Intervention de Philippe Marini

Réunion du 3 juillet 2008 à 15h00
Modernisation de l'économie — Article 38, amendement 23

Photo de Philippe MariniPhilippe Marini, rapporteur :

Permettez-moi d’être surpris par ces démonstrations que je qualifierais de « corporatives ».

Lorsque je lis le texte qui vient de l’Assemblée nationale, je vois qu’il crée un comité d’experts au sein d’un organe interne à l’INSEE. Or l’INSEE n’est rien d’autre qu’une direction d’administration centrale du ministère de l’économie, sous l’autorité directe de Mme le ministre.

Vous parlez d’indépendance, ma chère collègue, mais, très sincèrement, si l’on veut se doter, à l’instar des autres États européens, d’un outil véritablement indépendant quant aux méthodes, aux concepts et aux programmes de travail, mieux vaut suivre la solution qui était initialement proposée par le Gouvernement et que la commission spéciale vous suggère précisément de rétablir.

L’amendement n° 23 rectifié a ainsi pour objet de créer une Autorité de la statistique publique qui veillerait « au respect du principe d’indépendance professionnelle dans la conception, la production et la diffusion de statistiques publiques ainsi que des principes d’objectivité, d’impartialité, de pertinence et de qualité des données produites ». Franchement, êtes-vous opposée à ces principes, madame Terrade ? Considérez-vous qu’une sorte d’autogestion professionnelle les garantisse mieux que cette autorité ? C’est bien la question qui est posée, et je préfère, mes chers collègues, la poser en toute clarté, et en public.

Quant à la composition de cette autorité, elle comprend un président nommé par décret en conseil des ministres en raison de ses qualifications, une personnalité qualifiée désignée par le président de l'Assemblée nationale, une personnalité qualifiée désignée par le président du Sénat, un membre du Conseil économique et social désigné par le président de ce dernier, le président du comité du secret statistique du Conseil national de l'information statistique, un membre de la Cour des comptes nommé par le Premier président de la Cour, un membre de l'Inspection générale des finances nommé par le chef du service de l'Inspection générale des finances, un membre de l'Inspection générale des affaires sociales nommé par le chef de l'Inspection générale des affaires sociales, enfin une personnalité qualifiée en matière statistique nommée par le ministre chargé de l'économie.

Sincèrement, je ne vois là nul représentant d’un quelconque intérêt mercantile ou économique de nature à porter atteinte à l’indépendance professionnelle de nos chers amis les statisticiens publics ! Relisez bien la composition de cette autorité, madame Terrade, ainsi que toutes les motivations de ce texte ; je pense que vous serez alors totalement rassurée.

Par ailleurs, le texte proposé par l’amendement n° 23 rectifié pour l’article 1er bis de la loi n° 51-711 du 7 juin 1951 prend le soin de préciser le rôle du Conseil national de l’information statistique qui demeure, auprès de l’INSEE, chargé d’organiser la concertation entre les producteurs et les utilisateurs de la statistique publique.

Vous voyez donc que ce Conseil est maintenu dans ses fonctions. Simplement, à ses côtés, un organe extérieur aura pour rôle de garantir l’exercice indépendant de ces fonctions, tout à fait essentiel pour la transparence.

Enfin, madame le ministre, ne faudrait-il pas également que l’on progresse pour doter Eurostat, organisme essentiel sur le plan européen, d’un vrai statut indépendant ? En effet, si l’INSEE est une direction du ministère des finances, Eurostat est un service dépendant du vice-président de la Commission chargé des affaires financières et monétaires. Nous progresserions beaucoup dans la comparabilité de nos finances publiques, notamment dans le respect des engagements issus du traité de Maastricht, ainsi que dans la transparence, si nous avions une vraie autorité européenne en charge des méthodes de comptabilité publique.

Pour en revenir à la France et pour conclure, il me semble, madame le ministre, que votre intention initiale était excellente. C’est pourquoi la commission spéciale sollicite du Sénat le rétablissement de l’article 38 dans une version très proche de celle initialement proposée par le Gouvernement.

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