Certes, mais c'est Le Guépard : il faudrait que tout change pour que rien ne change...
Notre proposition ne change rien à la procédure de l'instruction. Mais en cas de fait fautif, l'auteur sera renvoyé devant la juridiction de jugement, à condition toutefois qu'il soit en capacité de comparaître conformément à l'article 10. Et en cas de divergence flagrante entre experts, le renvoi se fait aussi devant la juridiction de jugement. Cela n'est pas écrit noir sur blanc, mais c'est la pratique. Nous pourrions l'ajouter si Mme de La Gontrie y tient. Nous pourrions également ajouter que cela se fait à la demande de la partie civile, mais cela serait systématique. Nous sommes bien dans le continuum de la loi Dati.
La piste de la modification de l'article 122-1 du code pénal ne me semble plus pertinente : je reconnais que j'ai changé d'avis.
Pourquoi avoir choisi la juridiction de jugement ? Parce que tous les arrêts de la Cour de cassation - y compris celui de 2018 qui ne constitue en réalité pas un revirement de jurisprudence - confirment que ce sont toujours les juges du fond qui se prononcent sur la responsabilité et la capacité.
La piste de la définition d'un délit distinct non intentionnel ne tient pas la route. Mme l'avocat général près la Cour de cassation appelle le législateur à statuer en ce sens, mais elle ne propose aucune rédaction, pas plus que le rapport Houillon. Comment faire cohabiter dans une même phrase « non intentionnel » et « fautif » ? Je ne sais pas faire...
Notre dispositif n'est peut-être pas parfait, mais il a été validé par de nombreux acteurs, comme je l'ai indiqué.
Dans huit cas d'irresponsabilité sur dix, l'alcool ou les stupéfiants sont en cause. Souvenez-nous de cet homme qui rentre saoul de la fête des betteraves, se trompe d'immeuble, d'appartement, de lit et poignarde l'homme qu'il y trouve et qu'il pense être l'amant de sa femme... Il a été jugé irresponsable, car il était sous l'emprise de l'alcool. Dans notre droit, sept infractions - et non des moindres, je l'ai dit - ne sont pas aggravées par la prise d'alcool et de stupéfiants, contrairement aux autres crimes et délits, comme le viol par exemple. Il convenait donc d'y remédier et d'harmoniser les textes. Il y a une connexité entre cette disposition et la question de l'irresponsabilité pénale.
M. Bennarroche m'interroge sur la possibilité pour la chambre de l'instruction de régler la question des dommages civils : c'est déjà prévu par le code.
Il semblerait que l'exécutif travaille sur une exonération de responsabilité en cas de cause exclusive, mais c'est un cas qui ne se produit pratiquement jamais...
Quelqu'un qui arrête volontairement de prendre une médication obligatoire voit-il son discernement aboli ? Si oui, à partir de quand ? Le curseur est manifestement très difficile à placer, mais ce n'est pas la faute des victimes : elles ont besoin d'un procès, sous réserve que les conditions soient remplies.
Pour répondre à Mme Vérien, M. Kobili Traoré est actuellement hospitalisé sous contrainte. Mais sa sortie dépendra des médecins et non des juges.
D'après une étude de droit comparé réalisée par les services du Sénat à ma demande en janvier 2020, les codes pénaux suisse et espagnol prévoient une sorte de délit non intentionnel ; cette étude s'est également penchée sur les jurisprudences allemande, américaine, britannique et italienne, mais je n'y ai rien trouvé de pertinent à transposer dans le système français.