Nous en venons maintenant au cœur des débats qui ont animé les travaux des commissions avec cet article unique. Les commissions des lois et de l’aménagement du territoire ont donc choisi de reprendre l’avis du Conseil d’État et proposé de changer les termes de la modification de l’article 1er de la Constitution. Ainsi, la France ne garantirait plus la préservation de l’environnement, mais préserverait simplement l’environnement et la diversité biologique. Elle ne lutterait plus contre le dérèglement climatique, mais agirait simplement contre celui-ci.
Au-delà des formules retenues et de l’implication juridique concrète de ces modifications, nous faisons un constat simple : le Sénat a joué le rôle que l’on attendait de lui en éloignant l’idée même de toute réforme constitutionnelle, condamnant ce projet de loi constitutionnelle à la navette permanente, sauf à recourir à l’alinéa 3 de l’article 89, c’est-à-dire à passer par le Parlement réuni en Congrès pour opérer cette modification de la Constitution, une voie qui nous semble largement préférable.
Le Sénat aura ainsi fait le choix d’être le meilleur alibi du Président de la République pour un nouveau renoncement qui laissera un goût amer, non seulement aux membres de la Convention citoyenne pour le climat, mais également aux parlementaires que nous sommes.
Par ailleurs, l’opposition entre le « garantit » et le « favorise » est largement surjouée. Je le répète, il n’y a pas de hiérarchie entre les droits et libertés garantis par la Constitution, contrairement à ce qu’a affirmé la commission des lois.
En outre, le verbe « favoriser » apparaît peu ambitieux. En effet, comme l’a rappelé le Conseil constitutionnel dans une décision du 24 avril 2015, l’alinéa de l’article 1er qui dispose que la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux ne crée pas un droit ou une liberté garanti au sens de l’article 61-1 de la Constitution.
Mes chers collègues, vous nous amusez avec ces guerres sémantiques, qui masquent mal la régression des politiques publiques environnementales. Le Sénat est toujours d’accord avec la majorité présidentielle quand il s’agit de réduire le droit de l’environnement. Nous l’avons vu dans tous les derniers projets de loi que nous avons examinés, que ce soit sur les néonicotinoïdes ou bien sur l’évaluation environnementale, dans le cadre du projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique.
Ces débats ne servent donc qu’à jouer le statu quo. Nous le regrettons et voterons contre cet article, qui, comble du comble, revient à insérer une lapalissade à l’article 1er de la Constitution.