Séance en hémicycle du 10 mai 2021 à 21h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • charte de l’environnement
  • climatique
  • constitution
  • constitutionnel
  • constitutionnelle
  • démocratie
  • l’environnement
  • référendum

La séance

Source

La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante, est reprise à vingt et une heures trente-cinq, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Burgoa

Monsieur le président, lors du scrutin public n° 116 sur l’ensemble de la proposition de résolution en faveur de l’association de Taïwan aux travaux de plusieurs organisations internationales, M. Ronan Le Gleut a été enregistré comme ayant voté pour, alors qu’il souhaitait ne pas prendre part au vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Nous reprenons la discussion du projet de loi constitutionnelle complétant l’article 1er de la Constitution et relatif à la préservation de l’environnement.

Je rappelle que la discussion générale a été close.

Nous passons à la discussion du texte adopté par l’Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

L’amendement n° 7, présenté par Mme V. Boyer, est ainsi libellé :

Avant l’article unique

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 5 de la Charte de l’environnement de 2004 est ainsi modifié :

1° Les mots : « bien qu’incertaine en l’état des connaissances scientifiques » sont remplacés par les mots : « dont la probabilité de survenue est scientifiquement étayée » ;

2° Le mot : « précaution » est remplacé par le mot : « prudence responsable ».

La parole est à Mme Valérie Boyer.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Boyer

Le principe de précaution est devenu le grand épouvantail utile du débat politique, alors que sa définition originelle était nettement plus étroite, et ce, bien qu’il soit présent dans le lexique de la loi française depuis 1995. Ce principe a constitué une plus-value admirable au service de la protection de l’environnement dans l’action publique.

La précaution vise la prévention des risques, quand les connaissances techniques et scientifiques sont insuffisamment précises.

Mais c’est ce principe qui a conduit à interdire l’utilisation d’un certain nombre de produits qui ne disposaient d’aucune alternative viable, parfois en l’absence de certitude scientifique sur leur dangerosité. Il est aujourd’hui nécessaire de remettre la connaissance scientifique au cœur du débat public pour rationaliser les discussions, en reformulant ce principe : en effet, sans une telle connaissance, le risque est immédiat et l’innovation bridée.

Or nous avons justement besoin d’innovations scientifiques pour agir contre le changement climatique et au profit de la viabilité de notre modèle économique et industriel.

La question sanitaire étant fréquemment instrumentalisée pour interdire certaines pratiques, il est ici proposé de transformer, dans la Charte de l’environnement, le principe de « précaution » en un principe de « prudence responsable ». En effet, lorsqu’il neige, la précaution est de ne pas rouler, alors que la prudence préconise de rouler, mais moins vite qu’à l’accoutumée.

Exclamations ironiques sur les travées des groupes SER et GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Boyer

Sur le fondement de ce nouveau principe, aucune pratique ne saurait être interdite, lorsqu’elle contribue à la richesse nationale, si elle ne dispose pas d’une solution de substitution et s’il n’existe pas une probabilité scientifiquement étayée de dangerosité.

Tel est le sens du présent amendement. Plutôt que de prôner une précaution zélée, défendons une responsabilité sage et avisée, c’est-à-dire une prudence responsable !

Cet amendement est issu des travaux du mouvement Oser la France, des Républicains.

Exclamations sur les travées des groupes CRCE et SER.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

La commission demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis sera défavorable.

Cet amendement prévoit de modifier l’article 5 de la Charte de l’environnement afin de remplacer le principe de « précaution » par un principe de « prudence responsable ».

Ce principe serait défini par l’obligation, pour les autorités publiques, de mettre en œuvre des procédures d’évaluation des risques et d’adopter des mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation d’un dommage affectant de manière grave et irréversible l’environnement, non plus lorsque la réalisation d’un dommage est possible, quoique « incertaine en l’état des connaissances scientifiques », mais lorsque sa « probabilité de survenue » est « scientifiquement étayée ».

En réalité, on peut considérer que cet amendement est satisfait par le droit en vigueur, car le principe de précaution n’impose pas de parer à la réalisation de dommages imaginaires ou purement spéculatifs : il faut que la possibilité d’un dommage existe, autrement dit que ce dommage ait un certain degré de probabilité, étayée par des faits. Tout dépend naturellement du degré de probabilité exigé.

En 2005, le Constituant a posé un principe équilibré : s’il existe une probabilité de dommage, même légère, les autorités publiques doivent, d’une part, se mettre en mesure d’évaluer plus précisément cette probabilité, d’autre part, prendre des mesures provisoires et proportionnées. La commission ne souhaite pas toucher à cet équilibre.

Retrait ou avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti

Le Gouvernement exprime également un avis défavorable. Cet amendement démontre, à l’évidence, qu’il n’y a pas toujours d’accord sur les mots… Nous estimons qu’il constitue une régression par rapport à la Charte de l’environnement. Dans ces conditions, comme l’a parfaitement expliqué M. le rapporteur, je ne peux qu’y être totalement défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

L’amendement n° 7 est retiré.

L’amendement n° 9, présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :

Avant l’article unique

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 6 de la Charte de l’environnement de 2004, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. …. – Par application du principe de non-régression, la protection de l’environnement, assurée par les dispositions législatives et réglementaires relatives à l’environnement, ne peut faire l’objet que d’une amélioration constante. »

La parole est à Mme Éliane Assassi.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Monsieur le président, si vous le permettez, je présenterai en même temps les amendements n° 9 et 10.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

J’appelle donc également en discussion l’amendement n° 10, présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, et ainsi libellé :

Avant l’article unique

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 6 de la Charte de l’environnement, il est inséré un article ainsi rédigé :

« Art. …. – Le principe de solidarité écologique appelle à prendre en compte, dans toute prise de décision publique ayant une incidence notable sur l’environnement, les interactions des écosystèmes, des êtres vivants et des milieux naturels ou aménagés. »

Veuillez poursuivre, ma chère collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Avec ces deux amendements, nous souhaitons faire la démonstration que, si le Gouvernement et le Président de la République souhaitaient une réforme de la Constitution qui soit utile à l’environnement, alors que d’autres voies, comme je l’ai dit, sont possibles et même souhaitables, il leur suffirait d’écouter les juristes qui formulent un certain nombre de propositions.

Cette réforme n’a pour finalité que de donner de nouveaux outils au juge constitutionnel, alors qu’il conviendrait à notre sens de renforcer l’assise des principes de l’environnement dans le bloc de constitutionnalité.

En effet, la fragilité de certaines décisions du Conseil constitutionnel tient notamment à ce que certains principes généraux du droit de l’environnement formulés à l’article L. 110-1 du code de l’environnement ne disposent pas d’une valeur constitutionnelle, mais d’une simple valeur législative et que ces principes mis en balance avec d’autres principes constitutionnels comme la liberté d’entreprendre sont appelés à s’effacer.

Il en est ainsi du principe de non-régression environnementale, autrement appelé principe d’amélioration constante ; à nos yeux, ce principe devrait figurer au sein de la Charte de l’environnement afin d’intégrer le bloc de constitutionnalité. C’est également le cas pour le principe de solidarité écologique.

À l’aune de cette intégration, la jurisprudence du Conseil constitutionnel pourrait évoluer et certaines lois, comme celle qui a permis de réintroduire des néonicotinoïdes, n’auraient pas pu être adoptées, une telle réintroduction constituant à l’évidence une régression environnementale.

Ces modifications de la Charte de l’environnement pourraient fournir des points d’appui pour faire évoluer la jurisprudence du Conseil constitutionnel et par conséquent améliorer concrètement la préservation de l’environnement et la prise en compte des enjeux climatiques, en envoyant un signal clair, non seulement à nos concitoyens, notamment à ceux qui ont participé à la Convention citoyenne, mais également au législateur.

À défaut, la réforme qui est ici proposée, amendée ou non par le Sénat, ne serait que gesticulation et manipulation démagogique, sans aucune utilité concrète ou directe.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

L’avis est défavorable sur ces deux amendements.

La commission estime que l’amendement n° 9 est partiellement satisfait par la jurisprudence constitutionnelle actuelle.

Je rappelle en effet que, par sa décision du 10 décembre 2020, le Conseil constitutionnel a dégagé de la Charte de l’environnement un principe de non-régression. En effet, il a considéré que le législateur « ne saurait priver de garanties légales le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé consacré par l’article 1er de la Charte de l’environnement », que « les limitations portées par le législateur à l’exercice de ce droit ne sauraient être que liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par un motif d’intérêt général et proportionnées à l’objectif poursuivi » et que le législateur « doit prendre en compte le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement mentionné à l’article 2 de la Charte de l’environnement ».

Il serait déraisonnable d’aller plus loin. Dans aucun pays du monde, il n’existe un principe de stricte non-régression en matière d’environnement ou, plus largement, en matière de droits fondamentaux. Les pouvoirs publics doivent être en mesure de prendre les dispositions rendues nécessaires par l’intérêt général ou par d’autres exigences constitutionnelles, même si cela implique dans certains cas de revenir sur des dispositions prises pour la protection de l’environnement.

La décision du 10 décembre 2020 que je viens de citer concernait le contrôle de conformité à la Constitution de la loi relative aux conditions de mise sur le marché de certains produits phytopharmaceutiques en cas de danger sanitaire pour les betteraves sucrières. Le Conseil constitutionnel a décidé qu’il était possible, dans un cas particulier et pour une durée limitée, de revenir sur l’interdiction générale des néonicotinoïdes.

En ce qui concerne l’amendement n° 10, le principe de solidarité écologique a été introduit à l’article L. 110-1 du code de l’environnement et je vois mal ce qu’il ajouterait aux principes de précaution, de prévention et de réparation déjà consacrés par la Charte de l’environnement.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti

Je me permets d’ajouter qu’une précédente décision du Conseil constitutionnel en date du 4 août 2016 allait dans le même sens que celle du 10 décembre 2020. En outre, ces principes sont déjà reconnus à l’article L. 110-1 du code de l’environnement.

Pour ces raisons, je suis défavorable à ces deux amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Nous ne voterons pas ces amendements, pas pour les raisons avancées par M. le rapporteur et M. le garde des sceaux, mais tout simplement parce que le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires souhaite que ce texte aille jusqu’au bout.

Comme vous, madame Assassi, nous avons proposé des amendements pour améliorer le texte qui nous est proposé afin de répondre de manière plus précise au défi que pose la prise en compte de l’environnement par l’État. Comme vous, nous sommes favorables à une plus grande protection de l’environnement, y compris au travers d’une modification de notre Constitution, car cela permet de donner une force plus contraignante aux politiques qui sont menées en la matière.

Cependant, comme l’a expliqué le président de notre groupe, Guillaume Gontard, lors de la discussion générale, nous souhaitons, je le répète, que ce texte aille jusqu’au bout. Nous ne voulons pas qu’une éventuelle modification de rédaction rende un référendum impossible. Nous refusons d’être instrumentalisés de la sorte !

C’est pourquoi, même si nous partageons les objectifs de ces amendements, nous ne les voterons pas. Nous ne voulons pas entrer dans le jeu de dupes qui est en train de se nouer entre Les Républicains et le Gouvernement !

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Comme je l’ai indiqué dans mon intervention en discussion générale, je suis d’accord avec M. Benarroche sur le fait que nous assistons effectivement à un jeu de dupes.

Je suis toutefois surprise par votre argumentaire, mon cher collègue : vous dites que vous êtes d’accord avec nos amendements, mais vous voulez les rejeter, parce que vous souhaitez un vote conforme… J’avoue sincèrement ne pas comprendre votre démarche politique – j’utilise ce mot au sens noble.

On peut s’interroger : comment pouvez-vous soutenir l’idée d’introduire un certain nombre d’éléments dans la Charte de l’environnement, tout en étant favorable au texte proposé aujourd’hui par le Gouvernement ? Je suis sincèrement étonnée que votre groupe défende une telle position.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Kerrouche

L’article 2 de la Charte de l’environnement oblige déjà toute personne à prendre part à l’amélioration de l’environnement, mais il est vrai qu’à ce jour le Conseil constitutionnel n’en a pas déduit l’existence d’un principe de non-régression en tant que tel. Il nous semble qu’inscrire ce principe dans la Charte serait une avancée ; c’est pourquoi nous voterons l’amendement n° 9, qui va dans le bon sens.

S’agissant du débat plus général sur l’idée de voter un texte conforme, la question est tranchée de fait, puisque la commission des lois a déposé un amendement. Par conséquent, le texte ne sera pas voté conforme et nous pouvons adopter cet amendement !

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

M. Joël Labbé. Ce drôle de jeu me déstabilise ! On nous annonce que, de toute façon, le texte ne sera pas voté conforme. Les choses semblent courues d’avance. Dans ces conditions, ne perdons pas de temps et arrêtons les frais !

Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

Pour moi, comme pour beaucoup de collègues, la question du principe de non-régression est fondamentale. Or le Conseil constitutionnel ne nous a pas donné raison sur ce sujet à l’occasion de l’examen de la loi sur les néonicotinoïdes. Il faudrait donc bien inscrire ce principe dans le bloc de constitutionnalité.

Mais puisque je refuse de jouer à ce jeu politique, je ne prendrai pas part au vote sur ces amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Gontard

Je voudrais simplement répondre à Éliane Assassi.

Il est évident que nous sommes dans un jeu de dupes, mais le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires estime, peut-être à tort, que le texte adopté par l’Assemblée nationale va dans le bon sens et nous souhaitons qu’il soit soumis aux électeurs dans le cadre d’un référendum. Pour nous, le débat doit avoir lieu avec les citoyennes et les citoyens.

À ce stade de nos travaux, l’amendement du rapporteur n’a pas encore été voté ; nous allons en débattre dans quelques minutes.

Nous sommes d’accord avec les amendements que vous venez de présenter, madame Assassi. D’ailleurs, nous avons nous-mêmes déposé un amendement qui va dans le même sens. §Nous n’avons donc pas de problème de fond ; nous souhaitons simplement qu’un référendum ait lieu.

C’est un jeu de dupes, je le redis, mais nous verrons bien si l’amendement du rapporteur est adopté et si la droite décide qu’un tel référendum ne doit pas se tenir !

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Gontard

Il y a aura peut-être une navette, mais notre groupe souhaite trouver un accord pour que le texte adopté par l’Assemblée nationale soit conservé et soumis à référendum. Nous ne voulons pas d’une position en retrait par rapport au texte de l’Assemblée nationale. Nous voulons avancer et non pas régresser.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à M. Fabien Gay, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

J’ai moi aussi entendu dire que le référendum était enterré, mais ne tirons pas pour autant un trait sur le débat et sur la navette parlementaire ! Si nous ne votons pas le texte conforme, si nous l’enrichissons, il repartira à l’Assemblée nationale, puis il reviendra, s’il n’est toujours pas conforme…

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Le référendum pourra avoir lieu à l’issue de cette navette.

Il est vrai que le jeu est vicié, mais nous devons quand même respecter nos institutions et la Constitution !

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Françoise Gatel applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Personne ne nie qu’il existe un débat entre la droite et le Gouvernement !

Ensuite, mes chers collègues de gauche, si vous voulez un vote conforme, si vous refusez d’enrichir le texte, ne déposez pas d’amendement !

Nouveaux applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Fabien Gay

Même dans les périodes compliquées, le groupe communiste républicain citoyen et écologiste conserve sa boussole : c’est le cas sur la question de la non-régression environnementale. Je crois que nous pourrions être d’accord sur ce sujet et il nous revient de faire vivre, y compris au Sénat, un clivage gauche-droite sur ce type de question. Nous avons besoin d’être unis et rassemblés ; d’ailleurs, je le dis sous le contrôle de la présidente de notre groupe, nous voterons sans aucun problème l’amendement du groupe écologiste.

Nous devons faire vivre le débat démocratique, même si certains ici ne souhaitent pas aller au bout. La rédaction de ce projet de loi constitutionnelle ne nous convient pas en l’état ; par conséquent, nous proposons de l’enrichir. La question environnementale nous tient à cœur et je pense que c’est la même chose pour vous !

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à M. Philippe Bas, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Bas

Il faut tout de même préciser que le Gouvernement a été bien content de pouvoir revenir sur certaines décisions prises en matière environnementale – je pense notamment à la taxe sur le diesel au moment de la crise des gilets jaunes…

Cela prouve bien que, quand on parle de politique environnementale, il faut garder l’esprit de mesure. Aller un coup trop loin, vouloir avancer trop fort, c’est finalement l’assurance de régresser !

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Après la troisième phrase du premier alinéa de l’article 1er de la Constitution, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Elle garantit la préservation de l’environnement et de la diversité biologique et lutte contre le dérèglement climatique. »

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bonnefoy

Depuis le début de la pandémie de covid-19, chaque pays compte ses victimes par milliers. En France, depuis mars 2020, on dénombre plus de 106 000 morts. Depuis plusieurs semaines, l’Inde et le Brésil entassent, chaque jour, les corps par milliers.

Notre seule arme pour accéder à l’immunité collective, c’est le vaccin. Ce vaccin est un bien commun mondial, un bien commun qui ne peut être la propriété de personne, dès lors que nous en avons tous besoin pour vivre. À ce titre, nous devons favoriser son accès pour tous.

Est-il acceptable de laisser les logiques économiques l’emporter sur la santé humaine ? Nous pensons que non. Joe Biden et l’Union européenne ont répondu au cri d’alarme de l’Inde et de l’Afrique du Sud, en se prononçant en faveur de la levée des brevets sur les vaccins.

Ces vaccins ont été très largement financés par les contribuables, puisque près de 7 milliards de dollars ont été distribués aux laboratoires par les États-Unis et l’Union européenne pour financer la recherche. À cela s’ajoutent plusieurs centaines de millions de doses de vaccins achetées par les pays. Et c’est aussi grâce à des dizaines d’années de recherche publique, bien commun de la connaissance, que ces vaccins ont pu être découverts.

On peut donc considérer que les vaccins sont des biens communs financés très largement par des puissances publiques dans l’intérêt de l’humanité. Il est nécessaire que la France se positionne pour faire de ces vaccins des biens communs mondiaux.

Notre espoir de retour à la vie normale réside dans la vaccination pour tous. D’après les chercheurs, cette pandémie ne sera pas la dernière que l’humanité devra affronter. Les futurs vaccins et traitements devront aussi être considérés et gérés comme des biens communs mondiaux. Notre espoir pour l’avenir réside dans ce changement de société que nous appelons de nos vœux, une société fondée sur les biens communs. Patrick Kanner le rappellera tout à l’heure à l’occasion de la présentation de l’amendement n° 11.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à Mme Marie-Claude Varaillas, sur l’article.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Claude Varaillas

Nous en venons maintenant au cœur des débats qui ont animé les travaux des commissions avec cet article unique. Les commissions des lois et de l’aménagement du territoire ont donc choisi de reprendre l’avis du Conseil d’État et proposé de changer les termes de la modification de l’article 1er de la Constitution. Ainsi, la France ne garantirait plus la préservation de l’environnement, mais préserverait simplement l’environnement et la diversité biologique. Elle ne lutterait plus contre le dérèglement climatique, mais agirait simplement contre celui-ci.

Au-delà des formules retenues et de l’implication juridique concrète de ces modifications, nous faisons un constat simple : le Sénat a joué le rôle que l’on attendait de lui en éloignant l’idée même de toute réforme constitutionnelle, condamnant ce projet de loi constitutionnelle à la navette permanente, sauf à recourir à l’alinéa 3 de l’article 89, c’est-à-dire à passer par le Parlement réuni en Congrès pour opérer cette modification de la Constitution, une voie qui nous semble largement préférable.

Le Sénat aura ainsi fait le choix d’être le meilleur alibi du Président de la République pour un nouveau renoncement qui laissera un goût amer, non seulement aux membres de la Convention citoyenne pour le climat, mais également aux parlementaires que nous sommes.

Par ailleurs, l’opposition entre le « garantit » et le « favorise » est largement surjouée. Je le répète, il n’y a pas de hiérarchie entre les droits et libertés garantis par la Constitution, contrairement à ce qu’a affirmé la commission des lois.

En outre, le verbe « favoriser » apparaît peu ambitieux. En effet, comme l’a rappelé le Conseil constitutionnel dans une décision du 24 avril 2015, l’alinéa de l’article 1er qui dispose que la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux ne crée pas un droit ou une liberté garanti au sens de l’article 61-1 de la Constitution.

Mes chers collègues, vous nous amusez avec ces guerres sémantiques, qui masquent mal la régression des politiques publiques environnementales. Le Sénat est toujours d’accord avec la majorité présidentielle quand il s’agit de réduire le droit de l’environnement. Nous l’avons vu dans tous les derniers projets de loi que nous avons examinés, que ce soit sur les néonicotinoïdes ou bien sur l’évaluation environnementale, dans le cadre du projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique.

Ces débats ne servent donc qu’à jouer le statu quo. Nous le regrettons et voterons contre cet article, qui, comble du comble, revient à insérer une lapalissade à l’article 1er de la Constitution.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

L’amendement n° 4, présenté par M. Folliot, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Philippe Folliot.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

M. Philippe Folliot. « Charles, réveille-toi ! Nous sommes devenus fous ! » Telle est l’injonction que nous pourrions adresser au fondateur de la Ve République.

Murmures de désapprobation sur des travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

La défense de l’environnement est quelque chose d’important, et même d’essentiel. Chacune et chacun, ici, en est convaincu. Pour la plupart d’entre nous, dans nos fonctions d’élu local, quand nous en avons, nous essayons de mettre ces questions au cœur de notre action.

Pour autant, faut-il toucher à la loi fondamentale ? Faut-il changer notre Constitution en fonction de ces enjeux ?

Monsieur le garde des sceaux, ce texte pose un certain nombre de problèmes au regard de sa genèse, de ses principes et de ses conséquences.

S’agissant de sa genèse à travers les travaux de la Convention citoyenne pour le climat, je ne vais pas revenir sur ce qui a été dit par différents orateurs, mais je m’interroge à mon tour : les commissions « environnement » de l’Assemblée nationale et du Sénat ont-elles moins de légitimité que des citoyens tirés au sort pour réfléchir sur ces grands enjeux ?

Ensuite, les principes qui le guident me posent problème : est-il raisonnable de changer la Constitution chaque fois que nous nous trouvons face à un enjeu que nous jugeons important, essentiel ?

Montesquieu disait qu’il ne fallait toucher à la loi que d’une main tremblante. S’agissant de la loi constitutionnelle, la main doit être très tremblante…

Enfin, il y a ses conséquences. Je ne vais pas revenir en détail sur ce qu’a excellemment développé notre collègue Philippe Bonnecarrère à propos d’une nouvelle hiérarchie des normes qui va causer un certain nombre de difficultés, nous entraînant notamment dans le sens d’une judiciarisation accrue de la société. Ainsi, nombre de projets portés par nos collectivités seront systématiquement remis en cause par les tribunaux. Partant, nous ne serons plus dans une démocratie où sont les élus qui décident : in fine, ce pouvoir reviendra aux juges.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Folliot

S’appuyant sur ces constats, mon amendement a pour objet de supprimer cet article, afin d’éviter que nous ne touchions encore à la Constitution, cette loi fondamentale et sacrée qui devrait le moins souvent possible être modifiée.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

C’est une demande de retrait, faute de quoi l’avis sera défavorable. La commission des lois a souhaité non pas supprimer cet article, mais le réécrire.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti

C’est évidemment un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Monsieur Folliot, l’amendement n° 4 est-il maintenu ?

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les trois premiers sont identiques.

L’amendement n° 2 est présenté par M. Buffet, au nom de la commission des lois.

L’amendement n° 3 est présenté par M. Chevrollier, au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.

L’amendement n° 5 rectifié est présenté par MM. Retailleau, Marseille, Allizard, Anglars, J.M. Arnaud, Bacci, Bas, Bascher et Bazin, Mmes Bellurot, Belrhiti, Berthet et Billon, MM. J.B. Blanc, Bonne, Bonneau, Bonnecarrère et Bonnus, Mme Borchio Fontimp, MM. Boré et Bouchet, Mmes Boulay-Espéronnier, Bourrat et V. Boyer, MM. Brisson, Burgoa, Cadec, Cadic et Calvet, Mme Canayer, MM. Canévet, Capo-Canellas, Cardoux et Cazabonne, Mme Chain-Larché, MM. Chaize, Charon, Chatillon et Chauvet, Mme Chauvin, MM. Cigolotti, Courtial et Cuypers, Mme L. Darcos, MM. Daubresse et de Belenet, Mmes de La Provôté et Demas, M. S. Demilly, Mmes Deroche, Deromedi et Deseyne, M. Détraigne, Mmes Di Folco, Dindar et Doineau, M. Duffourg, Mmes Dumas, Dumont, Estrosi Sassone et Eustache-Brinio, M. Favreau, Mme Férat, M. B. Fournier, Mmes C. Fournier, Garnier et Gatel, M. Genet, Mmes F. Gerbaud, Gosselin, N. Goulet et Gruny, MM. Guené et Gueret, Mme Guidez, MM. Henno et L. Hervé, Mme Herzog, MM. Hingray, Houpert et Husson, Mmes Imbert, Jacquemet et Jacques, M. Janssens, Mmes Joseph et M. Jourda, MM. Karoutchi, Kern, Klinger et Lafon, Mme Lassarade, MM. Laugier et D. Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, de Legge, Le Gleut, Le Nay et H. Leroy, Mme Létard, M. Levi, Mme Loisier, MM. Longeot, Louault, Le Rudulier et Longuet, Mmes Lopez et Malet, MM. Mandelli, P. Martin et Maurey, Mme M. Mercier, MM. Mizzon et Moga, Mme Morin-Desailly, M. Mouiller, Mme Muller-Bronn, MM. Nachbar et de Nicolaÿ, Mme Noël, MM. Nougein, Paccaud, Panunzi, Paul, Pellevat, Pemezec et Perrin, Mme Perrot, M. Piednoir, Mme Pluchet, M. Poadja, Mme Primas, M. Prince, Mmes Puissat et Raimond-Pavero, MM. Rapin, Regnard, Reichardt, Rietmann et Rojouan, Mme Saint-Pé, MM. Saury, Sautarel, Savary et Savin, Mme Schalck, MM. Sido, Sol, Somon et Tabarot, Mme Tetuanui, M. Vanlerenberghe, Mmes Vérien et Vermeillet et MM. C. Vial et Vogel.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Remplacer les mots :

Elle garantit la préservation de l’environnement et de la diversité biologique et lutte contre le dérèglement climatique

par les mots :

Elle préserve l’environnement ainsi que la diversité biologique et agit contre le dérèglement climatique, dans les conditions prévues par la Charte de l’environnement de 2004

La parole est à M. le rapporteur, pour présenter l’amendement n° 2.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Cet amendement a pour objet, chacun l’a bien compris, puisque nous en parlons maintenant depuis de nombreuses heures, de réécrire l’article 1er pour éviter les effets, qui nous paraissent inconnus, du verbe « garantir ».

Il s’agit d’insérer, après la troisième phrase de l’article 1er de la Constitution, la phrase suivante : « [La France] préserve l’environnement ainsi que la diversité biologique et agit contre le dérèglement climatique dans des conditions prévues par la Charte de l’environnement de 2004. »

L’intérêt de la rédaction, au-delà des analyses qui ont été faites depuis tout à l’heure sur la proposition gouvernementale, c’est d’établir à nouveau une articulation claire entre l’article 1er de la Constitution et la Charte de l’environnement.

Ensuite, il faut le reconnaître, il y a un aspect symbolique à ne pas négliger, mais il y a aussi la volonté d’inclure expressément dans notre loi fondamentale la lutte contre le dérèglement climatique, que la Charte elle-même ne mentionne pas.

Tel l’objet de l’amendement qui a été présenté à la commission des lois, laquelle a émis un avis majoritairement favorable. Je le rappelle, sur un texte constitutionnel, c’est le texte du Gouvernement qui vient en séance, et tous les amendements, ceux tant de la commission que des sénateurs, sont discutés dans l’hémicycle.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à M. le rapporteur pour avis, pour présenter l’amendement n° 3.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Chevrollier

L’amendement de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable est identique à celui de la commission des lois. Il présente à mon sens trois avantages, juridique, politique et symbolique.

Pour ce qui est du juridique, le président de la commission des lois vient d’en parler, démontrant avec clarté en quoi cette nouvelle rédaction neutralise les risques soulevés par le Conseil d’État.

Politiquement parlant, comme il tend à rappeler le rôle central de la Charte de l’environnement à l’article 1er de la Constitution, je le vois comme une incitation à mener des politiques publiques plus ambitieuses dans le cadre sécurisant de la dynamique conciliatrice du développement durable – préservation de l’environnement, développement économique et progrès social –, sans pour autant créer de hiérarchie entre les principes constitutionnels ni d’incertitude quant à leur responsabilité.

Enfin, il y a un aspect symbolique en faveur de la préservation de l’environnement, de la diversité biologique et contre le dérèglement climatique. C’est un sujet qui est cher à la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, donc je ne peux qu’être favorable à ce que cette mention figure à l’article 1er de notre Constitution, aux côtés des valeurs éminentes de la République. Rappelons que la France a été le premier État du Nord à faire référence au climat dans son texte fondamental.

Pour toutes ces raisons, cet amendement a été largement adopté par notre commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à M. Bruno Retailleau, pour présenter l’amendement n° 5 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Il s’agit donc d’un amendement identique à ceux des deux commissions, que, avec Hervé Marseille et de nombreux collègues, nous avons tenu aussi à déposer, mais je vais le présenter selon un axe un peu différent pour éviter des redites.

Monsieur le garde des sceaux, on ne perd jamais son temps, le dimanche matin, à lire le journal. On en a généralement pour son argent…

Exclamations sur plusieurs travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Avant même que le Sénat n’examine ce texte en séance publique, ici dans l’hémicycle, avant même, d’ailleurs, que le dialogue ne se soit noué entre notre Haute Assemblée et l’Assemblée nationale, le Sénat était accusé de bloquer la révision et le référendum. C’était l’accusation lancée par un certain nombre de porte-parole, j’imagine, de l’exécutif et du Président de la République.

Je dois dire que c’est très injuste. On a déjà connu cette injonction de voter conforme par rapport à telle ou telle assemblée ; maintenant, il faudrait que l’on vote conforme par rapport à une assemblée de 150 citoyens tirés au sort ! En somme, c’est la démocratie du hasard ou la démocratie de la courte paille.

J’y insiste, je trouve que le reproche qui nous a été fait hier est particulièrement injuste. On ne peut pas reprocher aux commissions du Sénat, et au Sénat dans son ensemble, de faire un travail de fond. À cet égard, je voudrais saluer à la fois le président, rapporteur de la commission des lois, François-Noël Buffet, et Guillaume Chevrollier, rapporteur pour avis de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.

Nos commissions ont procédé à cet examen après de nombreuses auditions, en tenant compte aussi de l’avis du Conseil d’État. Le verbe « préserver », que nous proposons, n’est pas une lubie du Sénat. Il a d’ailleurs été proposé, monsieur le garde des sceaux, par votre majorité, voilà un peu plus d’un an, et il a également été suggéré par le Conseil d’État.

Si nous le retenons, c’est pour deux raisons que je tiens à rappeler.

D’abord, le verbe « garantir », c’est l’introduction du virus de la décroissance dans notre Constitution

Protestations sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Ensuite, nous sommes le pouvoir constituant ; nous sommes les représentants du peuple et nous n’abandonnerons pas notre responsabilité pour un gouvernement des juges. Plusieurs orateurs l’ont martelé, c’est à nous que revient cette responsabilité. Or, le Conseil d’État l’a bien indiqué, cette révision ouvre un champ des possibles trop important.

Alors, monsieur le garde des sceaux, nous sommes tout à fait ouverts à un référendum. Je suis d’ailleurs curieux d’en connaître le résultat…

Exclamations sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Si le Président de la République le souhaite, il lui appartient d’entrer dans un dialogue.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

M. Bruno Retailleau. Sinon, cela apparaîtrait comme une manœuvre, et la démocratie en serait abîmée, tout comme l’écologie, je le crois.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

L’amendement n° 19 n’est pas soutenu.

L’amendement n° 13, présenté par M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

Après le mot :

préservation

insérer les mots :

et l’amélioration constante

La parole est à M. Guy Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Nous souhaitons intégrer dans les objectifs de préservation de l’environnement, de la diversité biologique et de lutte contre le dérèglement climatique la notion d’amélioration constante. Ce principe permettrait de consacrer une obligation positive pesant sur l’État quant aux exigences de protection de l’environnement qu’il s’est lui-même fixées.

L’objectif d’amélioration constante de l’environnement n’a aujourd’hui qu’une valeur législative, inscrite au 9° du II l’article L. 110-1 du code de l’environnement : « Le principe de non-régression, selon lequel la protection de l’environnement, assurée par les dispositions législatives et réglementaires relatives à l’environnement, ne peut faire l’objet que d’une amélioration constante, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment ».

Afin de renforcer sa portée juridique et d’élargir son champ d’application, ce principe doit être élevé au rang constitutionnel, dans le but de lui conférer une valeur égale à celle des principes constitutionnels de droit de propriété et de liberté des entreprises, généralement utilisés pour autoriser la mise sur le marché, par exemple, des néonicotinoïdes et de certains produits phytosanitaires extrêmement nocifs pour la santé et l’environnement.

La France pourrait ainsi être juridiquement mieux armée pour se conformer aux objectifs instaurés par l’accord de Paris et, plus généralement, à ses engagements internationaux en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de promotion de la résilience.

J’ajouterai que, si par extraordinaire, l’amendement identique présenté par les rapporteurs des deux commissions et par les groupes LR et UC n’était pas adopté, bien entendu, en cohérence avec la position que nous avons exprimée lors de la discussion générale, nous retirerions notre amendement, de sorte que le texte originel ne soit pas modifié et que l’on puisse aller jusqu’au référendum que M. Retailleau appelle de ses vœux.

Sourires et applaudissements sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

L’amendement n° 11, présenté par M. Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Kerrouche, J. Bigot, Dagbert et Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mme Préville, MM. Bourgi et Durain, Mmes Harribey et de La Gontrie, MM. Leconte, Sueur et Antiste, Mme Artigalas, M. Assouline, Mme Blatrix Contat, M. Bouad, Mme Briquet, M. Cardon, Mmes Carlotti, Conconne et Conway-Mouret, MM. Cozic et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mme Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, MM. Jeansannetas, P. Joly et Jomier, Mmes G. Jourda, Le Houerou et Lepage, M. Lozach, Mme Lubin, MM. Lurel, Magner, Marie et Mérillou, Mme Meunier, M. Michau, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Poumirol, MM. Raynal et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, Todeschini, M. Vallet et Vallini, Mme Van Heghe, M. Vaugrenard et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Remplacer les mots :

et de la diversité biologique

par les mots :

, de la diversité biologique et de l’ensemble des biens communs mondiaux

La parole est à M. Patrick Kanner.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

Finalement, le Président de la République n’a plus qu’une seule idée en tête : sa réélection ! Mettons une petite couche de vernis vert sur le bilan et les Français n’y verront que du feu : voilà à quoi ressemble ce projet de loi constitutionnelle. C’est confondre la Constitution avec un tract de campagne ! Mais les Français n’ont pas la mémoire courte ! Ce gouvernement, c’est celui qui garantit l’utilisation, même provisoire, je vous le concède, des néonicotinoïdes et du glyphosate, l’artificialisation et le forage des sols, la persistance du chlordécone, la multiplication d’accords bilatéraux de libre-échange sans clause environnementale. C’est celui qui a affaibli les propositions de la Convention citoyenne pour le climat, quand il ne les a pas tout simplement effacées.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

Mes chers collègues, voilà que ce même gouvernement s’estime, cette fois-ci sans filtre, lié à la lettre même d’une proposition de cette convention, une proposition que nous partageons, à savoir élever la protection de l’environnement au rang de garantie constitutionnelle.

Ce débat constitue aussi une occasion rare pour le Parlement d’enrichir notre arsenal constitutionnel en matière de protection de l’environnement.

Cela fait plus de 15 ans que le peuple français n’a pas été consulté. Cependant, la démocratie impose que ce référendum ne se réduise pas à un symbole dans une logique purement plébiscitaire. On aurait pu espérer l’inscription de la règle verte, du principe de la non-régression ou encore l’introduction d’un véritable crime d’écocide, mais le Gouvernement n’affiche aucune volonté de débat ouvert, de travail collectif. Il veut seulement faire endosser au Sénat – je crois que tout le monde l’a bien compris –, la responsabilité de l’échec d’une réforme constitutionnelle. Cette dernière année de mandat porte décidément la marque des manigances et des faux-semblants. La ficelle est un peu grosse !

Oui ! Non ! Oui, mais non ! Voilà à quoi ressemble la politique du Gouvernement, notamment pour la levée des brevets sur les vaccins.

Non ! Oui ! Peut-être ! On ne sait pas ! C’est la même chose pour cette réforme de la Constitution. Pas de référendum, référendum, puis nouveau renoncement… Monsieur le garde des sceaux, votre valse à trois temps se joue au détriment de nos compatriotes, et si vous aviez voulu plomber cette réforme constitutionnelle, vous n’auriez pas fait mieux.

En tout cas, l’absence d’un vote en termes identiques lors de cette première lecture ne fait pas obstacle à la tenue du référendum. C’est le b.a.-ba de la procédure de l’article 89. La discussion peut se poursuivre si vous le souhaitez.

Dans ce cadre, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain se bornera à une seule proposition, à savoir celle qui a été portée par ma collègue Nicole Bonnefoy avec sa proposition de loi constitutionnelle, qui n’a malheureusement pas été acceptée le 10 décembre dernier…

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

Je conclus : l’ensemble des biens communs mondiaux, au rang desquels figurent notamment le climat, l’eau, la santé, doivent être reconnus dans la Constitution. La France en sortirait grandie, monsieur le garde des sceaux, dans le prolongement du rôle qu’elle a joué dans les négociations sur la COP21 en décembre 2015 pour faire aboutir le premier accord universel sur le changement climatique.

Continuons à être exemplaires devant les autres États de cette planète.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Avec l’amendement n° 13, nos collègues du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires veulent inscrire dans la Constitution que la France garantit non seulement la préservation de l’environnement, en conservant la rédaction proposée par le Gouvernement, mais aussi son amélioration constante.

C’est un avis défavorable, d’abord car l’amendement conserve le verbe « garantir », avec lequel la commission n’est pas d’accord. Ensuite, la Charte de l’environnement, dans son article 2, est parfaitement claire sur la notion d’amélioration, puisqu’elle dispose : « Toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement. »

Nous savons tous que la Charte de l’environnement a valeur constitutionnelle, puisqu’elle fait partie du bloc constitutionnel.

Dans l’absolu, votre amendement me semble satisfait, indépendamment du fait que vous conserviez le verbe « garantir ».

Enfin, sur l’amendement n° 11, c’est également un avis défavorable. Je rappelle que la notion « d’ensemble des biens communs mondiaux » reste encore trop floue pour être inscrite dans la Constitution française. Nous disposons d’un excellent travail sur ce sujet de notre collègue Arnaud de Belenet, auquel je vous conseille de vous référer. Rapportant sur un texte, il avait ainsi conclu en décembre dernier au rejet de l’utilisation de cette notion, compte tenu de son caractère encore insuffisamment défini.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti

D’abord, un petit mot, ou quelques petits mots pour contextualiser ma réponse.

J’ai entendu les inquiétudes de l’un d’entre vous, qui se demandait où était la démocratie, un peu comme Diogène cherchait la justice. Mais la démocratie, elle est partout !

Certes, on peut ne pas penser du bien de la Convention citoyenne pour le climat. Certains, d’ailleurs, l’expriment avec beaucoup de liberté.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti

Et de talent, naturellement !

Pourquoi pas ? Pour autant, 150 citoyens qui se réunissent et disent un certain nombre de choses, il faut les entendre. Le Président de la République les a entendues et a repris ces mots. À qui les a-t-il proposés d’abord ? Naturellement à l’Assemblée nationale. Cette dernière a également fait un travail, d’essence purement démocratique.

Pardonnez-moi, mais l’Assemblée nationale compte dans ses rangs des juristes. M. Bas disait que personne n’avait le monopole de l’écologie. C’est vrai, mais personne non plus n’a le monopole de la perfection juridique ! D’ailleurs, Mme la sénatrice Boyer a souhaité d’autres mots que ceux que la commission a retenus. Cela fait partie du débat démocratique. Chacun vient ici avec ses mots, et vous-même, monsieur le sénateur Retailleau, aviez proposé, avec M. Bas, d’ailleurs, une modification de la Constitution qui tournait autour de la laïcité, et vous étiez attaché aux mots que vous proposiez. Il est donc bien normal que le Gouvernement soit attaché aux siens. Que voulez-vous que je vous dise de plus ?

J’en viens au fond. Je vais d’abord essayer de répondre aux amendements identiques n° 2, 3 et 5 rectifié, lesquels ont pour objet de remplacer l’article en débat par un autre projet, en réalité, avec l’emploi de la formule « préserve l’environnement ».

Je ne peux qu’être défavorable à ce projet s’il tend, comme je le crains, à vider de sa substance l’avancée proposée par la Convention citoyenne sur le climat.

Vous reprochez au Gouvernement de faire une réforme inutile, que vous qualifiez aussi de dangereuse, ce qui est un oxymore, d’une certaine façon.

Avec cette rédaction, vous risquez de priver de toute portée la révision constitutionnelle que nous entendons mener en la rendant purement symbolique. En effet, cela n’ajouterait rien à ce que prévoit déjà la Charte de l’environnement, hormis la notion de dérèglement climatique, que nous proposons nous-mêmes. Vous considérez que l’intérêt de votre rédaction est d’opérer un renvoi à la Charte de l’environnement, mais un tel renvoi existe déjà dans le préambule de notre Constitution.

Ces amendements, s’ils étaient adoptés, fragiliseraient le droit applicable en matière environnementale en affirmant que la France préserve l’environnement « dans les conditions prévues par la Charte de l’environnement ». Vous semblez exclure toute autre norme, et en particulier le code de l’environnement : or les règles applicables en matière de protection de l’environnement ne sont pas toutes prévues dans la Charte.

À l’inverse, le projet du Gouvernement apporte une véritable plus-value au droit actuel grâce à l’emploi du verbe « garantir », qui a précisément pour vocation de renforcer les engagements de la France en matière environnementale. Il s’agit là d’introduire une véritable obligation d’action positive à la charge des pouvoirs publics. Ainsi, l’emploi de ce verbe revient à imposer à l’État, selon les termes mêmes de l’avis du Conseil d’État, une quasi-obligation de résultat à assurer la préservation de l’environnement, ou, si vous préférez, une obligation de moyens renforcée.

L’intensité de l’engagement ainsi créé pourrait être la source d’un élargissement de la responsabilité pour faute de l’État, mais c’est à ce prix que le renforcement de l’action des pouvoirs publics se concrétisera. C’est une exigence impérieuse au regard de la dégradation actuelle de la situation, que vous soulignez vous-mêmes.

Pour ces raisons, le Gouvernement ne peut être, en l’état, que défavorable à ces amendements.

Puisque j’ai introduit mon propos en rassurant tout le monde sur le fait que la démocratie était bien présente dans le cadre de ces débats, je termine en précisant que la démocratie suivra son cours à travers la navette parlementaire, et, si nous ne sommes pas d’accord, nous nous plierons, monsieur le sénateur, aux aspirations du Parlement.

C’est vrai que c’est utile de lire le journal le dimanche. J’avais lu notamment que ce n’était pas la peine de venir ici. Je suis quand même venu, parce que je crois dans la démocratie, et je crois, comme je l’ai d’ailleurs déjà démontré, que l’on peut se rejoindre sur un certain nombre de textes, au-delà de ce qui peut nous séparer, grâce à un véritable travail constructif. Pour autant, je suis défavorable à ces trois amendements identiques.

Je suis également défavorable à l’amendement n° 13, présenté par M. Benarroche, qui veut intégrer le principe d’amélioration constante, aussi appelé principe de non- régression. Je me suis expliqué longuement déjà sur cette question.

Enfin, avec l’amendement n° 11, M. Kanner souhaite intégrer dans la Constitution la notion de « biens communs mondiaux ».

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti

C’est très beau, monsieur le sénateur Sueur, mais cela n’est pas suffisamment précis pour intégrer la Constitution.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Un petit mot, monsieur le président, pour indiquer à la Haute Assemblée que nous avons parfaitement connaissance du code de l’environnement, mais qu’il y a aussi un principe de hiérarchisation des normes. La Constitution a une valeur supérieure à la loi, qui a elle-même une valeur supérieure au règlement. Par définition, la Constitution couvre l’ensemble du dispositif.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Exactement ! Vous avez raison de le rappeler, monsieur Richard.

Enfin, nous nous sommes déjà expliqués sur les conséquences de l’emploi du verbe « garantir ». Les doutes que nous avons sur ses conséquences résultent des auditions que nous avons menées et, surtout, de l’avis du Conseil d’État rendu au mois de janvier dernier, qui est d’une grande clarté à cet égard.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à M. Éric Kerrouche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Kerrouche

Je pense que la Convention citoyenne pour le climat ne mérite ni excès d’honneur ni excès d’indignité. Pour autant, à mon sens, il ne faut pas traiter avec condescendance les travaux qui ont été réalisés par 150 citoyens. C’est une procédure de jury citoyen qui est utilisée dans beaucoup de démocraties et qui vient compléter la démocratie représentative. À ce titre, il faut la prendre au sérieux.

Sur la procédure, on est tous d’accord pour dire que l’on tombe aujourd’hui dans la manœuvre, et c’est regrettable, parce que cela dépend uniquement du Gouvernement. Ce que laisse entendre le Gouvernement, ou ce qu’il laisse suggérer, ou ce que l’on pourrait comprendre, c’est que, alors que la navette pourrait se poursuivre, elle serait arrêtée ou elle pourrait être arrêtée par le Président de la République, qui ferait endosser la responsabilité de cet échec au Sénat. C’est cette posture qui n’est pas tolérable !

Sur la question du gouvernement des juges, j’entends les craintes, mais je suis assez kelsénien et je sais une chose : c’est que nous avons tous été contents que, d’une certaine façon, le juge constitutionnel prenne toute sa place en France. En donnant une valeur constitutionnelle au préambule de la Constitution et à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, en conférant une valeur constitutionnelle aux principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, en dégageant des principes particulièrement nécessaires à notre temps, le juge constitutionnel est aussi une garantie des libertés. Mes chers collègues, ne jetons pas l’opprobre sur son rôle !

Enfin, on ne peut que critiquer ces trois amendements identiques sur le fond, parce qu’ils apparaissent en retrait d’une rédaction qui n’était peut-être pas parfaite, mais qui avait le mérite d’exister. Avec ces amendements, on a une vraie minoration de la portée du texte, et la légèreté du Gouvernement ne doit pas nous conduire à une logique de moins-disant, ce qui serait le cas si nous suivions l’avis du rapporteur, président de la commission des lois.

Il ne faut pas accorder une place aussi importante au verbe « garantir », alors que l’on sait très bien que celui-ci n’a pas forcément les effets que le rapporteur prétend qu’il a. Pour preuve, si la loi garantissait véritablement « à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l’homme », on n’en serait pas là. Vous savez très bien que le verbe « favoriser » a un impact plus grand que le verbe « garantir ». On est là uniquement dans une querelle sémantique qui permet de faire en sorte, justement, de se dégager du fond, et c’est ce qui est extrêmement regrettable.

Quant à cette référence à la Charte de l’environnement, je ne pense pas qu’elle apporte grand-chose.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Kerrouche

Pour toutes ces raisons, nous ne pourrons pas voter les amendements identiques n° 2, 3 et 5 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à Mme Esther Benbassa, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Comme nous l’avons vu, le Sénat a vidé ce texte de sa substance. Il n’est pourtant pas nécessaire de rappeler la réalité du réchauffement climatique et de la dégradation de l’environnement.

La situation est plus que préoccupante, menaçante, et les responsables politiques que nous sommes ont une seule mission : trouver des solutions et les mettre en œuvre.

Cette inscription constitutionnelle aurait permis d’afficher clairement l’engagement écologique du Gouvernement et du législateur. En cette période électorale, la majorité sénatoriale n’avait nulle envie de faire un cadeau au Gouvernement ; pourtant, ni les profits, ni les dividendes, ni la prospérité économique ne seront en mesure d’arrêter la destruction de la planète !

Les jeunes, eux, ont compris l’urgence. C’est pour cette raison qu’ils sont des dizaines de milliers à descendre dans la rue pour réclamer des garanties et une lutte véritable contre le dérèglement climatique.

Dans la version retenue par le Sénat, la République préservera l’environnement et la diversité biologique en agissant contre le dérèglement climatique : avec une telle rédaction, on ne lutte pas, on ne garantit rien. Ainsi aura-t-on également trahi la demande de la Convention citoyenne pour le climat, qui, selon la majorité sénatoriale, était une manière de faire primer l’écologie aux dépens de l’économie.

Ce projet de loi constitutionnelle est donc dans l’impasse. Le texte adopté par le Sénat sera différent de celui de l’Assemblée nationale. C’est quasiment acté : il n’y aura pas de référendum. Le Président Macron a sûrement d’autres préoccupations en cette période riche en scrutins…

La faute à qui ? À tous ceux qui ne voulaient pas que ce projet aboutisse. Une fois de plus, l’écologie a été sacrifiée. À certains, elle ne sert, de temps à autre, qu’à verdir un peu les bulletins de vote !

Applaudissements sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Ronan Dantec

Je dois l’avouer, je suis un peu déçu par ce débat. Certes – on l’a répété maintes fois –, on ne touche à la Constitution que d’une main tremblante, mais on devrait en parler avec souffle !

Il s’agit tout de même d’inscrire les enjeux environnementaux dans la Constitution. Et, alors que nous devrions nous concentrer sur notre responsabilité collective, nous sommes accaparés par les calculs politiciens : comment doit-on se positionner par rapport au Président de la République ? Faut-il parier sur sa victoire ou sur sa défaite ?

Surtout, en reprenant peu ou prou l’argument avancé au sujet du projet de loi Climat, de nombreux orateurs estiment, en définitive, que l’économie française n’est pas capable de garantir la préservation de l’environnement. Quand on agite le spectre de ce mot galvaudé qu’est la décroissance, c’est globalement ce que l’on dit. La société française ne s’en trouve pas grandie.

Bien sûr, il faut lire le journal tous les matins : nous le faisons presque tous ! Mais c’est également intéressant de relire la Constitution et ses préambules, notamment celui de 1946. C’était la grande période de l’après-guerre, marquée par la victoire des « peuples libres ». Que lit-on dans ce préambule ? « […] Le peuple français proclame à nouveau que tout être humain, sans distinction de race, de religion ni de croyance, possède des droits inaliénables et sacrés. »

Mes chers collègues, il ne s’agit pas simplement des Français, mais de « tout être humain ». Aujourd’hui, nous sommes face à une terrible crise écologique, qui tue des centaines de milliers de personnes chaque année à travers le monde. On sait que la dégradation de l’environnement est devenue l’une des grandes atteintes aux droits de l’homme.

Notre pays doit renouer avec son histoire universaliste : voilà ce que l’on nous propose avec le présent texte. Nous ne voulons pas d’une France souffreteuse, se jugeant incapable de conjuguer ces enjeux et sa propre économie. À l’inverse, nous devons nous tourner vers le monde en disant : « Nous, nous luttons. Nous, nous garantissons. »

Au nom de l’histoire française, il faut inscrire ces mots dans la Constitution. Mais, hélas ! aujourd’hui, on casse ce qui fait l’essence de 1789 et du préambule de 1946 !

Applaudissements sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à M. Thomas Dossus, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Thomas Dossus

Nous l’avons dit : nous souhaitions que cette réforme de la Constitution soit proposée rapidement aux Françaises et aux Français, dans les termes adoptés par la Convention citoyenne, sans filtre. Nous ne voterons donc pas cette version édulcorée par la droite, qui, de son aveu même, ne souhaite pas de nouveaux effets juridiques et qui renonce à toute ambition climatique pour notre Constitution.

Chers collègues de la majorité sénatoriale, vous évoquez souvent le risque d’incertitude et d’instabilité juridiques qu’induit la rédaction initiale. Mais ces dangers ne sont rien face à ceux que le chaos climatique fait peser sur nos vies et sur nos institutions. Ces éléments ont été chiffrés par différents rapports scientifiques ou économiques et les assureurs eux-mêmes le disent : le coût de l’inaction climatique sera bien plus élevé que celui de l’action.

Oui, notre République doit désormais réviser sa Constitution pour prendre en considération les limites planétaires, afin de garantir la préservation de l’environnement et de la biodiversité.

Le temps est venu d’avoir un cadre juridique constitutionnel pour réguler l’ensemble de notre action publique. Nous avons l’obligation de réussir : c’est ce qu’implique le terme « garantit ».

Soyez cohérents. Depuis des mois, vous accusez les élus écologistes – notamment les maires –, pourtant portés au pouvoir démocratiquement, d’être les tenants d’une idéologie totalitaire. Vous les caricaturez en despotes de la piste cyclable ; nous avons même entendu parler de « nouvelle dictature ».

Vous aviez l’occasion d’en appeler au peuple pour engager, enfin, un grand débat démocratique au sujet de l’avenir climatique de notre République. Vous aviez l’occasion de faire trancher par les Françaises et les Français ce vrai choix de société : pour ou contre un avenir durable garanti par notre Constitution. Vous avez préféré le renoncement. Vous reculez face au défi démocratique. Comme les collègues de mon groupe, je voterai contre cette nouvelle formulation, qui passe totalement à côté de l’enjeu !

Applaudissements sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Gontard

J’abonde dans le sens de mes collègues : bien sûr, nous ne voterons pas les amendements identiques n° 2, 3 et 5 rectifié.

Chers collègues de la majorité sénatoriale, le terme « garantit » signifie a minima, pour la République, pour les gouvernements dont elle se dote et pour les collectivités territoriales, une obligation de moyens. Quels que soient les alternances et les aléas, tant que la forme républicaine du Gouvernement demeurera, ils devront d’agir positivement pour préserver l’environnement et la biodiversité et pour lutter contre le changement climatique.

Ce n’est pas rien. Effectivement, c’est contraignant. Mais c’est une avancée majeure, à laquelle on ne peut décemment pas s’opposer, surtout quand on clame haut et fort que l’écologie n’appartient pas à un parti et que tout le monde souhaite protéger l’environnement.

Dès lors, cessez de proclamer et agissez, en votant ce texte en l’état. Sinon, cela signifie que vous ne souhaitez pas voir la République agir positivement, en toute circonstance, pour l’environnement. Cela signifie que vous avez d’autres priorités et que vous préférez défendre une somme d’intérêts privés plutôt que l’intérêt général, scientifiquement admis par les chercheurs du monde entier. Dans ce cas, il faut tout simplement l’assumer.

Cette obligation d’action est une première étape, mais elle ne saurait suffire. Agir pour préserver un environnement déjà partiellement dégradé, c’est stopper l’hémorragie. Toutefois – j’y insiste –, il faut aller beaucoup plus loin et agir pour améliorer constamment l’environnement.

C’est une traduction constitutionnelle du principe de non-régression du droit environnemental. Le caractère strictement législatif de ce principe est insuffisant, comme l’a montré la décision récente du Conseil constitutionnel au sujet du texte de loi réintroduisant les néonicotinoïdes, dont nous avons débattu dans cet hémicycle.

Les écologistes sont sobres ; ainsi, nous nous contenterons de la rédaction actuelle et nous invitons le Sénat à faire de même en rejetant l’amendement de M. le rapporteur – et donc les deux autres, qui lui sont identiques. C’est un véritable sujet, dont nous devons débattre et dont nos concitoyens doivent se saisir : comme Bruno Retailleau, je souhaite qu’il soit soumis à un référendum !

Applaudissements sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Chers collègues de la majorité sénatoriale, le moment où l’on refuse d’avancer est toujours un moment grave et signifiant : on se souviendra qu’aujourd’hui le Sénat a refusé d’avancer.

L’amendement que vous nous proposez est l’illustration d’une contradiction assez dérangeante. Vous annoncez vouloir modifier l’écriture de cet article afin de lever telle ou telle incertitude juridique ; mais il reviendra toujours au juge d’arbitrer entre différents principes constitutionnels. Ces arbitrages ne garantissent pas une quelconque primauté d’un principe sur un autre : ils doivent simplement traduire un équilibre.

Parallèlement, selon votre analyse, le terme « garantit » « faciliterait l’engagement de la responsabilité des personnes publiques », voire « attribuerait une forme de priorité à la préservation de l’environnement ».

En définitive, qu’en est-il ? Le texte est-il trop incertain ou trop prescripteur ? On dit souvent : « Deux médecins, trois avis. » Contrairement à ce que vous avancez, le consensus des constitutionnalistes n’est pas au rendez-vous sur ce sujet.

Certains d’entre vous vont jusqu’à déclarer inutile cette réforme, telle que rédigée par l’Assemblée nationale. Mais votre souhait de modification montre bien qu’au contraire vous l’analysez comme une mesure forte, ayant un impact réel, que vous cherchez à atténuer.

Le terme « garantit » vous fait peur, autant que l’idée de soumettre au référendum une modification issue de la démocratie participative. Nous, au sein du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, prenons clairement parti pour cette rédaction.

Vous revenez assez vite sur cette inquiétude, en admettant choisir une formulation plus sobre ; mais s’il est une formulation plus sobre, c’est bien que la rédaction originale est plus percutante.

Tantôt, vous supposez que l’impact réel de ce texte est minime ; tantôt, vous le jugez trop grand. Je ne sais plus sur quel aspect de votre raisonnement contradictoire vous vous fondez. Quoi qu’il en soit, vous proposez de modifier ce projet de loi : a priori, vous empêchez donc son adoption dans les termes retenus par l’Assemblée nationale. La tenue du référendum s’en trouverait plus que compromise.

De la sobriété, nous passons ainsi à l’abstinence. Mais, aux dernières nouvelles de la planète Macron, on ne sait plus si, dans ce grand marché de dupes, tout ce qui compte n’est pas d’aller au référendum quoi qu’il en coûte…

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

M. Guy Benarroche. … pour le climat et la planète, quel que soit le texte, afin de communiquer politiquement. Nous voterons contre ces amendements !

Applaudissements sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

Mes chers collègues, il n’est pas illégitime d’éprouver des inquiétudes au sujet de la rédaction que nous propose le Gouvernement.

M. le garde des sceaux dit que l’on va continuer à concilier de la même manière les objectifs de nature constitutionnelle, sans les hiérarchiser, tout en allant plus loin : on a du mal à comprendre, mais au moins, on bouge ! Avec l’amendement de la commission – et les deux autres –, on ne fait plus rien : sur ce point au moins il n’y a pas de doute.

Monsieur le rapporteur, si, sur ces travées, l’un d’entre nous présentait un tel amendement, vous lui diriez ce que vous avez répondu au sujet du principe de non-régression : c’est satisfait par le droit en vigueur, tout simplement. Il n’y a pas photo ! D’ailleurs, Philippe Bas l’a dit en commission : une fois retiré le « venin » du texte gouvernemental, il ne reste pas grand-chose.

Bref, on ne bouge pas. Or, si tout le monde s’accorde à dire que la constitutionnalisation de la Charte de l’environnement en 2005 a été un progrès, il faut bien admettre qu’elle ne suffit pas.

« L’affaire du siècle » l’a montré : les politiques publiques menées à l’heure actuelle n’imposent pas aux pouvoirs publics de respecter les obligations conventionnelles et internationales de la France. Il est donc nécessaire de changer et, pour notre part, nous proposons une véritable innovation.

Ce qui nous préoccupe tous ici, c’est la préservation d’un certain nombre de biens communs aujourd’hui menacés, car – on le constate – ils ne sont pas infinis.

Tel est précisément l’objet de l’amendement du groupe socialiste : la santé, le climat, l’eau, tout ce qui est nécessaire à la vie, partout sur la planète.

Cet enjeu concerne tous les pays, il dépasse toutes les frontières. Nous ne trouverons pas une solution tout seuls. Si nous voulons être fidèles à notre histoire universaliste, nous devons innover et inscrire dans notre Constitution cette mention absolument indispensable. Notre collègue Nicole Bonnefoy l’a dit : nous faisons nôtre cette inquiétude et, face au destin commun de l’humanité, nous serions bien inspirés de procéder ainsi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Yves Leconte

M. Jean-Yves Leconte. Il faut trouver des solutions pour l’ensemble de l’humanité en se fondant sur cette notion de bien commun !

Applaudissements sur des travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Monsieur le rapporteur, à ce stade, j’ai simplement une question à vous poser : pourquoi présentez-vous l’amendement n° 2 ? Je ne le comprends pas et je vous remercie de bien vouloir me l’expliquer avant le vote.

J’entends vos remarques au sujet du verbe « garantir ». Mais ce que vous nous proposez, c’est d’écrire, dans la Constitution, que la France préserve l’environnement dans les conditions prévues par la Charte de l’environnement. Or la Charte de l’environnement a valeur constitutionnelle, car elle fait partie du bloc de constitutionnalité. Vous nous suggérez donc d’écrire dans la Constitution qu’il faut respecter la Constitution ; plus précisément, vous nous proposez d’écrire dans un article de la Constitution que la Constitution s’applique.

Cela s’appelle une aporie. En d’autres termes, cela n’apporte rien. La Charte de l’environnement existe : pourquoi préciser qu’elle doit être respectée ? Pouvez-vous m’éclairer ?

Depuis le début du débat, je n’ai pas entendu un seul argument justifiant une telle rédaction. En revanche, j’ai entendu les propos que Nicole Bonnefoy et Patrick Kanner ont consacrés aux biens communs de l’humanité. §Il s’agit d’une belle idée.

Regardez l’histoire : tous ceux qui, depuis près de deux siècles, se battent pour l’action sociale, pour des politiques progressistes, répondent à cette aspiration. Finalement, le but de la politique, c’est le bien commun de telle ou telle catégorie de nos concitoyens, de tous les Français, des Européens et de l’humanité tout entière.

Plutôt qu’une telle aporie, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

… mieux vaudrait inscrire dans la Constitution cette idée si belle et si forte : celle de bien commun !

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Mes chers collègues, ce débat me donne l’occasion de clarifier notre position.

Je l’ai dit : nous avons fait le choix, non de modifier l’article 1er de la Constitution, mais de renforcer la Charte de l’environnement. Vous pourriez me demander pourquoi.

Certes, à l’arrivée, la portée juridique des dispositions proposées est la même. Mais, pour notre part, nous considérons qu’il faut conserver le rôle et la dimension actuels de la Constitution dans la mesure du possible, même si, je vous l’avoue – vous ne le répéterez pas !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Or j’ai le sentiment que certains oublient la portée de l’article 1er de la Constitution, lequel définit les valeurs de la France. Il a certes une force symbolique ; mais, ce qu’il doit contenir, ce ne sont pas des principes d’action. Ce sont des valeurs, comme l’unité et l’indivisibilité de la Nation.

À nos yeux, la Constitution n’a pas vocation à énoncer des politiques sectorielles, en vue d’un effet de cliquet, mais à définir le rôle et les relations des pouvoirs publics. C’est pourquoi – j’y insiste –, nous avons fait le choix, non pas de réviser l’article 1er de la Constitution pour y introduire des considérations environnementales, mais de compléter la Charte de l’environnement, tout simplement pour lui donner toute sa portée !

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à M. Alain Richard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Mes chers collègues, à titre purement personnel, je tiens à prendre mes distances avec cette réforme constitutionnelle : c’est même de l’incompréhension qu’elle m’inspire, car elle présente un caractère proclamatoire et, à mon avis, peu productif.

Mme Assassi l’a expliqué à l’instant avec beaucoup de clarté et de justesse : il faut distinguer, d’une part, la Constitution et, de l’autre, l’action publique.

En l’occurrence, il s’agit de défendre la biodiversité et de prévenir le changement climatique. Cette action est multiforme. Elle fait l’objet de recherches permanentes. Elle est également négociée. Elle exige un approfondissement scientifique constant, qui est loin d’être terminé : en la matière, il n’y a pas de vérité révélée.

On pourrait en citer de multiples exemples : pour ma part, je n’en citerai qu’un. Quand on a la curiosité de se plonger dans le code de l’environnement, on constate qu’il est constitué uniquement de procédures. Il ne contient pas une règle de fond. La plupart des projets sont assujettis à des procédures préalables très strictes destinées à préserver l’environnement. Mais, comme par hasard, on a été obligé de prévoir quantité de clauses dérogatoires. Leur but est de limiter la protection de l’environnement et de la biodiversité pour aménager des équipements en faveur de l’environnement lui-même, comme des installations de production d’énergie ou d’épuration de l’eau.

Pour lutter contre le changement climatique, il faut mener des politiques industrielles, agricoles ou encore d’aménagement. Vouloir résumer et contraindre l’ensemble de ces initiatives par un seul terme, en l’occurrence celui de « garantit », est contre-productif.

Enfin, notre connaissance de la biodiversité est encore extrêmement imparfaite. Si vous approfondissez votre analyse de cette question en lisant la littérature scientifique, vous constaterez que les zones d’incertitude demeurent considérables.

Je le répète : il serait contre-productif de contraindre l’ensemble de ces politiques dynamiques et évolutives par les seuls termes « garantit […] la diversité biologique ». Ce serait, de surcroît, commettre une erreur profonde quant au rôle d’une Constitution !

Applaudissements sur les travées du groupe INDEP ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à M. Joël Labbé, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

Mes chers collègues, j’ai déjà expliqué pourquoi je ne prendrai pas part au vote final. Évidemment, je voterai contre ces amendements identiques.

Chacun appréhende la situation à la lumière de ses propres convictions. Je fais partie de ceux pour qui le climat et la biodiversité sont en péril. M. Richard nous assure qu’il faut relativiser tout cela ; mais c’est scientifiquement prouvé qu’il y a urgence !

Vous faites référence à la Charte de l’environnement. Bien sûr, ce texte a été un progrès en son temps, mais, depuis 2004, la situation n’en a pas moins continué de se dégrader.

Nous avons parlé de démocratie : quelles que soient nos opinions, n’oublions pas que 50 % de la population ne s’intéresse plus à la politique. Est-ce qu’une démocratie peut fonctionner comme cela ?

Nos jeunes générations ont besoin de projets collectifs : en l’occurrence, il s’agit ni plus ni moins que de sauver l’humanité !

Nos jeunes générations attendent des signes et des symboles. Je connais plusieurs jeunes couples, de l’âge de nos enfants, qui déclarent ne pas vouloir d’enfants à leur tour, car ils ne veulent pas les voir naître dans un monde pareil.

Exclamations sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

Une société qui en arrive là doit se remettre en question : c’est véritablement vers une nouvelle société que nous devons avancer ensemble !

Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – M. Joël Bigot et Mme Nicole Bonnefoy applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Je mets aux voix les amendements identiques n° 2, 3 et 5 rectifié.

J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.

Je rappelle que l’avis du Gouvernement est défavorable.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 117 :

Le Sénat a adopté.

En conséquence, les amendements n° 13 et 11 n’ont plus d’objet.

L’amendement n° 1 rectifié, présenté par MM. Roux, Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Corbisez et Guiol, Mme Pantel et M. Requier, est ainsi libellé :

Compléter cet article par les mots :

, et ses conséquences

La parole est à M. Jean-Pierre Corbisez.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Corbisez

Le rapport de la délégation sénatoriale à la prospective intitulé Adapter la France aux dérèglements climatiques à l ’ horizon 2050 : urgence déclarée a été présenté en mai 2019 par nos collègues Ronan Dantec et Jean-Yves Roux. Sa conclusion est sans appel : la France doit « se préparer à absorber un choc climatique inévitable ».

Ce dérèglement sera lourd de conséquences : aggravation des risques naturels, surmortalité liée aux vagues de chaleur ou à la pollution, propagation des maladies, stress hydrique, dangers pour l’agriculture et l’alimentation, etc.

Adopté à l’unanimité, ce rapport formule des propositions visant à amplifier l’effort d’adaptation de la France face aux défis sanitaires, économiques et écologiques que pose le changement climatique, par l’accompagnement des territoires, l’adaptation du bâti et de l’urbanisme, la réduction des tensions portant sur les ressources hydriques ou encore l’adaptation de notre modèle agricole.

Aussi, cet amendement vise à préciser dans la Constitution que, pour lutter contre le dérèglement climatique, il faut également combattre ses conséquences, qui menacent la vie quotidienne de nos concitoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Cette précision ne nous paraît pas indispensable : en luttant contre la cause, on lutte de facto contre ses effets. De surcroît – nous l’avons indiqué en commission –, nous ne souhaitons pas introduire dans la Constitution des notions trop indéterminées.

Nous émettons, en conséquence, un avis défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

L’amendement n° 18, présenté par M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

Compléter cet article par les mots :

, dans le respect des limites planétaires

La parole est à M. Guy Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Plus qu’une notion générale de non-régression, d’amélioration de l’environnement, il est nécessaire d’ajouter une dimension quantifiable aux objectifs environnementaux de notre pays. Ce concept a été proposé par une équipe internationale de vingt-six chercheurs, dans le cadre de travaux publiés en 2009, et est d’ores et déjà utilisé par de grands groupes industriels privés, qui cherchent à confronter leur impact sur l’environnement à la capacité de notre planète à l’absorber.

L’objectif de l’inscription de ce concept dans la Constitution est clair : notre société ne doit pas évoluer au détriment des capacités de notre planète, de ses ressources naturelles et de leur capacité éventuelle de renouvellement. Toute mesure environnementale quantifiée ne peut s’inscrire que dans un cadre fini, celui des limites planétaires.

Une limite d’émission ne trouvera donc son sens et ne sera acceptée par la population que si elle est mise en rapport avec un plafond évitant le dépassement des ressources de la planète.

Ainsi, cette inscription dans la Constitution solidifierait toute démarche d’inscription dans le droit de limites chiffrées d’émission de CO2, de destruction forestière, de limites de pêche, etc.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

M. François-Noël Buffet, rapporteur. Cet amendement nous paraît quelque peu superflu : nous voyons mal comment on pourrait préserver l’environnement sans respecter, par principe, les limites planétaires, quelle que soit la définition que l’on donne à cette notion.

Sourires ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

L’amendement n° 15, présenté par M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

Compléter cet article par une phrase ainsi rédigée :

Elle garantit aux générations présentes et à venir le droit de vivre dans un environnement sain et sûr.

La parole est à M. Guy Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Les liens entre santé, sécurité et environnement ne sont plus à démontrer. Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires demande donc la consécration au rang constitutionnel du droit des générations actuelles et futures à vivre dans un environnement sain et sûr.

Les nombreuses atteintes à la biodiversité et à l’environnement pourraient à terme provoquer la destruction de l’humanité. Ainsi, la France doit mettre en œuvre toutes les politiques environnementales nécessaires pour limiter l’impact des activités humaines à un niveau permettant à l’humanité de disposer des fonctions essentielles de la biosphère.

Il s’agit pour nous d’une position intergénérationnelle : nous n’héritons pas de la terre de nos ancêtres, nous l’empruntons à nos enfants.

Le Comité des droits de l’homme des Nations unies a fait part, le 30 octobre 2018, de ses craintes : « La dégradation de l’environnement, le changement climatique et le développement non durable comptent parmi les menaces les plus imminentes et les plus graves qui pèsent sur le droit à la vie des générations actuelles et futures. »

Nous souhaitons ainsi rappeler l’impact de nos décisions actuelles et leurs conséquences sur les capacités des générations futures à vivre dans de bonnes conditions environnementales.

Ce droit à un environnement sain, dans lequel on peut inclure le droit à l’eau, à un air non pollué, aux bénéfices de la biodiversité, a été reconnu en France et est inscrit dans la Charte de l’environnement de 2004. Il convient cependant d’en renforcer la portée juridique en l’érigeant en principe constitutionnel inscrit à l’article 1er de la Constitution.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Le souhait de notre collègue me semble satisfait : il suffit de lire le dernier alinéa du préambule de la Charte de l’environnement de 2004, qui dispose que, « afin d’assurer un développement durable, les choix destinés à répondre aux besoins du présent ne doivent pas compromettre la capacité des générations futures et des autres peuples à satisfaire leurs propres besoins ».

Les choses sont claires, l’avis est donc défavorable.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti

Même avis, pour exactement les mêmes raisons.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

L’amendement n° 16, présenté par M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

Compléter cet article par une phrase ainsi rédigée :

Elle assure un haut niveau de protection de l’environnement selon le principe de non-régression.

La parole est à M. Guy Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

M. Guy Benarroche. Après « superflu » et « satisfait », j’attends le troisième « s » !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Il s’agit ici du principe de non-régression. La gestion d’un avenir durable doit permettre de garantir que les acquis environnementaux ne sont pas remis en question. Le principe de non-régression protège les droits des générations futures en renforçant les exigences écologiques dans la prise de décision.

L’effectivité d’un droit humain à l’environnement ne devient réalité qu’à la condition de l’établissement d’une garantie juridique assurant que chaque avancée pour la préservation de l’environnement ne peut être remise en cause. Ce principe n’implique pas une impossibilité d’action de la part des autorités, mais crée une obligation positive, notamment pour le législateur, de ne pas dégrader les avancées écologiques.

En dépit de l’urgence climatique, certaines décisions législatives ou réglementaires sont en effet moins-disantes au niveau environnemental ; ce retour sur la protection de l’environnement et de la biodiversité nous semble insupportable.

Au vu des dernières décisions qui ont permis, par exemple, au juge de valider un retour en arrière sur la limitation des néonicotinoïdes, il est essentiel d’inscrire dans la Constitution que, à défaut de faire plus, on ne peut plus se permettre de faire moins.

Mme Esther Benbassa applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Il s’agit du même argumentaire que celui qui a été avancé à l’appui de l’amendement n° 9 de Mme Assassi et nous confirmons l’avis défavorable que nous avions alors exprimé. Je le rappelle, l’article 2 de la Charte est parfaitement clair sur ce point.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti

Je n’ai pas non plus changé d’avis depuis l’amendement n° 9 : défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

L’amendement n° 6 rectifié bis, présenté par MM. Guiol, Artano, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, MM. Fialaire et Guérini, Mme Pantel, MM. Requier, Roux, Lozach et Mizzon, Mme Varaillas et M. Iacovelli, est ainsi libellé :

Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

…. – Le premier alinéa du même article 1er est complété par une phrase ainsi rédigée : « Elle reconnaît la diversité de ses territoires et assure leur cohésion par un développement social, économique et environnemental équilibré. »

La parole est à M. André Guiol.

Debut de section - PermalienPhoto de André Guiol

La proposition du Président de la République d’inscrire à l’article 1er de la Constitution l’engagement du pays en faveur de l’environnement et dans la lutte contre le dérèglement climatique nécessite, pour avoir quelque chance de succès, d’associer à cette démarche vertueuse l’ensemble de nos concitoyens et de nos institutions.

Les Françaises et les Français se sont largement exprimés sur ce sujet, notamment lors du grand débat ou par l’intermédiaire de la Convention citoyenne pour le climat, souhaitant recourir à un référendum. Du fait de l’organisation décentralisée de la France, il convient d’associer également à cette démarche tous les territoires dans leur force et leur diversité, au regard du défi que l’humanité devra relever.

La France doit, pour cela, veiller à la santé et au bon équilibre de ses territoires afin que tous apportent leur contribution, qu’ils soient urbains, périurbains ou ruraux, recelant des zones destinées à recevoir tout type d’habitat correspondant aux attentes de nos concitoyens, des espaces de production agricoles indispensables à notre survie ou, tout simplement, des espaces naturels contribuant aux objectifs de maintien de la diversité biologique, porteurs de services écosystémiques rendus par la nature.

Il existe donc un lien intime et subtil qui relie environnement et territoires, un lien pressenti par l’Association des maires ruraux de France (AMRF) et par l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), laquelle a indiqué sa volonté de faire de la transition écologique un moteur de la cohésion des territoires.

Il s’agit donc, par cet amendement, de faire en sorte que la cohésion des territoires soit le moteur de la transition écologique, en prenant en compte dans la Constitution l’indispensable dimension spatiale et territoriale de notre pays.

Dans cette approche environnementale nous devons mettre toutes les chances de notre côté et corriger le modèle de société qui est le nôtre en nous souvenant de ce que disait Hubert Reeves : « Actuellement, l’homme mène une guerre contre la nature. S’il gagne, il est perdu. »

M. Jean-Pierre Corbisez applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Cet amendement est complexe dans sa rédaction ; il vise d’abord à inscrire à l’article 1er de notre Constitution que la France reconnaît la diversité de ses territoires. Quels effets juridiques peut-on attendre de cet acte de reconnaissance pris en lui-même ?

La seule référence récente dans les travaux du Sénat serait la proposition de loi constitutionnelle présentée par le président Larcher et notre collègue Philippe Bas, adoptée le 3 février 2015. Ce texte faisait clairement référence à cette notion, mais pour permettre une meilleure représentation de ces territoires au sein de notre assemblée, ce qui n’est pas tout à fait la même chose.

Ensuite, cet amendement tend à prévoir que la France assure la cohésion de ses territoires « par un développement social, économique et environnemental équilibré ». Or il s’agit, ni plus ni moins, des dispositions de l’article 6 de la Charte de l’environnement, laquelle, nous l’avons dit, fait partie de notre bloc constitutionnel, c’est aujourd’hui complètement admis. C’est précisément parce qu’il faut concilier ces trois éléments que nous avons préféré inscrire « préserver » plutôt que « garantir ».

Quant à l’objectif de cohésion des territoires, il ne nous paraît pas suffisamment bien défini pour se voir conférer un rang constitutionnel. La solidarité entre les citoyens français, quel que soit leur lieu d’habitation, est d’ores et déjà protégée par de nombreux principes constitutionnels.

Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti

L’avis est similaire à celui que vient de développer M. le rapporteur, pour les mêmes raisons.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Monsieur Guiol, l’amendement n° 6 rectifié bis est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de André Guiol

Oui, monsieur le président : il est soutenu par de nombreux maires de petites communes et je ne souhaite donc pas le retirer.

Il est nécessaire de reconnaître la diversité des territoires afin de tendre vers l’équité, qui est loin d’être effective aujourd’hui.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

L ’ article unique est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

L’amendement n° 12, présenté par M. Kanner, Mme Bonnefoy, MM. Kerrouche, J. Bigot, Dagbert et Devinaz, Mme M. Filleul, MM. Gillé, Houllegatte et Jacquin, Mme Préville, MM. Bourgi et Durain, Mmes Harribey et de La Gontrie, MM. Leconte, Sueur et Antiste, Mme Artigalas, M. Assouline, Mme Blatrix Contat, M. Bouad, Mme Briquet, M. Cardon, Mmes Carlotti, Conconne et Conway-Mouret, MM. Cozic et Éblé, Mme Espagnac, M. Féraud, Mme Féret, M. Fichet, Mme Jasmin, MM. Jeansannetas, P. Joly et Jomier, Mmes G. Jourda, Le Houerou et Lepage, M. Lozach, Mme Lubin, MM. Lurel, Magner, Marie et Mérillou, Mme Meunier, M. Michau, Mme Monier, MM. Montaugé et Pla, Mme Poumirol, MM. Raynal et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, M. Roger, Mme Rossignol, MM. Stanzione, Temal, Tissot, Todeschini, M. Vallet et Vallini, Mme Van Heghe, M. Vaugrenard et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article unique

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 34 de la Constitution est ainsi modifié :

1° Le quinzième alinéa est complété par les mots : «, de la protection du sol et de la garantie de la sécurité et de l’autonomie alimentaires » ;

2° Après le dix-septième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« La loi détermine les mesures garantissant le respect des biens communs par l’encadrement du droit de propriété et de la liberté d’entreprendre. »

La parole est à Mme Nicole Bonnefoy.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bonnefoy

Cet amendement prenait sens dès lors que la notion de bien commun était inscrite dans la Constitution ; ce n’est pas le cas, je le retire donc.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

L’amendement n° 12 est retiré.

L’amendement n° 14, présenté par M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

Après l’article unique

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le troisième alinéa de l’article 39 de la Constitution, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les projets et propositions de loi déposés devant l’Assemblée nationale ou le Sénat sont accompagnés d’une évaluation de leur impact climatique, dont les modalités sont définies par une loi organique. »

La parole est à M. Guy Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Je suis persuadé que cet amendement va faire l’unanimité sur ces travées !

Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires appelle à une transformation majeure du processus législatif en adoptant, pour l’ensemble des textes de loi susceptibles d’emporter des conséquences sur l’environnement, l’obligation de la publication d’une étude d’impact climatique avant leur examen parlementaire.

La France ne dispose pas de moyens permettant de piloter et de mesurer l’impact des lois au regard de l’objectif carbone fixé pour 2050. Il est donc indispensable d’intégrer une évaluation des impacts climatiques dans le processus de conception des politiques publiques.

Le Haut Conseil pour le climat, dans un rapport publié le 18 décembre 2019, recommandait de mettre en place une telle évaluation climatique des projets et propositions de loi. Élisabeth Borne, alors ministre de la transition écologique et solidaire, s’était également montrée favorable à cette initiative, après avoir été interpellée par quarante-six parlementaires de tous bords politiques. C’est la raison pour laquelle je suis optimiste quant au sort de cet amendement.

Ainsi, son but est de cheminer vers un principe d’irrecevabilité climatique, un mécanisme contraignant permettant de rejeter des textes, d’origine parlementaire ou gouvernementale, ainsi que des investissements publics, jugés incompatibles avec l’accord de Paris et avec la stratégie nationale bas-carbone, fixant la neutralité carbone de la France à 2050.

Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires est pleinement favorable à ce nouveau cadre d’évaluation, qui placerait la France en cohérence avec ses ambitions de protection de l’environnement et de lutte contre le réchauffement climatique.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Nos collègues proposent d’inscrire à l’article 39 de la Constitution que les projets et propositions de loi déposés devant le Parlement, soient accompagnés d’une évaluation de leur impact climatique dont le contenu serait défini par une loi organique.

Le principe même d’une telle étude d’impact existe déjà dans notre Constitution, singulièrement pour les projets de loi. Il est vrai, en revanche, que cela ne concerne pas les propositions de loi.

Disposons-nous, toutefois, de la capacité nécessaire pour réaliser ces études, à l’occasion de textes d’origine parlementaire ? C’est un exercice extrêmement difficile et sans doute peu adapté.

Même si nous considérons, évidemment, que l’enjeu climatique est important, puisque nous venons de l’ajouter à l’article 1er de notre Constitution, il n’en demeure pas moins que celle-ci établit un principe général : l’ensemble des textes doit faire l’objet d’une étude d’impact, quelle que soit la nature de celle-ci. Cela devrait suffire à satisfaire votre intérêt pour cette question.

Avis défavorable.

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

L’amendement n° 17, présenté par M. Benarroche, Mme Benbassa, M. Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique, Gontard, Labbé et Parigi, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mme Taillé-Polian, est ainsi libellé :

Après l’article unique

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le titre XI bis de la Constitution, il est inséré un titre ainsi rédigé :

« Titre

« Le Défenseur de l ’ environnement

« Art. 71 - …. - Le Défenseur de l’environnement veille à la préservation de l’environnement par l’État, ses collectivités territoriales, ses établissements publics, ses organismes investis d’une mission de service public ainsi que par toute autre personne.

« Il veille au respect de cette préservation et du principe de non-régression associé.

« Il veille à ce que les politiques publiques respectent les limites qui conditionnent l’habitabilité de la terre pour les générations actuelles et futures.

« Il rend public, à ce titre et lorsqu’il l’estime nécessaire, des avis sur les projets et les propositions de loi ainsi que sur les évaluations qui les accompagnent avant leur discussion au Parlement.

« Il peut être saisi, dans les conditions prévues par la loi organique, par toute personne estimant que la préservation de l’environnement est menacée. Il peut se saisir d’office.

« La loi organique définit les attributions et les modalités d’intervention du Défenseur de l’environnement. Elle détermine les conditions dans lesquelles il peut être assisté par un collège pour l’exercice de certaines de ses attributions.

« Le Défenseur de l’environnement est nommé par le Président de la République pour un mandat de six ans non renouvelable, après application de la procédure prévue au dernier alinéa de l’article 13. Ses fonctions sont incompatibles avec celles de membre du Gouvernement et de membre du Parlement. Les autres incompatibilités sont fixées par la loi organique.

« Le Défenseur de l’environnement rend compte de son activité au Président de la République et au Parlement. »

La parole est à M. Guy Benarroche.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

M. Guy Benarroche. Cet amendement répond à la demande de plusieurs associations et a déjà été présenté devant l’Assemblée nationale. Afin de s’assurer de l’effectivité du principe constitutionnel de préservation de l’environnement, il vise à créer, ce qui serait un apport majeur, sur le même modèle que le Défenseur des droits, un Défenseur de l’environnement.

Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

Mes chers collègues, est-ce l’évocation du Défenseur des droits ou celle du Défenseur de l’environnement qui vous fait ainsi réagir ?

Cette autorité constitutionnelle indépendante veillerait au respect par l’État et par ses administrations, ainsi que par l’ensemble des personnes morales, de cet engagement écologique essentiel. Le contenu de la loi organique s’y rapportant, comprenant notamment la procédure de nomination, se calquerait sur celui qui s’attache au Défenseur des droits.

Nous avons pu observer combien, ces dernières années, le travail du Défenseur des droits a permis d’alerter les responsables sur un certain nombre de conséquences et d’éviter des violations des droits des citoyens. Considérant qu’un principe constitutionnel n’a de sens que s’il bénéficie aux citoyens, nous souhaiterions voir l’émergence de ce Défenseur.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

L’idée en elle-même est intéressante, mais je voudrais préalablement indiquer que le Gouvernement a confié à une de nos collègues députés, Mme Cécile Muschotti, une mission temporaire pour réfléchir à ce sujet.

Par ailleurs, il pourrait être utile, en particulier, de créer un dispositif de médiation chargé de régler à l’amiable les litiges qui peuvent naître entre l’administration et les citoyens en matière de protection de l’environnement. En effet, le droit de l’environnement est extrêmement complexe et il est toujours utile de disposer d’une telle instance pour éviter des contentieux. Pourquoi ne pas réfléchir à ce sujet ?

En revanche, la commission est moins convaincue par la nécessité de créer une nouvelle entité consultative appelée à se prononcer, par exemple, sur les projets de loi relatifs à l’environnement. Je rappelle qu’il existe un Conseil économique, social et environnemental dont c’est le rôle et que nous venons de réformer.

Enfin, je note que la protection du droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé, consacré par notre Charte de l’environnement, entre dans les missions du Défenseur des droits, même si celui-ci ne s’est pas encore beaucoup investi sur cette matière.

Dans ces conditions, je demande le retrait de cet amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.

Debut de section - Permalien
Éric Dupond-Moretti

Monsieur le sénateur Benarroche, le Premier ministre a confié la mission qu’évoquait à l’instant M. le rapporteur à Mme Cécile Muschotti. Il s’agit de définir le contour d’un futur Défenseur de l’environnement. Il convient donc d’attendre que nous disposions des résultats de cette mission, Mme Muschotti devant rendre son rapport cet été.

Je demande donc, à mon tour, le retrait de cet amendement.

J’ajoute que nul n’est besoin, si nous allions vers la création d’un Défenseur de l’environnement, d’inscrire cela dans la Constitution.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Monsieur Benarroche, l’amendement n° 17 est-il maintenu ?

L ’ amendement n ’ est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

L’amendement n° 8, présenté par Mme V. Boyer, est ainsi libellé :

Compléter cet intitulé par les mots :

, de la biodiversité, du climat et de nos paysages naturels

La parole est à Mme Valérie Boyer.

Debut de section - PermalienPhoto de Valérie Boyer

Cet amendement devrait emporter les suffrages sur l’ensemble de nos travées, puisqu’il vise à ajouter à l’intitulé du projet de loi constitutionnelle les notions de « biodiversité », de « climat » et de « paysages naturels », à des fins de lisibilité et de cohérence avec les modifications qu’il porte.

À cet égard, l’utilisation du terme « biodiversité » a le mérite de faire preuve de clarté, au contraire de celui de « diversité biologique ». La biodiversité est définie par la Convention sur la diversité biologique comme « la variabilité des êtres vivants de toute origine y compris, entre autres, les écosystèmes aquatiques et les complexes écologiques dont ils font partie : cela comprend la diversité au sein des espèces, ainsi que celle des écosystèmes ».

En sus, préserver l’environnement n’est pas antithétique de l’ambition de ménager nos paysages, qui sont une grande richesse de nos territoires, constituent notre patrimoine et contribuent à notre identité géographique. On ne peut donc accepter que nos parcs naturels soient dénaturés par l’installation de structures, comme les éoliennes ou des antennes relais, qui peuvent parfois menacer la biodiversité en artificialisant les milieux naturels.

Face aux écologistes hors sol qui opposent, in fine, « écologie » et « écosystèmes », défendons nos paysages, notre patrimoine, notre identité géographique, défendons une écologie du bon sens, dans le respect de notre territoire, de son identité et de ses spécificités.

C’est la raison pour laquelle je propose de compléter l’intitulé de ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de François-Noël Buffet

Je note que l’adoption de cet amendement n’aura pas d’effet juridique, puisqu’il concerne l’intitulé du texte. Elle sera sans conséquence.

Par ailleurs, il serait étrange d’inscrire dans l’intitulé le terme « biodiversité », alors que nous venons de préférer inscrire à l’article unique la mention « diversité biologique » pour être en parfaite cohérence avec la Charte de l’environnement.

Enfin, s’agissant de la référence au paysage naturel, la commission des lois craint une confusion.

Le droit constitutionnel de l’environnement est aujourd’hui centré d’abord sur la protection de la santé et de la vie humaine ; or la notion de paysage est plutôt d’ordre esthétique. La protection des paysages, en droit français, se rattache plutôt au droit du patrimoine qu’à celui de l’environnement, notamment depuis la loi du 2 mai 1930 ayant pour objet de réorganiser la protection des monuments naturels et des sites de caractère artistique, historique, scientifique, légendaire ou pittoresque. Je relève d’ailleurs que la plupart des paysages français n’ont rien de naturel, mais qu’ils sont le produit de siècles d’histoire et, en particulier, de la diversité des pratiques agricoles et sylvicoles.

Pour ces raisons, la commission des lois a souhaité vous demander de retirer votre amendement ; à défaut, son avis serait défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Avant de mettre aux voix l’ensemble du projet de loi constitutionnelle, je donne la parole à M. Patrick Kanner, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

M. Patrick Kanner. Quel gâchis, mes chers collègues : une grande idée, une grande cause, va exploser en plein vol ce soir.

Mme Françoise Gatel et M. Loïc Hervé s ’ exclament.

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

À qui la faute ? Sûrement à l’exécutif, monsieur le garde des sceaux, qui, avec un cynisme assumé, n’a pas pris les voies et moyens pour parvenir à un vote conforme entre les deux chambres en dramatisant la situation politique par le recours, officiellement, au référendum à six mois de l’échéance présidentielle, tout en espérant, officieusement, que celui-ci ne puisse avoir lieu.

Monsieur le garde des sceaux, la manipulation de l’opinion et l’instrumentalisation du Parlement ne sont pas à votre honneur et encore moins à celui du chef de l’État. Je partage à ce sujet l’analyse que notre collègue Éric Kerrouche a présentée dans la discussion générale.

Ce crash est aussi dû, évidemment, à la droite sénatoriale, …

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

… – eh oui ! –, laquelle s’est engouffrée dans le piège avec une forme de délectation…

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

… pour s’opposer institutionnellement à cette tentative de modification de l’article 1er, tout en décrédibilisant un processus participatif qui méritait manifestement plus de reconnaissance de votre part.

Devant cette situation provoquée par la majorité présidentielle et par la droite sénatoriale, nous vous laisserons dos à dos, …

Debut de section - PermalienPhoto de Patrick Kanner

… en nous opposant au texte issu des débats de ce soir, qui se conclut par un crash politique incompréhensible pour nos concitoyens.

La protection de la planète, la notion de biens communs, défendue par notre collègue Nicole Bonnefoy, méritaient sûrement mieux, dans l’esprit des accords de la COP21 que nous avons porté durant le quinquennat précédent.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à Mme Nadège Havet, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Nadège Havet

Dans certains cas, notre Haute Assemblée bénéficie d’une forme de dernier mot. Comme les lois relatives au Sénat, la Constitution ne peut être modifiée sans l’aval des sénatrices et sénateurs. Ce soir, nous faisons le constat d’un désaccord entre les deux chambres sur le contenu du texte à soumettre aux Françaises et aux Français par la voie référendaire.

La rédaction proposée par nos rapporteurs et par les groupes LR et UC interroge à plusieurs égards. À la lecture de l’objet de l’amendement, nous apprenons que ses auteurs revendiquent le fait que leur rédaction ne produira pas d’effets juridiques nouveaux. Nous passerons donc, via cette réécriture, d’une prétendue incertitude quant aux effets de la révision initialement proposée à une apparente certitude sur l’absence de portée juridique de la rédaction qui sortira du Sénat.

En poussant le raisonnement jusqu’à son terme, c’est-à-dire jusqu’au référendum dont nous souhaitons tous, si j’ai bien compris, la tenue, un problème se pose donc : soutenir le « oui » au projet de révision dans la rédaction que nous votons ce soir consisterait à convaincre les citoyens de se rendre aux urnes pour approuver une révision constitutionnelle dont l’auteur affirme qu’elle n’aurait pas de portée.

Nous le comprenons mal, au regard de l’objectif, a priori partagé, de mobiliser autour d’un référendum les citoyens français sur l’enjeu en question.

Pour ces raisons, le groupe RDPI votera majoritairement contre la version proposée par la majorité sénatoriale, laquelle ne nous paraît pas suffisamment protectrice au regard de notre ambition.

Quant à moi, je regarderai encore ce soir quelques photos de notre planète prises par Thomas Pesquet : quelle beauté, quelle fragilité aussi ! Nous devons aller plus loin.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Estrosi Sassone

Nous achevons donc ce soir l’examen du projet de loi constitutionnelle concernant l’article 1er de la Constitution et relatif à la préservation de l’environnement, fruit d’une proposition de la Convention citoyenne sur le climat.

Je ne reviendrai pas sur les circonstances ayant conduit à cette proposition de révision. Je tiens simplement à rappeler que, à l’heure où la légitimité de nos institutions est parfois contestée, recourir au tirage au sort apparaît comme une bien mauvaise idée.

Reprendre, sans filtre, une proposition est un affaiblissement des pouvoirs du Constituant. Votre inflexibilité quant au texte soumis à l’examen du Parlement, monsieur le garde des sceaux, confirme cet affaiblissement et nous le déplorons solennellement.

Nous voyons d’ailleurs bien dans quel piège le Gouvernement s’est placé : vous soumettez à la discussion de la représentation nationale un texte qui n’a pas vocation à évoluer. Quelle conception du débat parlementaire vous faites-vous donc ?

Les propos rapportés de l’Élysée le démontrent : il n’y aura pas de référendum, parce que cette révision n’était qu’un moyen facile de donner des gages aux conventionnels, tout en se défaussant sur le dos du Sénat. La manipulation est grossière et aventureuse.

Qu’a voulu faire notre groupe sur ce texte ? La droite républicaine a défendu ce soir une écologie de progrès au service de tous nos concitoyens.

Marques d ’ ironie sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Estrosi Sassone

C’est cette conciliation que notre groupe a voulu assurer dans la révision constitutionnelle qui nous était soumise, et je tiens tout particulièrement à saluer le travail de nos deux rapporteurs François-Noël Buffet et Guillaume Chevrollier. La modification de l’article 1er adoptée par notre assemblée lève ainsi toute ambiguïté juridique, car nous ne voulons pas, comme le rapporteur l’a soutenu, constitutionnaliser le doute. Elle permet aussi de renvoyer expressément à la Charte de l’environnement.

Le travail du Sénat est ainsi bénéfique à double titre : d’une part, nous introduisons à l’article 1er de notre norme suprême la question environnementale tout en évitant, d’autre part, de laisser au juge constitutionnel un trop fort pouvoir d’interprétation au détriment de l’action des entreprises et des collectivités.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Estrosi Sassone

La balle est désormais dans le camp du Gouvernement et de sa majorité. À vous de prouver que toute cette opération n’était pas seulement un jeu cynique visant à contester les droits souverains du Parlement.

Bien entendu, nous voterons le texte ainsi modifié par le Sénat.

Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Gontard

Je regrette ce que je considère comme un énorme gâchis. Cette importante réforme de l’article 1er de la Constitution méritait que nous élevions le débat, car on ne touche pas à la Constitution pour rien : si on le fait, c’est pour obtenir des résultats, pour que ça serve à quelque chose.

On nous a objecté à droite que le terme « garantit » que nous proposions d’introduire dans la Constitution était trop contraignant, qu’il imposait une obligation de résultat. Mais c’est précisément ce que nous souhaitons !

Je ne reprendrai pas les propos de Jean-Pierre Sueur, qui vous demandait pourquoi vous aviez fait cette modification. Ce que vous nous proposez ce soir ne sert à rien ; or – je le répète – on ne touche pas la Constitution pour rien. Il eût mieux valu en rester là et voter contre. Si vous ne vouliez pas de référendum, si vous refusiez le débat démocratique avec nos concitoyens, il fallait le dire clairement.

Je regrette cette issue, car j’estime qu’il doit y avoir un vrai débat dans notre pays sur la possibilité de conférer un caractère contraignant à la prise en compte de l’environnement, de la biodiversité et de la lutte contre le réchauffement climatique. Il fallait soumettre cette question à nos concitoyennes et nos concitoyens. Vous ne l’avez pas souhaité : vous devez maintenant l’assumer.

J’en viens à la position du Gouvernement et du Président de la République. Parmi les 149 propositions formulées par les 150 citoyens convoqués par l’exécutif, le Président de la République n’en a retenu que 14, dont celle-ci, tout en sachant très bien qu’elle ne serait pas soumise au référendum. Nous regrettons ce jeu de dupes.

Le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires a toujours été très clair : nous estimons que la formulation issue des travaux de l’Assemblée nationale était satisfaisante car elle permettait d’avancer. Bien que nous ayons formulé des propositions pour aller plus loin – et nous continuerons –, nous la soutenions. C’est pourquoi nous regrettons le résultat de ce soir.

Applaudissements sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour explication de vote.

Protestations à droite contre l ’ intervention d ’ un deuxième orateur du même groupe.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Benarroche

« Notre monde est en danger, il faut le sauver. » Ce soir, de nombreux orateurs de toutes les travées ont repris ce constat. Je crois que nous sommes tous d’accord, du moins pour l’énoncer.

Je pensais qu’il était admis que, pour faire un pas pour sauver notre planète, il était nécessaire de faire de la préservation de l’environnement et de la biodiversité ainsi que de la lutte contre le changement climatique une priorité.

Ce soir, nous avons loupé une occasion d’avancer en ce sens, non pas pour des raisons de fond, mais – c’est ce qui me chagrine profondément – parce que, dans cette opération d’enfumage dont chacun espère tirer un profit politique, Emmanuel Macron et le Gouvernement, d’un côté, et la droite républicaine, de l’autre, s’appuient les uns sur les autres. Les citoyens jugeront…

Pour sa part, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires votera contre le projet de loi tel qu’il nous est présenté.

Nous voterons contre ce qui ressemble à une tentative de faire échouer le recours aux citoyens, au peuple.

Nous voterons contre votre ambition d’introduire une modification qui n’en est pas une.

Nous voterons contre une proposition qui ne prend pas la mesure de l’urgence climatique.

Nous voterons contre un positionnement caricatural face à la priorité de l’urgence écologique.

En revanche, nous aurions souhaité voter pour garantir la préservation de l’environnement et de la diversité biologique, et pour la lutte contre le dérèglement climatique.

Applaudissements sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Gatel

Personne, ici, n’a le monopole de l’environnement. Plusieurs de nos collègues ont exposé le modèle de développement durable que nous portons dans nos territoires, notamment dans le cadre de nos mandats d’élus locaux. Ce modèle, qui place l’homme au cœur de la société et au cœur de son environnement, ne saurait prospérer sans une prise en compte des dimensions à la fois sociétale et environnementale de son existence.

De nombreux orateurs ont évoqué la démocratie, confondant parfois la démocratie participative et la démocratie représentative. Comme beaucoup ici, je suis très attachée à l’écoute de nos concitoyens et, donc, à la démocratie participative, car je considère que les législateurs que nous sommes ne détiennent pas le monopole du savoir.

Toutefois, mes chers collègues, vous qui êtes si attachés au respect de la démocratie représentative et de la consultation citoyenne, vous devriez tout au moins avoir le même respect et la même exigence quant au droit d’expression du Parlement qui est élu par nos concitoyens et qui, à ce titre, est la démocratie représentative.

Enfin, mes chers collègues, vous ne pouvez pas instrumentaliser nos votes comme vous le faites.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Gatel

Je vous le dis sincèrement : vous ne pouvez pas soutenir que d’horribles conservateurs, des massacreurs qui n’ont rien à faire ni de l’environnement ni de l’avenir siègent au Sénat.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Gatel

Mme Françoise Gatel. Mes chers collègues, si nous avons démontré ce soir sur toutes les travées que nous étions profondément attachés à l’environnement, il reste que votre modèle, parfois extravagant, voire caricatural, est une forme de bien-pensance que nous ne pouvons pas accepter !

Applaudissements sur les travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains. – Protestations sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Madame Gatel, il ne s’agit pas d’opposer la démocratie participative et la démocratie représentative. De fait, la première nourrit l’autre. C’est pourquoi, quoi qu’en pensent certains, je me félicite pour ma part de ce que 150 citoyens aient pu se réunir pour élaborer des éléments de réflexion et formuler des propositions sur les questions, que nous nous accordons à considérer comme fondamentales, relatives à l’écologie, à l’environnement, etc.

En revanche, j’estime que l’utilisation politicienne qui a été faite de cette Convention citoyenne, sur les travées d’en face et sur d’autres travées, pose quelques difficultés. Chacun veut faire de cette Convention citoyenne sa convention citoyenne, alors qu’il s’agit bien d’une Convention citoyenne composée de citoyens qui ont émis un certain nombre de propositions.

Le traitement réservé au présent débat par un journal du dimanche – qui n’est pas l’Humanité Dimanche

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Nous ne sommes pas tombés dans ce piège. Comme je l’ai indiqué, le groupe communiste républicain citoyen et écologiste était contre le texte du Gouvernement tout comme il est contre la réécriture qui en a été faite par la majorité sénatoriale.

Mes chers collègues, je vous rappelle que le projet de loi Climat et résilience sera prochainement débattu au sein de notre assemblée. Au-delà de l’utilisation politicienne que certains font de ce projet de loi constitutionnelle, nous aurons alors un vrai débat de fond sur les propositions respectives de chaque groupe quant aux questions, fondamentales pour nous, mais aussi pour toute la planète, relatives à l’environnement, à l’écologie, au climat, etc.

Ne nous trompons pas de débat, mes chers collègues !

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Personne ne demande plus la parole ?…

Je mets aux voix, modifié, l’ensemble du projet de loi constitutionnelle.

En application de l’article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.

Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 118 :

Le Sénat a adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Marc

Monsieur le président, lors du scrutin n° 117 sur les amendements identiques n° 2, 3 et 5 rectifié, Mme Colette Mélot et M. Jean-Louis Lagourgue souhaitaient s’abstenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Acte vous est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, mardi 11 mai 2021 :

À quatorze heures trente et le soir :

Projet de loi de programmation, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales (texte de la commission n° 533, 2020-2021).

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée à vingt-trois heures quarante.