds est constitué par les dotations en capital qui lui sont apportées auxquelles s'ajoutent les donations et legs qui lui sont consentis et qui sont assimilées aux dotations en capital. Les dispositions de l'article 910 du code civil sont applicables à ces libéralités.
Cet amendement n'est pas soutenu.
Je suis saisi de deux amendements présentés par Mme N. Goulet.
L'amendement n° 304 est ainsi libellé :
Compléter la première phrase du cinquième alinéa du III de cet article par les mots :
dont les modalités sont fixées par décret
L'amendement n° 305 est ainsi libellé :
Après la première phrase du cinquième alinéa du III de cet article, insérer une phrase ainsi rédigée :
Tout refus devra être motivé.
La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour présenter ces deux amendements.
Dans l’état du projet de loi, les modalités selon lesquelles l’autorisation administrative ouvre le droit au fonds de dotation de faire appel à la générosité publique me semblent un peu vagues. Il me paraît donc utile de compléter l’article 37 du projet de loi en précisant que les modalités d’application seront fixées par décret.
L’amendement n° 305 me semble tout aussi important. En précisant que « tout refus devra être motivé », il est dans la droite ligne des dispositions adoptées par notre Haute Assemblée depuis le début de l’examen de ce texte.
L’objet de l’amendement n° 304 est de prévoir qu’un décret définira les modalités selon lesquelles une autorisation administrative ouvre le droit au fonds de dotation de faire appel à la générosité publique. En effet, selon notre collègue Nathalie Goulet, les dispositions du projet de loi seraient trop vagues. Peut-être un décret serait-il utile. Je suggère à l’auteur de cet amendement de s’en remettre, comme la commission, à l’avis du Gouvernement.
L’amendement n° 305 prévoit que l’autorité administrative doit motiver tout refus d’accorder une autorisation à un fonds de dotation de faire appel à la générosité publique.
Cette obligation de motivation semble aller dans le sens d’une bonne gouvernance et favoriser la transparence. La commission y est donc plutôt favorable, mais elle souhaiterait connaître l’avis du Gouvernement.
Le Gouvernement, à chaque fois qu’on lui propose d’intervenir par décret, incline à émettre un avis favorable. C’est donc le cas pour cet amendement n° 304, madame Goulet, qui est effectivement opportun.
En revanche, dans l’amendement n° 305, vous souhaitez que le refus soit nécessairement motivé. Cette proposition me paraît superfétatoire puisque, de toute façon, la décision entre dans le champ de la loi du 11 juillet 1979 qui impose déjà une telle obligation.
Donc, le Gouvernement est favorable à l’amendement n° 304 et souhaite le retrait de l’amendement n° 305.
Non, je vais le retirer, monsieur le président.
Toutefois, je souhaite revenir un instant sur l’amendement n° 370, qui a été retiré par Mme Khiari et qui concernait le domaine cultuel.
Inévitablement, dans un certain nombre de départements ruraux, des fonds de dotation se voueront à l’entretien du patrimoine cultuel ; on pense aux églises de campagne, qui soulèvent de très importants problèmes de financement. L’intérêt général dans ces cas-là sera cultuel parce que la mission de ce fonds sera liée non pas à l’activité religieuse en tant que telle mais aux bâtiments dédiés au culte, qu’il s’agira par exemple d’entretenir. Il est donc important que le décret soit précis sur ce point.
Cela dit, je retire l’amendement, monsieur le président.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 867, présenté par M. Gouteyron, est ainsi libellé :
Dans le cinquième alinéa du III de cet article, remplacer le mot :
peuvent
par le mot :
doivent
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 19, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l'avant-dernier alinéa du III de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
Toutefois, par dérogation aux dispositions du premier alinéa du I et de l'alinéa précédent, les statuts peuvent fixer les conditions dans lesquelles la dotation en capital peut être consommée.
La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.
L’amendement n° 19 tend à permettre aux fonds de dotation de fonctionner selon le système dit de la fondation à capitaux consomptibles.
Je m’explique.
Une donation est faite d’un montant de capitaux consacrés à la réalisation d’un investissement et ce montant de capitaux est consommé le temps nécessaire pour la réalisation de l’investissement. C’est une modalité qui existe naturellement dans le statut des fondations.
Il paraîtrait logique que les fonds de dotation, formule plus souple et plus contractuelle, puissent non seulement gérer sur la durée des capitaux dont les intérêts seraient affectés à des finalités d’intérêt général, mais aussi utiliser des capitaux délégués pour l’acquisition d’un équipement ou la réalisation d’un investissement, et le temps nécessaire pour ce faire.
Le sous-amendement n° 1071, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I.- Compléter cet amendement par un alinéa ainsi rédigé :
« II.- Dans le premier alinéa du 5 du texte proposé par le 3° du X de cet article pour l'article 206 du code général des impôts, remplacer les mots : , à l'exception des fondations reconnues d'utilité publique et des fonds de dotation, par les mots : , à l'exception, d'une part, des fondations reconnues d'utilité publique et, d'autre part, des fonds de dotation dont les statuts ne prévoient pas la possibilité de consommer leur dotation en capital, . »
II.- En conséquence, faire précéder le début de cet amendement par un I.
La parole est à Mme la ministre, pour défendre le sous-amendement n° 1071 et donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 19.
Le Gouvernement est favorable à l’adoption de cet amendement visant à rendre la dotation en capital consomptible, sous réserve de l’adoption du sous-amendement n° 1071, relatif aux mesures fiscales qui doivent accompagner le mécanisme de la dotation consomptible.
Le sous-amendement du Gouvernement prévoit que seuls les fonds de dotation qui n’auraient pas opté pour la dérogation les autorisant à consommer leur dotation en capital puissent bénéficier de l’exonération d’impôt sur les sociétés au titre des revenus tirés des placements.
On peut choisir soit une voie, soit l’autre ; soit on consomme et on ne bénéficie pas de l’exonération, soit on ne consomme pas et, dans ce cas, on bénéficie de l’exonération.
Le sous-amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 868, présenté par M. Gouteyron, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le premier alinéa du V de cet article :
Le fonds de dotation est administré par un conseil d'administration qui comprend au minimum trois membres nommés, la première fois, par le ou les fondateurs, dont la majorité doit être choisie parmi des personnalités qualifiées, indépendantes des fondateurs, des contributeurs principaux du fonds et des organismes bénéficiaires des revenus de la capitalisation des actifs reçus par le fonds.
Cet amendement n'est pas soutenu.
L'amendement n° 20, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après le premier alinéa du VI de cet article, insérer un alinéa ainsi rédigé :
Le fonds de dotation alimenté par des dons issus de la générosité du public établit chaque année des comptes qui comprennent un bilan, un compte de résultat et une annexe. L'annexe comporte le compte d'emploi annuel des ressources collectées auprès du public.
La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.
Mme le ministre a fait allusion tout à l’heure aux contrôles exercés sur les comptes du fonds de dotation, notamment au rôle du ou des commissaires aux comptes. C’est l’objet des deux amendements n° 20 et 21 que propose la commission.
L’amendement n° 20 concerne les obligations comptables, que nous souhaitons préciser.
L’amendement n° 21 tend à renforcer l’exercice du pouvoir d’alerte des commissaires aux comptes en calquant ce régime sur celui qui est en vigueur dans les sociétés commerciales.
L'amendement est adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 21, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit le dernier alinéa du VI de cet article :
Lorsque le commissaire aux comptes relève, à l'occasion de l'exercice de sa mission, des faits de nature à compromettre la continuité de l'activité, il demande des explications au président du conseil d'administration, dans des conditions fixées par décret. Le président du conseil d'administration est tenu de lui répondre sous quinze jours. Le commissaire aux comptes en informe l'autorité administrative. En cas d'inobservation de ces dispositions ou s'il constate qu'en dépit des décisions prises la continuité de l'activité demeure compromise, le commissaire aux comptes établit un rapport spécial et invite, par un écrit dont la copie est envoyée à l'autorité administrative, le dirigeant à faire délibérer sur les faits relevés un conseil d'administration convoqué dans des conditions et délais fixés par décret. Si, à l'issue de la réunion du conseil d'administration, le commissaire aux comptes constate que les décisions prises ne permettent pas d'assurer la continuité de l'activité, il informe de ses démarches l'autorité administrative et lui en communique les résultats.
Cet amendement a été défendu.
L'amendement n° 734, présenté par Mme Dini et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
I. - Dans la deuxième phrase du dernier alinéa du VI de cet article, remplacer les mots :
peut demander
par le mot :
demande
II. - Rédiger comme suit la dernière phrase du même alinéa :
S'il constate qu'en dépit des dispositions prises la continuité de l'exploitation demeure compromise, le commissaire aux comptes établit un rapport spécial qu'il présente au conseil d'administration et dont il envoie une copie à l'autorité administrative.
III. - Compléter le même alinéa par une phrase ainsi rédigée :
« Il établit également un rapport spécial à destination du conseil d'administration, s'il constate que les dispositions relatives à la tenue des comptes ne sont pas respectées.
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Le rôle du commissaire aux comptes dans le cas où la continuité d'exploitation serait compromise n'apparaît pas très clairement dans cet article et n'entre pas dans les dispositions habituelles et de droit commun de la procédure d'alerte, alors que ce que l'on demande au commissaire aux comptes s'en rapproche.
Par ailleurs, la notion d'irrégularités apparaît également peu précise.
Il est donc proposé, par cet amendement, d'une part, de créer une obligation pour le professionnel de demander au conseil d'administration de délibérer et, d'autre part, de préciser cette procédure d'alerte pour la rapprocher de celle qui est prévue par le droit commun.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 18 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I.- Rédiger comme suit le 1° du X de cet article :
1° Le 1 de l'article 200 est ainsi modifié :
a) Après le f, il est inséré un g ainsi rédigé :
« g) De fonds de dotation :
« 1° Répondant aux caractéristiques mentionnées au b ;
« 2° Ou dont la gestion est désintéressée et qui reversent les revenus tirés des dons et versements mentionnés au premier alinéa du présent 1 à des organismes mentionnés aux a à f ou à la Fondation du patrimoine dans les conditions mentionnées aux deux premiers alinéas du 2 bis, ou à une fondation ou association reconnue d'utilité publique agréée par le ministre chargé du budget dans les conditions mentionnées au dernier alinéa du 2 bis . Ces organismes délivrent aux fonds de dotation une attestation justifiant le montant et l'affectation des versements effectués à leur profit. » ;
b) Dans le dernier alinéa, le mot : « septième » est remplacé par le mot : « huitième » ;
II.- Rédiger comme suit le 5° du X de cet article :
5° Après le f du 1 de l'article 238 bis, il est inséré un g ainsi rédigé :
« g) De fonds de dotation :
« 1° Répondant aux caractéristiques mentionnées au a ;
« 2° Ou dont la gestion est désintéressée et qui reversent les revenus tirés des dons et versements mentionnés au premier alinéa du présent 1 à des organismes mentionnés aux a à e bis ou à la Fondation du patrimoine dans les conditions mentionnées aux deux premiers alinéas du f, ou à une fondation ou association reconnue d'utilité publique agréée par le ministre chargé du budget dans les conditions mentionnées au quatrième alinéa du f . Ces organismes délivrent aux fonds de dotation une attestation justifiant le montant et l'affectation des versements effectués à leur profit. » ;
III. - Pour compenser les pertes de recettes résultant des I et II ci-dessus, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes résultant pour l'État de l'inclusion des fonds de dotation parmi les supports permettant aux donateurs de bénéficier d'avantages fiscaux lorsque ces fonds de dotation subventionnent la Fondation du patrimoine ou réalisent des travaux d'entretien ou d'accessibilité sur des monuments historiques classés ou inscrits est compensée à due concurrence par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.
Il s’agit d’inclure les fonds de dotation parmi les supports permettant à des donateurs de bénéficier d’avantages fiscaux lorsqu’il s’agit de subventionner la Fondation du patrimoine ou de réaliser des travaux d’entretien ou d’accessibilité sur des monuments historiques classés ou inscrits.
Vous le savez, madame la ministre, ces personnes tout à fait dignes d’éloge et d’estime qui investissent pour sauvegarder, mettre en valeur, ouvrir au public des monuments historiques privés, classés ou inscrits, sont à l’heure actuelle inquiètes. Cette disposition serait de bon aloi pour leur montrer que leurs efforts sont appréciés à leur juste prix
Le Gouvernement est favorable à cet amendement et se joint aux commentaires élogieux de M. Marini pour louer l’enthousiasme, l’énergie et le goût du sacrifice dont font preuve un certain nombre des propriétaires de ces monuments historiques qui sont ainsi entretenus et rendus accessibles au public.
Le Gouvernement lève le gage.
Il s’agit donc de l'amendement n° 18 rectifié bis.
La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour explication de vote.
Je voudrais en fait suggérer à M. Marini une rectification à son amendement. Il me paraît en effet souhaitable d’ajouter la mention « ou présentant un caractère architectural ». Cela réglerait le problème de nos malheureuses églises rurales. Il n’y a pas que les monuments historiques ; beaucoup d’églises sont visitées qui ne sont pas inscrites et qui présentent un intérêt architectural.
Ma chère collègue, peut-être faudrait-il penser à aborder cette question lors de la discussion de la loi de finances pour 2009 ou de la loi de finances rectificative pour 2008 ?
J’avais le sentiment que le critère du classement ou de l’inscription à l’inventaire des monuments historiques était susceptible d’emporter l’accord du Gouvernement. Il n’est pas toujours facile de convaincre… Peut-être pourrons-nous avancer ultérieurement dans la direction que vous souhaitez, mais le critère que je propose est clair et net alors que la notion d’intérêt architectural reste plus difficile à apprécier. S’agissant de nos chères églises rurales, …
Il n’y a pas que les églises ! Il y aussi les temples et les synagogues !
… plusieurs d’entre nous y sont particulièrement attachés ; n’est-ce pas, chers collègues socialistes ? Vous vous souvenez certainement de cette affiche si célèbre, représentative de l’équilibre de nos territoires et de la permanence de la France, …
… à l’époque où il n’y avait pas d’éoliennes ! Nous avons tous cette image présente à l’esprit, mais nous ne pouvons peut-être pas aller beaucoup plus loin avec l’amendement actuellement en discussion.
J’ai commis un péché de jeunesse, monsieur le rapporteur, mais je présenterai un amendement en ce sens lors de la discussion de la prochaine loi de finances.
L’amendement est adopté.
L’article 37 est adopté.
L’amendement n° 613 rectifié ter, présenté par M. Adnot, Mme Desmarescaux et M. A. Dupont, est ainsi libellé :
Après l’article 37, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le I de l’article 885-0 V bis A du code général des impôts est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« 8° Des fonds de dotation répondant aux conditions fixées au g du 1 de l’article 200 ;
« 9° Des fondations universitaires et des fondations partenariales mentionnées respectivement aux articles L. 719-12 et L. 719-13 du code de l’éducation lorsqu’elles répondent aux conditions fixées au b du 1 de l’article 200. »
II. - L’article 795 du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« 14° Les dons et legs consentis aux fonds de dotation répondant aux conditions fixées au g du 1 de l’article 200. »
III. - La perte de recettes pour l’État résultant des I et II ci-dessus est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Philippe Adnot.
Le présent amendement vise un double objectif.
D’une part, la réduction d’impôt de solidarité sur la fortune en faveur des dons à certains organismes d’intérêt général serait étendue aux dons consentis au profit tant des fonds de dotation créés par l’article 37 du présent projet de loi que des fondations universitaires et partenariales mentionnées aux articles L. 719-12 et L. 719-13 du code de l’éducation. Cette extension permettrait d’élargir les sources potentielles de financement de ces fonds et fondations et d’assurer ainsi le développement de ces structures qui interviennent, notamment, dans le domaine de la recherche.
D’autre part, cet amendement tend à instituer une exonération des droits de mutation à titre gratuit en faveur des dons et legs consentis aux fonds de dotation. Cette mesure a pour objet d’éviter que les dons consentis à ces fonds ne soient imposés au taux de 60 %. Ainsi, l’amendement vise à compléter l’incitation aux donateurs sous forme de réductions d’impôt sur le revenu ou d’impôt sur les sociétés prévues aux articles 200 et 238 bis du code général des impôts. À défaut, ces dons seraient diminués du montant des droits de mutation.
La commission est tout à fait favorable à cet amendement en raison, notamment, des rectifications apportées par son auteur, qui a tenu compte d’une suggestion formulée lors d’un débat en son sein.
Nous remercions Philippe Adnot de ces rectifications et sommes ainsi renforcés dans notre appréciation tout à fait favorable de son initiative.
Le Gouvernement émet un avis favorable, et lève le gage.
L’amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 37.
Dans le premier alinéa du I de l’article 39 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, le taux : « 2, 5 % » est remplacé par le taux : « 8 % ».
Je souhaite intervenir sur l’article 37 bis, qui concerne le secteur audiovisuel dont la commission des affaires culturelles a la charge. Cet article, introduit par l’Assemblée nationale, tend à relever le seuil d’audience au-delà duquel s’applique le dispositif anti-concentration prévu par la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, et il me paraît particulièrement judicieux.
La loi prévoit actuellement que les chaînes de la télévision numérique terrestre, ou TNT, dont l’audience dépasse 2, 5 % de l’audience totale des services de télévision ne peuvent être détenues par un même actionnaire à plus de 49 % de leur capital.
Ce seuil de 2, 5 % d’audience correspondait à l’état du marché avant le lancement de la TNT. Or le succès de ce mode de diffusion a bouleversé ces données et il convient d’adapter ces dernières à la situation actuelle.
Le dispositif anti-concentration va en effet s’appliquer très vite à la plupart des chaînes de la TNT, obligeant leurs actionnaires à sortir partiellement de leur capital. Rappelons que ces chaînes sont détenues par des groupes audiovisuels qui ont eu le mérite de faire le pari du développement de la TNT.
Chacune de ces chaînes connaît un niveau d’audience nationale compris entre 1 % et 2 %, pour une couverture de 60 % à 65 % seulement de la population. Chaque année, ce niveau d’audience double, voire triple. De plus, près de 70 % des foyers français continuent de regarder la télévision uniquement en mode analogique et n’ont pas accès à la TNT.
Sur la seule base des foyers équipés d’un adaptateur TNT, les niveaux d’audience de ces chaînes sont déjà pour la plupart de l’ordre de 3 %. Avec l’extension de la couverture de la TNT à l’ensemble du territoire et l’arrêt de la diffusion analogique zone par zone jusqu’à son extinction, leur niveau d’audience va encore augmenter.
Or ces chaînes sont encore économiquement fragiles. Elles se sont engagées, à la demande des pouvoirs publics, à étendre de manière substantielle leur couverture du territoire, ce qui induit des investissements financiers extrêmement lourds. Par ailleurs, elles doivent et devront contribuer à la création d’œuvres originales.
Le maintien du seuil de 2, 5 % serait une anomalie, pour ne pas dire une absurdité économique. Il est paradoxal, en effet, de demander à ces groupes audiovisuels de se préparer et d’investir pour le passage au « tout numérique », tout en les mettant dans l’obligation de revendre le capital de leur chaîne parce qu’elles ont été performantes. Il n’est pas plus cohérent de les mettre dans une obligation de vente, créant mécaniquement une sous-valorisation de leur participation au sein de ces chaînes.
Si nous souhaitons réussir le pari du numérique, il est indispensable de garantir aux chaînes des conditions normales d’exploitation et de développement.
J’approuve donc le dispositif pragmatique de l’article 37 bis et le seuil d’audience de 8 % que prévoit ce dernier, seuil qui me paraît préférable, compte tenu de la croissance de l’audience que j’ai évoquée précédemment, à celui de 5 % que proposera Mme Morin-Dessailly dans l’amendement n° 726 rectifié.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 535 est présenté par Mmes Terrade, Beaufils et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L’amendement n° 1023 est présenté par M. Lagauche, Mmes Tasca, Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Massion, Pastor, Raoul, Repentin, Sueur, Yung et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Odette Terrade, pour défendre l’amendement n° 535.
Cet article 37 bis est issu d’un amendement de « commande », déposé par M. Frédéric Lefebvre, député des Hauts-de-Seine, département qui accueille nombre de sièges de chaînes de télévision, dont TF1 à Boulogne-Billancourt, M6 à Neuilly-sur-Seine, Direct 8, propriété du groupe Bolloré, à Puteaux.
La chaîne TF1 s’est d’ailleurs attaché les services de M. Laurent Solly, qui fut un temps collègue de travail de M. Lefebvre, au cabinet de Nicolas Sarkozy, place Beauvau. M. Lefebvre est donc très au fait des questions liées à l’audiovisuel !
Cet amendement, devenu l’article 37 bis du projet de loi, modifie le premier alinéa du I de l’article 39 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, dite loi Léotard, en assouplissant les règles anti-concentration dans le secteur de la télévision.
L’article 39 de la loi du 30 septembre 1986 dispose ceci : « Une même personne physique ou morale agissant seule ou de concert ne peut détenir, directement ou indirectement, plus de 49 % du capital ou des droits de vote d’une société titulaire d’une autorisation relative à un service national de télévision diffusé par voie hertzienne terrestre dont l’audience moyenne annuelle par un réseau de communications électroniques au sens du 2° de l’article L. 32 du code des postes et des communications électroniques, tant en mode analogique qu’en mode numérique, dépasse 2, 5 % de l’audience totale des services de télévision. »
Lors de l’adoption du régime juridique de la TNT, défini par la loi du 1er août 2000 modifiant la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, cette disposition a été étendue aux chaînes de la TNT.
L’article 37 bis modifie, pour les chaînes de la TNT, non pas le taux concernant la part de capital – la manœuvre aurait été trop grossière –, mais le taux d’audience totale, relevé de 2, 5 % à 8 %. Avec un tel taux, la règle anti-concentration a désormais peu de chance de se déclencher un jour s’agissant de la TNT ! Je précise que votre majorité, alors dans l’opposition, s’était opposée à cette TNT lors du vote de la loi du 1er août 2000. Il faut dire que TF1 et M6, mais surtout TF1, avaient œuvré très activement contre son développement, ne croyant pas, à l’époque, dans ce modèle de télévision !
En huit ans, les choses ont bien changé. Précisons que les opposants d’hier, TF1 comme M6, ont investi dans la TNT. La première détient 50 % de TMC, la seconde 100 % de W9. La TNT a peu à peu trouvé son public, et d’autres groupes, comme Bolloré, qui détient 100 % de Direct 8, ou Lagardère, propriétaire à 100 % de Virgin 17 et à 66 % de Gulli, leur ont emboîté le pas. Alors, pourquoi ce changement radical ?
À vous entendre aujourd’hui, ce changement de taux d’audience serait « vital pour soutenir le développement de la TNT ». Pourtant, les chaînes de la TNT ont très bien réussi à se développer avec l’ancien seuil.
Mme la ministre, qui a soutenu cet amendement, nous parle de « modèle économique fragile ». Ne l’était-il pas au moment de son lancement en 2000 ? Cette fragilité exigerait que ces chaînes – je cite toujours Mme la ministre – « soient soutenues par des groupes à l’assise financière solide ». Or ces mêmes groupes avaient tout fait pour que la TNT ne sorte jamais des cartons !
Aujourd’hui, les audiences sont en constante progression : 2, 1 % de part d’audience au mois de mai pour TMC, filiale de TF1, et 1, 9 % pour W9, propriété de M6. Ces majors ne veulent pas partager le gâteau et s’inquiètent donc de l’obligation d’ouverture du capital que la loi allait leur imposer. Heureusement, le projet de loi de modernisation de l’économie, voiture-balai de cette session extraordinaire, passe par là… Il est trop facile de changer les règles du jeu en fonction des intérêts et des convenances de certains !
Le seuil des 2, 5 % d’audience totale avait un objectif : protéger le pluralisme et lutter contre la concentration à la télévision. Cet objectif est plus que jamais d’actualité aujourd’hui, alors que la question de la trop grande concentration des médias se pose avec autant d’acuité et à l’heure où l’audiovisuel public est menacé d’asphyxie par la suppression de la publicité. Cette suppression est orchestrée par le Président de la République au profit des chaînes privées, auxquelles ce gouvernement a également décidé d’accorder une deuxième coupure publicitaire. Trop de cadeaux !
Notre amendement vise donc à la suppression de cet article, et nous demandons qu’il fasse l’objet d’un vote par scrutin public.
La modification de la législation permettra à certains opérateurs de chaînes diffusées en mode numérique terrestre, tels que Bolloré, Bouygues ou le groupe M6, de rester au-dessous du seuil d’audience et de continuer de détenir 100 % des parts de leur société. Certaines chaînes de la TNT comme Direct 8, détenue par Bolloré, W9, propriété de M6, et TMC sont proches d’atteindre ce seuil fatidique de 2, 5 % ou l’ont même déjà dépassé : TMC, avec plus de 4 %, W9, proche de 4 %, et Direct 8, proche de 2, 5 %...
Le droit de l’audiovisuel français, soucieux de ne pas permettre que la détention du capital d’une chaîne soit concentrée dans les mains d’une même personne, était jusqu’à présent construit sur la règle de détention maximale de 49 % des parts d’un service de télévision diffusé en mode hertzien analogique, car aucune des chaînes hertziennes privées historiques ne pouvait se situer au-dessous du seuil de 2, 5 %. Cette disposition anti-concentration, garante du pluralisme dans le secteur audiovisuel, avait, certes, été élaborée dans le cadre restreint de la ressource hertzienne, en mode analogique. L’arrivée du numérique, si elle multiplie la ressource, ne saurait néanmoins justifier que des nouveaux entrants puissent se soustraire au droit commun de l’audiovisuel et détenir jusqu’à 100 % du capital de leur société.
Ce cadeau offert avec l’article 37 bis concerne potentiellement tous les opérateurs privés faisant moins de 8 % d’audience cumulée : ils pourront tous se porter acquéreur des droits qu’ils ne détiennent pas encore sur leurs services de télévision diffusés en mode hertzien. Il s’agit d’un nouveau gage donné au secteur privé de l’audiovisuel.
Parallèlement, le Gouvernement et le Président de la République réservent un autre sort aux chaînes publiques. La publicité est supprimée, les parts de marché étant naturellement redistribuées aux opérateurs privés, et le montant de la redevance n’est pas augmenté, alors que, n’ayant pas changé depuis cinq ans, il est le plus faible d’Europe, la plupart des autres pays, comme l’Allemagne ou la Grande Bretagne, pratiquant un tarif supérieur à 200 euros.
Derrière cette absence de financement pérenne et suffisant, se profile donc un regroupement des moyens des chaînes mettant en jeu, à terme, leur existence même.
Et, cerise sur le gâteau, on envisage de nommer le président de France Télévisions en conseil des ministres, ce qui mettra en cause l’indépendance des chaînes publiques.
Pour toutes ces raisons, nous souhaitons la suppression de cet article.
L'amendement n° 726 rectifié, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
À la fin de cet article, remplacer le pourcentage :
par le pourcentage :
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Le relèvement du seuil d’audience proposé par l'Assemblée nationale, qui est fondé sur le succès remporté par les nouvelles chaînes de la TNT, nous semble excessif.
Si l’on peut comprendre l’intention qui animait les députés, il ne faudrait pas que cette mesure se traduise par un recul de la diversité des opérateurs et des programmes audiovisuels. Nous sommes en effet encore très loin du taux d’audience de 8 % ; c’est pourquoi un taux de 5 % nous semble déjà tout à fait acceptable.
Il ne faut en effet pas oublier que cette disposition favorise les grandes chaînes privées que sont TF1, propriétaire de TMC, et M6, propriétaire de W9, qui ne croyaient pas à la TNT, et les groupes audiovisuels plus récents, comme Bolloré et Lagardère.
Or, la règle des 2, 5 % avait pour objectif de protéger le pluralisme et de permettre à de petites chaînes de la TNT de se développer face aux opérateurs historiques dominants. En outre, il faut se rappeler que ces opérateurs ont déjà obtenu avec la loi sur la télévision du futur une « chaîne bonus ».
Nous proposons donc un taux d’audience de 5 %, qui constitue déjà un doublement du seuil actuel, afin de permettre aux chaînes de la TNT de poursuivre leur développement tout en préservant le principe qui a présidé à l’origine de la télévision numérique terrestre, c'est-à-dire favoriser le pluralisme et la diversité du paysage audiovisuel.
Je ne vais m’aventurer en la matière qu’avec une certaine prudence. Mais j’ai quand même plus de facilité à le faire depuis que j’ai écouté M. Jacques Valade !
Pour tenir compte et tirer toutes les conséquences de son analyse de l’article 37 bis, qui est celle à laquelle se réfère la commission spéciale, il convient de confirmer cet article dans la rédaction telle qu’elle est issue de l'Assemblée nationale, et donc de ne pas voter les amendements.
Toutefois, madame le ministre, je voudrais aller au-delà de l’article qui nous est soumis et me livrer à une réflexion plus générale.
Certains pays disposent de législations qui permettent de plafonner globalement l’audience que peut atteindre un même opérateur économique via les différentes filiales qu’il contrôle. Telle n’est pas l’optique choisie par la France depuis que nous avons commencé à légiférer sur le secteur de l’audiovisuel.
Je vais prendre un exemple pour me faire mieux comprendre : un groupe qui aurait 15 % ou 20 % d’audience globale pourrait progressivement atteindre, après l’acquisition d’autres opérateurs, un taux d’audience de 25 %, de 30 %, de 35 % si un plafond global n’était pas fixé.
Certes, cette question est, à l’heure actuelle, tout à fait théorique, compte tenu de la répartition des forces sur ce marché. Sans être un fin connaisseur du sujet, je me demande simplement si tout cela ne serait pas plus compréhensible pour l’opinion publique s’il existait une clause de limitation globale.
Une telle clause offrirait la garantie que les influences seront équilibrées et que le public aura un réel choix entre les différents opérateurs privés présents sur le marché de l’audiovisuel. Mais ce n’est qu’une réflexion parmi d’autres.
La commission émet un avis défavorable sur les trois amendements.
L'amendement n° 726 rectifié est retiré.
Quel est l’avis du Gouvernement sur les amendements n° 535 et 1023 ?
Le Gouvernement est défavorable à ces amendements.
Je tiens à dire à M. Valade que j’ai vivement apprécié son intervention liminaire sur l’article tel qu’il est issu de la longue discussion qui a eu lieu à l'Assemblée nationale et qui a permis, selon moi, d’arriver à un texte tout à fait convenable.
Comme je l’ai indiqué lors du débat à l'Assemblée nationale, la situation évolue constamment au fur et à mesure des avancées de la technologie, qui permet à la fois une pénétration plus rapide de l’audience et la découverte par les opérateurs de modèles économiques différents.
Les opérateurs sont confrontés à trois phénomènes : un accroissement limité des recettes publicitaires, la concurrence des autres médias qui se développent de manière très rapide, et la nécessité de consentir à des investissements très importants pour couvrir l’intégralité du territoire. Nous sommes donc clairement en présence d’un modèle économique à développement accéléré, mais à caractère fragile, ce qui justifie la nécessité de relever les seuils. Ces derniers étaient jusqu’à présent nécessaires pour éviter des phénomènes de concentration contre lesquels il était certainement légitime de lutter lorsque le paysage audiovisuel ne connaissait pas de grands bouleversements.
Mais les avancées technologiques ont tout modifié en permettant des déplacements rapides d’audiences. Dans ces conditions, il me paraît légitime de relever le seuil.
Monsieur le rapporteur, vous avez raison d’évoquer les régimes étrangers : le Royaume-Uni comme les États-Unis ont récemment modifié leurs mécanismes de mesure des phénomènes de concentration pour les appréhender de manière plus globale. Il n’est pas exclu d’envisager que la France mène à son tour une réflexion similaire pour mieux répondre à la concurrence internationale, c'est-à-dire à tous ces groupes solides que l’on a vu émerger dans d’autres pays, y compris au sein de l’Union européenne.
J’ai apprécié la suggestion formulée par M. le rapporteur. Nous sommes en effet un peu en retard si l’on se réfère aux réglementations appliquées dans d’autres pays, notamment européens. Comme l’a indiqué Mme la ministre, cette anomalie provient du fait que les avancées technologiques sont relativement récentes.
Codifier a priori ce que devrait être la réglementation applicable à telle ou telle entreprise paraissait impossible. En effet, personne d’entre nous ne pouvait prévoir l’explosion de la TNT ou les conséquences de l’arrivée de la télévision mobile personnelle. Il faudrait donc attendre que ce marché soit relativement stabilisé avant d’envisager une codification plus générale et plus formelle. Mais, sur le principe, j’y suis tout à fait favorable, et Mme la ministre a d’ailleurs estimé que cela était tout à fait envisageable.
Attendons donc quelques mois. Nous verrons alors les suites que nous pourrons apporter à cette question.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 126 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'article 37 bis.
L'article 37 bis est adopté.
L'amendement n° 742, présenté par Mme Morin-Desailly et les membres du groupe Union centriste - UDF, est ainsi libellé :
Après l'article 37 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l'article 27 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. ... - Une société titulaire d'une autorisation relative à un service national de télévision par voie hertzienne terrestre en mode numérique, dont l'audience moyenne annuelle par un réseau de communications électroniques au sens du 2° de l'article L. 32 du code des postes et des communications électroniques, tant en mode analogique qu'en mode numérique, dépasse 2, 5 % de l'audience totale des services de télévision, ne peut plus bénéficier des dispositions du décret pris en application des articles 27, 70 et 71 de la présente loi et fixant les principes généraux concernant la diffusion des services autres que radiophoniques par voie hertzienne terrestre en mode numérique.
« Elle est alors régie par les dispositions du décret pris en application des articles 27, 70 et 71 de la présente loi et fixant les principes généraux concernant la diffusion des services autres que radiophoniques par voie hertzienne terrestre en mode analogique.
« Le Conseil Supérieur de l'Audiovisuel se charge de modifier en conséquence les conventions et cahiers des charges desdites sociétés.»
La parole est à Mme Anne-Marie Payet.
Le succès très important de la TNT doit aujourd'hui être pris en considération. Cet amendement vient utilement compléter l'assouplissement, voté à l'Assemblée nationale, du taux d'audience des chaînes de la TNT susceptible de rendre applicable les dispositifs anti-concentration. Il propose d'exclure du bénéfice des dispositions dérogatoires en matière de soutien à la création les chaînes de la TNT dont l'audience dépasse 2, 5 % et de les soumettre aux mêmes obligations que les chaînes hertziennes analogiques.
De cette manière, la réglementation audiovisuelle permettra de faire des chaînes de la TNT, dont le succès d'audience et publicitaire est manifeste, des partenaires de la création, et d'accompagner utilement l'assouplissement des règles anti-concentration.
Elle souhaiterait connaître l’avis du Gouvernement, monsieur le président.
Le Gouvernement émet un avis défavorable, un peu pour des raisons identiques à celles que j’ai évoquées précédemment : il s’agit d’un secteur d’activité jeune, dont le modèle économique est en cours d’élaboration et dont le chiffre d’affaires est encore relativement faible. Lui imposer des obligations au demeurant très fortes et légitimes en matière de production nous paraît de nature à déséquilibrer tant ce secteur que les opérateurs s’y trouvant.
Même si, en soi, cette proposition nous paraît bonne, il est en tout cas trop tôt pour l’imposer à la TNT, car nous prendrions le risque de déséquilibrer cette dernière au moment de son expansion.
L'amendement n° 742 est retiré.
L'amendement n° 980 rectifié, présenté par MM. de Broissia et Longuet et Mme Dumas, est ainsi libellé :
Après l'article 37 bis, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 48-1 A de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de la communication est ainsi rédigé :
« Art. 48- 1 A. - Les programmes diffusés par voie hertzienne terrestre des sociétés mentionnées au I, II et III de l'article 44 ne peuvent faire l'objet d'un droit exclusif de reprise, y compris dans un mode de diffusion non linéaire, dès lors que ce droit exclusif aurait pour effet de restreindre le public pouvant accéder à ces reprises.
La parole est à M. Gérard Longuet.
Cet amendement vise à modifier l’article 48-1 A de la loi du 30 septembre 1986. Lors des débats sur cette dernière, je siégeais, en tant que secrétaire d’État chargé de la poste et des télécommunications, au banc du Gouvernement, avec François Léotard, et Adrien Gouteyron rapportait ce texte au nom de la commission des affaires culturelles.
Depuis, la technique a évolué. Est apparue une nouvelle forme de télévision, la télévision dite « de rattrapage », ou catch up TV, service nouveau qui permet de regarder en différé des émissions sur un support qui est en général l’ordinateur, mais qui sera de plus en plus le mobile, devenu le terminal indispensable sans lequel l’homme moderne – l’homme, la femme et l’enfant surtout, d’ailleurs – ne peut plus vivre …
Il y a là un problème pratique, madame le ministre, et c’est la raison pour laquelle Louis de Broissia et Catherine Dumas ont proposé cet amendement que j’ai cosigné : il s’agit de savoir si la commercialisation du service de télévision de rattrapage est captive ou ouverte.
En un mot, nous constatons que la chaîne publique France Télévisions, qui a d’ailleurs été créée, je crois, à l’occasion de cette loi de 1986, et Orange, qui a été dérégulé à partir de cette même loi de 1986 et qui est aujourd’hui une société de droit privé à capitaux privés majoritaires, même si l’État reste le principal actionnaire, ont conclu un accord exclusif de rachat de programmes de télévision dans le cadre d’un service de télévision de rattrapage.
Nous sommes quelque peu étonnés de cette orientation. Correspond-elle à la volonté du Gouvernement ? Elle ne correspond en tout cas pas à celle des signataires de cet amendement. Si les émissions de télévision appartiennent naturellement aux sociétés qui en ont eu la responsabilité, nous souhaitons cependant qu’elles puissent être librement achetées par tous ceux dont le métier est de diffuser de la télévision non linéaire, c’est-à-dire de la télévision ponctuelle à la demande.
Cette disposition permettrait d’éviter de créer des systèmes en silo produisant une intégration verticale, même si cette dernière est aujourd’hui le fait d’entreprises à capitaux publics principaux, exclusifs ou dominants.
Je ne pense pas que cela corresponde à l’idée d’un libre choix du consommateur et d’une libre ouverture du service de télévision, fût-elle nouvelle et fût-elle de rattrapage. Je me demande d’ailleurs parfois ce qu’il y a à rattraper…
Il faut remercier Gérard Longuet et ses collègues d’avoir abordé un important sujet.
L’amendement vise en fait l’accord d’exclusivité récemment conclu entre France Télévisions et France Télécom Orange en matière de télévision de rattrapage accessible sur tout support.
Le conseil de la concurrence s’est prononcé sur cet accord le 7 mai 2008, et il l’a validé. Son analyse tient, pour l’essentiel, dans les arguments suivants : le périmètre des programmes concernés est somme toute limité, puisqu’il s’agit de la tranche 18 heures-24 heures sans les films et les actualités ; ensuite, la durée est limitée dans le temps, l’exclusivité ne valant que pendant sept à trente jours après la diffusion des programmes à l’antenne ; en outre, l’exclusivité s’applique uniquement à la mise à disposition des programmes en location gratuite et non au téléchargement définitif.
Les programmes restent disponibles pour l’ensemble du public sur le site Internet de France Télévisions, l’exclusivité ne concernant donc que l’exploitation par un tiers. En d’autres termes, chacun, selon cet accord, peut visionner les documents en différé sur son ordinateur. C’est seulement l’usage en différé sur un téléviseur ou un mobile qui est réservé aux abonnés d’Orange.
Il demeure, au-delà de cet accord spécifique et de la décision récente du conseil de la concurrence, que ce sujet tel qu’il est soulevé par Gérard Longuet est extrêmement important. Il s’agit de savoir dans quelle mesure le choix d’un fournisseur d’accès à Internet peut conditionner l’accès au contenu. Il s’agit aussi de déterminer si un groupe public de télévision peut valablement recourir à des partenariats exclusifs en matière de vidéo à la demande. C’est précisément ce que permet le contrat d’objectifs et de moyens de France Télévisions.
Est-il vraiment opportun, à ce stade de notre texte, de traiter de ce sujet de manière partielle ? En effet, techniquement, l’adoption de l’amendement n° 980 rectifié reviendrait à priver France Télévisions d’une source de revenus à l’heure où existent certaines incertitudes sur la bonne visibilité financière de ce groupe public.
Il me semblerait donc raisonnable, après avoir entendu le Gouvernement, de débattre de ce sujet lorsque sera inscrit à l’ordre du jour du Sénat le projet de loi sur la télévision publique et son financement.
Mais, il serait vraiment utile, madame le ministre, que vous puissiez nous éclairer dès à présent sur les situations visées par cet amendement.
J’ai tendance à me ranger à l’avis de M. le rapporteur en la matière.
Cette question, qui est une vraie question de fond, concerne le droit d’exploitation réservé ou non réservé, exclusif ou non exclusif, au bénéfice de tel ou tel canal, des productions de France Télévisions. Cela mérite évidemment un débat approfondi.
Vos commissions – je suppose en effet que plusieurs commissions seraient saisies en l’espèce – auront évidemment l’occasion d’explorer l’ensemble de ces questions, c’est-à-dire à la fois la question des canaux et des types de production.
L’accord actuel est limité à une période de deux ans pour un droit de catch up lui-même d’une durée limitée ; il ne porte que sur certains programmes et non pas sur toutes les créations de France Télévisions. Cet accord présente un caractère véritablement exploratoire, en tout cas aux yeux du Gouvernement. Il a par ailleurs été validé par le conseil de la concurrence.
Mais la question de fond demeure et doit être explorée. Comme je le disais devant vos commissions, cela pourra évidemment être le cas à l’occasion du débat sur la transposition de la directive relative aux services des médias audiovisuels et de l’examen du projet de loi relatif à la nouvelle télévision publique et à ses modes de financement.
J’ajoute que la Commission européenne a elle-même engagé, au travers d’une large consultation publique, une réflexion sur le cadre futur du financement étatique des services publics de radiodiffusion, et que l’une des interrogations centrales portera sur le positionnement du service public dans le domaine des nouveaux médias.
Cette vraie question de fond pourra donc être analysée, à l’échelon communautaire, dans le cadre de cette consultation publique et, à l’échelon national, à l’occasion de l’examen de la transposition de la directive et du projet de loi sur la nouvelle télévision publique. J’invite donc M. Longuet à retirer cet amendement d’excellente qualité qui me paraît aborder un problème très vaste sous un angle trop étroit.
La proposition faite dans cet amendement me semble tout à fait pertinente. Il y a effectivement un problème de fond concernant notamment l’exclusivité de telles ou telles productions qui ont été financées d’une certaine façon, surtout au niveau de l’audiovisuel public.
Je partage tout à fait l’analyse de Mme la ministre, ainsi que celle de M. le rapporteur. En effet, nous avons été amenés, dans le cadre de la discussion de ce projet de loi, à examiner à plusieurs reprises des amendements qui revenaient sur des points stratégiques, mais de façon partielle, et dont l’adoption aurait abouti à modifier des dispositions fondamentales sans réelle réflexion sur la globalité du problème posé.
Par conséquent, il me paraît pertinent et prudent d’attendre un peu pour examiner ces questions de façon globale : la transposition de la directive relative aux services des médias audiovisuels et le projet de loi relatif à la nouvelle télévision publique et à ses modes de financement nous donneront bientôt l’occasion de le faire.
Mais je confirme qu’il s’agit d’un problème fondamental ; et je ne suis pas loin de partager les préoccupations des trois signataires de cet amendement.
Le premier alinéa de l'article 47 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 précitée est ainsi rédigé :
« L'État détient directement la totalité du capital des sociétés France Télévisions et Radio France et, directement ou indirectement, la totalité du capital de la société Radio France Internationale. »
à l’attractivité de nos territoires et intitulé « mobiliser l’attractivité au service de la croissance », porte sur la société Radio France Internationale, ou RFI.
Radio France Internationale est la première radio française d’actualité internationale non seulement en français, mais aussi – c‘est important pour ceux de nos collègues qui, comme moi, voyagent beaucoup – en plusieurs langues. Il y a 45 millions d’auditeurs dans le monde, auxquels s’ajoutent 33 millions de visiteurs sur Internet, 649 heures de programmes en 20 langues.
Ce sujet, en dehors de l’attractivité, concerne le rayonnement de la France. Or, la politique appliquée à Radio France Internationale aboutit à la suppression d’emplois de journalistes travaillant notamment en farsi, en russe, en arabe et en chinois.
Le 1er mars dernier, lors de la deuxième journée des Français de l’étranger au sein de cette maison, nous avons longuement interrogé M. Benamou pour savoir comment le rayonnement de la France pouvait, à son avis, se faire sans transmission de la sainte parole dans une langue compréhensible.
Radio France Internationale a un cahier des charges de service public et constitue un outil de promotion de la langue française. C’est extrêmement important, notamment à l’heure où, sur l’initiative de notre collègue Jacques Legendre, un article du projet de loi constitutionnelle de modernisation des institutions de la Ve République est désormais consacré à la francophonie, définie comme un espace de solidarité ayant le français en partage.
RFI est donc non seulement un outil utile à la promotion et au rayonnement de la France pour des gens qui ne parlent pas le français et qui pourront ainsi comprendre notre politique et notre culture, mais aussi un outil de promotion de la langue française. J’ajoute que RFI emploie des stagiaires étrangers et a conclu des services de partenariat avec des radios étrangères.
Aussi ai-je été plutôt surprise – et je n’étais pas la seule ! – de trouver dans ce projet de loi de modernisation de l’économie, un article visant RFI ! J’ai donc déposé un amendement de suppression de cet article.
J’ajoute que les propos tenus tant par M. Valade que par Mme la ministre concernant la TNT me confortent dans l’idée d’une nécessaire suppression de cet article en attendant, d’une part, la loi sur l’audiovisuel, puisque l’audiovisuel concerne non seulement la télévision mais aussi la radio publique, et, d’autre part, un certain nombre de dispositions européennes.
D’abord, l’article 37 ter ressemble fort à un cavalier législatif. Je vois mal le lien entre une telle mesure et la modernisation de l’économie. Mais je suis tout à fait prête à entendre vos explications sur ce point, madame la ministre.
Ensuite, un tel dispositif fait à mon avis peser des risques inconsidérés sur un outil extrêmement important pour l’attractivité de nos territoires, la promotion de notre culture et le rayonnement de la France.
Intervenant sur l’article, j’ai également défendu mon amendement n° 310, monsieur le président.
Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je pourrais moi aussi souligner les problèmes de forme que pose l’article 37 ter, comme vient de le faire notre excellente collègue Nathalie Goulet. En effet, cet article constitue bien un parangon de cavalier législatif, et j’imagine quelle sera la réaction du Conseil constitutionnel lorsqu’il en sera saisi.
Toutefois, je préfère centrer mon propos sur des remarques de fond.
Cet article, qui a été inséré dans le projet de loi à la suite de l’adoption par l’Assemblée nationale d’un amendement d’origine gouvernementale, vise à mettre en place la holding qui s’appelle désormais « Société de l’audiovisuel extérieur de la France ». Créée le 15 avril dernier, celle-ci doit regrouper les participations de l’État dans les différentes sociétés de l’audiovisuel extérieur, France 24, RFI et TV5 Monde.
La modification proposée de l’article 47 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication suscite évidemment l’inquiétude des salariés de RFI. Leur réaction est d’ailleurs tout à fait légitime. En effet, la commission pour la nouvelle télévision publique, présidée par M. Jean-François Copé, a proposé d’affecter à France Télévisions la part de redevance attribuée à RFI. L’avenir des personnels concernés est donc pour le moins incertain.
Heureusement, le Gouvernement n’a pas retenu cette très mauvaise idée, qui, si elle avait été mise en œuvre, aurait entraîné une perte de 60 millions d’euros pour RFI, surnommée la « radio du monde ».
Cependant, cette sage décision est loin d’apaiser les craintes des personnels de RFI, qui accueillent avec beaucoup de scepticisme les annonces intervenues depuis le début de la mise en chantier de l’audiovisuel extérieur, voilà près d’un an. Ils craignent en particulier que la mise en place de la société holding n’entraîne une fusion, totale ou partielle, des trois entreprises dont j’ai parlé tout à l’heure. Ainsi, la fusion des moyens, qui a déjà été évoquée, pourrait se traduire par la suppression d’environ 180 emplois. Mais cela pourrait aller plus loin, avec la fusion au moins partielle des rédactions de journaux télévisés et d’un certain nombre d’émissions. Par conséquent, il s’agit là d’un glissement dangereux vers une centralisation et un contrôle complet de l’ensemble de ces trois chaînes.
Selon nous – je ne développerai pas notre position à cet égard, car ce n’est pas l’objet central du débat –, cette réforme n’est pas engagée de la bonne manière. Il aurait fallu s’appuyer sur TV5 Monde, qui est présente dans tous les pays et qui rassemble plusieurs millions de téléspectateurs, au lieu d’attribuer une somme de 40 millions, de 50 millions ou de 60 millions d’euros à France 24, chaîne que personne ne regarde dans le monde.
Par conséquent, nous proposerons la suppression de l’article 37 ter. La réforme de l’audiovisuel extérieur étant une question très importante, nous sommes d'accord pour en débattre, mais en prenant le temps de la réflexion et en menant les consultations qui s’imposent.
Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les quatre premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 310 est présenté par Mme N. Goulet.
L'amendement n° 476 est présenté par MM. Ralite et Renar, Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
L'amendement n° 1008 est présenté par Mme Garriaud-Maylam.
L'amendement n° 1024 est présenté par Mmes Cerisier-ben Guiga et Tasca, M. Yung, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Massion, Pastor, Raoul, Repentin, Sueur et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
L’amendement n° 310 a déjà été défendu.
La parole est à Mme Odette Terrade, pour présenter l'amendement n° 476.
Je partage les préoccupations qui ont été exprimées par les orateurs précédents.
L’article 37 ter résulte de l’adoption d’un amendement d’origine gouvernementale à l’Assemblée nationale sur la détention du capital de Radio France Internationale par l’État, afin de faciliter la mise en œuvre de la réforme de l’audiovisuel extérieur.
On peut s’étonner, après l’article 37 bis, de trouver un nouvel article concernant l’avenir de l’audiovisuel, en l’occurrence public, dans la partie du projet de loi censée permettre d’attirer les financements privés pour des opérations d’intérêt général. Faut-il y voir, comme c’est à craindre, les prémices d’une profonde transformation de la nature du capital de RFI ?
Cet article vise à modifier la rédaction de l’article 47 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, qui dispose que l’État « détient la totalité du capital des sociétés France Télévisions, Radio France et Radio France Internationale ».
La nouvelle rédaction proposée précise que l’État détient directement la totalité du capital des sociétés France Télévisions et Radio France et, surtout, qu’il détient « directement ou indirectement » le capital de la société Radio France Internationale. C’est ce dernier point qui pose problème, car il s’agit, rien de moins, d’une modification fondamentale des règles de détention du capital de RFI.
Selon le rapport de la commission spéciale, l’objet d’un tel changement serait de « sécuriser juridiquement le schéma envisagé par le Gouvernement pour la réforme de l’audiovisuel extérieur. »
La réforme, menée sur la base du rapport Levitte-Benamou, qui a été remis au Président de la République au mois de décembre dernier, crée une société holding dénommée « Société de l’audiovisuel extérieur de la France », et non pas « France Monde », comme cela était indiqué par erreur dans l’exposé des motifs de l’amendement gouvernemental déposé à l’Assemblée nationale.
Cette holding réunit les participations de l’État dans Radio France Internationale, TV5 Monde et France 24 : un assemblage baroque s’il en est !
D’ailleurs, il aurait été souhaitable de débattre de ce sujet à l’automne prochain, à l’occasion de l’examen du futur projet de loi sur l’audiovisuel public. En effet, la réforme de l’audiovisuel extérieur intervient en plein débat sur le financement de l’audiovisuel public, débat au sein duquel RFI a toute sa place.
L’une des pistes retenues par la commission présidée par Jean-François Copé pour assurer le financement de France Télévisions, à la suite de la disparition de la publicité sur les chaînes publiques, est la suppression des ressources de la redevance allouées à RFI.
Pourquoi voulez-vous précipiter un tel changement juridique avant que le débat sur le financement de l’audiovisuel public ait lieu ? Les ressources de RFI issues de la redevance sont de 58 millions d’euros, soit 40 % de son budget. Cette garantie de financement assure à RFI son ambition internationale et lui permet de remplir son cahier des charges de service public. Que se passera-t-il si elle est supprimée ? Encore une fois, tout semble écrit d’avance, et les personnels de RFI sont légitimement inquiets quant à l’avenir de leur radio et de ses missions.
Par conséquent, afin de lever de telles inquiétudes, nous demandons la suppression de cet article.
La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam, pour présenter l'amendement n° 1008.
J’ai bien entendu les propos de mes collègues et je ne reprendrai pas des arguments qui figurent déjà dans les différents documents que nous avons reçus.
Bien entendu, je partage l’inquiétude exprimée par mon collègue sénateur représentant les Français établis hors de France Richard Yung, ainsi que par Mme Nathalie Goulet.
À mon sens, nous sommes tous – c’est encore plus vrai s’agissant des sénateurs représentant les Français de l’étranger – extrêmement attachés à RFI, qui est le premier réseau FM dans le monde devant la BBC. Nous sommes donc très vigilants quant à l’avenir de cette radio.
Aussi, dans un premier temps, j’ai moi aussi été très étonnée de la présence dans le projet de loi de cet article, qui m’est apparu comme un cavalier législatif. Ma première réaction a donc été d’en demander la suppression.
Néanmoins, j’écouterai naturellement avec beaucoup d’attention les explications de Mme la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi sur le sujet, car nous avons besoin d’être rassurés sur l’avenir de RFI. Peut-être pourrions-nous toutefois surseoir à cette discussion ?
La parole est à Mme Monique Cerisier-ben Guiga, pour présenter l'amendement n° 1024.
Si la chaîne RFI est très peu connue en France, c’est tout simplement parce qu’elle émet seulement en Île-de-France, où elle a 1 million d’auditeurs. Mais, dans le monde, elle en a 46 millions.
À cet égard, permettez-moi de faire référence à l’une des auditrices de cette radio, qui, détenue pendant six ans dans la jungle colombienne, n’a été reliée au monde que par ce seul fil.
Je parle d’Ingrid Betancourt, qui – nous l’avons su un peu tardivement – écoutait RFI depuis son lieu de captivité. C’est d’ailleurs par ce biais que ses enfants et sa famille ont pu lui adresser des messages.
Il est vrai que nous avons entendu nombre de philippiques, comme « RFI ne sert à rien » ou « ses programmes en ondes courtes sont ringards » ! Mais, pour l’auditrice que je viens d’évoquer, RFI, ne vous en déplaise, a joué un rôle très important !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Par conséquent, je refuse que, par un simple cavalier législatif, on modifie le financement de la seule chaîne d’information internationale que nous ayons en France. Ceux d’entre nous qui s’intéressent aux questions internationales n’écoutent que RFI.
Il faut le savoir, RFI tient à garder son autonomie éditoriale. Mais qu’en restera-t-il si l’État détient directement le capital de cette chaîne, comme le souhaite la commission spéciale du Sénat ?
RFI a des rédactions particulièrement compétentes et spécialisées, ainsi qu’un réseau de 600 correspondants dans le monde. Sa culture d’entreprise est faite de la recherche d’une réactivité maximale face aux événements internationaux, d’une information très pointue, d’une profondeur des analyses, d’une qualité technique et artistique des émissions et d’une bonne réception. C’est une radio qui produit 56 heures d’émission par jour, diffusées sur 200 flux différents, et qui émet 24 heures sur 24, en 19 ou en 20 langues, par tous les moyens, dont Internet et Worldspace. Elle fait tout cela pour 130 millions d’euros de dépenses publiques, avec une équipe de 1 000 personnes. Et on veut à présent mettre la main dessus, au risque de lui faire perdre son autonomie, sa spécificité, sa ligne éditoriale et sa crédibilité internationale.
Certes, nous pouvons très bien admettre l’utilité de la mutualisation des moyens des chaînes de l’audiovisuel international dans les domaines administratif ou commercial, mais à condition de respecter les droits des personnels et de ne pas créer un audiovisuel international standardisé qui parlerait d’une seule voix, en l’occurrence celle de l’État. Nous ne sommes plus au temps de l’ORTF !
L’audiovisuel international que nous voulons doit être constitué de chaînes de télévision, comme France 24 ou TV5 Monde, de chaînes de radio, notamment RFI, et de sites Internet. Il doit diffuser des informations diversifiées, non aseptisées et qui restent crédibles. Et, bien sûr, le personnel doit être réellement associé aux décisions prises, dans le cadre d’un véritable dialogue social. C’est pourquoi nous souhaitons un débat au Parlement sur l’audiovisuel international.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
L'amendement n° 303, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Compléter le second alinéa de cet article par une phrase ainsi rédigée :
Il assure au titre de cette dernière le rayonnement international de la France par les moyens appropriés.
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Il s’agit d’un amendement de repli, qui vise simplement à préciser que RFI doit disposer des moyens suffisants pour assurer son fonctionnement normal.
En effet, je connais les inquiétudes qui existent sur ce point. Certes, je n’ai pas reçu de document particulier de la part des syndicats ou de leurs représentants, mais je voyage beaucoup. J’ai ainsi constaté que des émissions autrefois diffusées en langue étrangère ne l’étaient plus aujourd'hui.
C’est la raison pour laquelle je souhaite être certaine que RFI disposera effectivement des moyens appropriés pour garantir la diffusion de telles émissions en langue étrangère, notamment en arabe et en farsi, langue à laquelle je suis particulièrement attachée.
M. Philippe Marini, rapporteur. Je me demande si certains ne se trompent pas quelque peu de débat. Mes chers collègues, je vous le dis sincèrement, personne ne menace RFI !
Marques de scepticisme sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.
Il s’agit seulement de simplifier et de clarifier une structure de détention capitalistique.
Mêmes mouvements sur les mêmes travées.
Cela signifie que RFI demeurera à 100 % contrôlée par l’État et conservera sa pleine personnalité et l’ensemble de ses missions. Mais, au lieu d’avoir une sorte de « râteau », avec un rattachement direct à l’État d’un certain nombre d’entités, vous aurez un groupe qui sera formé de plusieurs participations contrôlées par une seule holding. Pour autant, la société opérationnelle demeurera RFI, avec toute sa personnalité et ses rédactions, donc son autonomie.
En outre, je le rappelle, la holding « société de l’audiovisuel extérieur de la France » est seulement destinée à mutualiser des fonctions de support : sont évoquées l’administration, les ressources humaines, les finances et certaines tâches d’intérêt général en matière de distribution. Toutefois, aucune de ces finalités ne peut ni ne doit conduire à priver une antenne, et plus spécialement RFI, de la pleine maîtrise de sa programmation.
Il me semble donc que l’on se trompe de projet : cette réforme n’est qu’une simplification juridique ; il ne faut pas lui accorder plus d’importance qu’elle n’en a.
Il est vrai qu’un problème se pose par ailleurs, mais qui n’a pas été abordé à travers ces amendements : c’est celui du devenir de TV5 Monde, une chaîne de télévision francophone, et non purement française, qui est cofinancée par plusieurs institutions et États étrangers avec lesquels nous avons noué des partenariats.
Toutefois, il s'agit d’un autre sujet qui, naturellement, sera traité, si c’est nécessaire, en temps utile, dans les enceintes adéquates et par les moyens appropriés.
Pour rassurer nos collègues à propos du maintien de l’intégrité de RFI, nous pourrions peut-être donner satisfaction à l’amendement n° 303 présenté par Mme Nathalie Goulet, qui vise à réaffirmer que cette chaîne participe au « rayonnement international de la France par des moyens appropriés ». Ainsi, ses missions se verraient pleinement confirmées, ce dont, d'ailleurs, personne ne devrait douter.
Je suggère donc à Mmes Joëlle Garriaud-Maylam et Nathalie Goulet de bien vouloir retirer leurs amendements n° 310 et1008.
S'agissant des amendements n° 476 et1024, qui ont été présentés respectivement par les groupes CRC et socialiste, et en me référant surtout à la présentation qui en a été faite puisqu’ils sont identiques aux précédents, j’émets, au nom de la commission, un avis tout à fait défavorable.
Je fais miens les propos de M. le rapporteur.
Que de passions pour une réorganisation à caractère juridique, …
… qui n’est en aucune façon destinée à remettre en cause les missions, les moyens, l’excellence et la diffusion dans de nombreuses langues de Radio France Internationale ! Tel n’est pas du tout l’objet de cet article.
Je ne résiste pas au plaisir de vous présenter l’organisation de RFI avant et après cette réforme.
Mme la ministre de l’économie, de l’industrie et de l’emploi montre deux organigrammes.
Avant la réorganisation, la structure de RFI était effroyablement compliquée, comme le comprendrait même un juriste de bas étage, ce qui n’est d'ailleurs nullement votre cas, mesdames, messieurs les sénateurs.
La nouvelle organisation est beaucoup plus simple, car elle permet de concentrer en une holding l’ensemble des participations de l’État dans trois grandes chaînes, à savoir France 24, Radio France Internationale et TV5 Monde, sachant que nous finançons cette dernière avec certains partenaires, notamment francophones.
Nous n’avons absolument aucune autre intention, et surtout pas celle de remettre en cause la mission de Radio France internationale !
D'ailleurs, je rejoins Mme Monique Cerisier-ben Guiga pour me réjouir que Radio France Internationale soit si largement diffusée que ses émissions aient pu parvenir à Ingrid Betancourt et jouer le rôle, nous le savons, d’un fil la rattachant à la vie et à l’espoir.
Il ne s’agit pas de porter aux nues tel canal ou telle chaîne, mais, si RFI émet en français en Colombie et diffuse également en farsi ou en arabe, contribuant ainsi à l’attractivité de notre territoire au-delà de ses frontières, c’est tant mieux.
À ceux qui affirment que cet article constituerait un cavalier, je rétorque qu’il n’en est rien. L’usage de la langue française, la diffusion de concepts nationaux et la promotion de notre culture, fût-ce en Iran et en farsi, relèvent parfaitement de l’attractivité du territoire, et je maintiens que cet article 37 ter trouve parfaitement sa place dans ce projet de loi.
C'est pourquoi je ne suis pas favorable à ces amendements identiques, même si j’invite Mmes Nathalie Goulet et Joëlle Garriaud-Maylam à retirer ceux qu’elles ont présentés, au bénéfice de mes explications qui, je l’espère, les auront convaincues.
J'ajoute que je suis prête à émettre un avis favorable sur l’amendement n° 303, qui est, si je ne m’abuse, un amendement de repli. En effet, je le répète, il n’est pas question de remettre en cause les missions et les moyens de RFI.
Comme un certain nombre de garanties m’ont été apportées et qu’un avis favorable a été émis sur mon amendement n° 303, je retire l’amendement n° 310, monsieur le président.
Toutefois, madame la ministre, RFI doit être soutenue non parce qu’elle diffuse dans toutes les langues, « fût-ce en farsi », mais parce qu’elle émet « aussi en farsi », ce qui est quelque peu différent !
Nous maintenons notre amendement, parce que, selon nous, derrière cet article il n’y a non pas seulement la création d’une holding – cela aurait été très intéressant à étudier si les conditions d’un dialogue social normal avaient été respectées, ce qui n’a pas été le cas –, mais bien plutôt une fusion.
Si TV5 Monde a connu plusieurs crises ces derniers mois, c’est bien parce que nos partenaires francophones se méfient terriblement de l’uniformisation que l’on voudrait leur imposer en matière éditoriale, s'agissant de l’information et de la couverture de l’actualité politique.
Nous savons bien que le système du News Office que l’on veut mettre en place est destiné à produire une information commune pour tout l’audiovisuel international francophone, et nous ne souhaitons pas une telle évolution pour RFI.
J’ai bien compris l’esprit de l’amendement n° 303, présenté par Mme Nathalie Goulet.
Mais tout de même, cet amendement, qui a reçu un avis favorable de M. le rapporteur – lui qui se veut si rigoureux d’ordinaire ! – et de Mme la ministre, vise à inscrire ceci dans la loi : « Il assure au titre de cette dernière le rayonnement international de la France par les moyens appropriés ». Voilà un texte de droit qui va tout changer !
Ainsi, désormais, il serait possible d’utiliser la loi pour donner des instructions ou fixer des objectifs ? Il ne faudra pas que M. le rapporteur ou le Gouvernement nous rétorque, lorsque nous voudrons inscrire dans un texte législatif notre souhait d’atteindre le plein emploi ou d’augmenter les salaires, que de telles mentions n’ont pas de portée normative ! Vous faites preuve de bien peu de rigueur, me semble-t-il !
Mme Christine Lagarde, ministre. C’est l’exception culturelle !
Sourires
C’est l’expression « par les moyens appropriés » qui a une portée normative.
Le scrutin a lieu.
Il est procédé au comptage des votes.
Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 127 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 303.
L'amendement est adopté.
L'article 37 ter est adopté.
priorité
Garantir l'indépendance du service statistique public
L'amendement n° 22, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit l'intitulé du chapitre V du titre III :
Créer une Autorité de la statistique publique
La parole est à M. le rapporteur.
Mes chers collègues, avec cet amendement, nous en arrivons à la question de l’information économique. Comme vous le savez, la commission spéciale vous propose, à l’article 38 du projet de loi, de revenir à la rédaction initiale du Gouvernement.
Il nous semble particulièrement important que soit créée une autorité indépendante de la statistique publique, dont le champ de compétence s’étendra bien au-delà de celui de l'INSEE, l’Institut national de la statistique et des études économiques, puisque des moyens de statistiques publiques existent, par exemple, au sein de la Banque de France.
Du point de vue de la méthodologie et afin d’établir des programmes de travail, il est important que cette fonction – tout à fait essentielle dans une démocratie, plus particulièrement quand celle-ci se trouve partie prenante de l’Union européenne – soit exercée dans des conditions d’indépendance absolument irréprochables.
Or il a semblé à la commission spéciale que les modalités intermédiaires choisies par l’Assemblée nationale n’étaient pas de nature à garantir de manière suffisamment incontestable cette indépendance.
C'est pourquoi nous souhaitons que soit indiquée dès l’intitulé du chapitre V du titre III du projet de loi de modernisation de l’économie notre volonté de créer une autorité de la statistique publique.
Dans la version initiale proposée par le Gouvernement, il s’agissait d’une « Haute autorité ».
M. Philippe Marini, rapporteur. Pour notre part, nous nous contenterons d’une « Autorité » car, vous le savez, nous sommes ennemis de toute forme d’inflation.
Sourires
Le Gouvernement émet un avis favorable.
J'ajoute que l’adjectif « haute » n’est vraiment utilisé à bon droit qu’à propos de la Haute Assemblée !
Nouveaux sourires.
Je m’étais inscrite pour prendre la parole sur l’article 38, que nous examinerons juste après, mais je renonce à cette intervention.
En effet, il m’avait échappé qu’à travers cet amendement, discuté avant l’article 38, M. le rapporteur ne se contentait pas de proposer une modification de pure forme : bien qu’il supprime la qualification de « haute », il suggère de revenir au principe de l’autorité de la statistique publique qui figurait dans le texte initial du Gouvernement, lequel a été modifié par l’Assemblée nationale.
Mon intervention me permettra donc de présenter les raisons pour lesquelles je voterai contre l’amendement n° 22 ; bien entendu, elle vaudra aussi explication de vote sur l’article 38.
Il s’agit d’un article très important, tout particulièrement dans le contexte des polémiques qui se sont développées ces derniers mois sur la fiabilité de notre outil statistique public. Rappelons que ces polémiques, qui concernent la mesure du pouvoir d’achat, les indicateurs de chômage et la conjoncture économique, visent principalement l’INSEE.
Tout le monde est attaché à l’indépendance de la statistique nationale. Cette indépendance, que nul ne remet en cause et qui n’est plus à démontrer, est d’ailleurs confirmé tant par le rapport « d’évaluation par les pairs » de l’INSEE, effectué en janvier 2007, que par l’étude conduite par le FMI en 2003 sur les quatre critères principaux que sont les données, l’accès aux données, l’intégrité et la qualité.
Évidemment, pour éviter que chaque nouvelle publication d’un indice statistique important ne donne lieu à une vague de suspicion et de méfiance, nous pensons également qu’il convient d’inscrire dans la loi le principe d’indépendance de la statistique publique. Cette démarche, qui permettrait de se conformer au code de bonnes pratiques de la statistique européenne, adopté en 2005, ne devrait d’ailleurs pas se limiter à l’INSEE, certains ministères possédant également leurs propres services de statistiques, comme par exemple le ministère du travail avec sa direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES, qui publie des études fort lues et commentées.
Après un important travail parlementaire, nos collègues députés ont substantiellement modifié l’article 38 et sont allés jusqu’à modifier le titre du chapitre V. Pour aboutir à ce résultat, ils ont suivi les recommandations de la mission d’information commune aux trois commissions des finances, des affaires économiques et des affaires sociales de l’Assemblée nationale, chargée d’examiner la gouvernance de l’INSEE. Leur rédaction est donc le fruit d’un véritable consensus, le rapport de la mission d’information qui l’a motivée ayant été adopté à l’unanimité des trois commissions. Je précise par ailleurs que cette mission d’information, très diversifiée dans sa composition, était présidée par Pierre-Alain Muet et qu’elle avait comme rapporteur Hervé Mariton.
Le texte proposé par l’Assemblée nationale définit le service statistique public et pose le principe de son indépendance, ce que ne faisait pas le texte du Gouvernement et ne ferait pas l’amendement de M. Marini, s’il était adopté. À l'instar des députés, nous ne sommes pas favorables à la création d’une autorité « indépendante » supplémentaire, ce que nous propose M. le rapporteur en changeant le titre du chapitre V. Il nous semble que le Conseil supérieur de la statistique, qui reprend les compétences du Conseil supérieur de l’information statistique, le CNIS, lequel n’a pas démérité, doit être maintenu. Il faut sans doute créer également un comité scientifique de neuf membres qui serait chargé de veiller au respect du principe de l’indépendance professionnelle dans la production et la diffusion de la statistique publique.
Si je développe ces explications maintenant, monsieur le président, c’est parce qu’en adoptant l’amendement n°22, qui semble de prime abord purement rédactionnel, on amputerait en réalité la discussion à venir sur l’article 38. Bien évidemment, pour ne pas allonger la discussion, je ne réitérerai pas ces arguments lors du débat sur l’article 38.
Ainsi, monsieur le rapporteur, vous proposez de revenir au texte initial, qui créait une Autorité de la statistique publique. Mais ce faisant, vous ne satisfaites personne. Il faut surtout éviter de traiter l’INSEE avec défiance. Les statisticiens qui y travaillent sont sans doute, de par leur statut de fonctionnaire, les plus aptes à affronter toutes sortes de pressions contraires et à respecter la déontologie de la profession en préservant la transparence et la qualité des outils méthodologiques employés. Nous nous opposons donc à la modification du titre que vous proposez, monsieur le rapporteur. Elle emporterait en effet une modification totale de l’article 38, pour revenir à une rédaction initiale qui ne se justifie nullement au regard de notre outil national de statistiques, et qui serait de plus interprétée comme une marque de défiance à son égard.
L'amendement est adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L'amendement n° 477, présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Odette Terrade.
Cet article 38 du présent projet de loi vise, concrètement, à instituer une nouvelle autorité administrative indépendante appelée, selon les cas, Haute Autorité ou Autorité de la statistique publique. Ce dispositif a pourtant été remis en cause par les députés, qui ont préféré renforcer le rôle du Conseil national de l’information statistique.
À vrai dire, l’article 38 est présenté comme devant traduire dans notre droit français la logique qui préside aux pratiques statistiques des autres pays de l’Union européenne où, contrairement à la France, ce ne sont en général pas des organismes publics comme l’INSEE qui assurent l’essentiel de la production statistique.
Le grief que l’on semble d’ailleurs faire à l’INSEE serait de souffrir d’un manque d’indépendance au regard de la puissance publique, ce qui nuirait à la qualité de ses prestations.
Au contraire, nous pensons que c’est justement parce que l’INSEE et les services statistiques des ministères, administrations et institutions spécialisées sont publics qu’ils sont indépendants. L’action des services publics de statistique est en effet guidée par ces missions essentielles que sont la transmission et la diffusion au public d’informations objectives, documentées, qui sont une source utile de réflexion et d’action pour chacun. Au lieu de constituer un handicap, le caractère public de ces organismes apparaît au contraire comme un atout, qui est d’ailleurs validé par les études internationales comparant la qualité des appareils statistiques.
Ainsi, malgré l’absence de toute inscription formelle de l’indépendance des organismes de statistiques dans les textes juridiques, on a toujours considéré que l’indépendance était réalisée de façon satisfaisante en France. De plus, cela n’a pas empêché la statistique publique d’évoluer très profondément, et ce sans difficulté majeure, à l’exception de quelques tensions assez vives de temps en temps.
La comparaison avec d’autres pays doit d’ailleurs être regardée à la lumière de deux traits profondément originaux de la statistique française dans le paysage européen : premièrement, elle est la seule à disposer d’un système formalisé et effectif de concertation approfondie de ses programmes grâce au CNIS ; deuxièmement, elle est la seule où existe une forte tradition d’articulation entre production statistique et études économiques et sociales au sein même des principaux organismes statistiques.
Il est certes possible de débattre du contenu même de l’information statistique et, surtout, de son interprétation par l’usager. Mais, de la même manière que ce n’est pas en cassant le thermomètre que l’on fera tomber la fièvre, ce n’est pas en mettant l’INSEE, et la statistique publique en général, sous la coupe d’une énième autorité administrative indépendante, que l’on réglera les questions récurrentes que se pose naturellement l’opinion sur des sujets aussi sensibles que l’indice des prix à la consommation ou encore le chômage.
C’est donc au bénéfice de ces observations que le groupe CRC vous invite, mes chers collègues, à adopter cet amendement de suppression de l’article 38, ne serait-ce que pour signifier clairement le rejet de toute mise en cause de la qualité de l’intervention du service public de la statistique.
L'amendement n° 23 rectifié, présenté par M. Marini, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
La loi n° 51-711 du 7 juin 1951 sur l'obligation, la coordination et le secret en matière de statistiques est ainsi modifiée :
1° L'article 1er est remplacé par deux articles ainsi rédigés :
« Art. 1 er . - I. - Il est créé une Autorité de la statistique publique qui veille au respect du principe d'indépendance professionnelle dans la conception, la production et la diffusion de statistiques publiques ainsi que des principes d'objectivité, d'impartialité, de pertinence et de qualité des données produites.
« II. - L'Autorité est composée de neuf membres :
« - un président nommé par décret en conseil des ministres en raison de ses qualifications dans les domaines juridique, économique et technique ;
« - une personnalité qualifiée désignée par le Président de l'Assemblée nationale ;
« - une personnalité qualifiée désignée par le Président du Sénat ;
« - un membre du Conseil économique et social désigné par le Président de ce dernier ;
« - le président du comité du secret statistique du Conseil national de l'information statistique ;
« - un membre de la Cour des comptes nommé par le Premier président de la Cour des comptes ;
« - un membre de l'inspection générale des finances nommé par le chef du service de l'inspection générale des finances ;
« - un membre de l'inspection générale des affaires sociales nommé par le chef de l'inspection générale des affaires sociales ;
« - une personnalité qualifiée en matière statistique nommée par le ministre chargé de l'économie.
« III. - Un décret en Conseil d'État précise les attributions et les modalités de fonctionnement de l'Autorité de la statistique publique.
« Art. 1 er bis. - I. - Le Conseil national de l'information statistique est chargé, auprès de l'Institut national de la statistique et des études économiques, d'organiser la concertation entre les producteurs et les utilisateurs de la statistique publique. Il fait des propositions pour l'élaboration du programme de travaux statistiques et la coordination des enquêtes statistiques menées par les personnes chargées d'une mission de service public.
« II. - Un décret en Conseil d'État fixe les attributions, la composition et les modalités de fonctionnement du Conseil national de l'information statistique, ainsi que la représentation, en son sein, du Parlement et du Conseil économique et social. Il précise les conditions dans lesquelles l'autorité administrative décide du caractère obligatoire ou non de chaque enquête qui s'inscrit dans le cadre du programme annuel qu'elle a fixé. »
2° A la fin de l'article 3, les mots : « en vertu de l'article 1er » sont remplacés par les mots : « en vertu de l'article 1er bis ».
La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur.
Permettez-moi d’être surpris par ces démonstrations que je qualifierais de « corporatives ».
Lorsque je lis le texte qui vient de l’Assemblée nationale, je vois qu’il crée un comité d’experts au sein d’un organe interne à l’INSEE. Or l’INSEE n’est rien d’autre qu’une direction d’administration centrale du ministère de l’économie, sous l’autorité directe de Mme le ministre.
Vous parlez d’indépendance, ma chère collègue, mais, très sincèrement, si l’on veut se doter, à l’instar des autres États européens, d’un outil véritablement indépendant quant aux méthodes, aux concepts et aux programmes de travail, mieux vaut suivre la solution qui était initialement proposée par le Gouvernement et que la commission spéciale vous suggère précisément de rétablir.
L’amendement n° 23 rectifié a ainsi pour objet de créer une Autorité de la statistique publique qui veillerait « au respect du principe d’indépendance professionnelle dans la conception, la production et la diffusion de statistiques publiques ainsi que des principes d’objectivité, d’impartialité, de pertinence et de qualité des données produites ». Franchement, êtes-vous opposée à ces principes, madame Terrade ? Considérez-vous qu’une sorte d’autogestion professionnelle les garantisse mieux que cette autorité ? C’est bien la question qui est posée, et je préfère, mes chers collègues, la poser en toute clarté, et en public.
Quant à la composition de cette autorité, elle comprend un président nommé par décret en conseil des ministres en raison de ses qualifications, une personnalité qualifiée désignée par le président de l'Assemblée nationale, une personnalité qualifiée désignée par le président du Sénat, un membre du Conseil économique et social désigné par le président de ce dernier, le président du comité du secret statistique du Conseil national de l'information statistique, un membre de la Cour des comptes nommé par le Premier président de la Cour, un membre de l'Inspection générale des finances nommé par le chef du service de l'Inspection générale des finances, un membre de l'Inspection générale des affaires sociales nommé par le chef de l'Inspection générale des affaires sociales, enfin une personnalité qualifiée en matière statistique nommée par le ministre chargé de l'économie.
Sincèrement, je ne vois là nul représentant d’un quelconque intérêt mercantile ou économique de nature à porter atteinte à l’indépendance professionnelle de nos chers amis les statisticiens publics ! Relisez bien la composition de cette autorité, madame Terrade, ainsi que toutes les motivations de ce texte ; je pense que vous serez alors totalement rassurée.
Par ailleurs, le texte proposé par l’amendement n° 23 rectifié pour l’article 1er bis de la loi n° 51-711 du 7 juin 1951 prend le soin de préciser le rôle du Conseil national de l’information statistique qui demeure, auprès de l’INSEE, chargé d’organiser la concertation entre les producteurs et les utilisateurs de la statistique publique.
Vous voyez donc que ce Conseil est maintenu dans ses fonctions. Simplement, à ses côtés, un organe extérieur aura pour rôle de garantir l’exercice indépendant de ces fonctions, tout à fait essentiel pour la transparence.
Enfin, madame le ministre, ne faudrait-il pas également que l’on progresse pour doter Eurostat, organisme essentiel sur le plan européen, d’un vrai statut indépendant ? En effet, si l’INSEE est une direction du ministère des finances, Eurostat est un service dépendant du vice-président de la Commission chargé des affaires financières et monétaires. Nous progresserions beaucoup dans la comparabilité de nos finances publiques, notamment dans le respect des engagements issus du traité de Maastricht, ainsi que dans la transparence, si nous avions une vraie autorité européenne en charge des méthodes de comptabilité publique.
Pour en revenir à la France et pour conclure, il me semble, madame le ministre, que votre intention initiale était excellente. C’est pourquoi la commission spéciale sollicite du Sénat le rétablissement de l’article 38 dans une version très proche de celle initialement proposée par le Gouvernement.
L'amendement n° 441, présenté par M. Raoul, Mmes Bricq et Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Massion, Pastor, Repentin, Sueur, Yung, Desessard et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Dans le deuxième alinéa du V du texte proposé par cet article pour l'article 1er de la loi n° 51-711 du 7 juin 1951 sur l'obligation, la coordination et le secret en matière de statistiques, après le mot :
Sénat
insérer les mots :
, le Président du Conseil économique et social
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Il s’agit de permettre au président du Conseil économique et social de saisir le Conseil supérieur de la statistique, ce qu’il n’est pas autorisé à faire actuellement.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements n° 477 et 441, et un avis favorable sur l'amendement n° 23 rectifié.
Au sein de l’Union européenne, la France est l’un des seuls pays à ne pas avoir encore inscrit l’indépendance de ses services statistiques en droit positif.
L'adoption de l’amendement n° 23 rectifié comblera cette lacune. Le principe d’indépendance concernera tous les services de la statistique, qu’il s’agisse de l’INSEE, dont personne aujourd'hui ne remet en cause la qualité des services, de la DARES ou des services statistiques qui se trouvent dans certains ministères.
Grâce à cette Autorité de la statistique publique, composée de neuf membres dont la désignation a été précisée par le M. le rapporteur, la France se dotera d’un organisme véritablement autonome, qui ne présentera aucun lien de consanguinité avec l’INSEE ou le CNIS : il sera indépendant à la fois dans sa constitution, dans sa composition et dans son fonctionnement. Je reprends devant la Haute Assemblée l’engagement que j’ai pris devant l'Assemblée nationale : cette institution n’aura aucune ligne budgétaire particulière, ne disposera d’aucune prérogative la détournant de sa vocation première, qui est d’émettre des avis et de garantir l’indépendance des services statistiques.
Pour répondre à votre interrogation, monsieur le rapporteur, j’ajoute qu’Eurostat est en train de créer une instance pratiquement similaire à celle que vise à mettre en place l’amendement n° 23 rectifié, afin de garantir l’indépendance des services statistiques européens de manière beaucoup plus rigoureuse encore.
L'amendement n'est pas adopté.
La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l'amendement n° 23 rectifié.
Je ne reviens pas sur le dispositif proposé par la commission spéciale. La discussion qui aura lieu à ce propos entre les sénateurs et les députés en commission mixte paritaire ne manquera pas d’être fort intéressante !
Monsieur le rapporteur, en matière d’intérêts corporatistes, depuis hier soir, …
…un grand nombre d’amendements ont été examinés et acceptés par le Gouvernement, donnant satisfaction à de nombreuses catégories professionnelles.
Dispensez-vous de vos leçons sur le corporatisme, s’il vous plaît !
Vous promettez de faire fi de tout corporatisme d’ici à la fin des débats ?
L'amendement est adopté.
En conséquence, l'article 38 est ainsi rédigé, et l'amendement n° 441 n'a plus d'objet.
Dans le troisième alinéa de l'article L. 1411-8 et le deuxième alinéa de l'article L. 2132-3 du code de la santé publique, le premier alinéa de l'article 7 et le premier alinéa de l'article 7 bis de la loi n° 51-711 du 7 juin 1951 précitée, les mots : « national de l'information » sont remplacés par les mots : « supérieur de la ».
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 24 est présenté par M. Marini, au nom de la commission.
L'amendement n° 478 est présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Philippe Marini, rapporteur, pour présenter l'amendement n° 24.
La parole est à Mme Odette Terrade, pour présenter l'amendement n° 478.
Le Gouvernement est favorable à ces amendements identiques.
Les amendements sont adoptés.
priorité
priorité
I. - La section 1 du chapitre Ier du titre II du livre II du code monétaire et financier est ainsi rédigée :
« Section 1
« Le livret A
« Art. L. 221-1. - Le livret A peut être proposé par tout établissement de crédit habilité à recevoir du public des fonds à vue et qui s'engage à cet effet par convention avec l'État.
« Art. L. 221-2. - L'établissement de crédit mentionné à l'article L. 518-25-1 ouvre un livret A à toute personne mentionnée à l'article L. 221-3 qui en fait la demande.
« Art. L. 221-3. - Le livret A est ouvert aux personnes physiques, aux associations mentionnées au 5 de l'article 206 du code général des impôts et aux organismes d'habitations à loyer modéré.
« Les mineurs sont admis à se faire ouvrir des livrets A sans l'intervention de leur représentant légal. Ils peuvent retirer sans cette intervention les sommes figurant sur les livrets ainsi ouverts, mais seulement après l'âge de seize ans révolus et sauf opposition de la part de leur représentant légal.
« Une même personne ne peut être titulaire que d'un seul livret A.
« Art. L. 221-4. - Un décret en Conseil d'État précise les modalités d'ouverture et de fonctionnement du livret A.
« Les versements effectués sur un livret A ne peuvent porter le montant inscrit sur le livret au-delà d'un plafond fixé par le décret prévu à l'alinéa précédent.
« Le même décret précise les montants minimaux des opérations individuelles de retrait et de dépôt pour les établissements qui proposent le livret A et pour l'établissement de crédit mentionné à l'article L. 518-25-1.
« Le même décret fixe les modalités de clôture du livret A.
« Art. L. 221-5. - Une quote-part du total des dépôts collectés au titre du livret A et du livret de développement durable régi par l'article L. 221-27 par les établissements distribuant l'un ou l'autre livret est centralisée par la Caisse des dépôts et consignations dans le fonds prévu à l'article L. 221-7.
« Le taux de centralisation des dépôts collectés au titre du livret A et du livret de développement durable est fixé de manière à ce que les ressources centralisées sur ces livrets dans le fonds prévu à l'article L. 221-7 soient au moins égales au montant des prêts consentis au bénéfice du logement social et de la politique de la ville par la Caisse des dépôts et consignations au titre de ce même fonds, affecté d'un coefficient multiplicateur égal à 1, 25.
« Un décret en Conseil d'État, pris après avis de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, précise les conditions de mise en œuvre des deux alinéas précédents.
« Les ressources collectées par les établissements distribuant le livret A ou le livret de développement durable et non centralisées en application des alinéas précédents sont employées par ces établissements au financement des petites et moyennes entreprises, notamment pour leur création et leur développement, ainsi qu'au financement des travaux d'économie d'énergie dans les bâtiments anciens. Les dépôts dont l'utilisation ne satisfait pas à cette condition sont centralisés à la Caisse des dépôts et consignations.
« Les établissements distribuant le livret A ou le livret de développement durable rendent public annuellement un rapport présentant l'emploi des ressources collectées au titre de ces deux livrets et non centralisées.
« Ces établissements fournissent, une fois par trimestre, au ministre chargé de l'économie, une information écrite sur les concours financiers accordés à l'aide des ressources ainsi collectées.
« La forme et le contenu des informations mentionnées aux deux alinéas précédents sont fixés par arrêté du ministre chargé de l'économie.
« Art. L. 221-6. - Les établissements distribuant le livret A et ceux distribuant le livret de développement durable perçoivent une rémunération en contrepartie de la centralisation opérée. Ses modalités de calcul sont fixées par décret en Conseil d'État, après avis de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations.
« L'établissement de crédit mentionné à l'article L. 518-25-1 perçoit une rémunération complémentaire au titre des obligations spécifiques qui lui incombent en matière de distribution et de fonctionnement du livret A. Les modalités de cette compensation sont fixées par décret en Conseil d'État.
« La rémunération et la rémunération complémentaire mentionnées aux deux alinéas précédents sont supportées par le fonds prévu à l'article L. 221-7.
« Art. L. 221-7. - I. - Les sommes mentionnées à l'article L. 221-5 sont centralisées par la Caisse des dépôts et consignations dans un fonds géré par elle et dénommé fonds d'épargne.
« II. - La Caisse des dépôts et consignations, après accord de sa commission de surveillance et après autorisation du ministre chargé de l'économie, peut émettre des titres de créances au bénéfice du fonds.
« III. - Les sommes centralisées en application de l'article L. 221-5 ainsi que, le cas échéant, le produit des titres de créances mentionnés au II du présent article, sont employés en priorité au financement du logement social. Une partie des sommes peut être utilisée pour l'acquisition et la gestion d'instruments financiers définis à l'article L. 211-1.
« IV. - Les emplois du fonds d'épargne sont fixés par le ministre chargé de l'économie. La commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations présente au Parlement le tableau des ressources et emplois du fonds d'épargne visé au présent article pour l'année expirée.
« Art. L. 221-8. - Les opérations relatives au livret A sont soumises au contrôle sur pièces et sur place de l'inspection générale des finances.
« Art. L. 221-9. - Il est créé un observatoire de l'épargne réglementée chargé de suivre la mise en œuvre de la généralisation de la distribution du livret A, notamment son impact sur l'épargne des ménages, sur le financement du logement social et sur le développement de l'accessibilité bancaire.
« Les établissements de crédit fournissent à l'observatoire les informations nécessaires à l'exercice de sa mission.
« Un décret en Conseil d'État précise l'organisation et le fonctionnement de l'observatoire, ainsi que la liste et la périodicité des informations que les établissements distribuant le livret A lui adressent. L'observatoire de l'épargne réglementée remet un rapport annuel au Parlement et au Gouvernement sur la mise en œuvre de la généralisation de la distribution du livret A. »
II. - Après l'article L. 518-25 du code monétaire et financier, il est inséré un article L. 518-25-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 518-25-1. - I. - Un établissement de crédit, dont La Poste détient la majorité du capital, reçoit les dépôts du livret A, dans les conditions prévues à la section 1 du chapitre Ier du titre II du livre II.
« II. - L'État et cet établissement de crédit concluent une convention qui précise les conditions applicables à cet établissement pour la distribution et le fonctionnement du livret A.
« III. - La Poste et ce même établissement de crédit concluent une convention, dans les conditions prévues à l'article L. 518-25, qui précise les conditions dans lesquelles tout déposant muni d'un livret A ouvert auprès de cet établissement peut effectuer ses versements et opérer ses retraits dans les bureaux de poste dûment organisés à cet effet. »
III. - Le 7° de l'article 157 du code général des impôts est ainsi rédigé :
« 7° Les intérêts des sommes inscrites sur les livrets A ainsi que ceux des sommes inscrites sur les comptes spéciaux sur livret du Crédit mutuel ouverts avant le 1er janvier 2009 ; ».
IV. - Le 2° de l'article 1681 D du même code est ainsi rédigé :
« 2° Un livret A, sous réserve que l'établissement teneur du livret le prévoie dans ses conditions générales de commercialisation, ou un livret A ou un compte spécial sur livret du Crédit mutuel relevant du 2 du I de l'article 40 de la loi n° du de modernisation de l'économie ».
V. - L'article L. 221-27 du code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° Après les mots : « ce livret », la fin de la dernière phrase du premier alinéa est ainsi rédigée : « sont employées conformément à l'article L. 221-5. » ;
2° Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :
« Les versements effectués sur un livret de développement durable ne peuvent porter le montant inscrit sur le livret au-delà d'un plafond fixé par voie réglementaire. »
VI. - Le même code est ainsi modifié :
1° Le 2° de l'article L. 112-3 est ainsi rédigé :
« 2° Les livrets A définis à l'article L. 221-1 ; »
2° Le 4° du même article L. 112-3 est ainsi rédigé :
« 4° Les livrets de développement durable définis à l'article L. 221-27 ; »
3° L'article L. 221-28 est abrogé.
VI bis. - Dans le 9° quater de l'article 157 du code général des impôts, les références : « aux articles L.221-27 et L. 221-28 » sont remplacées par la référence: « à l'article L. 221-27 ».
VII. - La section 8 du chapitre Ier du titre II du livre II du code monétaire et financier est complétée par un article L. 221-38 ainsi rédigé :
« Art. L. 221-38. - L'établissement qui est saisi d'une demande d'ouverture d'un produit d'épargne relevant du présent chapitre est tenu de vérifier préalablement à cette ouverture si la personne détient déjà ce produit. Il ne peut être procédé à l'ouverture d'un nouveau produit si la personne en détient déjà un. Un décret en Conseil d'État précise les modalités de cette vérification. »
VIII. - Le VII de la section 2 du chapitre III du titre II du livre des procédures fiscales est complété par un 5° ainsi rédigé :
« 5° Prévention de la multi-détention de produits d'épargne générale à régime fiscal spécifique
« Art. L. 166 A. - À l'occasion de l'ouverture d'un produit d'épargne relevant du chapitre Ier du titre II du livre II du code monétaire et financier, l'administration fiscale transmet, sur demande, à l'établissement mentionné à l'article L. 221-38 du même code, les informations indiquant si le demandeur est déjà détenteur de ce produit. »
IX. - L'article L. 312-1 du code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° La dernière phrase du deuxième alinéa est remplacée par trois phrases ainsi rédigées :
« En cas de refus de la part de l'établissement choisi, la personne peut saisir la Banque de France afin qu'elle lui désigne un établissement de crédit à proximité de son domicile ou d'un autre lieu de son choix, dans un délai d'un jour ouvré à compter de la réception des pièces requises. L'établissement de crédit qui a refusé l'ouverture d'un compte informe le demandeur que celui-ci peut demander à la Banque de France de désigner un établissement de crédit pour lui ouvrir un compte, en prenant en considération les parts de marché de chaque établissement concerné. Il lui propose, s'il s'agit d'une personne physique, d'agir en son nom et pour son compte en transmettant la demande de désignation d'un établissement de crédit à la Banque de France ainsi que les informations requises pour l'ouverture du compte. » ;
2° Après le deuxième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« L'association française des établissements de crédit et des entreprises d'investissement, mentionnée à l'article L. 511-29, adopte une charte d'accessibilité bancaire afin de renforcer l'effectivité du droit au compte. Cette charte précise les délais et les modalités de transmission par les établissements de crédit à la Banque de France des informations requises pour l'ouverture d'un compte. Elle définit les documents d'information que les établissements de crédit doivent mettre à disposition de la clientèle et les actions de formation qu'ils doivent réaliser.
« La charte d'accessibilité bancaire, homologuée par arrêté du ministre chargé de l'économie, après avis du comité consultatif du secteur financier et du comité consultatif de la législation et de la réglementation financières, est applicable à tout établissement de crédit. Le contrôle du respect de la charte est assuré par la commission bancaire et relève de la procédure prévue à l'article L. 613-15. »
Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, nous entamons l’examen d’un titre important, qui porte sur un sujet suscitant les passions.
Le 10 mai 2007, au nom des règles de concurrence fixées par les traités, la Commission européenne a donné à la France un délai de neuf mois pour réformer en profondeur le mode de distribution du livret A et du livret bleu, qui est aujourd'hui attribué à la Banque Postale, aux Caisses d’épargne et au Crédit mutuel.
Cette décision, bien au-delà de ses effets sur les équilibres économiques des établissements concernés, est susceptible d’affecter de manière grave et définitive la cohésion sociale dont le Gouvernement est le garant devant les Français.
Depuis sa création en 1818, le livret A, qui compte 45 millions de titulaires, est le symbole de l’épargne populaire. Tous les gouvernements qui se sont succédé se sont attachés à préserver son mode de distribution, ainsi que le mode de centralisation de ses fonds, confiée à la Caisse des dépôts et consignations. Ils l’ont fait au nom de deux impératifs majeurs et incontournables : le financement du logement social cofinancé à 80 % par le livret A et la lutte contre l’exclusion bancaire.
Dans son rapport 2007 sur l’état du mal-logement en France, la Fondation Abbé-Pierre estime à 5 963 145 le nombre total de « personnes en situation de réelle fragilité à court ou moyen terme ». L’Union sociale pour l’habitat, qui rassemble l’ensemble du mouvement HLM, estime, au 31 août 2007, que plus d’un million de demandes de logement HLM sont en attente en France métropolitaine.
Aujourd’hui, environ 10 millions de personnes résident dans le parc HLM et acquittent, en moyenne, des loyers deux fois moins élevés que dans le secteur privé. Il est prévu que le financement du plan Borloo de relance du logement social repose à 80 % sur les fonds collectés par le livret A.
D’une manière générale, les Français continuent de vivre une situation de crise en matière de logements : logements chers à la location comme à l’achat, ségrégation, difficultés d’accès au logement, personnes sans-abri…
Par ailleurs, à défaut de chiffrage officiel, on estime couramment, depuis le débat législatif sur la mise en place de la procédure de rétablissement personnel, en 2004, que l’exclusion bancaire touche environ 5 millions de personnes dans notre pays. Or le livret A représente par excellence le dernier outil de lutte contre l’exclusion bancaire. En l’absence de tout dispositif légal de service universel bancaire gratuit, les populations les plus démunies et souvent âgées – exclus, bénéficiaires de minima sociaux, travailleurs émigrés, etc. –utilisent leur livret A pratiquement quotidiennement pour effectuer leurs opérations financières.
Produit d’épargne populaire sans équivalent à l’échelon international, le livret A a fait la preuve de sa solidité depuis des décennies. En 190 ans d’existence, il n’a jamais spolié aucun épargnant. Il est le moins coûteux, en Europe, pour les finances publiques. Une déstabilisation du système aurait un impact négatif sur les finances publiques nationales et locales ainsi que sur l’offre de logement social.
En cas de banalisation du livret A, la plupart des établissements financiers chercheraient à capter les bons clients et à décourager les autres, aux dépens des réseaux déjà actifs qui conserveraient la seule clientèle sociale. Leur objectif serait de siphonner les fonds du livret A au profit de placements plus profitables. Cette hypothèse inacceptable est pourtant très vraisemblable ! De plus, le secteur bancaire ne manquerait pas de contester le système de centralisation auprès de la Caisse des dépôts et consignations.
À cet égard, le CODEVI constitue un précédent très éclairant : seuls 6 % des fonds collectés aujourd’hui sont aujourd'hui centralisés par la Caisse des dépôts et consignations !
Dès lors, le système de financement du logement social, tel que nous le connaissons aujourd’hui, aurait vécu : il serait entièrement entre les mains des banques. Des établissements financiers, à la santé déjà très florissante, seraient alors en capacité d’imposer leurs conditions aux organismes d’HLM chargés d’assurer dans de bonnes conditions le logement de la fraction la plus modeste et la plus vulnérable de la population.
La Commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, présidée par M. Michel Bouvard, député UMP de Savoie, a rendu publique sa position le 27 septembre 2006 : « S’agissant de la distribution du livret A et de la question de sa banalisation, une telle décision est du ressort des pouvoirs publics. La Commission de surveillance estime pour sa part que les nouveaux réseaux collecteurs pourraient être amenés à proposer aux détenteurs du livret A d’autres produits financiers. Elle juge ce risque comme très sérieux. En définitive, les fonds centralisés à la Caisse des dépôts pourraient progressivement ne plus permettre d’assurer le financement du logement social. »
Outre des parlementaires de la majorité et de l’opposition, la Commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations est notamment composée de magistrats issus du Conseil d’État et de la Cour des Comptes, du Gouverneur de la Banque de France et du directeur du Trésor au ministère de l’économie, des finances et de l’emploi.
La mission sur le livret A, confiée par le Premier ministre au groupe de travail présidé par Michel Camdessus, n’est de toute évidence pas de nature à écarter le risque d’implosion du système du financement du logement social. Cette mission ayant notamment pour objectif la modernisation de la distribution du livret A et des circuits de financement du logement social, elle peut donc envisager d’accompagner la banalisation.
C’est terminé, madame !
La parole est à Mme Nicole Bricq, sur l'article.
Avant que nous engagions la discussion des amendements déposés sur cet article, je tiens à exposer les quatre principes qui sous-tendent les amendements déposés par le groupe socialiste, afin que ces derniers ne soient pas mal interprétés.
Premièrement, la libéralisation du livret A est conduite dans une précipitation dangereuse.
Cela fait des années que cela aurait dû être fait ! Que ne l’avez-vous fait plus tôt !
Il s’agit en effet d’une épargne réglementée dont l’importance quantitative, l’attachement que lui portent les Français, la destination – le logement social –, la sécurisation par la Caisse des dépôts et consignations en font un élément consubstantiel à ce que je n’hésite pas à appeler le « vivre ensemble » en France.
Deuxièmement, cette libéralisation procurera des avantages indus aux banques nouvelles entrantes, au travers d’une rémunération forfaitaire élevée et sans contrepartie.
Troisièmement, la décentralisation des fonds collectés outrepasse la demande de la Commission européenne, et l'article 39, tel qu’il nous est proposé, ne garantit pas la couverture des besoins en logements sociaux dans la durée.
Quatrièmement, cette libéralisation se fait dans un contexte de crise financière et de resserrement du crédit – la Banque centrale européenne a augmenté aujourd'hui même les taux directeurs d’un quart de point –, ainsi que de recul du pouvoir d'achat qui pénalisera les plus pauvres : certains pourraient se voir rejetés de l’accessibilité bancaire et ceux qui seraient « bancarisés » pourraient se voir « débancarisés ».
C’est à la lumière de ces quatre principes que doivent être appréhendés tous les amendements déposés par le groupe socialiste.
Cet article 39 a de fortes conséquences. Ainsi, depuis 150 ans, 80 % des logements sociaux ont été construits grâce au livret A. De plus, ce texte concerne près des deux tiers des Français qui détiennent un livret de ce type. Et aujourd’hui, tel qu’il est rédigé, il aura pour effet tant de fragiliser le système de financement du logement social que de remettre en cause le droit au compte des plus fragiles de nos concitoyens.
Comme je l’avais exposé lors de la discussion générale, la fin de la centralisation totale, que vous prenez l’initiative de proposer, ne constitue ni plus, ni moins, qu’une largesse faite aux banques. Et, contrairement à ce que l’on peut entendre ces temps-ci, ce point est loin d’être une simple question de clivage politique. Nous sommes nombreux, de tendances politiques très différentes, à regretter cette mesure, qui ne peut être comprise que comme telle. Ce point de vue est partagé tant par des parlementaires, que par des responsables associatifs et des élus locaux, de toutes sensibilités politiques. Nous avons d’ailleurs été nombreux à signer l’appel de l’Union sociale pour l’habitat, qui a exprimé ses craintes relatives à la pérennité du financement du logement social, craintes confirmées par certains grands banquiers.
Comment comprendre autrement que comme une aide financière de l’État le fait de laisser aux banques privées la libre disposition d’une épargne défiscalisée, dans une proportion pouvant atteindre jusqu’à 60 milliards d’euros ? Neelie Kroes, commissaire européen chargé de la concurrence, a elle-même reconnu que c’était une véritable question pour la Commission européenne, qui, contrairement à ce qu’affirme Bercy, n’a pas été consultée sur cette proposition de la réforme. Il n’est pas inutile de rappeler que, dans la décision visant à la banalisation de la distribution, la Commission avait bel et bien validé le principe de centralisation à 100 % à la Caisse des dépôts et consignations.
Il nous paraît très risqué de laisser 30 % de la collecte à la disposition des banques, alors que, jusqu’à présent, ces mêmes 30 % servaient à la Caisse des dépôts et consignations pour équilibrer les comptes des 70 % prêtés aux organismes de logement social. Ces 30 % ne bénéficieront plus de la garantie de l’État, ce qui implique que cette part des sommes placées par les détenteurs du livret A sera mise en jeu, à la guise des banques, sur n’importe quelle opération, y compris les plus risquées.
Mettre fin à la centralisation et, ainsi, soumettre le financement du logement social aux aléas du marché, voilà qui nous promet des temps difficiles ! Si le niveau d’encours se trouvait menacé, de deux choses l’une : soit il faudrait recourir à l’endettement des collectivités territoriales ou de l’État, soit il faudrait faire appel de façon accrue aux marchés financiers, ce qui signifie une hausse des taux d’intérêt pour les organismes d’HLM, un raccourcissement de la durée des prêts, et donc une augmentation inévitable des loyers dans le parc HLM.
C’est pour éviter un tel scénario que nous avons déposé plusieurs amendements de repli tendant au moins à inscrire le taux minimum de 70 % de centralisation, que vous annoncez sans pour autant le faire figurer dans le projet de loi, et à relever le coefficient multiplicateur minimum à 1, 33.
Ces amendements sont les garanties les plus minimes que nous nous devons d’apporter pour éviter une remise en cause trop importante du financement du logement social.
C’est aussi pour cette raison que nous vous proposerons d’augmenter le plafond du livret A. Cette hausse permettrait aussi d’accroître l’épargne sur livret et de garantir une hausse des encours à disposition des politiques publiques de l’habitat.
Nous souhaitons votre soutien à l’égard de cette série de propositions, ce qui marquerait votre attachement à l’intérêt général en le plaçant au-dessus des intérêts d’établissements bancaires qui vont voir leurs profits s’accroître grâce à l’épargne des détenteurs d’un livret A.
C’est d’ailleurs ce qui expliquerait votre décision de rémunérer les banques sur les fonds destinés au logement social, alors qu’elles auront largement de quoi se rétribuer avec les 30 % que vous voulez leur laisser.
Dans le texte qui nous est proposé, vous justifiez cette rémunération par les transferts de centralisation. Or, la centralisation ne va rien coûter aux banques. Seules les opérations aux guichets sont coûteuses ; cette rémunération devrait donc se faire au prorata des opérations effectuées sur livret. C’est en ce sens que va l’un de nos amendements.
De plus, vous faites ce choix au moment où d’autres investissements seront sûrement nécessaires et bien plus pertinents. Par exemple, nous savons tous que la banalisation risque d’avoir un impact clairement négatif sur le réseau de points de contact de La Poste situés, notamment, en zone rurale ou dans les quartiers les plus difficiles, parce que le produit net bancaire de cet établissement dépend fortement de son duopole de la collecte sur le livret A. Mais sur ce point, nous ne partageons sans doute pas les mêmes priorités.
D’autre part, en obligeant la seule Banque Postale à accepter toute demande d’ouverture de livret, l’article 39 la destine à être la « banque des pauvres », alors que les autres banques pourront sélectionner les clients « dignes » d’ouvrir un compte chez elles. C’est d’autant plus paradoxal que cela signifie que ces mêmes banques, alors qu’elles ont voulu la banalisation du livret A, ne seront pas tenues d’ouvrir un tel livret à tout client potentiel en faisant la demande. Cela se confirme, puisque vous avez déclaré que vous envisagiez, pour ceux qui se servent du livret A comme d’un compte courant, de mettre en place un dispositif « spécial » d’accessibilité bancaire. Mais cette mesure, si elle entrait en application, ne ferait qu’entériner la discrimination entre les détenteurs de livrets confortables et modestes.
Mesdames les ministres, il ne vous reste plus qu’à nous démontrer, en émettant un avis favorable sur certains des amendements que nous allons vous présenter, que, comme nous, vous êtes attachées à la vocation sociale et à la préservation de l’équilibre du livret A. Si vous agissez ainsi, madame le ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, vous enverrez un signal fort à Mme le ministre du logement et de la ville, comme aux 1 400 000 demandeurs de logements sociaux, auxquels je pense plus particulièrement, et vous contribuerez à la construction des 900 000 logements qui manquent aujourd’hui pour héberger la totalité de nos concitoyens.
Voilà quelques semaines, avant l’examen par l’Assemblée nationale du projet de loi dont nous débattons, le communiqué suivant a été rendu public : « L’Assemblée nationale examine une réforme très importante du livret A. Les signataires souhaitent attirer son attention sur les risques que comporte le texte actuel et lui proposer des améliorations.
« Comme l’a demandé la Commission européenne, le projet de loi ouvre la distribution du livret A à l’ensemble des banques, mais il va très au-delà de cette demande et peut mettre en danger deux services d’intérêt général reconnus par Bruxelles : l’accessibilité bancaire et le financement du logement social.
« La réforme a pour effet l’abandon de la centralisation complète du livret A.
« Le taux de 70 % de centralisation de la collecte livret A-LDD, auquel s’était engagé le Gouvernement, ne figure pas dans la loi : en laissant une part non définie de la collecte à la disposition du secteur bancaire, la réforme crée un risque de confrontation entre les intérêts des banques et ceux du logement social si, au-delà d’une probable période de hausse, la collecte subit des fluctuations.
« En cantonnant l’accessibilité bancaire liée au livret A à La Banque Postale, la réforme spécialise les réseaux par type de clientèle, et met à la charge des fonds d’épargne, donc du logement social, le coût supplémentaire de ce service, qui s’ajoutera à celui de la rémunération des banques.
« En l’état, le texte ne répond donc pas, dans la durée, aux conditions posées par le Président de la République à l’ouverture de la distribution : sécurité de la collecte pour le logement social et diminution du coût des prêts.
« Les signataires demandent en conséquence :
« Le principe d’une centralisation complète de la collecte du livret A, ou à défaut l’inscription dans la loi d’un taux minimum de centralisation fixé à 70 % de la collecte des livrets A et LDD, le seuil-plancher prévu par le texte intervenant comme clause de sauvegarde.
« L’affectation garantie de la ressource au logement social : d’autres emplois d’intérêt général ne doivent être autorisés qu’en cas d’excédents constatés.
« Une gouvernance et un contrôle de la Caisse des dépôts prenant en compte son rôle dans le financement du logement social, et le caractère non discriminatoire des prêts selon les organismes et les territoires.
« La prise en charge par l’ensemble des banques distribuant le livret A de l’accessibilité bancaire. À défaut, la garantie dans la loi du non-report sur les prêts en cours ou à venir au logement social du coût du service assuré par la Banque Postale.
« Un encadrement clair et rigoureux de la rémunération des banques.
« La répercussion complète de toute baisse du coût de la ressource sur le coût des prêts en cours ou à venir au logement social, pour soutenir la production et favoriser des loyers accessibles aux ménages à ressources modestes.
« L’engagement du Gouvernement à ne pas diminuer les subventions aux opérations de logement social, ce qui aboutirait à supprimer le seul effet positif de la réforme sur l’équilibre des opérations et le niveau des loyers. »
Ce communiqué a été publié le jeudi 29 mai 2008.
Suit la qualité des signataires : « Marc Censi, président de l’Assemblée des communautés de France, Jacques Bigot, président de l’Association des communautés urbaines de France, Michel Destot, président de l’Association des maires de grandes villes de France, Martin Malvy, président de l’Association des petites villes de France, Bruno Bourg-Broc, président de la Fédération des maires des villes moyennes, André Laignel, secrétaire général de l’Association des maires de France, Michel Delebarre, président de l’Union sociale pour l’habitat. »
Une telle prise de position impose que nous ne légiférions pas à la légère. Il est manifeste que le texte que nous examinons aujourd’hui ne recueille aucunement le soutien large que le Gouvernement était en droit d’attendre d’une telle disposition.
Bien au contraire, de nombreux élus, de sensibilité proche du Gouvernement, trouvent que la réforme qui nous est proposée présente nombre de défauts.
Je tenais, au moment où nous engageons la discussion de cet article, à faire état de cette prise de position parce qu’elle nous amène tous à nous interroger et montre à quel point les associations d’élus sont légitimement préoccupées par ce qui se prépare.
Je rappelle au Sénat que, pour la clarté des débats, il a été décidé, sur proposition de la commission spéciale, d’examiner en premier lieu les amendements tendant à la suppression de l’article 39.
Je suis donc saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 371 est présenté par Mme Bricq, MM. Massion, Repentin, Angels et Collombat, Mme Demontès, M. Godefroy, Mme Khiari, MM. Lagauche, Pastor, Raoul, Sueur, Yung et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° 979 est présenté par MM. Desessard et Muller et Mmes Blandin, Boumediene-Thiery et Voynet.
L'amendement n° 890 rectifié est présenté par Mmes Beaufils, Terrade et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Thierry Repentin, pour présenter l’amendement n° 371.
La décision de la Commission européenne de banaliser la distribution du livret A en France, pour mettre fin à la situation de monopole actuelle, a – dois-je le rappeler ? – fait l’objet d’un recours déposé le 23 juillet 2007 par l’État français. À ce jour, la décision de justice n’a toujours pas été rendue.
En fait, ce recours n’avait pour objet, du point de vue du Gouvernement, que de gagner du temps, ce dernier ayant renoncé, parallèlement, à défendre les spécificités de l’épargne réglementée des Français, tout en élaborant une réforme, dans l’urgence – d’ailleurs le projet de loi a été déclaré d’urgence –, d’un livret A dont l’histoire ancienne a marqué autant nos concitoyens que les vénérables institutions que sont La Poste, les Caisses d’épargne et le Crédit mutuel.
Le livret A, c’est l’épargne populaire. Mais le Gouvernement a saisi l’occasion qui lui était donnée pour mettre en œuvre, dans le domaine de l’épargne – il le fait d’ailleurs aussi dans d’autres domaines –, une politique de dérèglementation et de remise en cause d’un dispositif ancien, qui a pourtant fait ses preuves de service public et de solidarité.
Les mesures contenues dans l’article 39 du projet de loi de modernisation de l’économie vont bien plus loin que la simple généralisation de la distribution du livret A par les banques, car elles remettent en cause la centralisation complète des fonds collectés auprès de la Caisse des dépôts et consignations. Or, rien ne justifie l’abandon de ce mécanisme de centralisation. En tout cas, l’Union européenne n’a pas demandé l’adoption d’une telle disposition.
Remettre en cause cet équilibre est dangereux pour l’avenir du financement du logement social, car rien ne garantit, à terme, un niveau de collecte suffisant. L’expérience de la transformation de l’ancien livret CODEVI en livret de développement durable le démontre.
En outre, aucune garantie réelle n’est apportée en ce qui concerne le renforcement ou, simplement, le maintien de l’accessibilité bancaire des plus démunis : seule la Banque Postale serait transformée en banque des plus fragiles, alors que les autres établissements bancaires n’auraient à assumer aucune véritable contrainte et pourraient choisir leur clientèle !
Enfin, le recours intenté par l’État français ne sera pas interrompu par l’adoption éventuelle du projet de loi. À moins que l’État ne retire ce recours, nous verrons alors comment la juridiction saisie jugera la législation française éventuellement modifiée !
La Commission européenne n’a rien demandé d’autre que de mettre fin au monopole de la distribution. Jamais elle n’a demandé de remettre en cause la centralisation des fonds collectés, ni la rémunération des opérateurs bancaires. Elle a même reproché au Gouvernement français de ne pas l’avoir associée à sa démarche et de passer par pertes et profits les services d’intérêt économique général, auxquels concourt le livret A, dans sa configuration actuelle.
Pour toutes ces raisons, mes chers collègues, nous vous demandons de renoncer à remettre en cause le livret A et à tout ce qu’il permet, tout ce qu’il représente, tout ce qu’il signifie.
Cet amendement vise à la suppression de l’article 39, qui introduit la généralisation du livret A. Ce produit bancaire était jusqu’alors réservé à trois banques : La Banque Postale, la Caisse d’épargne et le Crédit mutuel. On pourrait penser que la généralisation envisagée tend à développer ledit produit. Or tel n’est pas le cas.
Il convient de rappeler l’attachement des Français au livret A. Le nombre de ces livrets déjà ouverts en France est très élevé ; on en compte près de 46 millions. Dans notre pays, ce produit joue un rôle important d’épargne populaire. Il est l’instrument du financement du logement social et un élément essentiel de la politique de la ville.
Nous devons garantir et faire perdurer le système de financement du logement social par le biais du livret A, ce qui n’est pas, hélas ! le sens de la réforme qui nous est proposée.
Pourquoi changer un système qui marche bien ? J’avais déjà formulé la même remarque au sujet de l’entreprise Aéroports de Paris. Alors que tout le monde reconnaissait que le dispositif fonctionnait, cette société a été privatisée.
De même, EDF était une entreprise qui marchait bien. On l’a privatisée et, désormais, c’est le bazar ! On ne comprend plus rien, on ne sait plus où trouver une agence pour effectuer un changement. Tout est devenu extrêmement compliqué, et cela va moins bien qu’avant !
Et l’on intitule ce texte « projet de loi de modernisation de l’économie » ! Moderniser n’est pas forcément, à mon avis, améliorer.
Aujourd’hui, 100 % des dépôts collectés au titre du livret A sont centralisés, puis entièrement gérés par la Caisse des dépôts et consignations, qui les utilise pour financer le logement social. Cette centralisation des dépôts à la Caisse des dépôts et consignations est remise en question par le projet de loi.
Les ministres nous annoncent que le taux de centralisation du livret A et du livret de développement durable sera d’environ 70 %, mais rien ne nous le garantit. C’est l’affectation des fonds collectés au titre du livret A qui est remise en cause.
Tout d’abord, le seuil de centralisation des dépôts collectés pas la Caisse des dépôts et consignations n’est pas inscrit dans la loi, ce qui ne nous laisse pour toute garantie que la bonne foi des ministres. Malgré tout, nous sommes sceptiques. Nous ne nous permettons pas de mettre en doute votre bonne foi, mais vous savez bien, mes chers collègues, que les gouvernements passent…
À une époque où la demande de logement n’a jamais été aussi forte, nos concitoyens ne peuvent souffrir une telle incertitude. Nous voulons la garantie que le seuil des dépôts collectés sera adapté, sur le long terme, aux besoins du financement des logements sociaux.
Par ailleurs, l’affectation des fonds non centralisés, c’est-à-dire 30 % des dépôts, comme on nous l’annonce, est, elle aussi, incertaine. Ces fonds devront servir au financement des PME ou à des travaux d’économie d’énergie. Je n’y suis pas opposé, mais je doute que les banques affecteront toutes les ressources collectées à ces fins.
Mme la ministre de l’économie reconnaissait elle-même, lors de la première lecture de ce texte à l’Assemblée nationale, que ce type de collectes décentralisées connaissait des applications imparfaites. Elle nous disait que la somme réellement consacrée au financement des PME, au titre du livret de développement durable, ne s’élevait qu’à 55 %, malgré l’obligation faite aux banques de leur consacrer 70 % des sommes collectées !
Nous ne pouvons pas faire confiance aux banques, acteurs privés de l’économie, pour assurer des missions d’intérêt général ; ce n’est d’ailleurs pas leur rôle !
Ce sont les établissements bancaires, et pas l’intérêt général, qui seront les grands gagnants de cette mesure. En effet, la généralisation du livret A fera bénéficier les banques d’un afflux de nouveau clients. Mais rien ne les empêchera de diriger les clients venus pour ouvrir un livret A vers d’autres placements financiers plus rémunérateurs et ne bénéficiant pas à la collectivité. Ce sont donc le financement du logement social et la collectivité qui seront les grands perdants de cette mesure.
Pour finir, je m’interrogerai, comme M. Repentin, sur l’action du Gouvernement. Celui-ci a déposé, dans un premier temps, un recours devant la Cour de justice des Communautés européennes afin de contester la décision de la Commission d’étendre à toutes les banques la distribution du livret A. Or nous avons appris par Mme Lagarde, s’exprimant sur ce sujet le 17 juin dernier, que le Gouvernement souhaitait désormais retirer ce recours.
Quel signal politique contradictoire ! Alors que vous vous opposiez à la généralisation du livret A, vous nous proposez aujourd’hui une loi qui va au-delà des recommandations de Bruxelles !
Comme nous l’avons dit lors de la discussion générale, l’objectif de ce projet de loi n’est pas de moderniser l’économie, mais de casser ce qui fonctionnait bien.
La parole est à Mme Odette Terrade, pour présenter l’amendement n° 890 rectifié.
Nous aurions pu croire, à l’énoncé du titre de ce chapitre, que le Gouvernement entendait renforcer un circuit de financement qui, quelles que soient les crises passées, a fait ses preuves au service des besoins de la population, notamment des plus démunis, dans sa mission d’accessibilité bancaire gratuite et égalitaire.
Nous aurions pu croire, à l’heure de la Présidence française de l’Union européenne, que M. Sarkozy allait avoir le courage de défendre la spécificité française, en inscrivant dans la loi les services d’intérêt économique général que constituent les systèmes, uniques au monde, de collecte de l’épargne populaire et de financement public du logement social, plutôt que de céder devant les lobbies financiers, très actifs à Bruxelles, mais aussi trop présents dans les coulisses de nos assemblées.
Moderniser le livret A, pourquoi pas ? Il ne représente plus que 4 % de l’épargne des Français, alors qu’il est souscrit par plus de 50 millions de nos concitoyens. Il contribue à un financement égalitaire du logement social, facilite l’accessibilité financière des exclus bancaires, garantit publiquement les fonds déposés et rémunère l’épargne constituée.
Le livret A mérite certainement un coup de pouce pour renforcer les missions qui lui sont historiquement attachées, pour accroître ses ressources et pour développer ses emplois au bénéfice de tous. Or c’est un coup de poignard que lui assène le Gouvernement !
Malgré les engagements publics pris par Mme la ministre, force est de constater qu’aucune concertation n’a été réellement engagée avec les associations de consommateurs, opposées à cette réforme, ni avec les associations caritatives, qui jugent la charte d’accessibilité bancaire aussi peu crédible qu’un vœu pieux, ni avec le mouvement HLM, qui demande une réflexion approfondie et sans précipitation, ni avec les organisations syndicales, qui s’alarment des licenciements massifs dans les réseaux des caisses d’épargne et de La Poste, qui vont se compter par milliers.
Cet article 39, qui banalise le livret A en permettant aux banques d’améliorer la présentation de leur bilan, qui organise l’apartheid, pour le moment financier, des populations jugées indésirables dans les agences bancaires, qui met en demeure le service public de financement du logement social de se privatiser pour survivre, est inacceptable.
Nous sommes, pour notre part, encore attachés au pacte républicain qui nous unit à l’ensemble de nos concitoyens. Si vous l’êtes aussi, mes chers collègues, vous ne pourrez que soutenir notre demande de rejet de cet article.
La commission spéciale ne peut que s’opposer à de tels amendements de suppression, compte tenu du caractère impératif de la banalisation de la distribution du livret A.
Je vous rappelle que la décision de la Commission européenne du 10 mai 2007 est exécutoire depuis le 11 février dernier et que notre pays est désormais passible d’une procédure en manquement.
Nous devons donc présenter officiellement la réforme du livret A avant la mi-août, au risque de faire l’objet d’une procédure en manquement.
Surtout, sur le fond, la réforme qui nous est proposée est totalement satisfaisante puisqu’elle permet à la fois de garantir le financement d’un logement social et d’offrir aux consommateurs un choix plus large d’établissements bancaires pour ouvrir un livret A.
La commission émet donc un avis défavorable sur les amendements identiques de suppression n° 371, 979 et 890 rectifié.
Mme Christine Lagarde, ministre. Monsieur le président, Mme Boutin et moi-même nous livrerons, sur ces amendements, à un numéro de duettistes.
Sourires
Le Gouvernement ne peut être que défavorable à ces trois amendements de suppression.
Je reviendrai sur certains des points évoqués, parfois de manière caricaturale, en limitant mon propos aux questions fiscales et financières, celles relatives au logement social relevant de la compétence de Mme Boutin.
Tout d’abord, vous avez été nombreux à faire des observations sur la procédure suivie par le Gouvernement et à nous reprocher une certaine précipitation. Je vous invite, à et égard, à rendre visite à Mme Neelie Kroes, commissaire européen chargé de la concurrence.
Je sais que vous l’avez auditionnée, mais peut-être apprendrez-vous avec intérêt qu’elle attend justement, de notre part, un peu plus de précipitation. Mme la vice-présidente de la commission spéciale a rappelé que nous devions présenter cette réforme à la mi-août. Nous devons donc sans retard aborder la question de la généralisation du livret A.
S’agissant de la méthode retenue, je précise que nous avons fait appel à des experts. M. Camdessus nous a livré un rapport tout à fait éclairé et nourri par les longues consultations qu’il a menées. Nous avons ensuite consulté les organisations de tous ordres, les banques, les consommateurs et les épargnants, qui sont très attachés au produit livret A. Nous avons également mené un travail de coproduction avec les parlementaires intéressés par le sujet, ce qui nous a amenés à tenir compte des différentes remarques afin d’élaborer le texte que nous vous présentons. Nous vous inviterons enfin à un travail de « postproduction », afin de s’assurer que cette réforme sera correctement mise en œuvre et utile pour nos concitoyens.
J’en viens au produit livret A lui-même, auquel les Français sont très attachés, comme l’indiquaient récemment certains journaux du matin.
Ce produit ne change pas dans sa nature. Il demeure accessible à tous, liquide, il profite d’une fiscalité particulièrement intéressante, d’un taux de rémunération, attractif ; plafonné, il ne peut devenir une niche fiscale sans fond ni plafond. Je le dis très clairement, il n’est pas question de toucher à tout cela !
Je souhaite, à cet égard, revenir sur des allégations publiées dans un journal du soir, selon lesquelles j’aurais l’intention de fiscaliser, dans le secret de mon administration, les produits de l’épargne du livret A. Il n’en est pas question, de même qu’il est faux, madame Bricq, que nous cherchons à modifier la fiscalité attachée au crédit impôt recherche.
En rendant le livret A accessible auprès de 40 000 agences, au lieu de 22 000 actuellement, et en donnant à chaque titulaire de livret d’épargne la possibilité de s’adresser à la banque de son choix pour ouvrir un livret A, nous facilitons à la fois le recours au livret et sa gestion.
Cette mesure positive correspond parfaitement aux desiderata de la Commission, avec laquelle nous avons entretenu, contrairement à ce que j’ai entendu ici ou là, des contacts étroits et réguliers. Comme mes collaborateurs peuvent en attester, nous nous sommes rendus à de multiples reprises à Bruxelles pour évoquer la façon dont nous allions mettre en œuvre la décision du 10 mai 1007 à laquelle faisait référence Mme la vice-présidente de la commission spéciale.
Non seulement nous ne touchons pas au produit livret A du point de vue des épargnants, mais nous facilitons son accès.
Nous ne faisons en aucun cas de cadeau aux banques à l’occasion de cette réforme. Sur ce point, j’ai entendu de véritables contre-vérités !
Je vous rappelle que, aujourd’hui, la rémunération dont bénéficient les organismes collecteurs est de 1, 11 % en moyenne, même si ce taux peut varier un peu selon les livrets et l’organisme concerné. À la suite de la négociation que nous avons menée, nous avons ramené ce taux de commission à 0, 6 %. Il n’est donc pas question de faire un cadeau aux banques ! Nous avons, au contraire, divisé par deux le montant de la commission afin de faciliter et de rendre plus rentable le financement du logement social.
Il n’est pas non plus question de faire un cadeau aux banques au nom d’une quelconque décentralisation des dépôts, cadeau résultant du passage d’un taux de centralisation des dépôts de 100 % à un taux de 70 %.
Il suffit, pour s’en convaincre, de se livrer à quelques calculs simples. Il faut d’abord appliquer une agrégation entre le taux obligatoire de centralisation auprès de la Caisse des dépôts et consignations, qui est de 100 %, d’une part, et le taux de 9 % de centralisation applicable au livret de développement durable, d’autre part, puis multiplier les deux taux et rapporter le tout à la somme. On aboutit à un taux de 70 %, qui correspond au seuil que nous envisageons de mettre en place par voie de décret.
Le recours au décret s’explique par la nécessité d’ajuster le taux en fonction de la collecte, afin de faciliter le financement du logement social. En effet, lorsque la collecte est très forte, le taux de 70 % est manifestement excessif ; en revanche, lorsque la collecte est plus faible, le même taux peut s’avérer insuffisant. Nous sommes donc loin d’un cadeau accordé aux banques !
J’aborderai un dernier point : ce mécanisme est un moyen pour le Gouvernement de renforcer l’accessibilité bancaire, qui n’est pas suffisante. Nous souhaitons permettre à tous les Français le souhaitant soit d’ouvrir un compte, soit d’engager une procédure de droit au compte.
Tels sont les points que je voulais préciser, mesdames, messieurs les sénateurs. Je laisse maintenant la parole à ma collègue Mme Christine Boutin, afin qu’elle vous fasse profiter de sa propre expertise.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, la préparation de cette réforme a fait l’objet de nombreuses réunions de travail entre les services de Mme Christine Lagarde et les miens, afin de parvenir à un texte non seulement équilibré entre les différentes aspirations que nous avions tous, mais aussi novateur, en ce sens qu’il vise à inscrire dans la loi l’importance accordée au financement du logement social.
Ce projet de loi a, par ailleurs, été amélioré lors de son passage à l’Assemblée nationale.
En ma qualité de ministre du logement et de la ville, je tiens à rappeler les principes essentiels qui guident cette réforme : le Gouvernement entend assurer la pérennité du financement du logement social, diminuer le coût de ce dernier et étendre les dispositions relatives à l’accessibilité bancaire.
S’agissant tout d’abord de la pérennisation du financement du logement social, il est extrêmement important de bien comprendre ceci : le projet de loi prévoit un niveau plancher de centralisation des ressources collectées à la fois – j’insiste – sur le livret A et le livret de développement durable. À ma demande, ce plancher a été fixé – et ce dans la loi – à 1, 25 fois le montant total des prêts au logement social, permettant ainsi de couvrir l’ensemble des besoins de financement, et a même été assorti d’un « matelas » supérieur de 0, 25 % à ce qu’il aurait été normal de prévoir.
L’Assemblée nationale, soucieuse d’assurer une permanence de la ressource au logement social, est allée au-delà, en prenant en compte dans le calcul de ce plancher non seulement les prêts au logement social, mais aussi les prêts consentis au bénéfice de la politique de la ville, ce qui répond à vos préoccupations, mesdames, messieurs les sénateurs.
Les organismes d’HLM auront ainsi la certitude de disposer des ressources nécessaires permettant de couvrir largement leurs besoins.
Des dispositions réglementaires fixeront par ailleurs le pourcentage global de centralisation de la collecte réalisée sur le livret A et le livret de développement durable au minimum à 70 %.
Comme vous l’a dit excellemment Mme Christine Lagarde, le décret permet une plus grande souplesse et une réaction plus rapide que la loi. Vous serez tous d’accord avec cela.
Le projet de loi prévoit également que l’épargne collectée sur le livret A soit utilisée en priorité pour le financement du logement social, ce qui n’est pas le cas actuellement.
Grâce à ce texte, une valeur législative sera donnée à la priorité absolue qui s’attache à consacrer les ressources de l’épargne réglementée à la résorption de la pénurie de logement. C’est là une avancée majeure, qui ne peut que rassurer la ministre du logement et de la ville que je suis.
Par ailleurs – c’est le deuxième point –, la diminution du coût du financement du logement social est un objectif que nous souhaitons bien entendu tous atteindre.
La généralisation à l’ensemble des banques de la distribution du livret A va s’accompagner d’une baisse du taux de rémunération des banques collectrices, comme l’a dit Mme Christine Lagarde. Cette mesure n’est pas un cadeau ; elle va permettre ce financement du logement social dans de meilleures conditions.
Cette baisse sera répercutée sur le coût du crédit octroyé aux bailleurs sociaux, leur permettant ainsi de réaliser des logements locatifs sociaux dans des conditions financières de toute façon améliorées, quel que soit le marché, ce qui n’est pas rien.
Ainsi, le taux des prêts PLUS baissera, à compter du 1er août, de vingt points de base : il passera ainsi de 4, 30 % à 4, 10 %. Le taux des prêts très sociaux, les PLA-I, baissera, lui, de cinquante points de base : il passera de 3, 30 % à 2, 80 %, ce qui n’est pas rien non plus. Cette baisse est indispensable.
En effet, pour lutter contre la pénurie de logements, due à l’insuffisance de l’effort de construction pendant de nombreuses années, le Gouvernement s’est fixé comme objectif la construction de 500 000 logements par an, dont 120 000 logements sociaux.
Plus de 430 000 logements ont été mis en chantier en 2007 – c’est un record depuis vingt ans –, dont près de 108 000 logements sociaux financés.
Ces chiffres en appellent d’autres. J’ai eu l’occasion, hier, de présenter, dans un souci de transparence totale – telle n’était pas la règle jusqu’à présent –, un bilan exhaustif de la seconde période triennale de mise en œuvre de l’article 55 de la loi SRU.
L’objectif de production de logements sociaux fixé aux 730 communes concernées était, sur la période 2005-2007, de 63 000 logements. Les résultats ont dépassé de loin les objectifs, puisque ce sont 93 000 logements sociaux qui ont été créés ou lancés !
Cette baisse des taux, qui se cumulera prochainement avec d’autres mesures en préparation dans le projet de loi de mobilisation pour le logement, que j’aurai l’honneur de vous présenter à l’automne, participera au soutien de la construction de logements sociaux.
Troisième et dernier point, l’extension de l’accessibilité bancaire est un souci que nous avons tous. Le projet de loi va permettre de renforcer l’accessibilité bancaire en conservant à la Banque Postale le rôle qu’elle joue aujourd’hui en matière d’accessibilité bancaire. J’y étais très attachée.
Le projet de loi va également améliorer cette accessibilité en consolidant l’effectivité du droit au compte. À cet effet, il est prévu que les banques devront adopter une charte définissant des modalités précises de mise en œuvre de ce droit.
Le ministre du logement et de la ville émet également, bien évidemment, un avis défavorable sur les trois amendements tendant à supprimer l’article 39.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt-deux heures.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante, est reprise à vingt-deux heures, sous la présidence de M. Philippe Richert.