Intervention de Nicole Bricq

Réunion du 3 juillet 2008 à 15h00
Modernisation de l'économie — Article 37 ter, amendements 22 38

Photo de Nicole BricqNicole Bricq :

Je m’étais inscrite pour prendre la parole sur l’article 38, que nous examinerons juste après, mais je renonce à cette intervention.

En effet, il m’avait échappé qu’à travers cet amendement, discuté avant l’article 38, M. le rapporteur ne se contentait pas de proposer une modification de pure forme : bien qu’il supprime la qualification de « haute », il suggère de revenir au principe de l’autorité de la statistique publique qui figurait dans le texte initial du Gouvernement, lequel a été modifié par l’Assemblée nationale.

Mon intervention me permettra donc de présenter les raisons pour lesquelles je voterai contre l’amendement n° 22 ; bien entendu, elle vaudra aussi explication de vote sur l’article 38.

Il s’agit d’un article très important, tout particulièrement dans le contexte des polémiques qui se sont développées ces derniers mois sur la fiabilité de notre outil statistique public. Rappelons que ces polémiques, qui concernent la mesure du pouvoir d’achat, les indicateurs de chômage et la conjoncture économique, visent principalement l’INSEE.

Tout le monde est attaché à l’indépendance de la statistique nationale. Cette indépendance, que nul ne remet en cause et qui n’est plus à démontrer, est d’ailleurs confirmé tant par le rapport « d’évaluation par les pairs » de l’INSEE, effectué en janvier 2007, que par l’étude conduite par le FMI en 2003 sur les quatre critères principaux que sont les données, l’accès aux données, l’intégrité et la qualité.

Évidemment, pour éviter que chaque nouvelle publication d’un indice statistique important ne donne lieu à une vague de suspicion et de méfiance, nous pensons également qu’il convient d’inscrire dans la loi le principe d’indépendance de la statistique publique. Cette démarche, qui permettrait de se conformer au code de bonnes pratiques de la statistique européenne, adopté en 2005, ne devrait d’ailleurs pas se limiter à l’INSEE, certains ministères possédant également leurs propres services de statistiques, comme par exemple le ministère du travail avec sa direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, la DARES, qui publie des études fort lues et commentées.

Après un important travail parlementaire, nos collègues députés ont substantiellement modifié l’article 38 et sont allés jusqu’à modifier le titre du chapitre V. Pour aboutir à ce résultat, ils ont suivi les recommandations de la mission d’information commune aux trois commissions des finances, des affaires économiques et des affaires sociales de l’Assemblée nationale, chargée d’examiner la gouvernance de l’INSEE. Leur rédaction est donc le fruit d’un véritable consensus, le rapport de la mission d’information qui l’a motivée ayant été adopté à l’unanimité des trois commissions. Je précise par ailleurs que cette mission d’information, très diversifiée dans sa composition, était présidée par Pierre-Alain Muet et qu’elle avait comme rapporteur Hervé Mariton.

Le texte proposé par l’Assemblée nationale définit le service statistique public et pose le principe de son indépendance, ce que ne faisait pas le texte du Gouvernement et ne ferait pas l’amendement de M. Marini, s’il était adopté. À l'instar des députés, nous ne sommes pas favorables à la création d’une autorité « indépendante » supplémentaire, ce que nous propose M. le rapporteur en changeant le titre du chapitre V. Il nous semble que le Conseil supérieur de la statistique, qui reprend les compétences du Conseil supérieur de l’information statistique, le CNIS, lequel n’a pas démérité, doit être maintenu. Il faut sans doute créer également un comité scientifique de neuf membres qui serait chargé de veiller au respect du principe de l’indépendance professionnelle dans la production et la diffusion de la statistique publique.

Si je développe ces explications maintenant, monsieur le président, c’est parce qu’en adoptant l’amendement n°22, qui semble de prime abord purement rédactionnel, on amputerait en réalité la discussion à venir sur l’article 38. Bien évidemment, pour ne pas allonger la discussion, je ne réitérerai pas ces arguments lors du débat sur l’article 38.

Ainsi, monsieur le rapporteur, vous proposez de revenir au texte initial, qui créait une Autorité de la statistique publique. Mais ce faisant, vous ne satisfaites personne. Il faut surtout éviter de traiter l’INSEE avec défiance. Les statisticiens qui y travaillent sont sans doute, de par leur statut de fonctionnaire, les plus aptes à affronter toutes sortes de pressions contraires et à respecter la déontologie de la profession en préservant la transparence et la qualité des outils méthodologiques employés. Nous nous opposons donc à la modification du titre que vous proposez, monsieur le rapporteur. Elle emporterait en effet une modification totale de l’article 38, pour revenir à une rédaction initiale qui ne se justifie nullement au regard de notre outil national de statistiques, et qui serait de plus interprétée comme une marque de défiance à son égard.

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