Intervention de Pierre-Antoine Levi

Réunion du 20 mai 2021 à 10h30
Engagement associatif — Vote sur l'ensemble

Photo de Pierre-Antoine LeviPierre-Antoine Levi :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, « plus encore qu’une liberté, l’association est une réalité qui a puissamment contribué à façonner la société française tout au long de ce siècle, à y renforcer la tolérance, la solidarité, l’innovation. Une réalité qui s’affirme […] reflétant, dans toute leur diversité, l’engagement des Français, leur sens de l’action collective, leur souci de solidarité comme d’ailleurs leur volonté d’épanouissement personnel ». Ces mots de Jacques Chirac, prononcés à l’occasion du centenaire de la loi de 1901, sont plus que jamais d’actualité.

Je tiens ici à rendre hommage à l’ensemble des bénévoles, des cadres et des dirigeants associatifs, qui, souvent, ne comptent pas leur temps pour faire vivre leurs associations, tisser, maintenir le lien social, animer les territoires.

La commission de la culture en a la conviction : la crise de la covid-19 a montré le rôle essentiel joué par les associations. Cependant, la pandémie ne les a pas épargnées : les informations que j’ai pu recueillir à l’occasion de mes auditions témoignent d’une forte incertitude pesant sur le secteur associatif.

Certes, ce secteur a fait preuve d’une très forte résilience après le premier confinement. Même si les événements n’ont pas pu avoir lieu, la plupart des subventions ont été maintenues par l’État et par les collectivités locales, ce que je salue. En mai et juin 2020, les bénévoles sont revenus, les activités ont repris, l’emploi dans le secteur associatif est reparti à la hausse, alors que le reste du secteur privé continuait à peiner. Mais le deuxième confinement a marqué un nouvel arrêt brutal pour un grand nombre d’associations. Les remontées du terrain témoignent des doutes existants : les conseils d’administration ont du mal à se tenir, il n’est pas sûr que les bénévoles reviennent. La motivation a chuté. En outre, de nombreuses associations employeuses sont menacées de disparition. Or le secteur associatif est un acteur économique important de notre pays : un salarié du secteur privé sur dix y est employé.

Ce tableau sombre ne doit toutefois pas masquer certains points de satisfaction et des lueurs d’espoir.

Tout d’abord, un fonds d’urgence doté de 30 millions d’euros pour le secteur de l’économie sociale et solidaire, accessible aux associations, a été instauré par le quatrième collectif budgétaire. Il est opérationnel depuis la fin du mois de janvier 2021. J’y vois la reprise d’une recommandation effectuée par la commission de la culture dans ses travaux sur la pandémie de la covid. L’enjeu est désormais de faire connaître ce fonds aux associations concernées.

Ensuite, l’élargissement progressif de la vaccination fait émerger de nouvelles questions relatives au mélange de bénévoles et d’un public de vaccinés et de non-vaccinés. Cela témoigne d’une volonté de relance des activités et de la vie associative.

Enfin, cette pandémie a montré l’envie de s’engager d’une partie importante de la population, notamment de la jeunesse, ainsi que la nécessité d’accompagner les associations, pour les aider à se développer et répondre aux attentes des nouveaux bénévoles.

La proposition de loi en faveur de l’engagement associatif répond à un certain nombre de ces préoccupations et à plusieurs demandes du monde associatif : elle atténue la responsabilité financière des dirigeants des associations en cas de faute de gestion ; elle s’adresse à la jeunesse, afin de mieux lui faire connaître le monde associatif ; elle complète le dispositif d’abondement par les comptes en déshérence du FDVA, qui finance notamment la formation des bénévoles. Je rappelle que 2021 est la première année de mise en œuvre d’un abondement de ce fonds par un pourcentage des comptes en déshérence. Lors de mes auditions, il m’a été indiqué que cette mesure représenterait 19 millions d’euros supplémentaires pour 2021. La commission de la culture ne manquera pas de faire un bilan de cette première année d’application, des difficultés rencontrées comme des améliorations possibles.

La proposition de loi traduit l’émergence d’un consensus entre l’Assemblée nationale et le Sénat. Sans doute ce texte aurait-il pu aller plus loin. La commission a fait le choix d’une adoption rapide pour soutenir un secteur associatif fortement malmené par la pandémie. Aussi, alors que nous allons prochainement commémorer les cent vingt ans de la loi de 1901, j’espère, madame la secrétaire d’État, que cette proposition de loi et celle visant à améliorer la trésorerie des associations, que nous venons de voter, constituent une étape, et non l’aboutissement de l’action du Gouvernement en faveur des associations. Je tiens d’ailleurs à souligner que, si un très large consensus s’est dégagé au sein de notre commission pour une adoption rapide de ce texte, nous sommes également nombreux à noter les bouleversements qui ont ballotté, voire percuté les associations ces dernières années, y compris indépendamment de la pandémie.

Les associations font partie de notre quotidien et maillent l’ensemble du territoire français. Leur existence, leurs actions semblent aller de soi à chacun. Leurs problèmes et leurs besoins demeurent toutefois trop souvent invisibles.

En première lecture, le Sénat avait souhaité faciliter la reconnaissance de leur rôle d’intérêt général au niveau local, mais la disposition proposée posait de nombreuses questions, raison pour laquelle la commission de la culture n’a pas proposé son rétablissement.

Toutefois, madame la secrétaire d’État, le monde associatif a besoin de soutien de la part de la Nation. Ces dernières années, le Haut Conseil à la vie associative a fait plusieurs propositions pour améliorer cette reconnaissance. J’espère que vous y serez sensible, tout comme à l’ensemble des interventions des différents groupes politiques sur ce sujet.

Le cœur de l’association, c’est l’humain, l’engagement d’un individu en faveur des autres. Sans bénévoles, il n’y a pas d’association. La transmission de la volonté de s’engager d’une génération à l’autre représente donc un défi. Le texte prévoit une découverte et une sensibilisation dès le plus jeune âge au rôle des associations et au bénévolat.

L’encouragement et la reconnaissance du bénévolat étaient également l’objet de plusieurs amendements adoptés par le Sénat en première lecture. Nous n’avons pas souhaité les rétablir en commission, parce qu’ils suscitaient un certain nombre d’interrogations. La situation économique des entreprises a également fortement évolué depuis 2019.

En revanche, les représentants d’associations que j’ai pu rencontrer, qu’il s’agisse de têtes de réseau ou d’associations locales, m’ont indiqué la nécessité d’encourager le bénévolat et ont souligné l’investissement en temps des bénévoles. Ces derniers y passent des soirées et, souvent, tous leurs week-ends – je pense aux dirigeants et encadrants des associations sportives, par exemple – ou encore une partie de leurs vacances. D’ailleurs, l’une des inquiétudes des associations porte sur le retour des bénévoles qui auront redécouvert les week-ends et soirées libres de tâches associatives…

Comme l’a rappelé notre collègue Michel Savin en commission, le statut de bénévole doit être mieux reconnu et valorisé, notamment par des actes. On ne peut en rester là, sans faire de proposition pour l’avenir. Aussi, permettez-moi de conclure mon propos par une proposition, madame la secrétaire d’État : prendre en compte l’engagement associatif dans le calcul de la retraite. Dans notre système de retraite universelle, ce serait une reconnaissance par la Nation d’un don de temps et d’énergie au service de la collectivité fait plus tôt dans sa vie.

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